2 décembre 1805
La bataille d'Austerlitz
3 heures du matin
Une partie du corps dArmée de Davout (Division Friant), qui se trouve à environ 15 km du champ de bataille, se met en mouvement. Les Alliés nen ont pas connaissance. Le piège va se refermer.
Sur le champ de bataille, règne toujours un calme étonnant.
Barrès : "Longtemps avant le jour, la diane fut battue dans tous les régiments; on prit les armes et on resta formé en bataille jusqu'à ce que les reconnaissances fussent rentrées. La matinée était froide, le brouillard assez épais; un silence complet régnait dans toutes les lignes. Ce calme extraordinaire, après une soirée aussi bruyante, aussi folle, avait quelque chose de solennel, d'une majestueuse soumission aux décrets de Dieu: c'était le précurseur d'un orage impétueux, meurtrier, qui élève et abat des empires."
Savary : "Le silence, jusqu'à l'extrémité de l'horizon était absolu; on n'eût jamais pensé qu'il y avait autant de monde et de foudres enveloppés dans ce petit espace."
Napoléon quitte sa tente et descend jusquà Puntovice. Il aperçoit les feux presque éteints sur les hauteurs de Pratzen, et perçoit très nettement des bruits indiquant que ces derniers se dirigent vers les étangs, vers sa droite. Le piège est en marche.
5 heures du matin - Le Pratzen
Il fait encore nuit noire. Du coté des alliés, le centre, les réserves et l'aile droite du général Bagration restent sur leurs positions. Mais les Autrichiens, qui forment la gauche du dispositif allié, descendent du plateau de Pratzen. Mais la 3e colonne de Przybysewski croise la 5e colonne formée de la cavalerie de Lichtenstein, qui, la veille au soir, dans lobscurité, navait pas occupé la place qui lui était assignée, et sy rend maintenant ! D'où une belle pagaille, un retard dans l'exécution des ordres, et
. des chevaux qui ne reçoivent pas leur ration de fourrage!. Langeron est obligé d'arrêter ses troupes, tout comme Przybysewski; quand les cavaliers sont enfin passés, une heure a été perdue.
Ce retard donne également le temps à la division Friant de se rapprocher du champ de bataille et aux défenseurs de Telnice, attaqués par lavant garde de Kienmayer, de renforcer leur défense. Contre-attaquant baïonnette au canon, ils contraignent les Autrichiens à reculer et à repasser le Goldbach en désordre.
Débouche alors la 3e colonne de Przybysewski. Elle attaque le château de Sokolnice, où Legrand les reçoit avec de terribles salves dartillerie (aujourdhui, des croix dans le mur entourant le château marquent lemplacement des batteries françaises). La manœuvre d'enveloppement prévue par les Alliés est en cours: 12 bataillons de Langeron assaillent Sokolnice, tandis que 29 bataillons austro-russes attaquent Telnice
7 heures du matin - Le Santon
Alors que la bataille a commencé depuis déjà deux heures près des étangs, le combat va s'engager à l'autre extrémité des lignes, sur la route d'Olomouc. La colline du Santon est le pivot de la défense de la gauche française.
Les canons tonnent, et les deux divisions du maréchal Lannes s'ébranlent à la rencontre des quatre-vingt-deux bataillons austro-russes du général Bagration, qui a, à ce moment, son quartier-général au relais de poste de Pozorice - la Stara Posta.
La division Suchet est au nord dans les contreforts boisés qui bordent la route d'Olomouc. La division Caffarelli, précédée de la cavalerie légère de Kellermann et les dragons entrent dans la plaine, plus au sud.
Les uhlans de la réserve russe attaquent. Kellermann replie ses cavaliers parmi les bataillons de Caffarelli. Ceux-ci, par une fusillade nourrie, accueillent les Russes dont l'élan est ainsi brisé. Le général russe Essen est mortellement atteint. Les escadrons ennemis essaient de se regrouper. À ce moment les cavaliers de Kellermann surgissent sabre au clair et dispersent les Russes. Le prince de Lichtenstein (on a vu que la cavalerie de Liechtenstein est arrivée plus tard que prévu) envoie aussitôt des renforts, mais les dragons français chargent à leur tour. Après quelques minutes de ce féroce combat, chaque cavalerie se replie laissant le terrain jonché d'hommes et de chevaux.
L'infanterie s'avance alors. Les Russes dirigent sur les troupes françaises toute leur artillerie, quarante pièces de canon. Une décharge enlève en entier le groupe de tambours du premier régiment de Caffarelli, qui perd 400 hommes en trois minutes. Malgré cela les Français avancent et marchent déjà sur Blazowice. Sur les ordres de Lannes, le colonel Castex prend le commandement du 1er bataillon du 137e léger. En entrant dans le village, il est frappé d'une balle en plein front, mais ses soldats s'élancent et prennent le village qu'avait occupé le matin un détachement de la garde russe.
8 heures 30 - Le Zuran
Les français résistent bien à Telnice, Sokolnice et sur la ligne du Goldbach, et le plan mis sur pied par les alliés pour écraser Napoléon semble désormais impossible à réaliser. Au contraire, le plan français va commencer dentrer en exécution.
Sur le Zuran, où un sémaphore a été installé pour la transmission des ordres, Napoléon est entouré de tous ses officiers généraux: Berthier, Junot, Bessières, Murat, Davout, Bernadotte, Soult, Lannes.
Barrès: "L'Empereur, entouré de ses maréchaux et des généraux d'élite de son armée, était placé sur un mamelon dont j'ai parlé, distribuant des ordres pour la disposition de ses troupes et attendant que le brouillard se dissipât pour donner le signal de l'attaque."
Lejeune: "Nous vîmes se lever le soleil d'Austerlitz. Le 2 décembre 1805, jour anniversaire du couronnement de l'Empereur, il était huit heures du matin lorsqu'il apparut sur l'horizon de la Moravie, pur et radiaux comme aux plus beaux jours du printemps. Une légère vapeur adoucissait les teintes, et nous permettait cependant de voir distinctement cent vingt mille baïonnettes qui luisaient au soleil et qui s'avançaient lentement vers nous en formant un croissant immense comme l'horizon (..)"
Ségur: "Un instant après, nous vîmes, sur le sommet de ce tertre que nos soldats appelaient < Butte de l'empereur > , accourir, des divers points de notre ligne, suivis chacun d'un aide de camp, tous les chefs de nos corps d'armée. Napoléon avaient voulu qu'ils vinssent ainsi, tous à la fois, recevoir ses derniers ordres. Ce furent: le maréchal prince Murat, la maréchal Lannes, la maréchal Bernadotte, le maréchal Soult et le maréchal Davout....Spectacle merveilleux ! Dans ce cercle redoutable, que de gloires réunies ! ..."
Ségur : "Dans cet instant solennel, ces maréchaux formèrent autour de l'Empereur le plus formidable ensemble que l'imagination puisse concevoir ! Spectacle merveilleux ! Dans ce cercle redoutable, que de gloires réunies ! Il me semble les voir encore recevoir successivement son inspiration, et aussitôt, comme s'ils eussent emporté la foudre, s'élancer de toutes part pour aller briser les forces réunies des deux empires ! Ma vie aurait la durée de celle du monde, que jamais l'impression d'un tel spectacle ne s'effacerait de ma mémoire."
Car c'est bien la crème de la Grande Armée qui est là, et, à lexception de Berthier, ils ont tous moins de 40 ans ! Les deux derniers nommés, suite à une querelle le 28 novembre, ont promis de se battre en duel, mais Soult décide quils ont plus urgent à faire, et lépisode en restera là.
Napoléon donne ses dernières instructions: à Telnice et Sokolnice, la division Friant du maréchal Davout et la division Legrand du maréchal Soult ont pour instruction de tenir le plus longtemps possible, de ne reculer que pied à pied, dharceler sans cesse l'ennemi jusqu'à ce que les colonnes austro-russes soient coupées de leurs arrières. Elles vont accomplir point par point les ordres reçus.
Lannes et Murat, sur la route d'Olomouc, doivent tenir en échec et refouler si possible la droite ennemie.
Soult, avec les divisions Vandamme et Saint-Hilaire doit, malgré son impatience, attendre que les troupes ennemies aient dégarni le plateau de Pratzen (pour attaquer la droite du dispositif français), pour foncer entre Jirikovice et Ponetovice, traverser le Goldbach et remonter les pentes du plateau, coupant ainsi en deux l'armée ennemie.
Napoléon, la Garde, les grenadiers et le corps de Bernadotte, resteront en réserve derrière Soult pour l'appuyer si nécessaire.
"Il faut que dans une demi-heure, la ligne entière soit tout en feu !" dit, en terminant, Napoléon.
8 heures 45 - Telnice
Accablés par des forces cinq fois supérieures, les Français sont près de perdre Telnice et Sokolnice, lorsque la division Friant arrive (elle vient de marcher 65 km en deux jours!) et entre immédiatement dans le combat, soutenue par les cavaliers de Bourcier. Mais le combat est inégal: 10 000 français contre 50000 austro-russes ! Bientôt, la situation devient critique: Telnice et Sokolnice sont aux mains des alliés.
9 heures - Le Santon9 heures - Le Pratzen
LEmpereur donne le signal: Vandamme et Saint-Hilaire se mettent en mouvement.
20000 hommes traversent le Goldbach à Ponetovice et à Girzikovice et en une demie-heure, ils vont atteindre les hauteurs de Pratzen (Saint-Hilaire) et de Stari Vinoradhy (Vandamme).
Le quartier général de Koutousov est installé à Krenovice. Vers neuf heures, sur la foi des rapports qu'il reçoit, il estime la situation satisfaisante: les Français ont déjà perdu Telnice et Sokolnice, sans que la quatrième colonne de Kollowrath soit entrée en action.
Le tsar est impatient de vaincre et morigène Koutousof. Ce dernier, à contrecœur, donne l'ordre à Miladorowitch de commencer la descente, tandis qu'il va voir près du bord du plateau où en sont les combats. La brume est en partie dissipée. On aperçoit confusément des troupes ennemies sur les hauteurs opposées. Pourtant, en bas, la fusillade devient plus distincte. Koutousov se tourne vers un aide de camp, lui demande sa lunette d'approche, mais l'ordonnance sursaute, et le bras tendu vers le pied du plateau: "Regardez ! là, devant nous ! Ce sont les Français !"
Les officiers s'arrachent la lunette, changent d'expression, la terreur se lit sur leurs traits. Devant eux, des milliers de français montent à l'assaut, en chantant :
On va leur percer le flanc,
Ran, ran, ran, rantanplan, tirelire,
Rantanplan tirelire en Plan !On va leur percer le flanc,
Que nous allons rire !
Ran, tan, plan, tirelire,
Que nous allons rire !
Kollowrath sest aperçu de lavance des français. Il fait faire demi-tour à ses troupes pour contrattaquer. De l'aide est demandée au prince de Lichtenstein, engagé à ce moment là près de Blazovice, qui envoie quatre régiments russes.
Les choses vont vite. La division Saint-Hilaire prend le pas de charge, bouscule les détachements de Miladorowitch, traverse village de Pratzen sans s'arrêter. Le général Morand (10e léger) s'établit sur le plateau, soutenu par la 1ère brigade du général Thiébault, tandis que la division Vandamme prend position près de Stari-Vinohrady. Thiébault, avec sa batterie de douze canons, tire à boulet et mitraille sur les Autrichiens qui se débandent sur le revers du plateau. Vandamme attaque alors les Russes à la baïonnette, les obligeant à fuir en abandonnant leur artillerie. Il revient vers la hauteur de Stari-Vinohrady, l'attaque avec le 24e léger du général Schiner et le 4e de ligne dont le colonel nest autre que Joseph Bonaparte. Il gravit la pente, culbute l'ennemi et s'empare des canons et de leurs servants
10 heures - Sokolnice
Là se déroule une terrible empoignade, où les participants sont tour à tour vainqueurs et vaincus. Mais les alliés ne parviennent pas à enfoncer les français. A ce moment précis, des nouvelles alarmantes arrivent du Pratzen. Les alliés piétinent, le plan de Weirother pour écraser Napoléon est désormais impossible à réaliser.
11 heures - Le Pratzen
Soult s'établit sur le plateau et s'efforce de concrétiser la rupture des armées alliées.
Koutousov regroupe encore ses forces: les troupes de Kollowrath et de Miladorowitch, la brigade Kamenski du corps de Langeron, (qui, au bruit du canon sur le Pratzen, a fait faire demi tour à ses hommes, engagés à ce moment à Sokolnice), la garde impériale russe du prince Constantin, et fond sur la brigade Thiébault, isolée du reste de la division par le ravin de Pratzen.
Les Austro-Russes se sont rapprochés jusqu'à trente pas des Français, précédés de deux officiers qui crient:" Ne tirez pas, nous sommes Bavarois."
Lorsque la supercherie est découverte, la position des Français est précaire. Saint-Hilaire, ayant consulté les généraux Morand et Thiébault sur le parti à prendre, décide: En avant, et pas de prisonniers. L'ennemi est culbuté, les uns dans la vallée du Goldbach, les autres de l'autre côté du plateau.
Koutousov est légèrement blessé. Côté français, le colonel Mazars est tué, le général Saint-Hilaire blessé, et de nombreux officiers hors de combat.
Pendant ce temps, la brigade Varé refoule les Austro-Russes de Kollowrath vers Krenovice.
Un détachement de cavalerie de la garde russe, regroupant les fuyards, repart à l'assaut. Le 4e de ligne du frère de l'Empereur, se retrouve au milieu des combats, est bousculé et accuse de grandes pertes.
11 heures - Le Santon
Le général Ouvarof, avec les escadrons dont il peut encore disposer, tente de colmater la brèche ouverte dans la droite de l'armée alliée. Murat reçoit le renfort dune division du Corps dArmée de Bernadotte. Liechtenstein et Bagration sont contraints de reculer.
Lannes occupe Holubice, ayant fait 4 000 prisonniers, tué ou blessé 2 000 Russes. De plus il s'est emparé de la plus grande partie des équipages ennemis. Il arrête alors sa progression, ignorant le sort de l'ensemble de la bataille, et fait informer Napoléon de la situation.
13 heures - Le Pratzen
Napoléon avait raison: ces hauteurs sont bien la clé de la bataille. Si ses soldats se maintiennent dans cette position, comme cela semble le cas, Koutousof est coupé en deux. Pourtant rien nest encore sûr pour les français. L'Empereur sétablit sur le plateau de Pratzen, suivi de la réserve: Bernadotte, la Garde et les grenadiers.
Le grand-duc Constantin, après avoir bousculé les deux bataillons de Vandamme, lance toute la garde impériale russe (où combattent des représentants des plus nobles familles de Russie) sur le flanc de l'attaque française. La brigade Kamenski tente, près de Sokolnice, un dernier effort.
Alors, Napoléon se tourne vers Rapp : "Il y a là du désordre, il faut le réparer."
Rapp prend le commandement d'un régiment de chasseurs à cheval de la Garde auquel il adjoint l'escadron des mameluks. Ordener suit avec les grenadiers à cheval. Bernadotte a détaché la division Drouet (colonel Gérard) pour contrer l'infanterie russe.
Cest la première fois que ces deux corps délite se rencontrent.
Les Français s'élancent, enfoncent la cavalerie russe. Une deuxième charge de cavalerie commandée par le prince Repnine s'effectue. Le colonel Morland est tué. Arrivent en renfort les grenadiers à cheval d'Ordener. La mêlée est impressionnante. La cavalerie française parvient à disperser et à refouler les chevaliers-gardes d'Alexandre, faisant un illustre prisonnier, le prince Repnine en personne, que le général Rapp, le crâne entouré dun pansement, présentera lui-même à Napoléon (tableau célèbre du peintre Gérard).
Rapp: "Les canons, le bagage, le prince Repnin étaient dans nos mains....J'allais rendre compte de cette affaire à l'empereur; mon sabre à moitié cassé, ma blessure, le sang dont j'étais couvert, un avantage décisif remporté avec aussi peu de monde sur l'élite des troupes ennemies lui inspirèrent l'idée d'un tableau qui fut exécuté par Gérard."
Marbot: "Le peintre Gérard, dans son tableau de la bataille d'Austerlitz, a pris pour sujet le moment où le général Rapp, sortant du combat, blessé, tout couvert du sang des ennemis et du sien, présente à l'Empereur les drapeaux qui viennent d'être enlevés, ainsi que le prince Repnine, fait prisonnier. J'étais présent à cette scène imposante, que ce peintre a reproduite avec une exactitude remarquable. Toutes les têtes sont des portraits."
Pendant ce temps, les trois régiments de la division Drouet refoulent l'infanterie russe, privée de la protection de la cavalerie, sur Krenovice et Austerlitz.
13 heures - Le Santon
Bagration est coupé du reste des alliés. Lannes poursuivant son effort, aidé par les cuirassiers de Murat, force les Russes à se replier vers Rousinov. Mais deux batteries russes, installées sur une hauteur derrière le relais de poste de Pozorice (la Stara Posta) protègent ces derniers, et Bagration sauve la presque totalité des troupes qui lui restent.
Peu après, Murat sétablit à la Stara Posta.
14 heures - Le Pratzen
Ce qui reste de l'aile droite de Bagration se replie, les cavaliers de Lichtenstein fuient au-delà d'Austerlitz. La garde russe est anéantie, toutes les troupes, du centre à la droite, sont en retraite. Seules les colonnes de l'aile gauche qui devaient encercler les troupes de l'Empereur résistent sur le Goldbach, mais elles sont maintenant coupées de leurs arrières.
La garde du plateau est confiée aux troupes de Bernadotte. Napoléon réunit le corps d'armée de Soult, y adjoint les bataillons de la Garde, les grenadiers d'Oudinot avec 40 pièces de canon, et descend par ces mêmes chemins qu'ont emprunté le matin même les troupes alliées.
Autour de Telnice, la division Friand tient tête depuis les premières heures aux colonnes alliées. Friand a eu quatre chevaux tués sous lui. Davout, arrivé sur les lieux, se demande s'il pourra tenir encore ses positions. Buxhoewden pense pouvoir obtenir la décision, quand sur ses arrières arrivent les grenadiers d'Oudinot, Napoléon à la tête de la Garde Impériale, et les divisions de Soult. Les batteries françaises entrent en action et causent de grandes pertes aux Russes.
Les colonnes de Langeron et de Pribyschewski tentent de se replier le long du Goldbach vers le nord. La cavalerie française se lance à la poursuite des fuyards, en capturant la plupart, dont le général Pribyschewski lui même.
Le corps d'armée du maréchal Soult arrive alors sur le versant du plateau. Buxhoewden avec quatre régiments, se replie sur Ujezd, au nord des étangs, Langeron se joint à lui. Les Russes commencent à pénétrer dans le village, mais Vandamme, avec sa division dévalant du plateau, y entre de son côté. Buxhoewden est blessé, parvient à s'enfuir, mais ses troupes ne pouvant plus avancer se précipitent vers les étangs glacés, pensant pouvoir s'enfuir par cette voie.
Barrès: "Parvenu à la descente qui domine les lacs, je sortis un instant des rangs, et je vis, par ce moyen, dans la plaine, la lutte terrible engagée entre le 4e corps et la portion de l'armée russe qui lui faisait face, ayant les lacs à dos. Nous arrivâmes pour lui donner le coup de grâce, et achever de les jeter dans les lacs. Ce dernier et fatal mouvement fut terrible. Qu'on se figure 12 à 15 000 hommes se sauvant à toutes jambes sur une glace fragile et s'abîmant presque tous à la fois (..) L'artillerie de la Garde tira ensuite avec une vivacité incomparable sur la glace pour la briser et la rendre impropre à porter des hommes."
La glace ne peut évidemment résister au poids des hommes, des chevaux et des canons. Elle se brise bientôt et la déroute est complète.
Lejeune: "L'infanterie (russe) flottant incertaine sur le parti qu'elle avait à prendre, n'entrevit de salut qu'en essayant de franchie sur la glace les larges étangs qui la séparaient de l'autre rive. Quelques hommes, en effet, purent passer; mais lorsqu'un plus grand nombre fut arrivé au milieu des étangs, la glace commença à craquer sous leur poids, et ils s'arrêtèrent; ceux de derrière, continuant toujours à avancer, formèrent bientôt une masse de plus de six mille hommes qui chancelaient en glissant. Tout à coup, cette foule agglomérée, chargée d'armes et de bagages, disparut en deux secondes sous les glaçons brisés, sans qu'un seul homme put s'échappèrent nageant à la surface."
Lejeune ne sera pas le seul à déformer l'évènement qui, en réalité, fut beaucoup moins dramatique. Mais la légende, orchestrée par Napoléon lui-même semparera de cet épisode, en l'amplifiant à l'envie.
Par ailleurs, Soult, autour de Sokolnice, soutenu par les dragons de Beaumont, vient à bout de la dernière résistance des troupes russes. Les cavaliers se saisissent en quelques instants de milliers de prisonniers et de leur artillerie.