Février 1800


Paris, 2 février 1800

Au général Lefebvre, commandant supérieur des 14e, 15e et 17e divisions militaires, à Paris

Je reçois, Citoyen Général, votre lettre par laquelle vous m'informez qu'un lieutenant du 9e de dragons, porteur de dépêches, a été égorgé, dans le bourg de Sainte-Gauburqe, par les habitants. Faites partir sur-le-champ un officier d'état-major, qui ira en poste à la réserve de Verneuil, prendra 400 hommes d'infanterie et 60 dragons de cette réserve, se rendra dans ce bourg, en désarmera les habitants, les consignera tous dans le bourg et tâchera de faire arrêter les plus coupables. Vous commanderez également à cet officier de rester quelques jours dans ce bourg et de faire de là quelques courses dans les environs.

Vous préviendrez par la même occasion le général de brigade Chambarlhac que, s'il a besoin de cette réserve, il peut en disposer pour parvenir à anéantir le reste des chouans de ce département et à désarmer les communes malintentionnées.


Paris, 2 février 1800

DÉCISION

Le ministre de la guerre propose d'accorder au citoyen Pouret le grade de sous-lieutenant dans le 5e régiment de dragons

Cette place sera donnée à un   des maréchaux des logis du régiment qui aurait obtenu un sabre d'honneur en Italie.


Paris, 2 février 1800

DÉCISION

Le ministre de la guerre propose de confirmer le citoyen Naverres dans le grade de chef de bataillon

Refusé. Cet officier sera envoyé à l'armée et, à la première affaire où il se distinguera, il sera fait chef de bataillon.


Paris, 3 février 1800

Au général Berthier, ministre de la guerre

Citoyen Ministre, j'obéis aux ordres du Premier Consul Bonaparte en vous mandant, de sa part, qu'il désire que vous écriviez au général en chef Kléber, commandant l'armée d'Orient, pour lui recommander les intérêts du citoyen Billy Van Berchem, de Marseille. Ce citoyen doit faire partir, le 20 du courant, un bâtiment de ce port pour Alexandrie, en Égypte. Il est important, Citoyen Ministre, que vous engagiez le général en chef Kléber à assurer au bâtiment du citoyen Van Berchem tous les moyens de revenir en France, ainsi qu'il le désire, et que vous lui fassiez sentir combien il est nécessaire d'accorder cette sorte de facilité, puisque c'est elle seule qui peut encourager les spéculations commerciales particulières entre la France et l'Égypte.

Par ordredu Premier Consul.


Paris, 4 février 1800

DÉCISION

Le général Saint-Hilaire demande que les brigands dits chauffeurs soient distraits des tribunaux ordinaires et jugés prévôtalement.

Renvoyé à la section de législation, pour que, dans la nouvelle organisation des tribunaux, on insiste sur une juridiction équivalente à l'ancienne juridiction prévôtale.


Paris, 4 février 1800

Au général Lefebvre, commandant supérieur des 14e, 15e et 17e divisions militaires, à Paris

Vous voudrez bien, Citoyen Général, vous transporter demain dans les différents ateliers d'habillement de Paris, et particulièrement dans ceux où sont confectionnés les selles et les souliers. Vous vous ferez ouvrir tous les magasins; vous y examinerez avec la plus grande attention les objets qu'on y confectionne, et vous me rendrez  compte de cet examen.

Vous mènerez avec vous un maître cordonnier, un maître tailleur un maître sellier.


Paris, 5 février 1800

Au général Augereau, commandant en chef l'armée française en Batavie

J'ai recu, Citoyen Général, votre lettre sur le refus que fait le Gouvernement batave de vous remettre le commandement de ses troupes.

Le ministre des relations extérieures écrit par ce courrier au citoyen Semonville et au Directoire batave.

Dans la position où nous nous trouvons, nous avons plusieurs objets de la plus grande importance à traiter avec le Gouvernement batave, et la conduite du Gouvernement français sera basée sur l'issue de ces négociations.

Si nous prenons pour base le traité de la Haye et celui conclu par le citoyen Charles Delacroix , votre armée sera complétée à 25,000 hommes, et alors vous aurez les instructions nécessaires pour lever toutes les difficultés et prendre le commandement de l'armée batave.

Si, au contraire, de nouvelles transactions établissent de nouveaux rapports avec le Gouvernement batave, il conviendra de ne pas insister sur ce commandement et de prendre d'autres mesures.

En attendant, vous devez laisser pressentir que mon intention est qu'on vous donne le commandement, ne fût-ce que pour défendre la Batavie contre l'ennemi qui la menace.

Je désire que vous vous assuriez de la situation des principales places de la Hollande, et de leur approvisionnement en tout genre.

Envoyez-moi un mémoire sur chacune d'elles.

Voyez aussi les différentes villes, et faites-moi connaître l'esprit qui les anime. Tâchez de vous concilier les généraux, officiers et soldats bataves.


 Paris, 6 février 1800

Au général Masséna, commandant en chef l'armée d'Italie

J'ai vu. avec beaucoup de plaisir, Citoyen Général, la fermeté que vous mettez pour rétablir l'ordre dans votre armée.

On attend à chaque instant 1,500,000 francs de lettres de change sur Gènes et Marseille, tirées de Hollande, que l'on vous fera parvenir.

Indépendamment des 500,000 francs que l'on vous a envoyés par un commissaire ordonnateur, on vous a fait passer 500,000 francs la décade dernière, et 500,000 francs cette décade.

La Vendée est aux trois quarts pacifiée; Brune a battu Georges et ses bandes du Morbihan. Tout me fait espérer que d'ici à quinze jours cette guerre sera finie.

Je compte dans ce moment-ci que vous êtes à Gênes. L'adjudant général Lacroix doit vous avoir joint et fait part de mon projet.

Je désirerais que vous profitassiez du moment où les neiges encombrent encore les débouchés de l'Apennin pour concentrer des forces à Gênes et faire un coup de main sur l'ennemi, soit qu'il se présentât devant Gavi ou dans la Rivière du Ponant.

Je vous salue et attends de vos nouvelles.


Paris, 6 février 1800.
                                                     
 
Au citoyen Fouché, ministre de la polica générale.

Le Premier Consul désire, Citoyen Ministre, que vous lui présentiez, dans un très-bref délai, un rapport sur tous les individus condamnés à la déportation par des actes relatifs et qui ont été mis en surveillance dans différentes communes de la République.

Par ordre du Premier Consul.


Paris, 6 février 1800.

Au général Brune, commandant en chef de l'armée de l'Ouest.
                                 
Je reçois, Citoyen Général, votre lettre du 13. J'attends, avec bien de l'intérêt le moment où vous vous serez débarrassé de ce malotru de Georges..

J'ai lu votre proclamation aux habitants du Morbihan; elle est dans le bon style.

Quand vous pourrez vous passer de quelques troupes, faites filer dans la 14e division les détachements des 14e, 15e et 5e de ligne. Je voudrais réorganiser ces corps pour la campagne.

Envoyez-y également, lorsque cela vous sera possible, les détachements des 5e et 26 légères et de la 64e de ligne. Mon projet est de faire venir ces corps dans les environs de Paris, et de prendre des mesures pour les compléter à 3,000 hommes.


 Paris, 6 février 1800.

 Au général Berthier, ministre de la guerre

Vous aurez reçu, citoyen Ministre, le règlement pour la levée de quatre bataillons francs dans les trois divisions qui composent l'armée de l'Ouest, ainsi que dans la 14e. Vous chargerez le général Lefebvre du dernier, et le général Brune des trois premiers; vous autoriserez ces généraux à nommer les officiers de ces corps, et leur ferez connaître que l'intention du Gouvernement étant de tâcher de tirer tous les individus sans aveu, déserteurs, anciens contrebandiers, etc., de ces départements, ces généraux sont autorisés à confier le commandement de ces corps même à des hommes qui se seraient distingués dans les chouans. Il n'est pas besoin de dire que, dès l'instant que ces corps seront formés, on les dirigera sur l'armée du Rhin.


Paris, 6 février 1800.

Au citoyen Gaudin, ministre des finances.
                                   
Le Premier Consul, Citoyen Ministre, ayant reçu une lettre écrite au nom du commerce de Paris, vous invite à lui présenter, ce soir, à dix heures, douze négociants appartenant aux douze premières maisons de Paris, et pouvant être considérés comme représentant réellement le commerce de la capitale.

Par ordre du Premier Consul.


Paris, 6 février 1800.

Au général Brune, commandant en chef l'armée de l'Ouest
                                    
Le commerce de Nantes, Citoyen Général, doit imiter celui de Paris, de Lyon et de Marseille. Il peut vous avancer 4 ou 500,000 francs, qui vous mettront à même de solder les troupes que vous commandez, et de pourvoir aux besoins les plus pressants. J'écris au ministre des finances pour qu'il autorise quelqu'un, à Nantes, à le représenter e à faire les arrangements nécessaires pour le remboursement de cette  somme. Au reste, ceux que vous prendrez, pourvu qu'ils ne soient en aucune manière onéreux, seront exactement remplis.


 Paris, 7 février 1800

MESSAGE AU SÉNAT CONSERVATEUR.

Sénateurs, en conformité de l'article 16 de la Constitution, le Premier Consul vous présente, pour remplir la place vacante au sénat conservateur, le citoyen Barthélemy, ancien ambassadeur de la République, lequel, pendant sa carrière diplomatique, a signé la paix avec le roi d'Espagne et avec le roi de Prusse.


Paris, 7 février 1800

Au citoyen Lucien Bonaparte, ministre de l'intérieur
                            
Le Premier Consul m'ordonne, Citoyen Ministre, de vous prier en son nom de donner les ordres nécessaires pour faire placer dans la grande galerie des Tuileries les statues de Démosthène, d'Alexandre, d'Hannibal, de Scipion, de Brutus, de Cicéron, de Caton, de César, de Gustave-Adolphe, de Turenne, du grand Condé, de Duguay-Trouin, de Marlborough, du prince Eugène, du maréchal de Saxe, de Washington, du grand Frédéric, de Mirabeau, de Dugommier, de Dampierre, de Marceau et de Joubert.

Vous êtes invité, Citoyen Ministre, à prendre les mesures que vous jugerez convenables pour vous procurer celles de ces statues qui n'existeraient point encore, ou qui ne seraient pas à votre disposition.

Par ordre du Premier Consul.


Paris, 7 février 1800.

ORDRE DU JOUR,
      POUR LA GARDE DES CONSULS ET POUR TOUTES LES TROUPES DE LA RÉPUBLIQUE.

Washington est mort. Ce grand homme s'est battu contre la tyrannie. Il a consolidé la liberté de sa patrie. Sa mémoire sera toujours chère au peuple français comme à tous les hommes libres des deux mondes, et spécialement aux soldats français qui, comme lui et les soldats américains se battent pour l'égalité et la liberté.

En conséquence, le Premier Consul ordonne que, pendant dix jours, des crêpes noirs seront suspendus à tous les drapeaux et guidons de la République.


Paris, 8 février 1800

ARRÊTÉ

Les consuls de la République arrêtent ce qui suit

ARTICLE 1er. - Une bibliothèque de20 000 volumes sera formée à l'hôtel des Invalides pour l'usage des militaires habitant cette maison
ART. - 2. - Les livres qui composeront cette bibliothèque seront tirés des dépôts des livres qui appartiennent à la République
ART. - 3. - Les ministres de la guerre et de l'intérieur se concerteront pour l'exécution du présent arrêté.


Paris, 8 février 1800 (2 heures après-midi)

Au général Brune, commandant en chef l'armée de l'Ouest

Je reçois, Citoyen Général, votre lettre du 16 pluviôse, par un courrier extraordinaire.

J'espérais qu'avec les 18 on 20,000 hommes que vous aviez sous  vos ordres que alliez enfin avoir une journée décisive, qui, dispersant les brigands, ne laisserait plus que des bandes. Alors la soumission de Georges, le désarmement et la pacification eussent assuré pour longtemps la tranquillité de ce pays.

 Georges est véritablement le chef du parti anglais; c est le plus dangereux de tous les ennemis, comme le Morbihan est le point le plus essentiel, rnititairement et politiquement.

Georges a au moins 12 pièces de canon et a reçu au moins 30 000 fusils des Anglais; vous ne recevrez ni canons ni fusils , et cependant la grande quantité de troupes qui existe dans ce moment dans le Morbihan ne peut pas toujours y rester.

Que me parlez-vous de disposer des troupes qui composent l'armée de l'Ouest? Ne suis-je pas sûr que dans un ou deux mois une escadre anglaise viendra débarquer 20 ou30 000 hommes ; qu'ils trouveront le pays réarmé et réorganisé, et qu'ils recommenceront alors la guerre ? Ainsi, pendant le fort de la guerre sur le Rhin et aux Alpes, on verra les chouans ressortir, tout organisés, tout armés, et, combinés avec des armées de débarquement , former une diversion puissante et mettre en danger l'existence de la République.

Si l'on vous a rendu les canons et les 20,000 fusils, vous avez obtenu quelque chose, mais pas encore ce que j'espérais. Il fallait une journée vigoureuse. L'affaire de Grandchamp n'a pas été assez décisive. Il fallait qu'au moment de pacifier il ne restât aucun fort rassemblement, et que le peuple du Morbihan eût reçu une leçon qui l'empêchât de remuer une autre fois.

Je suis persuadé qu'ils cacheront les canons et nieront qu'ils en ont, que vous recevrez peu de fusils, que le temps s'écoulera, que vous aurez manqué toute la guerre. Que devez-vous donc faire? Immédiatement après la réception du présent ordre, demander à Georges que sous vingt-quatre heures il vous livre ses canons et 20,000 fusils; s'il le fait, il ne restera plus qu'à parcourir le pays, à s'informer de ses principaux lieutenants, à exiger que lui, Georges, vienne à Paris, que que ses principaux lieutenants se rendent dans différentes villes de la République, où on leur fera toucher des pensions pour vivre. Alors je regarderai le Morbihan comme en voie de pacification. Il faudra alors vous porter avec la masse de vos forces à Rennes et dans le département des Côtes-du-Nord , et y faire la même chose pour La Prévalaye et pour le désarmement, et enfin revenir dans la Loire-inférieure, dans Maine-et-Loire, dans la Sarthe, et exiger le même désarmement. C'est alors, et alors seulement, que je regarderai la guerre de la Vendée comme en train de se terminer. Mais jusqu'aujourd'hui je vois que tout est contre nous, puisque nous avons des forces plus considérables que celles que nous pourrons y envoyer, que la stagnation où nous sommes d'événements militaires abat plus qu'elle ne relève leur courage, et puisque le général Hédouville, ayant pacifié, au moins pour le moment, la moitié des départements de l'Ouest , vous donne beau jeu contre l'autre moitié.

Si, par la réponse à la sommation que vous lui ferez, Georges, au contraire, cherche à gagner du temps, déclarez-lui que, n'ayant pas posé les armes, n'ayant pas rendu ses canons, vous le regardez comme l'agent de l'Angleterre et ayant faussé sa parole; faites alors marcher vos colonnes, déployez vos forces, et souvenez-vous que les républiques naissantes ne gagnent rien à traiter avec des rebelles; qu'il faut être généreux envers les peuples, mais après avoir été sévère avec les rebelles qui conservent des intelligences avec les ennemis de la patrie.

Nous sommes dans le courant de février; les jours sont extrêmement précieux. Mon intention est que sous dix jours tous les rassemblements armés du Morbihau soient dissipés et le désarmement effectué de gré ou de force. Je ferai faire la même chose pendant ce temps-là dans la 14e division militaire Ce n'est qu'en suivant cette marche qu'il nous sera possible d'avoir la   moitié de vos troupes disponibles pour la fin de mars.

J'attends avec bien de l'impatience le retour du courrier; car la paix intérieure comme le succès de la campagne prochaine sont attachés à la conduite que vous tiendrez dans cette circonstance. Le Gouvernement ne doit pas être la dupe de quelques misérables émigrés ou de quelques paysans.

Le général Chambarlhac poursuit très-vivement Frotté. Tous les rassemblements ont été dispersés, et Frotté, à la tête de 100 ou 200 hommes, erre dans les forêts et dans les landes. On est à sa poursuite, et à chaque instant on espère le prendre. La 14e division a déjà bien changé de face.

Je vous recommande encore le fort Penthièvre. Faites-y travailler sur-le-champ et mettre en état de défense.

Songez que vous êtes dans cette circonstance délicate où un jour perdu peut décider d'une opération militaire, du succès d'une campagne et de la gloire nationale. Vous avez 18 à 20,000 hommes réunis; c'est le cas de dicter impérieusement la loi aux rebelles, ou ils nous la dicteront un jour

Amitié et grande confiance.


Paris, 9 février 1800

Au général Brune, commandant en chef l'armée de l'Ouest

De crainte, Citoyen Général, que le courrier que je vous ai expédié ne soit intercepté, je vous en expédie un second avec duplicata.

Il y a deux mois, le ministre de la guerre ordonna au général Hédouville de faire passer à Brest des bataillons de conscrits faisant 2 à 3,000 hommes. Il paraît que ces bataillons ne sont pas arrivés.   Je vous prie de vous faire rendre compte de ce qu'ils sont devenus. Il serait bien essentiel qu'ils fussent à Brest ; ils retardent notre expédition maritime.

Faites également presser le départ des déserteurs autrichiens.

Le marché qu'avait Ouvrard pour les subsistances de la marine été résilié; il n'y a aucune espèce de doute que ses agents ne profitent de cette circonstance pour faire manquer le service à Brest. Actuellement que les Anglais ne sont plus à Quiberon, il nous sera plus facile d'envoyer des vivres à Brest, de Nantes. Envoyez, je vous prie dans cette dernière ville, un de vos aides de camp, avec des instructions nécessaires pour faire partir de suite pour Brest tous les objets de subsistance de la marine, qui seraient chargés ou en magasin. Il se concertera avec le commissaire de la marine à Nantes.

Je vous prie de faire parvenir le courrier à Brest, pour y remettre ses dépêches.

J'attends avec bien de l'impatience la nouvelle du désarmement de Georges, de la remise de ses canons, ou d'une bonne affaire qui nous en délivre pour longtemps; vous rnettrez tous vos soins à purger les départements d'Ille-et-Vilaine, et surtout celui des Côtes-du-Nord, qui, à ce qu'il parait, marche le plus mal.

Je viens de recevoir ce matin, par un courrier extraordinaire, de Berlin, la nouvelle de la non-réussite des Anglais à Pétersbourg. Paul 1er laisse à la disposition des Anglais la division qui est à Jersey. Il retire ses autres troupes. Souwarow continue sa marche pour la Russie.


Paris, 10 février 1800.

Au général Lefebvre, commandant supérieur des 14e, 15e et 17e division militaires, à Paris.

Le général Gardanne, Citoyen Général, me rend compte, par une lettre du 16 pluviôse, qu'il part pour se rendre dans la 14e division. Il doit y être arrivé en ce moment. Je vous prie de lui donner l'ordre, par un courrier extraordinaire, de ne pas perdre un instant et de poursuivre vivement les rebelles dans les départements de l'Orne et de la Manche. Enjoignez-lui de prendre toutes les mesures convenables pour désarmer toutes les communes suspectes, et détruire enfin entièrement Frotté et ses bandes. Pendant le temps que le général de brigade Chambarlhac restera dans la l4e division, il sera sous les ordres du général Gardanne. Faites-lui connaître qu'il est d'autant plus essentiel de ne pas perdre un instant, que les 3,000 hommes envoyés de Paris dans le département de l'Orne n'y peuvent pas rester plus de dix à douze jours. Mandez-lui qu'il ne doit pas respecter les limites de sa division, et, s'il apprend qu'il existe des chouans, soit à Dinan ou dans les Côtes-du-Nord, soit dans les départements voisins, qu'il s'y porte avec rapidité et aille disperser ces brigands toutes les fois qu'ils y paraîtront.

Envoyez d'ici un officier de votre état-major, qui ne reviendra qu'avec la nouvelle de la mort on de la prise de Frotté.


Paris, 11 février 1800

Au général Brune, commandant en chef l'armée de l'Ouest

Dans l'extrait que vous m'avez fait passer, Citoyen Général, du combat qui a eu lieu près d'Hennebon, vous ne me dites pas qui y commandait.
Faites connaître au général Houdetot que j'ai vu avec peine qu'il ne s'y est pas trouvé: le quartier général des généraux doit être au milieu des colonnes.

Je me fais rendre compte, par le ministre, pourquoi les guides ne sont pas partis.


Paris, 11 février 1800

Au citoyen Abrial, ministre de la justice (André Joseph comte Abrial, 1750-1828)

Je suis prévenu, Citoyen Ministre, que, malgré les ordres qu'a  du donner le ministre de la police générale, et la surveillance des militaires, des grains extraits du département de la Roër et de ceux qui l'environnent ont passent sur la rive droite du Rhin. L'administration des douanes et même les autorités constituées de ces départements paraissent ne pas être étrangères à ce délit, et un nombre de ces dernières, accusé et convaincu de l'avoir commis, n'a point encore été destitué par le département. Remédiez promptement à cet abus.


Paris, 11 février 1800

Au général de brigade d'Arnaud

J'apprends, citoyen Général, que dans le département de la Sarthe, du coté du Lude, de Sablé, de La Flèche, de Château-du-Loir, les brigands n'ont pas posé les armes, qu'ils se réunissent et qu'ils commettent des actes hostiles. Cependant je n'entends pas dire que vous soyez à leurs trousses, que vous rassembliez les colonnes mobiles et les troupes que vous avez dans ces cantons pour marcher à ces brigands. Voulez-vous donc être le seul à n'acquérir aucune gloire avant la fin de cette guerre, ou croyez-vous en obtenir en tenant votre quartier général dans une ville ?

Marchez; que j'apprenne par votre premier courrier que vous avez dispersé, désarmé et détruit les brigands de la Sarthe, et que, jour et nuit, vous êtes à la poursuite de leurs bandes éparses.


   Paris, 1l février 1800

Au général Gardanne, commandant la 14e division militaire, à Caen

Je vous envoie, Citoyen Général, un de mes aides de camp pour rester auprès de vous et m'apporter la nouvelle de la prise ou de la mort de Frotté. Il faut que cela finisse.

Indépendamment des forces que vous avez, il est parti plus de 3,000 hommes de la garnison de Paris pour le département de l'Orne.

Que pluviôse ne se passe pas sans que vous m'annonciez la fin de cette guerre. Ce n'est pas le cas de faire aucun accommodement avec Frotté.

Désarmez les communes les plus malintentionnées.

Tâchez d'avoir en vos mains le baron de Commarguies, commandant la le division; le chevalier de Lionceaux, commandant la 2e division; le nommé Lavi Dubois, commandant la 3e division; d'Hauteville, Memecourt (dit Fortunat) , Picot, Ruès, Hugon , Des Essairts.

Mettez des colonnes à la poursuite de tous ces brigands. Vous pouvez promettre 1,000 louis à ceux qui tueront on prendront Frotté, et 100 pour chacun des individus ci-dessus nommés.

Il faut qu'au plus tard au 10 ventôse aucun de ces hommes n'existe plus.


Paris, 11 février 1800

Au citoyen Lévêque, commissaire du gouvernement , à Caen

Le général Gardanne doit être de retour dans la 14e division, avec sa colonne. Le général Lefebvre a fait passer de Paris des renforts dans l'Orne. Le général Puilly doit se trouvera à Lisieux et Falaise avec une colonne respectable. Tant de forces réunies doivent enfin promptement dissiper les bandes qui désolent la 14e division.

Envoyez au général Gardanne des hommes qui connaissent les lieux où se trouvent les chouans; désignez-lui, ainsi qu'au général Pully, les communes malveillantes des départements de l'Eure, du Calvados et de la Branche. Faites connaître à ces généraux les mesures que vous croyez propres à rasseoir enfin la tranquillité. Une aussi grande quantité de troupes ne doit pas toujours rester dans vos contrées; il faut donc profiter du moment où elles s'y trouvent pour saper le mal dans ses fondements. Faites-moi connaître s'il y a des chouans dans les environs de Lisieux.


Paris, 11 février 1800

Au général Moreau, commandant en chef l'armée du Rhin

Je reçois, Citoyen Général, la lettre par laquelle vous me faites connaître que vous avez touché 1,100,000 francs, 600,000 francs, et 500,000 francs. Vous devez avoir reçu depuis : 1° 1,000,000 parti de Paris en argent; 2° 500,000 francs accordés à la distribution de la dernière décade; 3° 500,000 francs tirés d'Amsterdam sur Strasbourg, Bâle, etc.; 4° 500,000 francs partis d'Amsterdam en or; 5° 1,000,000 parti hier de Paris en lettres de change : total, 3,500,000 francs.

Faites-moi connaître, article par article, si vous avez reçu ces sommes.

Le ministre des finances vous aura fait part des mesures que j'ai prises en affectant les rentrées de pluviôse et ventôse dans le tiers des divisions militaires de la République, et en y envoyant trois inspecteurs pour faire verser tous les fonds dans la caisse du payeur de l'armée du Rhin. On calcule que cela produira une ressource de deux millions.

Faites-moi connaître ce produit au fur et à mesure des versements. Envoyez-moi par le retour du courrier l'état des armes et effet d'habillement venus depuis votre arrivée à l'armée. Les rapports qui me sont faits assurent qu'on vous en a fait envoyer beaucoup.

Vous devez avoir reçu l'arrêté sur les conscrits. Au 1° ventôse, il ne doit plus y avoir de bataillons de conscrits.


Paris, 11 février 1800

Au citoyen Berthier, ministre de la guerre

Je suis averti d'une manière certaine, Citoyen Ministre, que les caisses envoyées par l'agence générale des hôpitaux, à Paris, dans les différentes armées, sont composées d'instruments défectueux et de scies avec lesquelles on déchire les militaires auxquels il faut
faire des opérations. Je vous invite à faire cesser cet abus sans délai et à en punir les auteurs.


Paris, 11 février 1800

DÉCISION
Le citoyen Robert (Ex-canonnier au 4e régiment d'artillerie, ancien régiemnt de La Fère)
demande un emploi dans les arsenaux militaires.

Renvoyé au général Aboville, qui me proposera le moyen de placer ce brave homme.


Paris, 11 février 1800

DÉCISION
Rapport du ministre de la guerre sur l'arrestation du général Don

La décision du général Brune est conforme aux droits de la guerre. Le général Don ne peut être considéré comme prisonnier de guerre, ni comme parlementaire. Réitérer les ordres que l'on ne le laisse pas échapper.


Paris, 12 février 1800

DÉCISION
Le ministre de la guerre propose d'exempter d'une réquisition de chevaux
le département du Léman récemment réuni à la France.

Refusé. Il ne peut exister deux sortes de citoyens français.


Paris, 13 février 1800

Au général Hédouville, lieutenant du général en chef de l'armée de l'Ouest.

Comme vous vous trouvez plus près de Paris que le général chef Brune, Citoyen Général, je prends le parti de vous envoyer directement mes ordres.

Bourmont nous joue; il n'a rendu ni ses canons ni ses armes. Donnez l'ordre aux généraux qui commandent au Mans et à Laval de réunir leurs troupes et de se diriger contre ce rebelle. Le général Brune va vous envoyer de Nantes 2,000 hommes; le général Gardanne a ordre de faire partir pour Laval une colonne de 1,500 hommes. Elle sera à vos ordres. Coordonnez le mouvement de toutes ces troupes. Faites connaître à Bourmont qu'il ait à rendre ses canons vingt-quatre heures après votre sommation à cet effet, et 3,000 fusils trois jours après. Sur la réponse négative, mettez-vous à la tête de vos troupes et ne quittez vos bottes que lorsque vous l'aurez détruit.

Frotté a demandé à se soumettre; ma seule réponse a été qu'il eût à se rendre à discrétion. Brune va poursuivre vigoureusement Georges; ainsi la guerre sera poussée avec force dans le Morbihan, contre Bourmont et contre Frotté. Il faut que, dans la première décade de ventôse, ces trois foyers de guerre civile soient éteints à la fois; c'est le seul moyen de consolider la pacification de ces départements. C'est sur Bourmont, Frotté et Georges que comptent les Anglais, et c'est sur cette diversion de la guerre des chouans que les ennemis espèrent pour le commencement de la campagne prochaine.


Paris, 13 février 1800

Au général Brune, commandant en chef l'armée de l'Ouest.

J'ai reçu, Citoyen Général, les dépêches que vous m'avez envoyées par l'aide de camp Lacuée et par le courrier que vous m'avez adressé. J'espère qu'en ce moment les hostilités auront déjà commencé, puisque ces misérables veulent traiter de puissance à puissance. J'attends avec impatience les nouvelles de vos premiers événements militaires. Il faut aller vivement et vigoureusement. J'écris au général Hédouville que mon intention est qu'il se porte sur-le-champ à Laval, pour marcher contre Bourmont. Donnez-lui promptement 2,000 hommes de votre réserve de Nantes. Il ramassera les troupes qui restent au Mans ou à Laval. Je donne l'ordre au général commandant la 14e division militaire de diriger sur-le-champ 1,800 hommes sur Laval. Ordonnez au général Hédouville de mener Bourmont vigoureusement et de le menacer fortement, 1° s'il ne rend pas sur-le- champ ses canons et ses 6,000 armes; 2° s'il ne sort pas personnellement du territoire qu'il habite en ce moment., pour se rendre à Paris où dans les environs.

Frotté demande à corps et à cri à traiter; ma seule réponse a été qu'il eût à se rendre à discrétion. On le poursuit.

J'attends les cadres des 5°, 14e, 45e et 26e légères, afin de les réorganiser. Prévenez-moi de leur arrivée à Évreux. Je compte entièrement sur vous et sur votre armée. Ne perdez jamais de vue que la gloire et l'honneur sont attachés au succès complet, et que, pour faire triompher la République de la ligue des puissances de l'Europe, il faut que, dans la première décade de ventôse, les trois foyers de la guerre civile de Georges, de Frotté et de Bourmont aient été anéantis, ou, au moins, que Georges et Bourmont n'aient plus, comme Frotté, que deux on trois bandes de 60 à 80 hommes, errantes et n'osant se montrer.

Tous les jours, on fusille ici cinq ou six chouans. Un grand nombre d'arrestations ont été faites. Barruel-Bauvert, l'un des écrivains les plus royaliste, a été surpris et arrêté hier; on a pris tous ses papiers et ses correspondances.

Finissez promptement la guerre des chouans. Déployez avec activité la force que je vous ai confiée.

On assure que les armes, l'argent et les poudres qu'on fait passer dans le Morbihan sont déposés et cachés dans une île de la rivière du Teil, appelée Locoal, entre Lorient et Auray, dans des excavations pratiquées dans une ferme au milieu de l'île.

Si vous avez une réserve à Rennes, dont les troupes ne soient pas indispensables pour établir la tranquillité dans le département des Côtes-du-Nord, dirigez contre Bourmont une colonne extraite de cette réserve. Le général Hédouville en fera coïncider l'action avec celle des autres troupes qui sont mises sous ses ordres.


Paris, 13 février 1800

Au général Muller, commandant la 12e division militaire, à Nantes.

L'enceinte de la ville de Nantes a été forcée par une poignée de brigands. Cela ne fait pas honneur aux nombreux habitants de cette intéressante cité. Mais j'attribue ce temps de désordre aux choses qui viennent de se passer, et j'espère que désormais, si la circonstance se présentait, je trouverais les habitants de cette ville dans la ligne de l'honneur et de la bravoure.

Contribuez par vos discours, par votre exemple, à réunir tous les citoyens, effacer toutes les passions. Il n'est plus de salut pour le bonheur, la gloire française, que dans l'ordre rétabli.


Paris, 13 février 1800

Au général Lefebvre, commandant supérieur des 14e, 15e et 17e divisions militaires, à Paris

Bourmont élude le désarmement; il a encore des canons et des fusils qu'il n'a pas rendus.

Donnez l'ordre, Citoyen Général, au général commandant la 14° division de faire partir la 72e en toute diligence pour Laval; et, si cette demi-brigade réunie ne formait pas 1,500 hommes, il la compléterait par la 21e et le bataillon de la 79e, jusqu'à concurrence de 15 à 1800 hommes; vous en donnerez le commandement au général de brigade Moulin, ou à tout autre, s'il était absent.

Arrivé à Laval, ce général recevra des ordres du général Hédouville; et, en cas que les routes fussent interceptées, il dissipera les rassemblements armés qu'il rencontrera, et forcera le nommé Bourmont à rendre ses canons et ses fusils. Il ramassera, à cet effet, toutes les troupes des départements de la Mayenne et de la Sarthe, en se concertant avec les généraux commandant ces départements. Toutes les fois qu'il se trouvera auprès du général Hédouville ou à portée de prendre ses ordres, il les exécutera ponctuellement.

Ce général, arrivé à Laval, vous fera connaître par un courrier extraordinaire la situation de ces troupes et les nouvelles qu'il pourrait
avoir de ces départements.

Faites partir cet ordre par un courrier extraordinaire, et recommandez qu'il soit exécuté le plus promptement possible.

Faites-moi connaître si le général Béthencourt test arrivé à Chartres; si les troupes d'Orléans y sont arrivées, et combien il a de monde sous ses ordres.


Paris, 14 février 1800

Au général Brune, commandant en chef de l'armée de l'Ouest

Vous trouverez ci-joint, Citoyen Général, le rapport du ministre de la guerre, relativement aux 3,600 hommes qui devaient se rendre à Brest pour s'y embarquer. Je n'ai pas besoin de vous dire pour quelle destination; vous la pressentez assez.

Comme il parait que le nombre n'a pas été complété, envoyez-y sur-le-champ les bataillons de conscrits qui sont dans votre arrondissement, et tous les conscrits que vous pourrez ramasser, ainsi que tous les prisonniers que vous ferez aux chouans, chefs, soldats, etc. Dans le pays où ils iront, ils se trouveront Français et sous des hommes qui leur donneront un bon exemple.

Il paraît que les départements de la rive gauche vont assez bien. Je vous ai écrit hier pour Bourmont. Vous allez achever Georges. Frotté est aux abois.

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J'attends votre premier courrier; il m'apportera la nouvelle de cinq ou six combats 1'un sur l'autre qui finiront la guerre de l'Ouest et retentiront dans l'Europe.


Paris, 14 février 1800

Au général Guidal, commandant la subdivision de l'Orne

J'ai mis sous les yeux du Premier Consul, Citoyen Général, la dépêche que vous m'avez adressée le 24 du courant et qu'un courrier m'a remise ce matin.

Le Premier Consul me charge de vous dire que vous devez vous conformer en tout aux ordres du général Lefebvre. Le général de division Gardanne ignorait les intentions du Gouvernement lorsqu'il vous écrivait de recevoir Frotté sans qu'au préalable le désarmement complet de ses bandes eût eu lieu. Georges même n'obtiendra aucunes conditions qu'il n'ait rendu ses douze canons et 20,000 armes, et, s'il résiste à cette demande, le général Brune a ordre de l'anéantir. Le Premier Consul m'ordonne de vous mander de mettre de bons espions en campagne et de marcher sur le lieu où Frotté et ses principaux officiers pourraient se réfugier, à moins que ce chef de rebelles ne consente au désarmement absolu de ses bandes. Il faut être bien aveugle pour ne pas sentir que le peuple abandonne ces brigands à leur impuissante rage. Il faut qu'au ler ventôse cette guerre soit terminée. La grande quantité de troupes qui couvre la 14e division militaire ne peut pas y rester toujours. Elles doivent être employées à désarmer les communes malintentionnées, à faire rejoindre les réquisitionnaires et les conscrits et à obliger les paysans à chasser eux-mêmes ou à livrer Frotté. Confiez une colonne au brave Jaume, votre aide de camp; mettez-vous à la tête de l'autre; le général Chambarlhac fera également marcher la sienne, et vous serez bientôt défait de Frotté. Qu'il se rende à discrétion:  il peut alors compter sur la générosité du Gouvernement, qui veut oublier le passé et rallier tous les Français, mais qui ne consentira jamais à être la dupe de quelques rebelles.

Vous connaissez le pays où vous êtes; vous y avez été longtemps. Vous pouvez plus qu'un autre y opérer le bien et en éloigner à jamais la guerre civile.


Paris, 14 février 1800

Au général Berthier, ministre de la guerre

Je n'ai point reçu, Citoyen Ministre, le rapport du général division Gauthier, que je vous avais demandé, sur les dépôts de l'armée d'Orient.

J'attache une grande importance à le recevoir sans délai. Vous donnerez au général de division Chabran l'ordre de rendre sur-le-champ à Chalon-sur-Saône, pour prendre le commandement des quatorze bataillons de dépôt de l'armée d'Orient. Le général Chabran les passera en revue et veillera à leur équipement, armement, habillement et recrutement. Ces bataillons resteront cantonnés à Mâcon, Châlon, Seurre et Saint-Jean-de-Losne. Ils seront exercés deux fois par jour à la manœuvre.

La division commandée par le général Chabran portera le nom de 1e division de l'armée de réserve. Il sera attaché à cette division trois pièces de 8 et un obusier de 6 pouces, servis par l'artillerie légère, deux pièces de 12, quatre de 8 et deux obusiers, servis  par l'artillerie à pied. Le général Chabran aura sous ses ordres deux généraux de brigade et un adjudant général. Son quartier général sera à Châlons-sur-saône. Il ne recevra directement des ordres que du ministre de la guerre.

Je vous prie de me faire un rapport sur les légions polonaise, Nord et cisalpine, sur leur emplacement actuel et sur les mesures que vous avez adoptées pour leur formation, leur organisation et 1eur destination.

Le chef de brigade Taupin, qui est à Toulon, recevra de vous l'ordre de se rendre à Chalon-sur-Saône, pour y prendre le commandement des bataillons des 18e, 32e et 75e demi-brigades. Le chef de brigade Gaspard prendra celui des bataillons des 13e, 25e et 85e demi- brigades.

Les bataillons des 4e, 21e et 22e légères seront commandés également par un ancien chef de brigade de l'armée d'Italie qui aura fait la campagne d'Italie comme commandant une troupe.

Les bataillons de la 6le, de la 69, et de la 88e seront commandés par un chef de brigade sortant d'un de ces corps.


Paris, 15 février 1800

ARRÊTÉ

Les Consuls de la République arrêtent ce qui suit :

Le ministre de la police générale notifiera à tous les journalistes qu'ils ne doivent se permettre de rien imprimer dans leurs feuilles de relatif aux mouvements des armées de terre et de mer.


Paris, 15 février 1800

Au général Moreau, commandant en chef l'armée du Rhin

Le ministre de la guerre m'a remis, Citoyen Général, les états de situation que vous lui avez envoyés, en date du 20 nivôse. Je n'ai pu asseoir aucune idée d'après ces états de situation, puisque c'était l'ancienne organisation. Je vous prie de m'envoyer un état de situation exact de votre armée après la nouvelle organisation que vous lui avez donnée.

Je désire que vous composiez vos plus fortes divisions de quatre demi-brigades et d'une légère, et les plus faibles seulement de quatre; que chaque division n'ait pas plus de deux généraux de brigade et d'un adjudant général, et dans les plus fortes, un général de brigade ou un adjudant général de plus; qu'il y ait le moins de cavalerie possible attachée à une division, tout au plus un régiment de hussards ou de chasseurs; que vous partagiez également votre cavalerie en divisions, composées de quatre ou au plus de six régiments et quelques bataillons d'infanterie légère, commandées par un général de division, deux généraux de brigade et un adjudant général qu'il y ait tout au plus douze pièces d'artillerie attachées à chaque division; que vous ne laissiez dans toutes les places du Rhin et la 6e division que vos compagnies auxiliaires et vos dépôts; que vous parveniez à réunir en divisions actives l20 ou 130,000 hommes en dix ou quatorze divisions, y compris celles de cavalerie, et que vous laissiez les corps les plus fatigués dans Ehrenbreitstein et Kehl.


Paris, 16 février 1800

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

D'après les nouvelles que je reçois, Citoyen Ministre, il me paraît que les Bataves se conduisent toujours de plus en plus mal. Je viens de donner les ordres pour faire partir sur-le-champ pour la Batavie la 29° demi-brigade légère, les 5e, 55e, 65e demi-brigades de ligne et 6,000 conscrits. Je viens de faire rapprocher de la Belgique plusieurs demi-brigades qui deviennent inutiles à l'Ouest.

L'ambassadeur batave viendra sûrement vous faire pressentir réponse à votre lettre. Ne lui faites qu'une réponse excessivement froide et courte:

"Le  Premier Consul exécutera littéralement le traité de la Haye et la convention de Charles Delacroix, puisque ce sont les seuls traités qui aient remplacé le droit de conquête; mais il entend que de votre côté, vous les exécutiez avec la plus stricte exactitude. Il sait tenir ses engagements et est accoutumé à obliger les autre les tenir. Les ordres sont partis hier pour mettre en marche 25,000 hommes pour la Batavie."

Je vous prie de m'envoyer le traité de la Haye et la convention Charles Delacroix.


Paris, 16 février 1800

A monsieur l'amiral Mazarredo

Le Premier Consul a lu avec le plus grand intérêt et avec la plus grande attention la lettre que vous lui avez transmise. Le citoyen Alquier est chargé de témoigner à Sa Majesté Catholique et à M. d'Urquijo les sentiments d'estime qu'il a pour elle et le cabinet de Madrid.

A son avènement à la première magistrature, le Premier Consul avait vu avec quelque peine les liaisons d'affaires que le ministre espagnol entretenait avec différents particuliers de Paris.

Si le Premier Consul n'a pas communiqué à Sa Majesté Catholique la demande qu'il a faite auprès du roi d'Angleterre, c'est qu'elle n'était qu'une première ouverture, qu'aucune condition n'était articulée, et que le vœu pour une première ouverture de négociations avait été plusieurs fois manifesté par Sa Majesté Catholique.

Mais, dès l'instant qu'il aurait été ou qu'il serait question d'articuler des conditions, même pour des préliminaires, le Premier Consul se ferait un devoir de ne rien faire que de concert avec Sa Majesté Catholique et pour le commun intérêt des deux relations.

Le Premier Consul me charge, Monsieur l'Amiral, de vous faire connaître combien il est reconnaissant des soins particuliers que vous vous êtes donnés pour procurer deux bricks pour l'Égypte, auxquels il continue d'attacher toujours une grande importance.

La soumission de l'Ouest, le départ des Russes, le rapprochement de la Porte ottomane de ses vrais intérêts, et l'amélioration sensible des finances de la République, vont mettre le Premier Consul dans le cas de proposer à Sa Majesté un plan digne des deux grandes Nations qui doivent contribuer à sa réussite.


Paris, 16 février 1800

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures

Je vous prie, Citoyen Ministre, d'envoyer chercher les différents Irlandais qui se disent à Paris chargés des intérêts des insurgés, de leur demander des notes sur la situation actuelle de l'Irlande, et de laisser entrevoir qu'aujourd'hui que les départements de l'Ouest sont pacifiés, il serait possible que le Gouvernement se décidât à délivrer l'Irlande.


Paris, 16 février 1800

Au général Moreau, commandant en chef l'armée du Rhin

Un grand nombre de personnes me répètent qu'une partie des individus qui composent le Gouvernement helvétique sont enclins pour les Autrichiens. En effet, je suis instruit que depuis une quinzaine de jours l'on répète et l'on calcule des projets de paix séparée, que l'on décore du nom de neutralité. Cette idée est absurde, si elle n'est malveillante; il n'est plus aujourd'hui de milieu entre la Suisse : ou libre, et indépendante, et nous aidant dans la guerre pour arriver à la paix, ou esclave des princes d'Autriche, ses anciens maîtres.

Faites sentir au Gouvernement, dans des conversations journalières, l'inconséquence et le danger pour eux de laisser circuler de pareilles chimères.


Paris, 18 février 1800

ARRÊTÉ

Les Consuls de la République, le Conseil dÉtat entendu, arrêtent:

Les militaires qui étaient membres du Conseil des Anciens on du Conseil des Cinq-Cents au 18 brumaire dernier, et qui n'ont été nommés ni au Sénat conservateur, ni au Tribunat, ni au Corps législatif, seront considérés, jusqu'à réorganisation définitive de l'armée, comme étant en activité de service, et payés, à compter du  ler nivôse, de la solde dont ils jouissaient à l'époque de leur admission au corps législatif, sans que cela puisse s'étendre au delà du ler vendémiaire an IX.


Paris, 18 février 1800

DÉCISION
Le citoyen César Berthier demande le grade de général de brigade

À la première bataille.


Paris, 18 février 1800

Au général Brune, commandant en chef l'armée de l'Ouest

Je reçois, Citoyen Général, votre lettre du 25 courant, que me porte votre aide de camp. J'ai lu avec plaisir votre proclamation, que je trouve fort bonne; mais il s'agit de la faire appliquer avec la plus grande vigueur. On m'assure que Georges vous trompe et a au moins dix pièces de canon. Commencez par prendre ce qu'il vous donne, et faîtes des perquisitions pour vous assurer de la vérité. Je n'ai pas besoin de vous faire connaître le besoin que nous avons de fusils et la nécessité de faire filer sur Nantes, et de là sur Orléans, tout ce que vous pourrez vous procurer par le désarmement.

J'espère que, par votre première lettre, vous m'apprendrez que vous vous êtes procuré 10 ou 12,000 fusils anglais. Alors je croirai véritablement aux bonnes intentions de Georges, et je vous ferai compliment sur vos succès. Mais j'en reviens toujours aux principes que je vous ai développés, ne négligez rien pour désarmer.

D'après ce que vous me dites de Georges , je le verrai avec grand plaisir à Paris. Envoyez-moi la liste des principaux chefs.

Frotté a été pris avec tout son état-major; je m'étais refusé à aucun traité. Dans le moment actuel, il doit être fusillé. Ainsi, la tranquillité se trouve bien consolidée dans la ci-devant Normandie.

Il se confirme toujours que les Russes s'en vont.

Lorsque vous aurez consolidé la tranquillité du Morbihan, je crois qu'il sera très-essentiel que vous vous rendiez d'abord à Rennes.

Faites-moi connaître la note des hommes que vous avez envoyés à Brest.


Paris, 18 février 1800

Au général Hédouville, lieutenant du général en chef de l'armée de l'Ouest.

J'ai reçu, Citoyen Général, la lettre que m'a remise l'adjudant général Dalton; ma confiance en vous est entière.

Le but de votre conduite doit être celui-ci : faire en sorte que, dans les mois de ventôse et de germinal, lorsque la mer deviendra moins orageuse, lorsqu'une partie de nos troupes sera appelée vers le Rhin, il n'existe personne dans les départements de l'Ouest qui ait le pouvoir et la force de se révolter et de seconder les opérations des ennemis.

Pour cela, il faut désarmer le plus qu'on pourra et faire rester à Paris ou dans les départements environnants les ex-chefs des chouans. Je trouve fort bonne la réponse de Bourmont, que vous m'avez expédiée. En effet, dès qu'il a licencié ses bandits, il n'a plus aucune autorité. Qu'il se rende à Paris.

Faites marcher de bonnes patrouilles contre toutes les bandes encore armées, faites pêcher les canons dans les rivières où Bourmont
dit les avoir jetés. Il est nécessaire que vous ayez ces canons, pour l'opinion de la France et de l'Europe. Alliez la modération à la force et à des exemples de rigueur. Je verrai avec plaisir à Paris d'Autichamp et Chatillon.

 Ce misérable Frotté a préféré se faire prendre à rendre les armes. Vous verrez dans le Moniteur les lettres prises sur lui.

 Apprenez-moi bientôt que vous avez en votre pouvoir les canons et les armes des insurgés.


Paris, 18 février 1800

NOTE POUR L'APPROVISIONNEMENT DE LA RÉSERVE

L'on suppose la réserve arrivée à Zurich.

Il y a de là à Coire..................30 lieues, ce qui fait...........6 jours de marche,
De Coire au mont Slugen.... 10 lieues.........................ci...2 jours;
De Splugen à Morbegno.... 12 lieues.........................ci.. 2 jours;
De Morbegno à Bergame... 12 lieues........................ ci.. 2 jours;

Total.......................................64 lieues.............................12 jours;

Il faudrait acquérir des renseignements sur cette route; des voitures peuvent-elles passer ?

Avoir le détail, lieue par lieue, avec les villages, leur population, mauvais passages, ponts, etc.

Il est difficile de se hasarder à placer des magasins à Coire ou au Splugen, parce qu'à la première marche rétrograde ils se trouveraient pris, et que d'ailleurs une opération de cette nature ne peut réussir qu'avec un extrême secret.

Il faudrait que l'armée partit de Zurich avec des vivres pour quinze jours. Il serait facile d'avoir un entrepôt de vivre qui serait conduit de Zurich jusqu'à l'extrémité du lac, par eau; ce qui diminuerait les transports de trois jours. Il ne s agirait donc plus que de transporter des vivres pour douze jours.

Le soldat pourrait prend, en partant de Zurich, pour quatre jours de vivres. Il n'en  faudrait donc plus que pour huit jours.

Un mulet porte 200, c'est-à-dire qu'il faut cinq mulets pour nourrir 1,000 hommes pendant un jour; et, pendant huit jours, 40 mulets. En supposant 50 000 hommes, cela ferait 2,000 mulets.

Ainsi, en supposant 75,000 bouches, y compris d'ailleurs ce qu'il faudrait pour le transport de l'eau-de-vie, cela ferait 3,000 mulets.

Il est à remarquer qu'on suppose les choses au pire, parce qu'il serait facile, lorsqu'on devient dans le cas de faire ce mouvement, d'être maître de Coire et d'avoir fait faire une partie du voyage à une portion de ces mulets pour porter des vivres à Coire.

Peut-être serait-il possible d'avoir à Lucerne un dépôt de vivres, de les transporter par le lac à Altorf, et de là de faire faire un ou deux voyages au Splugen à un grand nombre de mulets.

Si les circonstances rendaient ces deux combinaisons possibles, alors la moitié des mulets suffirait.

Il faudrait donc avoir à Lucerne et à Zurich du biscuit pour les rations de quinze jours, moins quatre jours qui pourraient être donnés en pain, ce qui ferait onze jours. Il faudrait avoir au moins onze jours pour la retraite, qu'on ferait filer de Zurich et de Lucerne au magasin du Splugen, dans le cas que l'armée serait pressée.

Ce seraient donc 1,650,000 rations de biscuit qu'il faudrait avoir en réserve à Lucerne et à Zurich.


Paris, 18 février 1800

Au général Berthier, ministre de la guerre

Je désirerais, Citoyen Ministre, que vous me fissiez connaître les noms de tous les officiers qui désirent passer en Egypte, et que vous les dirigeassiez sur Brest, où il est indispensable qu'ils soient rendus dans la première décade de ventôse, l'escadre étant prête à partir.

Si le général Quentin est à Paris, donnez-lui l'ordre de se rendre en toute diligence à Brest, pour s'embarquer à bord de l'escadre de l'amiral Bruix, avec un corps de troupes de débarquement dont il aura le commandement. Vous l'autoriserez à mener avec lui les adjudants généraux et officiers d'état-major qui auront sa confiance. Il est indispensable qu'il soit rendu à Brest dans la première décade de ventôse.

Les 1,500 déserteurs autrichiens ne sont point armés ni habillés: donnez ordre qu'on leur fournisse à Brest autant de fusils, gibernes et briquets que l'on embarquera d'hommes.

Donnez ordre au commissaire ordonnateur de la division de se concerter avec l'amiral Bruix et le citoyen Najac pour leur procurer autant d'habits que possible. Je désire qu'ils soient habillés comme les soldats français; surtout qu'ils aient des chapeaux.

Envoyez sur-le-champ à Brest un adjudant général attaché au ministère, pour se concerter avec les généraux Bruix et Brune, et les ordonnateurs de terre et de marine, à l'effet d'incorporer les déserteurs dans les bataillons de conscrits, ou d'en faire un bataillon à part, en prenant des officiers parmi ceux qui seraient à Brest ou à la suite des corps de l'armée de l'Ouest. Vous chargerez cet officier de me rapporter la revue exacte des hommes qui s'embarqueront et l'inventaire de tout le matériel en artillerie.

Réunissez les Moniteur, depuis un an, et autres brochures, copie des dépêches envoyées par les différentes occasions, et écrivez de nouveau au général Kleber, pour lui faire connaître la tournure favorable que prennent les affaires de la République, l'espérance d'avoir bientôt une pacification générale ou continentale, et enfin les sollicitudes que nous ne cessons de nous donner pour lever tous les obstacles qui s'opposent au recrutement et à l'approvisionnement de son armée.

Je n'ai pas besoin de vous faire observer combien il est nécessaire que tous les ordres que vous donnerez soient secrets, et que personne de ceux qui les recevront ne se doute du lieu où doit se rendre l'escadre.


Paris, 18 février 1800

A l'amiral Bruix, commandant l'armée navale à Brest

Je reçois, Citoyen Général,. votre lettre du 25 pluviôse.

Le général en chef Brune va donner les ordres pour que tous les conscrits et troupes de la marine qui se trouvent dans 13e division militaire se rendent sur-le-champ à Brest. Je lui écris également de vous faire passer tous les prisonniers faits sur les chouans, et tous les déserteurs autrichiens. Concertez-vous avec le citoyen Najac pour prendre à Brest tous les hommes qui seraient en prison ou détenus pour une raison quelconque, hormis les galériens condamnés pour crime. Tout Français en prison, pour désertion ou autre délit contre la discipline, doit être embarqué. Ayez soin, indépendamment des fusils que vous avez dû embarquer d'embarquer autant de fusils que de déserteurs autrichiens; car c'est surtout de fusils qu'on a besoin dans les pays où vous allez. Concertez-vous aussi avec l'ordonnateur de la marine pour habiller les prisonniers autrichiens le mieux qu'il vous sera possible; j'écris à cet effet à l'ordonnateur. Dans les circonstances extraordinaires où nous nous trouvons , c'est sur votre zèle et celui de l'ordonnateur Najac que je compte pour écarter tous les obstacles qui se sont présentés pour retarder votre intéressant mission.

Vous pourrez incorporer les prisonniers autrichiens dans les cadres de conscrits, afin de pouvoir exercer une surveillance sur eux.


Paris, 18 février 1800

Au citoyen Najac, commissaire ordonnateur, à Brest

Douze ou quinze cents déserteurs autrichiens, Citoyen Ordonnateur, se rendent à Brest pour s'embarquer. Procurez-leur, par tous les moyens possibles, des effets d'habillement, même pris dans les dépôts de la marine.

Je désirerais que l'amiral Bruix embarquât au moins 3,000 hommes. Le général Brune va envoyer, pour cet objet, tous les conscrits à Brest. Procurez à l'amiral Bruix tout ce qu'il vous sera possible d'hommes de la marine, de l'arsenal, en un mot, de jeunes gens, excepté des galériens. Procurez-lui enfin tous les fusils dont il aura besoin.

S'il vous devenait impossible de fournir des habillements pour les hommes qui s'embarquent, faites embarquer les draps nécessaires pour leur faire des habits à l'uniforme national.

Enfin je m'en repose essentiellement sur votre zèle pour prendre les mesures extraordinaires qui remplissent mon but.

Frotté, avec tout son état-major, a été pris et fusillé. Bourmont a désarmé, il se rend à Paris; Georges s'y rend aussi. Les Russes ont quitté la Bohème pour retourner dans leur pays. L'armée du Rhin, forte de 180,000 hommes, s'habille, se réorganise et est soldée. L'armée d'Italie commence à se maintenir dans de meilleures positions. Les impositions vont se payer, et j'espère que nous pourrons bientôt subvenir à une partie de vos besoins.

Je vous salue et compte particulièrement sur votre activité et sur votre zèle.

Je vous verrai avec plaisir lorsque vous aurez mis l'amiral Bruix à même de partir, et que le nouveau munitionnaire aura pris son service.


Paris, 20 février 1800

Au citoyen Gaudin, ministre des finances

La garde des Consuls, Citoyen Ministre, est depuis un mois sans prêt. Vous sentez que cela est inconvenant.


Paris, 20 février 1800

Au général Gardanne, commandant la 14e division militaire, à Caen

La mort de Frotté et de ses principaux complices accélère sans doute la pacification de la 14e division. Il faut maintenant, Citoyen Général, que vous preniez des mesures 1° pour l'arrestation de ce que ces messieurs appellent chefs de légion (entre autres pour celle de Charles et de Picot) ; 2° pour arrêter tous les gens sans aveu, et, lorsque vous en aurez deux ou trois cents, les envoyer sous bonne escorte à Brest, où il y a des ordres pour les enrôler dans les troupes de Saint-Domingue. Quant aux différents chefs qui se sont rendus à discrétion, vous leur ferez connaître que mon intention n'est pas de leur faire du mal, mais, puisqu'ils se sont confiés dans le Gouvernement, de leur faire éprouvé sa générosité; mais que j'exige seulement leur parole qu'ils ne rentreront pas dans l'Orne ou les pays chouannés pendant la guerre. Vous leur demanderez de vous désigner la ville où ils se proposent de se rendre; ils y seront en surveillance, et je leur y ferai donner des moyens de subsistance. Vous m'enverrez une note sur chacun deux, et me ferez connaître la ville où ils se proposent de se retirer; en attendant, vous les surveillerez. Après avoir pris ces mesures, il vous restera à faire rejoindre les conscrits; leur dépôt est à Versailles. Enfin vous lèverez un bataillon franc, dont vous pourrez choisir les officiers, pris même entre les hommes qui ont été chefs parmi les chouans. Le moment est favorable pour déraciner entièrement cette guerre; ne le laissez pas échapper. Vous aurez rendu un grand service à la patrie , si, par votre activité et par les mesures que vous prenez, vous remettez le calme dans la division que vous commandez.


Paris, 20 février 1800

Au général de brigade Delarue, commandant dans le département de la Sarthe

Votre aide de camp m'apporte, Citoyen Général, votre lettre du 28 pluviôse. J'ai vu avec indignation la circulaire du nommé Henri. Mettez-vous en campagne, tâchez de le surprendre dans quelque endroit qu'il se trouve, et, dès l'instant que vous l'aurez pris, vous le ferez juger par une commission militaire comme rebelle à la République. Vous motiverez votre accusation sur la lettre dont vous m'avez envoyé copie. Je ne doute pas que la commission militaire ne le condamne à mort. Vous ferez alors connaître, par une proclamation aux habitants du pays dans lequel vous commandez, le crime dont ce misérable s'était rendu coupable.

Le général Hédouville doit avoir envoyé des troupes à Laval. Il doit également en être arrivé dans cette ville, venant de la 14e division militaire. Écrivez au général commandant à Laval, qui enverra une colonne pour vous seconder. D'ailleurs, dans la position où sont les choses, avec vos colonnes mobiles et la poignée de monde que vous avez à votre disposition, vous en avez assez.

Le général Béthencourt, qui commande à Chartres, a eu ordre d'entrer dans le département de la Sarthe avec les forces qu'il a sous ses ordres. Écrivez-lui, concertez-vous avec lui , et prenez sur-le-champ les mesures nécessaires .pour dissiper toutes les bandes de chouans, faire arrêter tous les vagabonds et opérer le désarmement le plus qu'il sera possible.

Le nommé Charles s'étant rendu coupable de plusieurs crimes depuis la pacification, vous le ferez arrêter. Ayez soin que cette mesure ne produise aucune secousses.


Paris, 22 février 1800

INSTRUCTIONS POUR L'AMIRAL BRUIX
Commandant l'armée navale, à Brest

L'amiral Bruix mettra à la voile le plus tôt possible, avec dix-sept ou dix-huit vaisseaux de guerre français, six frégates et l'escadre espagnole.

Il donnera la chasse à l'escadre anglaise qui bloque Brest, que l'on suppose inférieure en nombre.

Il se dirigera ensuite droit sur Malte, qu'il débloquera; il se fera joindre par le Généreux, le Guillaume-Tell, l'Athénien et les frégates la Carthaginoise, la Diane et la Justice, et autres bâtiments de guerre inutiles à la défense de Malte qui sont dans ce port. Il versera dans Malte les vivres de toute espèce dont son escadre pourra se passer, et les 6,000 quintaux de farine et 100,000 pintes d'eau-de-vie que l'ordonnateur Najac a ordre d'embarquer à Brest.

Après quoi, il retournera avec les deux escadres réunies à Toulon. Les vaisseaux qui sont au Ferrol et à Cadix s'y rendront également,
et de là cette escadre, qui se trouvera composée de quarante-deux ou quarante-trois vaisseaux, fera l'expédition de Mahon.

Au moment du départ de Malte, l'amiral Bruix enverra en Égypte une escadre légère, composée des meilleurs voiliers de l'escadre, pour y porter des troupes et les armes de toute espèce dont son escadre est chargée pour cette intéressante armée. L'escadre qu'il enverra sera plus on moins forte, selon ce qu'il apprendra de l'ennemi et des événements qui se seront passés.

Si, arrivé à la hauteur de Cadix, l'escadre espagnole voulait absolument entrer dans ce port, l'amiral Bruix ne retarderai pas son voyage et se rendra à Malte. avec la seule escadre française, après avoir épuisé tous les moyens de sollicitation , promesses et protestations qui pourraient décider l'amiral espagnol à le suivre jusqu'à Malte.

Les ordres sont donnés pour que des préparatifs de toute espèce soient faits à Toulon pour réapprovisionner l'escadre.

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Le premier Consul n'entre dans aucun détail sur la manière dont l'amiral Bruix doit s'y prendre pour surprendre l'escadre anglaise qui bloque Cadix, celle qui bloque Malte et tous les bâtiments qui croisent dans les mers de Livourne et de Naples. Il s'en réfère à ses talents et à son zèle pour la gloire de la marine française.

Le Premier Consul désire que l'amiral Bruix, depuis Brest jusqu'à Toulon, ne mouille dans aucun port et se tienne toujours en mer. La saison est encore favorable; la fortune sera suffisante pour l'escadre française, si l'amiral Bruix met à profit toutes les chances quelle lui offrira et s'il va droit à son but et ne perd pas une heure.


Paris, 22 février 1800

A monsieur de Gravina, commandant en second de l'escadre espagnole, à Brest.

Je désire vivement, Monsieur, que les deux escadres réunies, commandées par des officiers distingués et composées de vaisseaux de choix, ne soient pas bloquées par une escadre de beaucoup inférieure en nombre.

Je donne des ordres à l'amiral Bruix pour qu'il sorte avec les deux escadres réunies. Je compte sur les talents distingués, l'amour de la gloire et la bravoure si naturelle à la nation espagnole, et je donne des instructions à l'amiral Bruix selon les événements et les circonstances. Je désire fort qu'elles soient telles qu'elles vous permettent de remplir les intentions de Sa Majesté Catholique et les miennes, et réaliser le désir qu'elle a plusieurs fois manifesté de voir Malte et Mahon arrachés à nos plus mortels ennemis.

Croyez, Monsieur, à l'estime toute particulière que j'ai pour vous.


Paris, 23 février 1800

Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures.

Le Premier Consul me charge de vous faire connaître qu'il désirerait avoir, réunis dans la même note, les principaux faits qui servent à établir la violation du droit des gens par les Anglais, toutes les fois qu'elle a eu lieu, et leur conduite immorale à l'égard des autres puissances, notamment dans le cours de la guerre actuelle.

Il vous invite à faire rédiger cette note le plus tôt possible.

(Par ordre du Premier Consul.)


Paris, 23 février 1800

Au général Brune, commandant en chef de l'armée de l'Ouest

Je reçois, Citoyen Général, votre lettre du ler ventôse. Les chouans n'ont pas encore rendu les armes dans les départements d'Ille-et-Vilaine, Mayenne et Sarthe. Il est bien urgent que vous réitériez vos ordres pour cet objet.

Je ne conçois rien à l'ordre que le général Muller dit avoir reçu de faire partir 3,000 hommes. Tous les ordres de mouvement doivent venir de vous. C'est, je crois, une méprise; j'en écris au ministre de la guerre.

Bourmont est à Paris; il va se marier. Il déclare vouloir vivre tranquille dans cette ville ou partout ailleurs et ne se mêler de rien, puisqu'il est rentré en grâce auprès du Gouvernement.

Exigez la rentrée rigoureuse des impositions pour mettre en état votre armée, la solder et la nourrir.

J'apprendrai avec plaisir que Georges est parti du Morbihan, ainsi que ses principaux chefs, et que vous avez complété votre désarmement.

Continuez à activer les versements de subsistances de Nantes sur Brest.

Je destine les 40e et 58e à faire partie de l'armée de réserve; elles sortiront de la Bretagne aussitôt que vous pourrez vous en passer. Je vous recommande, en attendant, de les réunir et de les organiser.


Paris, 23 février 1800

Au général Berthier, ministre de la guerre.

Les besoins urgents en plomb, pour les armées de la République, doivent s'évaluer à 400 cartouches pour 500,000 hommes, ce qui fait 200 millions de cartouches.

Par les états que vous m'avez remis, je vois qu'il existe 92 millions de cartouches fabriquées; 6,100,000 livres en balles ou en saumons (saumon: masse de métal brut de fonderie, lingot de métal non précieux), ce qui fait 120 millions de cartouches; ce qui excède de 12 millions nos besoins.

Sur les états que vous m'avez remis, je ne trouve que le tiers des places fortes de la République.

Je ne saurais croire que toutes les places de la Sarre, que Luxembourg, Venloo, Maastricht, etc., Antibes, Briançon, Besançon, Huningue, Landau, etc. , se trouvent sans plomb et sans cartouches; cependant l'approvisionnement de toutes ces places se trouve raisonnablement compris dans le calcul de 400 cartouches pour 500,000 hommes.

Je ne vois donc aucune sollicitude raisonnable à avoir pour cette partie du service, ni aucune urgence à employer plusieurs millions dans un moment où l'argent nous est aussi nécessaire.

D'après l'état que vous m'avez remis, je vois qu'il est facile de faire filer de Douai, Lille, Saint-Omer, Bruxelles, Metz, Bruges, la quantité de 31 millions de cartouches, et presque autant de plomb en saumons ou en balles. Il me paraît nécessaire de faire refluer ces quantités de cartouches sur Mayence, qui se trouve dans le plu grand dénuement; sur Strasbourg, qui, étant l'entrepôt de l'armée du Rhin, doit avoir une vingtaine de millions de cartouches; si Besançon, sur Auxonne, où il serait nécessaire d'avoir 4 à 5 millions de cartouches, et 3 millions à Lyon.

De Perpignan, de Montpellier, de Toulouse, vous pouvez également tirer plusieurs millions dirigés sur Toulon et Antibes.

Ces mouvements me paraissent suffisants pour nous mettre hors d'inquiétude sur le manque de cartouches pour la campagne prochaine; et, quant à celle qui suivra, il est indispensable, avant de prendre aucune mesure, de connaître exactement la quantité plomb, en saumons, balles ou cartouches, qui se trouve dans toutes les places fortes de la République au 1er germinal. Écrivez à cet effet une circulaire à tous les commandants de place, et envoyez des modèles d'état pour qu'on n'ait qu'à les remplir.

La consommation de la campagne ne peut pas passer 30 millions de cartouches, ce qui ferait 1,500 milliers de saumons, que l'on trouvera dans les places et magasins dont on n'a pas les états. Au reste, ce sera un travail à régler à la fin de germinal, lorsque vous aurez reçu tous les états du 1er germinal.


Paris, 23 février 1800

Au général Berthier, ministre de la guerre

J'ai lu, Citoyen Ministre, dans les différents rapports que vous m'avez remis, que vous pensez que nous manquons d'affûts de siège. Il est possible que dans telle on telle place il en manque; mais je suis très assuré que, dans la presque totalité des places, magasins ou arsenaux, nous avons un tiers d'affûts au delà de nos besoins. Il ne s'agit que de les répartir selon les besoins de chaque place. Cela nous épargnera beaucoup d'argent, car c'est une ruine pour l'État d'avoir une trop grande quantité d'affûts et d'objets de charronnage. Le temps les dégrade, c'est une perte en bois et en argent. Je vous prie de m'en dire autant pour les équipages de campagne. Nous avons le double de ce qui nous est nécessaire; il ne s'agit que d'en faire une bonne distribution.


Paris, 24 février 1800

Au contre-amiral Ganteaume

Vous vous rendrez à Brest, Citoyen Général; vous vous présenterez chez l'ordonnateur, le commandant des armes et l'amiral Bruix, comme chargé par le Gouvernement d'une inspection extraordinaire, devant durer quatre ou cinq jours, afin de pouvoir me remettre un état exact de la situation administrative et militaire de Brest. Vous prendrez le même titre au quartier général du général Brune et sur votre route.

Arrivé à Brest, vous conférerez avec l'amiral Bruix.

Si l'escadre anglaise qui bloque Brest est en moindre nombre, et si le général Gravina est prêt avec son escadre, vous arborerez votre pavillon sur un des bâtiments de l'escadre de l'amiral Bruix, et, avec dix-sept ou dix-huit vaisseaux français , les frégates que l'amiral Bruix jugera nécessaires, et l'escadre espagnole, vous vous rendrez droit à Malte , où vous jetterez des provisions de toute espèce que vous devez embarquer à Brest. Vous y jetterez également une partie des vivres qui seraient superflus à votre escadre. Vous enverrez, selon les circonstances , cinq ou six vaisseaux de guerre en Égypte pour y débarquer les secours et les munitions de guerre qui sont sur l'escadre.

De là, l'escadre se rendra le plus tôt possible à Toulon, pour réapprovisionner et faciliter le départ des bâtiments vénitiens et autres transports, chargés de vivres destinés pour Malte.

Je donne à l'amiral Bruix , sous les ordres duquel vous serez, les instructions nécessaires; mais le départ de l'escadre de Brest vous concerne spécialement. Il peut arriver les cas suivants :

1°  Que le général Gravina ne veuille pas prendre sur lui d'être dans la Méditerranée sans un ordre de Mazarredo; dans ce cas, vous le sommerez de sortir pour protéger le départ de l'escadre français ,et, après avoir, de concert, donné la chasse à l'escadre anglaise, l'amiral Bruix se dirigerait avec dix-huit vaisseaux français sur Malte.

2°  Si l'escadre espagnole sort, et que Gravina, comme l'assure l'amiral Bruix, soit bien aise de trouver cette occasion de commander en chef, alors il faudrait toujours le requérir, seulement pour donner la chasse aux Anglais, et, lorsque vous serez sortis , vous dresserez un procès-verbal qui constatera l'impossibilité de rentrer sans rencontrer l'escadre anglaise qui aurait été renforcée.

3°  Si, en passant devant Cadix, l'escadre espagnole voulait absolument entrer dans le port, soit par ordre du Gouvernement, soit pour toute autre raison, et qu'il fût impossible de la décider à aller à Malte, ce que je suppose peu présumable, comme, dans cette opération, 1es journées sont inappréciables, je pense que vous ne devez pas perdre un moment, et vous porter devant Malte avec dix-huit vaisseaux francais. Enfin, si l'escadre anglaise devant Brest était supérieure en nombre, vous resterez à Brest le temps nécesssaire pour voir partir l'amiral Bruix avec ses huit on neuf vaisseaux, les meilleurs voiliers de l'escadre.

Vous trouverez ci-joint les instructions pour l'amiral Bruix et lettre pour le général Gravina. Vous ne remettrez cette lettre que lorsque vous serez persuadé que l'assertion de l'amiral Bruix est vraie et que Gravina est décidé à le suivre.

Si vous restez à Brest quelques jours, faites-moi connaître la situation de l'artillerie de terre, de la garnison, ce qu'il serait possible que les anglais tentassent pour enlever ce port, et les obstacles qu'ils auraient à surmonter.


Paris,  25 février 1800

Au général Brune, commandant en chef l'armée de l'Ouest

J'apprends par la voie de Londres, Citoyen Général, qu'en ce moment les Anglais font embarquer leurs troupes à Jersey et à Guernesey. Est-ce pour l'Irlande? Est-ce pour débarquer leurs forces dans le Finistère? Est-ce pour s'emparer de Cherbourg et de la presqu'île du ci-devant Cotentin? C'est ce qu'on ne peut prévoir, car la prudence et la connaissance des choses ne leur commandent aucune de ces opérations.

Si le général Dulauloy est à votre quartier général, ordonnez-lui de visiter sur-le-champ le fort Penthièvre, la place de Brest, ainsi que les forts qui l'environnent. Faites-moi ensuite connaître le résultat de sa tournée et si les approvisionnements de tout genre sont au complet.

Quant au fort Penthièvre, le ministre de la guerre a dû donner des ordres pour qu'il fût mis sur-le-champ en état de défense. Il a dû également avancer les fonds nécessaires pour cet objet.

J'ai vu avec satisfaction que vous étiez occupé de l'approvisionnement de Belle-Île. Songez maintenant à accélérer le désarmement; assurez-vous des chefs, et faites rejoindre, le plus que vous pourrez, les conscrits et les déserteurs.

Je ne pense pas encore à aller à l'armée du Rhin, et, lorsque j'y penserai, vous pouvez compter que je vous y réserverai une place.

Il est actuellement parfaitement certain certain que les Russes, ainsi que Souwarow, se sont acheminés vers leur pays, et qu'ils ont déjà atteint la Pologne.


Paris 26 février 1800

ARRÊTÉ

Les Consuls de la République, le Conseil d'État entendu, arrêtent ce qui suit:

ARTICLE 1er. - Dans l'intervalle du 1er germinal au 1er messidor prochain, le Gouvernement, 'après le rapport du ministre de la justice et en conformité des dispositions suivantes , prononcera sur toutes les réclamations présentées avant le 4 nivôse dernier, soit aux administrations civiles, soit au Gouvernement, par des individus inscrits sur des listes d'émigrés.

ART. 2. - Le ministre de la police générale enverra au ministre de la justice , avant le 1 germinal prochain, un état général des réclamations qui pourront être soumises à un examen définitif; il fera un deuxième envoi avant le ler floréal; il fera un troisième et dernier envoi avant le 1er prairial.

ART. 3. - Immédiatement après la publication du présent arrêté les préfets et sous-préfets adresseront au ministre de la police les demandes en radiation qui seraient encore dans les bureaux des administrations centrales.
Le ministre de la police générale donnera les ordres et les instructions nécessaires pour accélérer les envois.

ART. 4. - Les réclamations antérieures au 1er nivôse, formées par des individus inscrits sur des listes d'émigrés, seront examinées par une commission composée de trente citoyens et divisée en six bureaux, chacun de cinq membres.

ART. 5. - Les trente membres de la commission seront nommés par le Premier Consul , sur une liste de soixante candidats, qui sera présentée par les ministres de la justice et de la police.
La répartition en bureaux sera faite par la voie du sort.

ART. 6. - Le travail sera également distribué par la voie du sort entre les bureaux de la commission.
A cet effet, le ministre de la justice divisera en cinq parties les affaires qui, aux termes de l'article 2, lui auront été envoyées par le ministre de la police générale.
Cette division sera effectuée dans les vingt-quatre heures qui suivront les envois.
Le ministre fera ensuite exécuter en sa présence la distribution par la voie du sort, entre les bureaux.

ART. 7. - Dans la quinzaine de la distribution des affaires, chaque bureau terminera son travail et le remettra au ministre de la justice.
Le ministre l'examinera et en fera la base du rapport qu'il soumettra aux Consuls avant la fin de la décade suivante.

ART. 8. - Le ministre de la justice est autorisé à prendre les mesures nécessaires pour régulariser et activer le travail des bureaux.
Il prononcera sur les difficultés relatives à l'instruction.

ART. 9. - Les ministres de la justice et de la police sont chargés, chacun pour ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté, qui sera inséré au Bulletin des lois.


Paris, 26 février 1800

Au citoyen Boulay  (de la Meurthe), président de la section de législation au Conseil d'État

Le projet de loi sur les passe-ports à l'étranger, délibéré par le Conseil d'État dans la séance du 5 ventôse, n'est pas entièrement conforme aux vues des Consuls: ils ont différé d'en approuver la rédaction.

La section de législation est invitée à s'occuper de nouveau de cet objet, et à examiner :

1° Si la transmission d'une copie non authentique à l'agent de la République résidant hors du lieu porté par le passe-port est une précaution suffisante pour assurer que le porteur du passe-port s'est en effet rendu à sa destination;
2° S'il ne serait pas utile d'insérer dans la loi l'obligation à imposer aux ministres et agents de la République de transmettre au ministre des relations extérieures l'extrait du registre sur lequel ils inscrivent le nom des Français arrivés avec passe-ports dans les États de leur résidence;
3° S'il ne peut pas se présenter des circonstances où il paraîtrait utile au Gouvernement soit de rappeler tel individu absent en révoquant son passe-port, soit de généraliser ce rappel à l'égard de tous les Français qui auraient obtenu des passe-ports pour les États de telle ou telle puissance;
 4° Si, dans ce cas, la loi ne doit pas prescrire, pour garantir à l'absent la connaissance de son rappel, une signification à domicile, à la diligence des préfets;
5° Si, le Gouvernement ayant fixé, dans la signification du rappel, un délai pour la rentrée eu France, l'absence prolongée au delà de ce terme ne doit pas donner lieu au séquestre de tous les biens de l'absent après deux nouvelles significations, faites chacune à la distance d'un ou deux mois;
6° S'il n'est pas quelque moyen pénal d'atteindre un citoyen français qui, n'ayant aucune propriété et ne payant point de contribution directe, serait ou sorti sans passe-port, ou resté absent après l'expiration du temps déterminé pour lequel le passeport aurait été accordé, ou qui, étant sorti avec un passe-port et se trouvant encore dans ses délais, aurait été rappelé par le Gouvernement et n'aurait point obtempéré à ce rappel.

(Par ordre du Premier Consul)


Paris, 26 février 1800

Au citoyen Carnot, inspecteur général aux revues

Citoyen Inspecteur général, le premier Consul Bonaparte, m'ordonne de vous transmettre les propositions faites par le ministre de
la guerre de divers individus pour remplir des places d'inspecteurs et de sous-inspecteurs aux revues. L'intention du Premier consul est que, demain 8, vous lui fassiez parvenir, à midi, un nouveau tableau des personnes que vous et vos collègues les inspecteurs généraux jugerez propres à remplir les places vacantes d'inspecteurs et de sous-inspecteurs. Il désire que, dans les propositions qui lui seront faites, on ait égard à la probité bien constatée et certaine des individus, et qu'ensuite on considère la longueur de leurs services et ceux qu'ils ont pu rendre pendant la guerre actuelle. Il insiste surtout pour que la probité de ceux qui seront proposés ne puisse pas même être soupçonnée. Il est inutile de dire que c'est de ces choix que dépend l'utilité du corps.

(Par ordre du Premier Consul)


Paris, 27 février 1800

Au général Marescot, Premier inspecteur de l'arme du Génie

Le Premier consul désire, Citoyen Général, que vous lui fassiez un rapport, demain à midi, sur Ehrenbreitstein.

Lui présenter le meilleur plan que nous ayons.

Lui faire connaître le degré de résistance dont cette place est susceptible.

Et, enfin, traite la question, 1° s'il serait utile de raser la partie d'Ehrenbreistein qui regarde Coblentz, en traitant absolument cette place comme une tête de pont; 2° s'il nous serait avantageux de raser entièrement cette place.

(par ordre du Premier consul)


Paris, 28 février 1800

A M. l'amiral Mazarredo, ministre extraordinaire de Sa Majesté Catholique, à Paris

Monsieur, le premier consul a lu avec la plus grande attention le dernier mémoire que vous lui avez transmis, qui n'est que la répétition de ceux que vous lui avez remis précédemment. Il adopte, avec des modifications qui lui ont paru indispensables, une partie des idées que vous avez communiquées. Il a donné des ordres, à Brest, de sortir pour donner la chasse à l'escadre anglaise qui bloque ce port. Il est honteux qu'une escadre de 21 à 25 vaisseaux en bloque une de 35 à 40.

Le désir, réitéré dans toutes vos dépêches, de porter votre escadre dans la Méditerranée, décide le Premier consul à cette mesure, quels que soient les avantages qu'il aurait trouvés à tenter une expédition d'Irlande.

1° Les deux escadres réunies, l'escadre espagnole, au nombre de 15 vaisseaux, et l'escadre française, au nombre de 17, sortiront de Brest, donneront la chasse à l'escadre anglaise, et, dans la nuit, feront route droit sur Malte, sans s'arrêter en aucune manière, ni au Ferrol, ni à Cadix; elles seront jointes à Malte par quatre vaisseaux français et les trois frégates du même pavillon qui s'y trouvent.
Vingt-quatre-heures après que l'escadre combinée sera partie de Brest, un courrier portera l'ordre aux six vaisseaux du Ferrol de mettre voile et de se rendre à Cadix.

2° Les escadres combinées jetteront dans Malte les secours que l'escadre française aura à bord; après quoi, les deux escadres réunies se rendront aux îles d'Hyères, où les mesures seront prises pour les subsistances; elles ne séjourneront pas plus de deux ou trois jours dans la rade des îles d'Hyères, temps nécessaire pour débarquer leurs malades, recevoir quelques renforts d'équipage et des approvisionnements. De là elles se mettront en mouvement pour enlever Mahon, et opérer leur jonction avec l'escadre de Carthagène ou de Majorque,

3° Les vaisseaux du Ferrol se réuniront avec ceux de Cadix, et se rendront à Carthagène ou dans un port de Majorque, s'il en est que vous jugiez suffisamment sûr.

Si Sa Majesté Catholique a fait tous les préparatifs nécessaires, l'escadre trouvera également aux îles d'Hyères tous les secours en troupes de terre, en officier du génie ou de l'artillerie que vous pourrez désirer.

Le Premier consul me charge de vous faire connaître qu'il croit que cette expédition ne peut réussir qu'en y mettant de la célérité et en l'enveloppant du plus grand secret. Il  désire qu'on n'en fasse confidence qu'au plus petit nombre possible d'individus. Quelques indiscrétions ont déjà été commises.