Juin 1801
Paris, 1er juin 1807
A M. Gaudin
Monsieur Gaudin, vous trouverez ci-joint la copie de lettres patentes
tentes qui ont été données en communication au Sénat. Mon intentioi est que la dotation (lu duché de Danzig soit prise parmi les domaine qui ont été réservés dans les États de Parme et de Plaisance par moi décret du 30 mars 1806. Il faut en conséquence vous occuper sur. le-champ de mettre en vente pour 2 millions 500,000 francs desdiù domaines, dont le produit sera employé à acheter une propriété ayani une belle habitation, produisant 100,000 francs nets et située dans Pancienne France, sur la Loire, sur la Seine ou sur la Saône. Comme les payements des ventes ne- correspondront peut-être point à ceux que vous aurez à faire pour cette acquisition , les fonds seront faits par la caisse d'amortissement, à laquelle on accordera des intérêts convenables et qui se remboursera au fur et à mesure des ventes, Je ne sais pas si nous avons encore dans le Poitou, la Normandie, la Bretagne, la Bourgogne ou la Champagne, des domaines nationaux qu'on puisse employer à cette opération. Vous sentez que cela serait fort avantageux, puisque le trésor public en recevrait promptement le prix. S'il était nécessaire, pour compléter cette dotation en do. maines, d'y joindre une portion de forêts, cela ne serait pas une difficulté. L'important est d'avoir une belle maison dans l'étendue des arrondissements que j'ai désignés, ou dans les départements qui envi- ronnent Paris et qui me paraissent également convenables. On achè- terait ensuite à proximité les propriétés nécessaires pour compléter le revenu que j'ai fixé. S'il n'y a pas dans les domaines nationaux de possessions de cette nature, vous ne manquerez pas d'offres : il y a beaucoup de propriétaires de grandes terres qui cherchent à s'en défaire. Vous vérifierez si, par exemple, llàl. de Vintimille ne sont pas dans l'intention de vendre une grande terre qu'ils possèdent aux environs de Caen. Il me conviendrait assez qu'un établissement de cette nature fût formé dans le voisinage de cette ville. On pourrait aussi traiter avec M'O de Sérent pour une terre qu'elle a auprès d'An- gers. Prenez aussi des informations sur le chàteau de Richelieu, dont j'ai arrêté la démolition. Aussitôt qu'on saura que vous faites de telles recherches, les propositions ne vous manqueront pas. Ne perdez pas de vue que mon intention est que, indépendamment d'une belle mai-
son, la propriété qui constituera le duché rende 100,000 francs de
rente nets.
Ainsi occupez-vous sans délai de chercher d'abord s'il existe dans' les domaines nationaux un beau chàteau situé comme je le désire; il devrait être préféré, puisque ce serait l'avantage du trésor public. A défaut d'un chàteau national, cherchez une terre de particulier. Comme tous les duchés d'Italie se réalisent en argent et que les remplacements
CORRESPONDANCE DE NAPOLÉON l". - 1.807. 305
doivent se faire en France, je puis avoir besoin dans quelques mois d'une vingtaine de terres pour les duchés dont je disposerai. Je désire que vous établissiez un bureau de recherches pour cet objet, afin que, le moment arrivant, vous ayez sous la main un travail tout prêt. il serait à désirer de placer beaucoup de duchés en Normandie, en Bretagne et en Poitou. Ce sont des pays où les fondations de cette nature peuvent avoir le plus d'utilité.
.12708. - A L'INIPÉRATRICE.
Danzig, 2 juin 1807.
Mon amie, j'apprends ton arrivée à la Malmaison. Je n'ai pas de lettres de toi; je suis fiché contre Hortense; elle ne m'écrit pas un mot, Tout ce que tu me dis d'elle me peine. Comment n'as-tu pas pu un peu la distraire? Tu pleures! J'espère que tu prendras sur toi afin que je ne te trouve pas toute triste.
Je suis à Danzig depuis deux jours; le temps est fort beau; je me porte bien. Je pense plus à toi que tu ne penses à un absent.
Adieu, mon amie; mille choses aimables. Fais passer cette lettre
à Hortense.
12709. - A LA REINE DE HOLLANDE.
Danzig, 2 juin 1807.
11a Fille, vous ne m'avez pas écrit un mot, dans votre juste et grande douleur. Vous avez tout oublié, comme si vous n'aviez pas encore des pertes à faire. L'on dit que vous n'aimez plus rien, que vous êtes indifférente à tout; je m'en aperçois à votre silence. Cela n'est pas bien, Hortense! ce n'est pas ce que vous vous promettiez. Voire fils était tout pour vous. Votre mère et moi ne sommes donc rien! Si j'avais été à la Malmaison, j'aurais partagé votre peine, mais j'aurais voulu aussi que vous vous rendissiez à vos meilleurs amis.
Adieu, ma fille; soyez gaie : il faut se résigner. Portez-vous bien, pour remplir tous vos devoirs. Ma femme est toute triste de votre état; ne lui faites plus de chagrin.
Voire affectionné père.
A M. CANIBACÉRÈS.
Danzig, 2 juin 1807.
Mon Cousin, je suis venu passer deux jours à Danzig, que j'ai employés à voir la ville et à donner différents ordres. Je compte être de retour à Finkenstein ce soir-
NApoi.ùo\'5c,.
Comm. par M. le due de Cambad-rès.
(En mi uute aux Arcb. de l'Emp.)
*12711. - A M. DE TALLEYRAND.
Danzig, 2 juin 1807.
Monsieur le Prince de Bénévent, j'irai probablement coucher ce soir à Marienburg pour être demain à Finkenstein. Je pense que vous ferez, bien d'écrire à Gardanne de ne pas attendre autre chose pour partir pour la Perse. Chargez-le seulement de dépêches pour donner à Sebastiani des nouvelles de l'ambassadeur turc.
NAPOLÉON.
Archives des affaires étrangères.
(E'u winuteau% Arch.
122712. - AU GRAND-DUC HÉRÉDITAIRE DE BADE.
Danzig, 2 juin 1807.
Mon Fils, partez pour vous rendre chez vous; pressez vous-même' pour renforcer vos troupes en recrues, pour réparer les pertes faites. Envoyez un nouveau régiment de cavalerie et deux nouveaux régi- ments d'infanterie, afin d'avoir un contingent de troupes proportionné
à votre rang.
Vers les premiers jours de juillet, si vous êtes bien portant, vous pourrez revenir à l'armée.
NAPOLÉON.
Archâes de l'Empire.
12713. - A L'IMPÉRATRICE.
àlarienburj, 2 juin 1807.
J'ai couché aujourd'hui à Marienburg. J'ai quitté hier Danzig. Ma@ santé est fort bonne. Toutes les lettres qui viennent de Saint-Cloud, disent que tu pleures toujours; ce n'est pas bien : il faut se bien por- ter et être contente.
12717. - A M. DE CHAMPAGNY.
Finkenstein, 4 juin 1807.
Monsieur Champagny, depuis vingt ans il s'est manifesté une ma- ladie appelée croup, qui enlève beaucoup d'enfants dans le nord dE PEurope. Depuis quelques années ellese propage en France. Nous désirons que vous proposiez un prix de 12,000 francs, qui sera donné
CORRESPONDANCE DE NAPOLÉON 1-. 1- 1807. Hortense est toujours mal; ce que tu m'en écris fait pitié. Adieu, mon amie; crois à tous les sentiments que je te porte.
NAPOLÉON.
12714. - A M. CAMBACÉRÉS.
Marienburg, 3 juin 1807.
Mon Cousin, je reçois votre lettre du 25 mai. L'importante place de Neisse en Silésie a capitulé. BientÔt le prince Jérôme aura achevé la conquête de toute la Silésie.
12715. - A M. FOUCHÉ.
Marienburg, 3 juin 1807.
Je recois votre lettre du 12)5 mai. Je vois avec plaisir la bonne con- duite des habitants de Riaillé. L'impudence de cette bande de bri- gands est extraordinaire. Il faut en suivre la marche avec beaucoup d'attention, afin de la détruire.
Il faut avoir grand soin que les demoiselles Saumaun ne rentrent plus dans la Lozère.
Faites-moi connaître, je vous prie, comment a pris l'évêque, à Montpellier, avec les protestants et avec les catholiques.
au médecin auteur du meilleur mémoire sur cette maladie et sur la manière de la traiter.
NAPOLÉON.
Comm. par %B I. de Champagny et NI. de Montalivet.
(En miauw aux Arch. de l'Emp.)
12718. - AU VICE-A.NIIRAL DECRÈS.
Finkenstein, 4 juin 1807.
Je recois votre lettre du 125. Xai 5 vaisseaux à deux ou trois ponts à Toulon; il ne faut donc pas laisser bloquer la ville par 3 vaisseaux., Si les Anglais s'obstinent au blocus, il faut verser les équipages dés frégates sur les vaisseaux, et attaquer l'ennemi dans une circonstance favorable.
Je recois votre lettre du 12)1 mai. J'ai toujours regardé comme un très-grand malheur que toutes les subsistances de l'Empire se trou- vassent dans une rnéme main, et que la mort d'un seul homme dût me donner de l'inquiétude sur la sûreté du service des vivres de terre et de mer, surtout quand cet entrepreneur est un homme aussi indé- chiffrable que M. Vanierberglie, qui, non content d'avoir à régir les affaires d'une aussi immense entreprise, va se jeter dans des opérations de commerce avec l'Espagne, etc. Mori-4ntention bien positive est donc que M. Vanlerberghe ne soit plus chargé du service, et que, puisque son marché expire, vous en passiez un avec un autre individu.
Le projet que vous présentez d'établir une régie pour.un an et d'en revenir ensuite à un entrepreneur est le plus mauvais de tous, parce que je perdrais trois millions en recevant les magasins de M. Vanler- berghe, j'en perdrais trois autres en les remettant à une autre corn- pagnie. Voilà ce que l'expérience m'a prouvé. Il faut qu'à M. Vanler- berghe soit substitué un autre entrepreneur, et que les magasins de M. Vanlerberghe soient remis à une autre compagnie.
NAPOLÉON.
Archives de l'Empire.
12719. A M. DARU.
Finkenstein, 4 juin 1807.
Ni-lonsieur Daru, mon intention serait de faire une distribution par régiment, toutes les semaines , de 100 livres de tabac à fumer. Faites-
moi connaître où je pourrai prendre ce tabac, et faites-en faire des: approvisionnements à Elbing, Marienwerder'et Osterode. @,J
NAPOLÉON
Comm . par@ M. le'comte Daru.
(En ininuie aui'Arch. de l'Emp.) Wî_
12720. - DÉ CRET.
uin 1807. Finkenstein, 4 j'
NAPOLÉON, Empereur des Français, Roi d'Italie,
Voulant récompenser les services qui nous ont été rendus, par un grand nombre d'officiers polonais,
Avons décrété et décrétons ce qui suit
ARTICLE 1 er. - Des domaines royaux pour la valeur de vingt mil- lions de livres tournois seront tenus à notre disposition par la Com- mission du gouvernement polonais, pour être donnés en récompense et en toute propriété aux individus de l'armée polonaise qui nous ont
rendu le plus de services.
ART. 2. - L'état de ces domaines sera dressé dans l'espace de cinq jours et remis par le ministre de l'intérieur du gouvernement
polonais à M.; Vincent, notre commissaire près ce gouvernement,
nous réservant d'en faire d'ultérieures dispositions. i
'ART. 3. - La Commission du gouvernement polonais et notre
commissaire près d'elle sont chargés de l'exécution du présent décret.
AU MARECHAL KÈLLERINIANN,
COMMANDANT EN CHEF L'ARMÉE DI? RÉSERVE DU RHIN, A MAYENCE. Finkenstein, 4 juin 1807.
Mon Cousin, faites-moi connaître quelle est la situation de votre armée de réserve, le 200 régiment provisoire formé, ainsi que les régiments et bataillons de Magdeburg, Stettin, Hameln, etc. , présents sous les armes, et quels sont les conscrits annoncés de 1807 et de la réserve. Je désire que vous me fassiez là-dessus un travail dont j'ai besoin pour fixer mes idées.
Je ne vous parle pas de l'appel de la conscription de 1808, mon intention étant qu'aucuns ne viennent à l'armée, étant trop jeunes, mais qu'ils restent dans l'intérieur, où ils seront habillés, armés et exercés. Il ne faut pas les confondre avec les autres conscrits. Les enfants de dix-huit ans sont trop jeunes pour faire la guerre si loin. Pressez les gouverneurs auxquels vous avez envoyé de la cavalerie à pied de les monter promptement. Je vois avec plaisir que les 19" et 20e provisoires soient formés. Faites-les partir sans délai pour Berlin.
NAPoLÉo,\'5c,.
Archives de l'Empire.
12723. - A M. @FOUCHÈ'.
Finkenstein, 4juin 1807.
Je recois vos lettres des 26 et 27. Je vois avec plaisir la surveil- lance que vous exercez. Apprenez-moi bientôt que cette bande de voleurs est détruite.
Le nommé Ogier, colonel de cavalerie de l'ancien régime, le
nommé Simon, ancien greffier de la Table de marbre, Dubouzet, ancien colonel du régiment de Pen thiè vre-c aval erie , une soi-disant baronne de Lauterbourg, sont des mauvais sujets qui colportent de mauvais bruits dans Paris. Faites les conduire par la. gendar- merie à quarante lieues de Paris, où ils seront en surveillance dans quelque petite commune, soit de Bourgogne, soit de Champagne, soit de Lorraine.
12724. - A 11. BIGOT DE PRÉIAMENEU,
PlIÉSIDENT DE LA SECTION DE LÉGISLATION AU CONSEIL D'ÉTAT. Finkenstein, 5 juin 180j.
Monsieur Bigot de Préameneu, il est à votre connaissance qu@ beucoup de communes de notre empire ont un revenu qui surpassi leurs besoins. Un grand nombre de villes ayant perdu tous leur biens pendant la révolution, nous avons établi, par cette considéra. tion, des octrois municipaux. Cette mesure a été 8énéralisée, et ell(
a porté non-seulement sur les communes qui avaient éprouvé de.@ pertes, mais aussi sur celles qui, ayant conservé leurs propriétés, Oui fait payer leurs dettes à l'État, se sont affranchies du logement et du casernement et de divers autres services que l'usage avait mis à leur charge, et qui se sont ainsi trouvées avoir plus de revenus qu'avant
la révolution, en même temps qu'elles étaient déchargées de plusieurs dépenses considérables. Nous avons toujours considéré les inconvé- nients de cette inégalité comme une suite naturelle des événements qui se sont passés. Mais, si nous avons conçu l'espérance, justifiée par plusieurs villes, que ces fonds, bien administrés, serviraient à améliorer les établissements qui existent et à en fonder de' nou- veaux, nous n'avons jamais entendu que ce surcroît de revenus occa- sionnerait un surcroît de dépenses inutiles. La commune de Dole paraît être du nombre de celles dont les recettes excèdent de beau- coup les dépenses ; mais elle est aussi , par sa situation , l'une des plus susceptibles d'embelli sseni e nts , de travaux et d'établi ssements utiles. Le sous-préfet a censuré l'emploi de ses fonds et a dénoncé sa comptabilité. Notre intention est que, conformément au règle- ment du 11 juin 1806, une commission du Conseil, dont nous
vous nommons président, vérifie les faits, fasse venir à Paris, si elle le juge convenable, le sous-préfet et le maire, et porte la plus grande attention àéclairer la comptabilité de la ville de Dole. Les lois qui régissent l'Etat doivent être exécutées avec rigueur, soit envers les dilapidateurs, soit envers les administrateurs qui emploieraient les deniers confiés à leur administration à se faire des partisans au lieu de les consacrer ii des établissements avantageux aux communes. Le sous-préfet a fait son devoir en donnant son opinion à ses supérieurs sur les abus qu'il croyait apercevoir, mais il s'en est écarté en la manifestant par un écrit rendu publie. Celui qui a imprimé le pre- mier, qui a invoqué l'opinion publique dans une simple affdire d'ad-
I.ministration, et qui a donné à ses démarches le caractère d'une ani- mosité personnelle, a eu un tort très-grave. Il convient que vous
vous attachiez à établir si ce tort appartient au sous préfet ou au maire. Il convient aussi que votre rapport soit fait de manière qu'il puisse être imprimé pour servir à prévenir des écarts, dont il y a déjà trop d'exemples, et ces querelles publiques qui ne tendent qu'à aigriÉ les citoyens les uns contre les autres et qui to.urnent toujours au détriment de l'administration.
NAPOLÉON.
Comm. par AI- la baronne de Nougarède de Fayet.
1272,5. - A M. DE TALLEYRAND.
rinkenstein, 5 juin 1807.
Monsieur le Prince de Bénévent, donnez ordre à mon ministre en Perse de partir sans délai et de s'y rendre le plus rapidement pos- sible. Envoyez-lui vos dépêches pour Constantinople.
Faites connaître à M. Sebastiani que, pour mes intérêts , il est nécessaire qu'il reste encore à Constantinople.
NAPOLÉON.
Archives des affaires étrangères.
(En iaute aux Arch. de l'Emp.)
12726. - DÉCRET.
Camp impérial de Finkenstein, 5 juin 1801.
ARTICLE ler. .- Les habitants de Marienburg dont les maisons auront été ou seront démolies pour les fortifications de la place seront indemnisés en biens royaux.
ART'. 2. @ La chambre de Marienwerder nommera des commis- saires qui, concurremment avec les experts nommés par le commis- saire des guerres de la place , estimeront les maisons démolies et terrains occupés par les fortifications.
ART. 3. - La chambre de Marienwerder présentera à notre intendant général un état des biens royaux situés dans son arrondis- sement qui pourraient être accordés en indemnité desdites maisons et terrains.
ART. 4. - Le major général et l'intendant général de l'armée sont chargés de l'exécution du présent décret.
12727. - A M. DARU.
Fitikenstein, 5 juin 1807.
Monsieur Daru, la chambre de Marienwerder sera divisée en trois sections : une résidera à Alarienwerder, une à Danzig et la troisième à Elbing, chacune ayant le contrôle et l'autorité sur l'arrondissement dépendant de ces villes. Il faut faire part de ces dispositions au géné- ral Rapp, pour qu'il fasse venir, par le moyen de la chambre qui résidera à Danzig, ce qui est nécessaire pour l'approvisionnement de cette place.
NAIIOLÙO.\'5c'.
Comm. par M. le comte Daru. (En ininule aux Arch. de 1'Emp.)
12728. - AU GÉNÉRAL RAPP, GOUVERNEUR DE DANZIG.
Ilinkenstein, 5 juin 1807.
Il est possible que, le 10, je fasse faire un mouvement à l'armée. Je n ai pas besoin d'appeler votre attention sur votre place. Vous ne devez pas perdre de vue qu'elle peut être investie d'un moment à l'autre. L'en- nemi est parfaitement servi en espions. S'il savait que le Haàelsberg n'est pas rétabli et que vous n'êtes pas approvisionné en vivres ni en munitions, il serait possible qu'il fit un mouvement sur vous.- Il4aut donc que vous alliez deux fois par jour sur les travaux du Higelsbe'rg, afin de voir par vous-même; que l'on rétablisse les remparts , les blockhaus, les chemins couverts, les palissades; que l'on efface nos tranchées, que l'on rentre toute rartillerie dans la place; que l'on fasse venir 2,000 boeufs de la Poméranie; que l'on ait deux millions de car- .touches, cent milliers de poudre et 2,000 fusils; que les forts qui êsont sur mer soient garnis de mortiers et de canons pour battre les bâtiments ennemis qui voudraient s'approcher; que des signaux soient @établis, afin que vous sachiez ce qui se passe en mer et que vous p1aissiez correspondre entre la place et le ïVeichselinünde.
Huit régiments provisoires, formant 6,000 hommes au moins, vont arriver. Il arrivera, indépendamment de cela, beaucoup de monde des dépôts, et des traînards. Il faut donc avoir des fusils pour en donner à ceux qui n'en ont pas.
e, Le bataillon des marins de la Garde va venir, de manière que vous ,'aurez près de 600 marins. Ils feront le service dans la rade, et, dans le besoin, celui de canonniers.
Il faut faire choisir et armer sans délai, avec les caronades que ron a prises sur la corvette anglaise, deux grosses péniches pour croiser à l'embouchure de la rivière. Faites venir chez vous les offi-
ciers de la marine de la Garde qui ont été à Elbing, pour leur dire de chercher quatre bàtiments en forme de péniche, propres à navi- guer. sur le Frische-Haff, qui, avec les quatre déjà armés, formeront une flottille de huit bàtiments, qui pourra attaquer les hàtiments ennemis en croisière sur le Haff. Comme le bataillon des marins de la Garde arrive sous très-peu de jours, ils seront en nombre suf- fisant pour armer ces bàtiments et fournir un bon nombre pour le service de la place.
Il faut se défaire de. tous les officiers prussiens et russes qui peuvent se trouver dans la place, car, du moment qu'il y aura un mouvement, toute communication sera coupée. Il est donc très- important que le bàtiment qui reste encore parte sans délai.
Il faut former votre conseil, le réunir tous les jours, le composer du commissaire ordonnateur qui reste dans la place, du commandant d'artillerie et de celui du génie, afin d'aviser à tous les besoins de la place.
Il faut faire défaire les deux ponts et en faire faire un en place en face de la ville, et faire travailler sans délai à la tète de ce pont.
Tout cela est de la plus grande importance.
Il faut réunir tous les malades prussiens et russes dans les envi- rons, soit dans des maisons de campagne, soit dans une grosse abbaye à trois ou quatre lieues de la place.
NAPOLÉON.
Archives de l'Empire.
1271229. - AU MARÉCHAL BERNADOTTE,
Finkenstein, 5 juin 1807, 2 heures après midi
Mon Cousin, le maréchal Ney me mande qu'il a été attaqué aujourd'hui à six heures du matin. Est-ce une affaire comme la vôtre ou est-ce une attaque sérieuse? C'est ce que je saurai dans quelques heures. Je me hàte cependant de vous en prévenir pour que vous vous mettiez en mesure.
J'ai ordonné la réunion de toute ma'cavalerie; tout va être en mouvement.
Je suppose que d'ici à ce soir je vous instruirai de ce que vous aurez à faire. Quoiqu'il soit peu' probable qu'après avoir laissé prendre Danzig l'ennemi tente une affaire générale, cependant il faut. penser que, s'il veut faire quelque chose, son attaque sérieuse sera sur Guttstadi.
12731. - AU MARÉCHAL SOULT, A SPORTHENFN.
Finkenstein, 5 juin 1807.
Mon Cousin, je reçois au moment nième, à deux heures après midi, une lettre du maréchal Ney qui m'écrit, i sept heures du matin, que son avant-garde a été attaquée à six heures à Altkirch; il a dû vous en prévenir. Il paraît qu'hier le maréchal prince de Pente- Corvo a été aussi attaqué légèrement. Qu'est-ce que tout ceci veut dire? Tout porte à penser qu'il y a un mouvement chez l'ennemi, quoiqu'il soit absurde de sa part d'engager une affaire générale,
@'aujourd'hui que Danzig est pris. Je viens toutefois d'ordonner que demain, à midi, toute la cavalerie soit réunie. Je n'ai pas de non- velles de vous, ce qui nie fait supposer que vous n'avez pas été attaqué.
Je serais fort aise que l'ennemi voulût nous éviter d'aller à lui. Ilon projet était de me mettre en mouvement le 10. J'ai fait toutes mes dispositious de magasins pour aller à sa rencontre à cette
@'époque.
J'imagine que vous aurez appelé'à vous toute votre cavalerie légère. Je vous prie, si le maréchal Ney est obligé d'évacuer Guttstadt, et
Aans ce cas il se retirera sur Deppen, de porter votre attention sur sa gauche, et de favoriser sa retraite, si tant est qu'il soit contraint ,à la faire.
12730. - AU MARÉCHAL DAVOUT, A OSTERODE.
Finkenstein, 5 juin 1807, '2 heures après midi.
Mon Cousin, je reçois au moment même une lettre du maréchal Ney qui m'annonce qu'il a été attaqué ce matin à six heures. Est-ce une attaque sérieuse ou n'est-ce qu'une escarmouche? Il faut toute- fois se préparer. Le maréchal Ney, s'il voit qu'il ait affaire à des forces trop considérables, doit se retirer sur Deppen. Vous avez sans doute déjà appelé voire cavalerie légère. Dans le cas de la retraite du maréchal Ney, je désire que vous souteniez son flanc droit et que vous preniez toutes les mesures pour que son mouvement sur Dep- pen se fasse sans désordre et sans perte. J'ai ordonné la réunion de toute la cavalerie, Je vous enverrai des ordres cette nuit. Envoyez quelqu'un à Guttstadt et instruisez-moi de tout ce que vous savez.
Je vous remercie sur ce que vous me dites relativement à la mort du petit Napoléon.
Je compte beaucoup sur vous et vos braves.
Mettez à l'ordre que Neisse a capitulé; vous sentez rimportancç de cette place. Faites-le sentir.
Dépôt de la guerre.
(En minute au. Arch. de l'Emp.)
12732. A M. CAMBACÉRÈS.
Finkensiein, 6 juin 1807, 6 heures du matin.
Mon Cousin, je recois votre lettre du 28. Les deux armées sont en manceuvres. L'ennemi s'est mis en mouvement. Hier 5, à six heures du matin, on a attaqué la. tète de pont de Spanden sur la Passarge, que défendait la brigade du général Frère. Cinq régiments russes, revenus trois fois à l'assaut, ont été constamment repoussés et ont laissé 5 à 600 morts dans les abatis. Le prince de Ponte- Corvo,- qui, de derrière, observait la 'Position de l'ennemi, a recu une balle* au col, qui l'a frappé légèrement. Ait même moment, l'ennemi à attaqué la tête de pont de Sporthenen, que défendait le général
Ferey, du corps du maréchal Soult. L'ennemi est venu deux fois à' l'assaut et a laissé 1,500 morts dans les abatis. Plusieurs colonels
russes sont restés prisonnie.rs entre nos mains.
Le maréchal Ney a été attaqué au même moment; toutes les fois 'que l'ennemi a voulu monter à ses positions, il a été repoussé avec une énorme perte; et, conformément à mes dispositions générales,; ce maréchal s'est porté sur la Passarge, à Deppen, du moment qu'il a été assuré que l'ennemi avait toutes ses forces en mouvement. Mà réserves sont en marche, et, quand vous lirez ceci, de grands év'é- nements auront en lieu. Je vous instruis de tous ces détails, qui ne seraient pas bons à faire connaître, pour que, s'il arrivait de,faui bruits, vous puissiez les repousser. Si cependant ceci percait et.qài l'impatience, du public fût trop forte, vous pourriez mettre ces détaik dans le Journal de l'Empire, sous le titre d'une lettre particulièreï écrite, de Thorn ou de Danzig,, par un officier de l'armée. @ Mais
tant qu'on ne saura rien, il vaut beaucoup @ mieux que l'on
prenne que tout est fini en même temps que l'on saura que cela a a commencé.
Communiquez cette lettre au ministre de la police; toute autre' confidence est inutile. Vous pouvez du reste être sans inquiétude. Il
paraît que l'ennemi ne sait ce qu'il fait, puisque, après avoir laissé prendre Danzig, il s'enfourne sous des positions retranchées.
NAPOLÉON.
Comm. par M. le duc de Cambacérès.
(En win.te au. Areb. de l'Emp.)
19733. - A M. FOUCHÉ.
Finkenstein, 6 juin 1807, 6 heures du matin.
Je charge 11. l'archichancelier de vous communiquer ma lettre de ce jour, parce qu'il est convenable que vous soyez prévenu. Vous vous conformerez au sens de nia lettre, en tenant cela secret, s'il est possible. Voyez souvent l'Impératrice pour empêcher les mauvaises nouvelles d'arriver jusqu'à elle. Huit jours après que vous aurez reçu cette lettre, tout sera fini. Tout me porte à penser que cela ira au miéux.'Je vous instruirai ainsi tous les soirs, jusqu'à ce que j'aie le temps :d'ordonner la rédaction d'un bulletin, qu'il est d'ailleurs convenable de ne faire que lorsque tout sera fini.
NAPOLÉON.
Archives de l'Empire.
19-734. - AU GENÉRAL VICTOR,
COMMANDANT LE SIÉGE DEVANT GRAUDENZ.
Finkenstein, 6 juin 1807.
Je vous écris par les relais de la Garde, parce qu'il est possible klue l'ordre vous arrive par cette voie plus tôt que par le courrier que @ous expédie le major général. Un quart d'heure après la réception @du présent Ordre, partez dans la plus grande diligence, et arrivez au
uartier général aujourd'hui de bonne heure, ayant un commande- Ment im.po.rtant à vous donner. Dirigez vos chevaux et vos bagages, à, double marche, sur Finkenstein. Laissez le commandement du @%iége au général de division Rouyer; recommandez-lui de prendre ,des mesures extraordinaires pour faire filer sur Marienwerder toutes jes barques qui sont entre Thorn et Graudenz.
" L'ennemi a attaqué hier les 6e, lie et le, corps; il a été;partout -repoussé avec d'énormes pertes. Les nôtres étaient partout retranchés Adans des têtes de pont. Le prince de Ponte-Corvo a été touché d'une laile morte au col. Cette blessure est légère, mais les chirurgiens
Î
ént pensé qu'elle exigeait du repos.
ORDRE POUR LE GRAND MARÉCHAL.
Finkenstein, 6 juin 1807.
Tous mes gros bagages et objets inutiles se rendront à Danzig et partiront ce soir même.
Mon petit quartier général de guerre se rendra sur-le-champ à Saalfeld.
Le petit service d'avant-garde se rendra sur-le-champ à Mohrungen. On enverra au galop l'ordre à l'escadron de la Garde et à la
brigade des chevaux de selle de se porter entre les deux lacs, à Seegerswalde.
Les chevaux de voiture resteront à Saalfeld pour me mener jusqu`4 Seegerswalde, où je monterai à cheval; de sorte que ce soir il ne reste plus rien au chàteau de Finkenstein.
Toute ma Garde à cheval, ainsi que l'artillerie qui y est attachéa,,
se mettront sur-le-champ en marche pour se rendre à Saalfeld; l'infanterie se mettra également en marche pour y arriver sana délai.
NAPOLÉON.
Archives de l'Empire.
12736. AU MARÉCHAL NEY.
Finkenstein, 6 juin 1807, midi.
Mon Cousin, l'officier par lequel vous avez expédié hier soir vos dépêches au major général vient d'arriver et m'a fait connaître que vous aviez pris position entre Deppen.et Queetz, auprès du village d'Ankendorf. Depuis hier, 11 le maréchal Mortier, 21 la réserve d'infanterie, 30 la réserve de cavalerie, sont en mouvement. Il est donc convenable de tenir dans votre position, si cela vous paraît prudent, et, lorsque vous vous retirerez, de marcher le plus lente- ment possible, d'abord derrière Deppen et ensuite derrière les lacs que je vous ai fait désigner.
Je réunis toutes mes forces. Mon plan d'opération dépend de l'a position que vous et le maréchal Soult vous aurez lorsque je serai en mesure. Au reste, il faut au moins tout le jour de demain. f
Je suis très-satisfait de tout ce que vous nie dites de votre corps d'armée, et je ne puis que vous témoigner ma satisfaction sur le sang-froid et l'intrépidité de toutes vos dispositions. Vous ne sauriez écrire trop souvent. Vous sentez qu'il me tarde de me retrouver au milieu des combattants; mais j'y serai sous peu de jours, et il faut espérer que tout cela mettra fin aux circonstances actuelles.
Je regrette bien vivement ce pauvre général Roguet; mais enfin il est mort sur le lit d'honneur.
L'importante place de Neisse a capitulé.
NAPOLÉON.
Dépôt de la guerre.
(En minute aux Arch. de l'Emp.)
19737. - AU GÉNÉRAL RAPP.
Finkenstoin, 6 juin 1 Sol.
Nous sommes en mouvement. Je vous ai fait écrire hier par Bertrand, et précédemment je vous avais écrit moi-même,
Prenez toutes vos précautions pour mettre la place en bon état. Surtoutfaites filer sur Marienburg les subsistances; 8 ou 10,000 quin- taux ne sont pas trop. Envoyez surtout de la farine. Bien n'est impor- tant comme cet objet, que je vous recommande.
Je vous ai laissé toutes vos troupes. Envoyez un général à l'île de iXogat pour commander dans cette île, avec de l'infanterie, de la cavalerie et, si vous en avez, une on deux pièces de canon. Quelques centaines d'hommes doivent suffire pour cela; ils doivent s'entendre avec le commandant de Marienburg, afin, en tout événement, de conserver ce pont.
J'ai ordonné à l'artillerie d'armer Marienburg; c'est très-iniportant. M. Talleyrand se rend à Danzig. Vous lui ferez donner une garde
et vous aurez soin de le traiter en prince.
Il serait à désirer que le général la Riboisière me rejoignît sans délai, ainsi que les autres officiers de mon état-major qui peuvent
être restés à Danzig.
Placez une garde à la tête du pont de Dirschau pour que quelques malveillants ne le brûlent pas. Envoyez-moi souvent de vos nouvelles. Je ne saurais trop vous recommander de correspondre avec le com- mandant de Marienburg et même avec le gouverneur de Thorn.
Tous les détachements et hommes isolés qui viendraient à passer
à Danzig , gardez-les. Ils pourront vous servir à accroître votre Sarnison.
NAPOLÉON.
Archives de l'Empire.
12738. AU MARÉCHAL BERTHIER.
Finkeristein, 6 juin 1807.
Le colonel Clément se rendra à Marieniverder pour y prendre le
c o m m a n d e m e n t d e l a v i l l e , d e l a t ê t e d e p o n t , e t v e i l l e r à l a c o n - s e r v a t i o n d e s m a g a s i n s e t d u p o n t .
NAPOLÉON.
Envoyer l'ordre directement à la division polonaise du 8e corps, qui arrive par MarieDwerder, de se diriger le plus tôt possible sur Saalfeld.
Dépôt de la guerrê.
(Eu mluute au. Arch. de l'Exup.)
12739. - AU GÉNÉRAL LENIAROIS.
Finkenstein, 6 juin 1807, 5 heures du soir.
Monsieur le Général Lemarois, nous sommes en plein mouvement;@ l'ennemi a commencé les hostilités; tous les cantonnements sont levés, et bientôt des affaires importantes vont avoir lieu. Toutes Ies@ affaires d'avant-garde jusqu'à cette heure sont à notre avantage. Écrivez-moi ce qui se passe de votre côté. Je pense qu'il serait plus prudent de faire passer désormais les courriers par la rive gauche de la Vistule. Organisez tous les dépôts et tous les moyens que vous avez, afin que, dans un cas imprévu, vous puissiez défendre Praga et vous faire honneur. Faites toujours passer les subsistances à force.
NAPOLÉON.
Comm. par AI. le comte Lemarois.
(En mir.ale aux Arch. de 1'Emp.)
21
127,110. AU MARÉCHAL BERTHIER. "b
Finkenstein, 6 mai 180î, 6 heures du soir.
Mon Cousin, donnez ordre que le 15e provisoire, qui demain arrive à .11arienwerder, se rende sans délai à Marienburg, où il tiendra garnison pour la défense de la place.
Expédiez un courrier au gouverneur de Thorn. Il est nécessairé!
q
'il veille avec attention à ce qu'aucun homme isolé ni aucun déta- u cheffient ne rejoigne plus l'armée. A moins d'un ordre spécial e vous, tout ce qui arrivera à Thorn doit s'y arrêter et augmen[erU@ garnison de la place. Recommandez à ce gouverneur de vous écrire tous les jours par mes courriers, et qu'il sache que ses lettres seront mises sous mes yeux. Pour plus de sûreté, il serait peut-être conve- nable de faire passer les courriers par la rive gauche.
Il faut que ce gouverneur fasse filer les subsistances à force sur Marienwerder, et qu'il porte une grande surveillance à mettre sa
place en bon état; qu'il active la marche des régiments provisoires et des détachements qui sont sur la route, de Posen.
Sa cavalerie doit faire des patrouilles, car il n'est pas impossible
que quelques Cosaques se glissent.
Il faut qu'il corresponde avec le commandant du blocus de Graudenz, et qu'il donne les nouvelles au général Lemarois, mon aide de camp, à Varsovie, afin de le mettre, au fait de ce qui est important. Il doit correspondre de même avec le gouverneur de Danzig. Je suppose que sa place sera armée de manière à résister à un coup de main.
NAPoLÉo,\'5c,.
Npôt dle la guerre.
(En minute aux Arch. de l'Emp.)
192741. - AU MARÉCHAL DAVOUT.
Finkenstein . 6 juin 1807, 8 heures du soir.
Mon Cousin, l'ennemi a été repoussé hier devant le prince de Ponte-Corvo et devant le maréchal Soult. Il a alors pris le parti de se dégarnir devant eux pour se porter avec plus de forces sur le maréchal Ney. Le maréchal Ney est vis-à-vis Deppen. Le prince de Ponte-Corvo et le maréchal Soult occupent encore leurs tètes de pont ordinaires. Dans cette situation de choses, vous comprenez facile- ment qu'il est bien urgent que vous soyez réuni à Osterode avec toutes vos forces et les deux divisions de dragons, à la rencontre desquelles il faut envoyer, et que vous puissiez appuyer ainsi la droite du maréchal Ney. Que fera l'ennemi"? Continuera-t-il à marcher sur Allenstein, quand nous occupons encore Deppen et Liebstadt? Tout cela peut donner lieu à des événements fort singuliers. Toute ma cavalerie et mon infanterie de réserve se réunissent à Saalfeld et
Mohrungen; moi-même je serai à Saalfeld dans une heure, bien désireux d'avoir de vos'nouvelles deux ou trois fois dans la nuit, s'il est possible. Il faut ne rien laisser à Allenstein et faire tout évacuer sur Marienwerder, car c'est par Marienwerder, Marienburg et Danzig qu'est nia ligne d'opération. L'ennemi manoeuvre comme si ma ligne éÉait sur Thorn. Vous aurez choisi des positions à Osterode, qui en offre de si avantageuses, pour retenir l'ennemi s'il avance jusque-là. Vous êtes l'extrémité de ma droite; jusqu'à cette heure mon intention est de pivoter sur vous. Je compte sur le courage de voire corps d'armée et sur votre fermeté; mais beaucoup de canons et de bonnes positions, afin, à tout événement, de gagner tout le temps possible.
Paris, 1 juin 1801
Au général Berthier, ministre de la guerre
Faites connaître, Citoyen Ministre, au Gouvernement cisalpin, qu'il est nécessaire d'organiser son armée d'une manière régulière; que je pense que deux demi-brigades légères, cinq de ligne et une de Polonais, un régiment de chasseurs et deux régiments de dragons, deux bataillons de sapeurs, un régiment d'artillerie à pied, seraient suffisants pour le premier moment. Deux ou trois généraux de division, sept ou huit de brigade, un de cavalerie et un du génie, et des capitaines du génie, suivraient également.
Chargez le général Vignolle de l'organisation de l'armée cisalpine, afin d'y rétablir l'ordre et la discipline.
Paris, 1 juin 1801
Au lieutenant général Saint-Cyr, à Ciudad Rodrigo
Les nouvelles d'Espagne m'instruisent, Citoyen général, que le prince de la Paix est entré en Portugal.
J'écris à l'ambassadeur pour lui faire connaître que mon intention est, ou que vous soyez chargé de la direction de la guerre, ou bien que l'on mette sous vos ordres 10,000 Espagnols et les 15,000 Français, et qu'avec ces deux corps réunis vous soyez chargé d'une opération particulière, telle que l'opération d'Oporto.
Dans l'un ou l'autre cas, vous vous acquitterez de votre mission d'une manière digne de vous.
Votre aide-de-camp m'a donné sur les troupes espagnoles des renseignements qui ne sont pas trop satisfaisants; ce qui m'a décidé à renforcer les corps français.
Indépendamment de deux premières colonnes formant 8,000 hommes, qui doivent être arrivées, deux bataillons des 24e légère et 44e de ligne, formant 2,500 hommes, doivent être près d'arriver; deux bataillons de la 96e, et trois de la 39e, formant 3, 000 hommes, doivent être dans ce moment-ci à Bayonne : ce qui porte le corps du général Leclerc à 15,000 hommes.
Les 3èmes bataillons des 24e, 44e, 96e, et trois bataillons de la 83e, les 2èmes des 92e et 93e, formant en tout près de 5,000 hommes, avec un bon train d'artillerie, seront à Bayonne dans les premiers jours de messidor, pour aller vous joindre, si cela est nécessaire.
Faites-moi connaître si vous croyez qu'il y ait besoin d'autres troupes.
Paris, 1er juin 1801
ARRÊTÉ
ARTICLE 1er. Il sera construit une batterie de six mortiers de 12 pouces à la Gomer, et trois ou quatre batteries, chacune de sis pièces de 24, avec des grils à boulets rouges, pour défendre l'entrée du port de Boulogne et le mettre à l'abri d'un bombardement par mer.
ART. 2. - Le ministre de la guerre est chargé de l'exécution du présent arrêté.
Paris, 1er juin 1801
ARRÊTÉ
ARTICLE 1er. - Il sera fait un fonds extraordinaire de 305,000 francs, pour être appliqué à la réparation et à la construction des jetées et estacades du port de Boulogne, et à la construction de trois parties de quais en charpente à claire-voie.
Il sera fait les dispositions les plus promptes pour rendre les anciens et les nouveaux quais de ce port facilement accessibles aux bâtiments de 8 à 12 pieds de tirant d'eau, sur une étendue d'environ 500 toises de développement.
ART. 2. - Le Ministre de la marine est chargé de pourvoir à la réparation et à la conservation de la jetée de l'ouest du port de Boulogne.
ART. 3. - Le ministre de la marine est chargé de l'exécution du présent arrêté.
Paris, 1 juin 1801
Au général Mortier, commandant la 1e division militaire
J'apprends, Citoyen Général, que le citoyen Artus, capitaine à la suite du 7e régiment de hussards, est arrêté pour avoir frappé une sentinelle qui exécutait sa consigne au théâtre du Vaudeville. Je vous prie de le faire traduire à un conseil militaire, pour y être puni selon la rigueur des lois.
Paris, 2 juin 1801
DÉCISION
J. Miot annonce qu'il a été nommé sous-inspecteur aux revues de la 23e division militaire par le conseiller d'État Miot. Il demande à être confirmé dans ce grade. | Renvoyé au ministre de la guerre pour annuler cette nomination, l'administrateur général n'ayant pas le droit de nommer à ce grade à des emplois militaires. |
Paris, 2 juin 1801
DÉCISION
Le général Decaen demande la place vacante au tribunal d'appel à Caen pour le citoyen Lasseret, jurisconsulte et suppléant au tribunal criminel du Calvados. | Renvoyé au consul Cambacérès pour me faire connaître si ce citoyen a les qualités requises. Je désirerais déférer à la demande du général Decaen, qui est un officier d'un grand mérite. |
Paris, 2 juin 1801
Au Citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures
Faites connaître, Citoyen Ministre, par un courrier extraordinaire, au citoyen Petiet, que le général Moncey est nommé lieutenant général commandant le corps des troupes françaises dans la Cisalpine.
Ce général, ainsi que celui qui commande en Piémont et en Ligurie, correspondent directement avec le ministre de la guerre; par là la place de général en chef de l'armée d'Italie se trouve supprimée.
Le citoyen Petiet fera connaître à la Commission de gouvernement que j'ai vu avec peine qu'un ramassis d'étrangers, Napolitains et Romains, avaient commis, des désordres à Milan et poussé des cris séditieux;
Que mon intention est que tous ces étrangers soient renvoyés chez eux, et que le bon peuple de la Cisalpine, dont je connais le patriotisme et la douceur de mœurs, ne soit plus troublé par ce grand nombre de gens sans aveu qui, depuis longtemps, y arrivent de tous les points de l'Italie; que c'est au ministre de la République à se concerter avec le général et le Gouvernement pour faire arrêter les individus qui ont trempé dans les complots, et que j'attends, par le retour du courrier, qu'il a provoqué du Gouvernement cisalpin un arrêté, publié et imprimé, qui ordonne le renvoi sous bonne escorte aux frontières, de la Cisalpine de tous les Napolitains et Romains; le général commandant l'armée d'observation du Midi leur donnera des passeports pour aller chez eux.
Je désire que le ministre Petiet et le général Moncey se réunissent pour former une liste des cinquante plus mauvais sujets français ou italiens qui ont fomenté les troubles, et les envoyer à Fenestrelle pour y être détenus jusqu'à nouvel ordre.
Paris, 2 juin 1801
Au lieutenant général Moncey, commandant par intérim l'armée d'Italie
J'ai reçu, Citoyen Général, votre dernière lettre, que m'a apportée un courrier extraordinaire.
J'approuve beaucoup la mesure que vous avez prise, en tant qu'elle est provisoire; mais il faut, en définitive, renvoyer tous les étrangers chez eux, et que le bon peuple de la Cisalpine ne soit plus tourmenté par ce grand nombre de gens sans aveu.
Les ministres de la guerre et des relations extérieures vous feront connaître la détermination du Gouvernement. Mais j'ai cru devoir vous dire moi-même que c'est sur votre sévère probité que je fonde principalement l'espoir du rétablissement de l'ordre et de l'administration dans l'armée et dans le beau pays où vous êtes.
Je vous salue affectueusement.
Paris, 5 juin 1801
DÉCISION
Rapport du ministre de la guerre relatif aux citoyens Clere, Gottmann, Guerain et Saint-Requier, officiers à la 98e demi-brigade. | Cette affaire ne paraît pas assez instruite. Avoir le rapport des généraux de division, de brigade, adjudants commandants et autres de l'état-major, à l'affaire des 30 frimaire et 3 nivôse, pour constater si le citoyen Gottmann a montré ou non de la lâcheté. Charger l'inspecteur du corps (officier général), ou bien le général commandant la division où il se trouve, d'interroger séparément le chef de brigade et trois ou quatre des principaux officiers qui ont pris part à la rédaction de l'adresse. Il sera fait un rapport de tous les faits qu'ils allégueront pour prouver ceux qu'ils allèguent dans l'adresse, savoir: immoralité, improbité et lâcheté. Faire demander au chef de brigade pourquoi il a souffert dans son corps une assemblée d'officiers contraire aux ordonnances et à la discipline. Il fera constater également s'il existait depuis longtemps une intimité entre le chef de brigade et le chef de bataillon. Lorsque tous ces interrogatoires seront faits, le chef de brigade et le citoyen Gottmann se rendront à Paris. |
Paris, 7 juin 1801
Au citoyen Forfait, ministre de la marine et des colonies
Vous trouverez ci-joint, Citoyen Ministre, une lettre que je reçois de l'amiral Bruix. Faites partir cette nuit un courrier extraordinaire pour lui faire connaître qu'il peut faire partir pour Cadix l'escadre sous les ordres du contre-amiral Bedout. (Jacques Bedout, 1751.1818, contre-amiral.)
Faites connaître au vice-amiral Truguet (Laurent-Jean-François, comte Truguet, 1752-1839, amiral), conseiller d'État, que je l'ai nommé pour commander une escadre (celle qui est destinée à apporter des secours à l'armée d'Égypte, mais qui deviendra inutile, après la capitulation de Menou. Il se prononcera contre la proclamation de l'Empire), et que je désire qu'il se tienne prêt à partir le plus tôt possible.
Paris, 9 juin 1801
Au général Berthier, ministre de la guerre
Tous les rapports qui arrivent de Düsseldorf, de Cassel et de Kehl, Citoyen Ministre, nous apprennent que les généraux commandant les 5e et 26e divisions militaires, après avoir évacué toute la droite droite du Rhin, y ont fait repasser plusieurs bataillons et ont fait réoccuper Düsseldorf, Ehrenbreitstein, Cassel et Kehl. Le Gouvernement ne sait à quoi attribuer une conduite aussi extraordinaire, et qui a pu autoriser ces généraux à prendre sur eux une démarche de cette importance. Comment n'avez-vous pas pris sur-le-champ des mesures pour vous y opposer, et comment n'en avez-vous pas instruit le Gouvernement ? Je désire que vous me fassiez, demain à midi, un rapport sur cet objet, en me remettant une copie des divers ordres émanés du ministère pour les généraux et des rapports qu'ils vous ont transmis.
Paris, 11 juin 1801
Au citoyen Chaptal, ministre de l'intérieur
Les Conseils ont pris connaissance, Citoyen Ministre, du règlement général que vous vous proposez d'adopter pour les collèges dépendants du Prytanée. Les dispositions de ce règlement leur ont paru quelquefois incomplètes et, sous d'autres rapports, susceptibles de modifications. Ils ont désiré que leurs observations vous fassent transmises, non comme exigeant de vous des changements indispensables, mais comme des idées que vous apprécierez et que vous mettrez en usage, si elles s'accordent avec vos vues.
DE L'ADMINISTRATION
Ils pensent, sur le premier titre, intitulé De l'administration qu'il convient,
1° De diviser le Prytanée en quatre sections, au lieu de trois, et d'établir, en conséquence, un quatrième collège à Saint-Germain;
2° D'énoncer que chacun de ces collèges sera composé de 900 élèves, et qu'il pourra y être admis jusqu'à 100 pensionnaires;
3° D'ajouter à l'article 4, indépendamment d'un directeur de chaque collège, un directeur des études, un économe et le nombre de maîtres de quartier nécessaire;
4° De ne pas faire recevoir de l'administration centrale le prix des pensions par le directeur, comme le porte l'article 6, mais par l'économe, qui en rendrait compte au directeur et à un conseil d'administration, où serait admis le directeur des études; ce conseil se tiendrait tous les trois mois, en présence d'un des membres de l'administration centrale;
5° De renvoyer ,à un autre titre les articles 15, 16 et 17, qui n'appartiennent point au titre de l'administration.
DE LA POLICE.
Les Consuls ont pensé que le titre intitulé Police est très-imparfait. Ils croient qu'il convient, pour le rendre complet, que vous preniez connaissance des règlements faits par le ministre de la guerre pour l'école militaire; la plupart de leurs dispositions s'appliquent naturellement aux établissements que vous organisez. Ces règlements, qui avaient tout prévu, ont reçu la sanction de l'expérience.
Les articles 22 et 30 du titre Police de votre règlement accordent aux élèves officiers la dénomination de capitaines, lieutenants ou sous-lieutenants. Il serait plus convenable d'échanger ces dénominations en celles de sergents et caporaux. Les élèves porteraient les distinctions de ces grades.
DE L'INSTRUCTION
Le titre De a paru insuffisant. Les consuls ont exprimé sur cet objet, Citoyen Ministre, des vues que je vais avoir l'honneur de vous faire connaître.
L'éducation devrait se diviser en deux grandes sections : la première, des enfants ayant moins de douze ans; la deuxième, de jeunes gens au-dessus de cet âge.
La première section recevrait une éducation commune; elle serait divisée en classes composées de 25 élèves, lesquelles se nommeraient première, seconde, troisième et, s'il y avait lieu, quatrième class. On apprendrait dans la première à lire, à écrire, à chiffrer, et les premiers éléments de la grammaire; dans la seconde, les quatre règles, l'orthographe et les principes de la langue latine; dans la troisième, les fractions, les parties plus élevées de l'arithmétique, celles des divers objets d'instruction pour lesquels le cours d'une année est insuffisant, le dessin, la danse et les armes. On distribuerait, de plus, entre les trois classes, pour exercer la mémoire des élèves, des leçons d'histoire naturelle et de géographie à leur portée, des fables françaises et latines, les premiers éléments de l'histoire ancienne et un recueil d'actions de vertu et d'héroïsme propre à leur inspirer des sentiments de patriotisme et de morale.
La seconde section, comprenant les jeunes gens au-dessus douze ans, se diviserait naturellement entre les élèves destinés, à la carrière civile, soit à la carrière militaire. L'inspecteur général, dans une inspection qui aurait lieu à cet effet, déterminerait cette division, d'après la déclaration des professeurs et le vœu manifesté par les parents.
Les élèves destinés à la carrière civile apprendraient les langues anciennes, principalement le latin, tout ce qui tient à la rhétorique et à la philosophie. Ils apprendraient accessoirement le premier volume du cours de mathématiques.
Les élèves destinés à la carrière militaire apprendraient particulièrement les quatre volumes qui forment le cours de mathématiques complet, un peu d'astronomie, le dessin, la fortification, la levée des plans, etc. On enseignerait aux plus avancés parmi eux les principes de la physique et de la chimie, les manœuvres du canon, etc. Les élèves composant chacune de ces divisions seraient distribués, dans l'ordre de leurs progrès, en trois ou quatre classes. On déterminerait, chaque année, la classe à laquelle chacun d'eux appartiendrait, et l'on pourrait alors, soit retenir dans la même classe, soit faire franchir la classe suivante à ceux des élèves dont les connaissances seraient en deçà ou au delà des connaissances nécessaires pour entrer dans la classe qui suivrait immédiatement.
Il importe que le règlement détermine d'une manière précise les objets d'enseignement qui seront affectés à chaque classe.
La formation d'une bibliothèque dans chacun des établissements est une disposition reconnue nécessaire; mais il paraît que 2,000 volumes seraient plus que suffisants. Le catalogue de chaque bibliothèque doit être imprimé à la suite du règlement.
DE LA SORTIE DES ÉLÈVES
Il manque à ce règlement un titre important que l'article 54 ne fait qu'indiquer : c'est celui de la sortie des élèves.
La République, s'étant chargée pendant plusieurs années de leur entretien et de leur éducation, ne peut pas les abandonner au moment le plus critique. Elle leur assurera des emplois dans la carrière à laquelle ils auront été destinés.
Si, dans la carrière civile, ils se consacrent à l'administration, ils seront placés ou dans les corps de l'administration de la guerre et de la marine, ou dans les bureaux des ministres, des préfets, etc., dans les écoles des mines, des ponts et chaussées; si c'est à la jurisprudence ou à la médecine, ils auront des places d'élèves, qui seront créées, à cet effet, dans les écoles spéciales.
S'ils sont destinés à la carrière militaire, ils auront des places de sous-lieutenants dans l'infanterie, ou seront admis à concourir aux examens pour obtenir des emplois dans le génie, l'artillerie ou la marine.
Il pourra être créé par an huit ou dix pensions de 200 francs chacune, distribuées entre les différents collèges, pour être décernées aux sujets qui se seront distingués.
COLLÈGE SAINT-CYR
Tout ce qui est relatif au collège de Saint-Cyr doit former un titre particulier.
L'éducation y doit être dirigée d'après le parti qu'on se proposera de tirer des élèves qui en sortiront, et dont le nombre peut être porté jusqu'à 400. Toutes les connaissances qui peuvent en faire de bons ouvriers et des hommes utiles dans les arts mécaniques, dans les ateliers de l'administration publique, soit de terre, soit de mer, sont celles qu'ils doivent recueillir de l'éducation nationale. Il se trouvera sans doute, dans un nombre aussi considérable d'individus, des élèves que leurs facultés personnelles rendront capables d'aspirer à des emplois civils on militaires; il doit en conséquence être fait, tous les ans, des examens à la suite desquels on pourra faire passer huit ou dix élèves de Saint-Cyr dans les autres collèges du Prytanée.
Je vous ai exposé, Citoyen Ministre, les diverses observations auxquelles le règlement que vous avez présenté aux Consuls a donné naissance. J'ai l'honneur de vous répéter qu'elles vous sont adressées moins comme des vues auxquelles vous deviez vous astreindre que comme des idées qui peuvent entrer dans les vues de bien public qui vous animent.
Paris, 12 juin 1801
Au citoyen Forfait, ministre de la marine et des colonies
Il est impossible, Citoyen Ministre, de distinguer dans les bataillons qui sont destinés à l'expédition de Brest, ceux qui sont conscrits et ceux qui ne le sont pas. Il n'en est aucun qui n'ait plus de trois mois de service et qui dès lors ne soit à la première classe des manœuvres; dès ce moment, ils vont au feu aussi bien que les autres.
Le ministre de la guerre donne l'ordre qui y ait autant de compagnies de grenadiers qu'il y a de bataillons.
Paris, 15 juin 1801
Au citoyen Talleyrand, ministre des relations Extérieures
Le citoyen Baciocchi arrive; il sera probablement passé chez vous. En tout cas, je vous expédie la copie du magnifique traité que nous a fait notre ambassadeur. Je vous prie de lui faire connaître, par un courrier extraordinaire, que ce traité est contraire à ses instructions, contraire au traité fait avec l'Espagne, contraire aux intérêts de la République et tout à fait dans ceux de l'Angleterre; ,qu'il doit déclarer sur-le-champ à l'Espagne que le traité n'est pas ratifié et n'est pas susceptible de l'être; que, si les trois provinces ne sont pas sur-le-champ occupées par les troupes espagnoles et françaises, je ne puis répondre d'aucune manière de la restitution des colonies espagnoles;
Que le traité est un coup inattendu que le Premier Consul regarde comme un des revers les plus éclatants qu'il ait éprouvés dans sa magistrature;
Que, s'il n'était pas rompu sur-le-champ, il faudrait s'attendre à voir se prolonger encore de trois campagnes la guerre du Portugal; car la compensation seule des trois provinces est le seul moyen d'obtenir la restitution de la Trinité et d'accélérer l'œuvre si essentielle et si importante de la paix générale;
Le traité de paix ne doit être considéré que comme une espèce de protocole, puisqu'il porte que les hostilités ne cesseront qu'après les ratifications;
Que le général Leclerc doit, à l'heure qu'il est, être à la tête de 15,000 hommes, et que 10,000 autres, qui sont à la frontière de France, entreront à la première demande de l'Espagne;
Que je désire que l'on renforce les troupes françaises de 12,000 Espagnols, lesquelles envahiront Oporto et toutes tes provinces que l'on doit occuper;
Enfin qu'il est absurde de vouloir que nous garantissions au Portugal la restitution de ses colonies; que cela déshonore entièrement ce cabinet, et que j'aimerais mieux, pour l'honneur de ce Gouvernement, avoir perdu une province que de ratifier ce traité;
Que mon nom n'est accoutumé à se trouver qu'à des choses utiles sur la nation et honorables pour le peuple français.
Demain, à midi, vous me présenterez ce projet de dépêche.
Je vous prie également de m'approprier toute votre correspondance et le traité fait avec l'Espagne.
Faites un projet de note que le citoyen Otto présenterait à la cour de Londres avec le présent traité, sous le titre de protocole. Le but de cette note sera,
De faire connaître à lord Hawkesbury que la province d'Alemtejo a été conquise par les Espagnols;
Que la reine de Portugal a expédié M. Pinto, et qu'il a été conclu une espèce de traité entre le ministre français et M. Pinto; que les ordres sont déjà partis et ce traité regardé comme nul, vu que le Premier Consul ne se désistera jamais de la déclaration faite, à Lorient, à M. d'Aranjo, de ne faire jamais la paix avec le Portugal qu'en occupant trois provinces qui puissent servir de compensation pour les colonies des alliés; que, tout en ordonnant que les armées françaises se mettent en disposition de continuer leurs attaques contre le Portugal, le Premier Consul devait à l'impuissance et à la faiblesse du Gouvernement portugais de suspendre les hostilités jusqu'à ce que la cour de Londres ait répondu aux dernières propositions, savoir : si elle voulait, dans les négociations, admettre le statu quo ante bellum pour le Portugal, comme servant d'équivalent au statu quo ante bellum de l'Amérique;
Que le britannique devait voir, dans la franchise de cette démarche, le désir de ménager une puissance faible, mais qui a joué dans cette guerre le rôle de province de d'Angleterre, et d'éviter les événements qui pourraient donner de l'exaspération aux deux nations.
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Je vous prie de me rapporter cette lettre demain midi
Paris, 16 juin 1801
Au général Berthier, ministre de la guerre
Je vous prie, Citoyen Ministre, de faire connaître au général Saint-Cyr, par un courrier extraordinaire, que les propositions de paix faites par le Portugal n'ont pas été admises par le Gouvernement, qui ne peut faire la paix qu'autant que la République occupera, jusqu'à la paix générale, deux ou trois provinces , pour servir d'équivalent au grand nombre de colonies que les Anglais ont prises aux alliés.
L'intention du Gouvernement est que le général Saint-Cyr se concerte avec le général Leclerc, qu'il accélère la réunion des détachements non encore arrivés, qu'on réunisse les corps français pour pouvoir occuper Oporto et les provinces voisines.
Le général Saint-Cyr se rendra ensuite au quartier général du prince de la Paix, pour concerter un nouveau plan de campagne. Je désirerais que les Espagnols continuassent à garder la province qu'ils ont occupée, et que le général espagnol mît sous les ordres du général Saint-Cyr une division de 13 ou 14,000 Espagnols, qui, joints aux Français, formeraient un corps d'armée suffisant pour marcher droit à Oporto.
Indépendamment des 15,000 hommes qui doivent être en ce moment hors des frontières de la République, d'autres troupes sont prêtes à les joindre.
Écrivez au général Leclerc que l'intention du Gouvernement est que le corps à ses ordres marche toujours réuni. Il continuera à avoir le commandement direct des troupes françaises, et se trouvera sous les ordres du général Saint-Cyr, lorsque celui-ci aura le commandement d'une partie de l'armée espagnole et des Français.
Écrivez à l'ambassadeur de la République à Madrid que l'intention du Gouvernement est que le général Saint-Cyr soit chargé, à la tête d'un corps espagnol et des Français, de prendre possession d'Oporto et des trois provinces Entre-Douro-e-Minho, Tras-os-Montes, Beïra; et enfin que les généraux espagnols ne doivent donner aucun ordre aux troupes françaises, sans que cela ait été arrêté dans le plan de campagne avec le 'général Saint-Cyr; que l'on n'a pas envoyé à Madrid un général aussi distingue pour que l'on n'en fasse aucun cas, et que des gens nouveaux dans l'art de la guerre dédaignent ses conseils.
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Recommandez au général Leclerc d'envoyer exactement des états de situation.
Paris, 16 juin 1801
Au général Berthier
Vous voudrez bien, Citoyen Ministre, donner l'ordre au général commandant la 12e division militaire de porter son quartier général à la Rochelle; de réunir dans cette ville 1,500 hommes de troupes; de placer des officiers d'état-major aux îles d'Aix, de Ré, d'Oléron; de visiter lui-même ces trois îles, faire mettre en état les batteries, réparer les affûts et faire tirer en sa présence toutes les batteries à boulets.
Il s'assurera que toutes les mesures sont prises pour la défense de ces trois îles, et que tous les magasins sont convenablement approvisionnés en munitions de guerre et de bouche.
Il distribuera les troupes qu'il aura réunies à la Rochelle dans ces trois îles, et son quartier général restera à la Rochelle jusqu'à ce que l'escadre soit partie. Le Gouvernement compte sur son activité pour surveiller toutes les batteries, qui doivent défendre l'escadre, dans le cas où elle serait attaquée.
Paris, 16 juin 1801
Au général Berthier
Vous donnerez l'ordre, Citoyen Ministre, au directeur d'artillerie de la 12e division militaire de faire placer huit mortiers à la Gomer de 12 pouces à la batterie des Saumonards, une batterie de 8 pièces de 24 avec des grils à boulets rouges et quatre mortiers à la Gomer de 12 pouces, à la pointe de Chassiron, île d'Oléron, et une batterie d'égale force à la position de l'île de Ré qu'il jugera le plus convenable du côté de Sainte-Marie.
Le but de ces trois batteries est de défendre, autant que possible, le passage du pertuis d'Antioche, de favoriser le passage de nos petits bâtiments et de défendre la rade de l'île d'Aix.
Vous ferez partir en poste un officier supérieur d'artillerie avec trois capitaines, pour être chargés de ces batteries.
L'officier supérieur se rendra à la batterie de l'île d'Aix, qu'il mettra en parfait état, et il y restera jusqu'à ce que l'escadre soit partie; les deux autres officiers resteront jusqu'à la même époque à leurs batteries.
Vous recommanderez au général Chabot, au préfet maritime, aux directeurs de l'artillerie et du génie, de prendre toutes les mesures pour que ces batteries soient armées et mises promptement dans le meilleur état.
Paris, 17 juin 1801
Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures
Je vous prie, Citoyen Ministre, de faire connaître à M. Azara qu'il serait nécessaire qu'il écrivit au ministre d'Espagne à Rome, pour que le Pape envoyât un légat à Florence pour complimenter le roi d'Étrurie, conformément à l'usage de tous les temps. Ce ministre fera part à la cour de Rome que l'Espagne et la France, ont reconnu le prince de Parme comme roi d'Étrurie. Il est de quelque importance que le Pape le reconnaisse également.
Il serait bon que vous écrivissiez en Espagne pour que l'on ordonnât la même notification par les ministres espagnols dans les cours d'Europe, notification qui ne serait faite, toutefois, que lorsque l'arrivée à Florence du roi d'Étrurie sera connue de toute l'Europe.
Il serait convenable que les Républiques batave, helvétique, cisalpine et ligurienne reconnussent le roi d'Étrurie.
Écrivez au citoyen Moreau Saint-Méry qu'il se concerte avec le ministre d'Espagne à Parme, et qu'il fasse en sorte que le roi d'Étrurie soit reçu par son père d'une manière convenable. Il fera sentir combien il serait scandaleux pour l'Europe que le prince de Parme ne passât pas à Parme, ou que le père ne reçût pas bien son fils.
Enfin,, entendez-vous avec le roi d'Étrurie pour tous les détails relatifs à son voyage et à son installation en Toscane.
Paris, 17 juin 1801
Au citoyen Forfait, ministre de la marine et des colonies
Faites sentir, Citoyen Ministre, au préfet maritime de Rochefort, qu'il est important que le contre-amiral Bedout (Jacques Bedout, 1751-1818, contre-amiral) mette promptement à la voile d'une rade où il n'est pas à l'abri des entreprises de l'ennemi, surtout s'il y séjournait tout l'été.
Écrivez également au général Bedout sur le même objet.
Paris, 17 juin 1801
Au citoyen Forfait
Les malades à Toulon, Citoyen Ministre, ne sont pas assez soignés. Les officiers de marine n'y font pas des visites assez fréquentes. Les malades sont soignés par des forçats; ne serait-il pas possible d'y établir des sœurs de la Charité comme à Brest ?
Il paraît que les ouvriers de l'arsenal de Toulon font beaucoup de petits ouvrages pour leur compte; il serait nécessaire de réitérer les ordres pour que la surveillance s'exerce avec plus d'efficacité.
Paris, 20 juin 1801
Au citoyen Forfait
Un projet général pour un établissement maritime à l'île d'Aix et d'Oléron.
Transporter les malades, non à Rochefort, mais dans ces îles. Examiner s'il conviendrait d'établir une forge, un petit chantier, un magasin d'approvisionnement et une boucherie, un hôpital et quelques magasins à l'île d'Aix.
En effet, les vaisseaux sortent désarmés de la Charente; leur artillerie, leurs vivres, une partie de leur eau sont mis à bord en rade, près de l'île d'Aix. Ces vivres, dont une partie vient de Bordeaux, se rendent à Rochefort et de là à l'île d'Aix. S'il y a une escadre en rade, les corvées que les vaisseaux en rade font sont considérables et facilitent la désertion.
La moindre avarie oblige de rentrer un vaisseau et de le désarmer, tandis qu'on pourrait avoir à l'île d'Aix un ponton, dépendant de l'arsenal, qui servirait à faire des réparations.
On sent que, dans ce nouveau système, il faudrait, indépendamment du fort de Montalembert, établir un bon fort en maçonnerie au milieu de l'île, pour la mettre à l'abri de toute insulte.
Enfin, ne conviendrait-il pas de mettre des corps-morts dans la rade ?
Paris, 21 juin 1801
Au Citoyen Talleyrand, ministre des Affaires étrangères
Je prie le Ministre des Affaires étrangères de me faire connaître son opinion sur cette affaire.
Paris, 21 juin 1801
ARRÊTÉ
ARTICLE ler. - Il sera construit cent péniches, moitié doubles, moitié simples.
ART. 2. - Il sera frété deux cents bateaux de pêche, à dater du 1er thermidor.
ART. 3. - Le ministre de la marine et des colonies est chargé de l'exécution du présent arrêté.
Paris, 21 juin 1801
Au général Berthier, ministre de la guerre
La légion expéditionnaire qui est en garnison dans les îles d'Hyères n'a ni habits, ni solde, ni viande. Donnez les ordres pour que sa solde lui soit exactement payée; et, comme cette légion se trouve campée et fait un service extraordinaire, faites-lui donner de la viande.
Paris, 22 juin 1801
Au citoyen Petiet, ministre extraordinaire
Je reçois, Citoyen Ministre, votre lettre du 24 prairial. Vous évaluez la dépense de 30,000 Français à 48 millions; cela passe tous les calculs. Vous trouverez ci-joint l'état qui m'a été remis par le ministre de la guerre. La dépense, d'après cet état, ne se monterait qu'à 15 millions. Je conçois qu'il peut y avoir quelques millions de différence; mais comment cela peut-il aller à trois fois davantage ?
Vous pouvez faire mettre les 6,000 Polonais au nombre des troupes à nourrir par la Cisalpine, de manière à compléter les troupes que doit avoir cette république, conformément à l'arrêté du 12 prairial.
Quant à la réduction des commandants de places, voyez le général Moncey pour supprimer tout ce qui est inutile. Dans le courant de l'été, la République cisalpine aura son organisation stable. Mais faites- leur connaître qu'il a fallu commencer par organiser le militaire, et ôter tout ce qui n'était pas nécessaire à la défense de l'Italie, avant d'établir un gouvernement définitif, qui aurait eu, dès son origine, à combattre les désordres et les difficultés de l'entretien et de la nourriture d'une grande armée.
Paris, 23 juin 1801
NOTE POUR LE MINISTRE DES RELATIONS EXTÉRIEURES
L'article 9 du traité de Lunéville porte: "Aussitôt après l'échange des ratifications du présent traité, il sera accordé, dans tous les pays cédés, acquis ou échangés par ledit traité, à tous les habitants ou propriétaires quelconques, mainlevée du séquestre mis sur leurs biens, effets et revenus, à cause de la guerre qui a eu lieu."
La première question à décider pour déterminer l'exécution de cet article est de savoir si ces mots, à cause de la guerre qui a eu lieu, ne doivent pas s'entendre de la guerre qui a suivi la rupture des négociations de Rastadt.
Une seconde question à résoudre est celle-ci : ces mots, les pays cédés ou acquis par ledit traité, s'entendent-ils uniquement des départements de la rive gauche du Rhin, sans qu'ils puissent être appliqués à la Belgique ?
Pour la solution de cette question, il faut considérer que la cession de la Belgique est seulement confirmée par le traité de Lunéville, et qu'elle avait été légalement faite par celui de Campo-Formio. En effet, l'article 3 de celui-ci est expressément cité dans l'article 2 du traité de Lunéville.
En tenant pour certain que l'article 9 de ce traité ne concerne véritablement que les quatre départements du Rhin, il resterait à décider ce qu'il faudrait faire pour exécuter cet article à leur égard.
Mais d'autres questions se présentent :
Qu'entend-on par tous les habitants ou propriétaires quelconques, qui, aux termes de cet article, ont droit à la mainlevée du séquestre mis sur leurs biens ?
Faut-il distinguer les habitants et les propriétaires et lever en conséquence les séquestres mis, 1° sur les biens de tous les habitants ayant domicile dans les départements de la rive gauche et frappés de séquestre à cause de la guerre qui a eu lieu; 2° sur les biens qui appartenaient, dans les départements de la rive gauche, à des propriétaires domiciliés ou en Autriche ou dans les États de l'Empire ?
Après que l'on aura fixé le sens de ces mots, habitants ou propriétaires quelconques, il restera à examiner si l'expression propriétaires quelconquescomprend les souverains des différents États de l'Empire qui auraient possédé des biens patrimoniaux dans les quatre départements réunis ; Si l'on avait voulu que le séquestre fût levé sur les propriétés de ces souverains, ne l'aurait-on pas dit d'une manière explicite? Lorsque les négociateurs ont entendu que les biens patrimoniaux du grand-duc de Toscane lui seraient conservés, ils en ont fait une stipulation expresse.
Toutes ces difficultés étant résolues, il faudrait distinguer
1° Les séquestres mis pour cause de la guerre sur ceux des biens revenus au fisc en vertu de jugements rendus par les tribunaux; les quatre départements étant, depuis plusieurs années, gouvernés par les agents de la République, l'action de la justice a dû y produire des effets immuables et ne peut être confondue avec les effets passagers de la guerre.
2° Il faudrait distinguer les séquestres mis sur les biens des moines; la mesure politique qui aurait déterminé la suppression des établissements religieux ne peut être considérée comme un effet de guerre.
Quant à la Belgique, il faut savoir : 1° si le traité de Campo-Formio a été exécuté à son égard; 2° dans la supposition où il n'aurait pas été exécuté, ce qu'il convient de faire pour qu'il le soit.
L'article 2 de ce traité porte : "Aussitôt après l'échange des ratifications du présent traité, les parties contractantes feront lever tout séquestre mis sur les biens, droits et revenus des particuliers, résidant sur les territoires respectifs et les pays qui y sont réunis, ainsi que des établissements publics qui y sont situés. "
L'article 9 du même traité contient aussi la même stipulation que l'article 9 du traité de Lunéville; il se termine par la disposition suivante : "Ceux qui, à l'avenir, voudront cesser d'habiter lesdits pays, seront tenus d'en faire la déclaration trois mois après la publication du traité de paix définitif. Ils auront le terme de trois ans, pour vendre leurs biens meubles et immeubles, ou en disposer à leur volonté."
Lorsque les armées française entrèrent dans la Belgique, tous les sujets attachés à l'Empereur émigrèrent; les séquestres furent mis sur leurs biens, et cette disposition fut un effet de la guerre. Il paraîtrait donc que ces individus seraient dans le cas de l'application de l'article 9, et devraient, en conséquence, obtenir la mainlevée du séquestre mis sur leurs biens, effets et revenus.
Le droit de souveraineté comporte celui de bannir les individus dont la résidence semblerait contraire aux intérêts du Gouvernement.
Ce droit a été reconnu; on a senti que la République ne pouvait pas souffrir que des hommes ennemis de ses principes et du système de son organisation sociale revinssent habiter la Belgique et y jouir des droits de citoyens. On a reconnu même qu'ils ne pouvaient pas, sans danger pour l'État, demeurer propriétaires, et que le Gouvernement pouvait leur refuser cette faculté. (La disposition prise explicitement en faveur du prince Charles suffirait pour démontrer l'existence du droit de refus réservé au Gouvernement.) En conséquence, on a stipulé, en terminant l'article 9, l'autorisation à ceux qui ne voudraient plus habiter le pays de déclarer dans trois mois leur intention, et de vendre leurs biens dans l'intervalle de trois ans. Ou doit entendre par ceux qui ne veulent plus habiter le pays ceux qui ne peuvent pas être soumis à un ordre de choses qui ne leur convient pas, ou auquel ils ne peuvent pas convenir.
Ces choses posées, il est nécessaire de faire connaître:
1° Quelle a été l'interprétation donnée par le Directoire à l'article 9 du traité de Campo-Formio;
2° Ce que le Directoire a fait pour l'exécution de cet article;
3° Ce qu'il convient de faire aujourd'hui.
Il y aura, à l'égard de ce dernier point, diverses sortes de mesures à prendre, et trois principales :
1° Lever le séquestre sur les biens des individus qui, attachés à l'Empereur, ont émigré lors de l'entrée des Français en Belgique, c'est-à-dire par l'effet de la guerre;
2° Parmi les individus dont l'absence ou le séquestre auraient été postérieurs à cette époque, restituer les droits de citoyen et de propriétaire, ou rayer de la liste des émigrés ceux dont la présence dans le pays ne serait pas susceptible de porter ombrage au Gouvernement;
3° Déclarer émigrés ou bannis du territoire de la République, en appliquant à leurs personnes ainsi qu'à leurs biens les lois sur l'émigration ceux qui, après s'être reconnus Français par suite du traité de Campo-Formio, out servi contre la République dans les armées impériales, et se sont ainsi donné le caractère de rebelles.
Le ministre des relations extérieures est invité par le Premier Consul à revoir le rapport qu'il a présenté sur cette matière, et à prendre en considération, dans un nouveau travail, les notes qu'il vient de lire.
Paris, 23 juin 1801
Au général Berthier, ministre de la guerre
Je désire, Citoyen Ministre, que vous me fassiez un rapport sur les mesures d'exécution prises pour l'armement des îles d'Aix et d'Oléron. Comme j'attache une grande importance à la prompte exécution de ces ordres, puisque je suis instruit que les Anglais menacent l'escadre que nous avons dans la rade de Rochefort, veuillez, je vous prie, accélérer l'armement de ces îles. On me rend compte qu'à l'île d'Aix il n'y a que neuf mortiers, dont trois, étant des mortiers à galiotes, sont d'un service très-difficile, et les six autres, n'étant pas tous de l2 pouces, ne peuvent pas être d'une grande utilité.
Réitérez les ordres pour qu'on laisse les trois mortiers à galiotes. Les canonniers n'osent tirer ces mortiers qu'avec 18 livres de poudre, tandis qu'ils peuvent les tirer à 21 livres. Ordonnez que les plates-formes soient faites à neuf, et que la batterie soit munie de trois crics et du nombre de pinces nécessaire pour pouvoir les mouvoir le plus promptement possible.
Faites changer les six autres mortiers et remplacer par six autres mortiers à la Gomer de 12 pouces. La batterie de l'île d'Aix étant susceptible de contenir beaucoup d'autres mortiers, mon intention est qu'on en mette jusqu'à trente. Le ministre de la marine a l'ordre de faire fournir, de l'arsenal de Rochefort, tous les mortiers à la Gomer de 12 pouces qui ne seraient pas nécessaires pour les galiotes à bombes, et tous les bois et madriers pour les plates-formes.
On m'instruit qu'il n'y a pas à l'île d'Aix le nombre d'affûts de rechange nécessaire, et qu'il y a même des pièces qui ne sont pas montées. On me rend compte également que la poudre est de mauvaise qualité, et en trop petite quantité; qu'il n'y a pas les ustensiles nécessaires pour tirer à boulets rouges, et, entre autres, qu'il manque des gargousses en parchemin, ce qui est indispensable pour ce tir.
Donnez les ordres pour qu'à commencer du 20 messidor on fasse, tous les jours, l'exercice du canon et de la bombe, et que, de deux jours l'un, on tire à la fois une bombe par mortier, chargée et avec sa fusée, et deux coups à boulets rouges par chaque pièce qui voit sur la rade.
Le ministre de la marine a l'ordre de faire placer sur le Boyard la carcasse de quelque bateau de pêche, sur laquelle les mortiers de l'île d'Aix et des Saumonards tireront, et les bombardiers qui mettront dans cette carcasse auront 12 francs par coup.
Il sera mis également un bâteau à la même distance de la batterie de l'île d'Aix, à la hauteur du cinquième vaisseau; il sera accordé 6 francs par chaque boulet qui portera sur ce bateau.
Je désire qu'un général d'artillerie se rende à Rochefort pour diriger ces exercices, qui seront continués pendant deux décades. Le procès-verbal sera dressé et signé par le préfet maritime, le commandant de l'escadre, le directeur de l'artillerie et le général commandant les troupes de débarquement.
Donnez l'ordre à un capitaine d'artillerie, deux lieutenants, quatre maréchaux des logis, six brigadiers qui aient beaucoup tiré de bombes et à boulets rouges, de se rendre en toute diligence à Rochefort et aux batteries de l'île d'Aix pour y diriger les exercices. Ces individus seront pris dans l'artillerie de la garde des Consuls; ils resteront à l'île d'Aix jusqu'à nouvel ordre.
Paris, 23 juin 1801
Au général Augereau, commandant en chef les troupes françaises en Batavie
Vous trouverez ci-joint, Citoyen Général, le rapport du ministre de la guerre pour terminer tout ce qui est relatif à l'entretien des troupes.
J'ai vu avec plaisir que le calme n'avait pas cessé de régner dans la République batave, et que les corps constitués avaient discuté froidement et avaient pris, de leur propre mouvement, la résolution qu'ils croyaient propre au bien de leur patrie.
Pressez, je vous prie, le plus qu'il vous sera possible, le départ de l'escadre batave. Vous recevrez incessamment des instructions sur ce que vous aurez à faire pour former cinq divisions de chaloupes canonnières à Flessingue, afin que, réunies aux seize divisions que l'on forme dans les ports de la Manche, nous puissions imposer à l'Angleterre.
Paris, 24 juin 1801
Au citoyen Talleyrand, ministre des relations extérieures
Je vous prie, Citoyen Ministre, de faire connaître à M. Azara que je désirerais que le comte de Livourne fût au delà de Chambéry le 14 juillet. Il n'est pas convenable qu'il soit témoin des fêtes qui se célèbrent ce jour dans toutes les grandes communes de la République.
Paris, 24 juin 1801
DÉCISION
Le ministre de la guerre propose de réformer, avec traitement, le citoyen Bonnard, capitaine an 25e régiment de | Renvoyé au général Leclerc, pour voir si les raisons de réformer, cet officier sont suffisantes, parce que le renvoyer de son corps, c'est le déshonorer. |
Paris, 26 juin 1801
DÉCISION
Le ministre dé la guerre prie les Consuls de faire connaître si les fournitures faites par le Gouvernement helvétique aux troupes françaises stationnées sur son territoire doivent être ou non comprises dans leur décision du 27 floréal dernier (voir en date du 17 mai) | La République française a dé-fendu la République Helvétique; les comptes sont soldés. |
Paris, 27 juin 1801
NOTES SUR UN PROJET DE RÈGLEMENT DE L'ÉCOLE D'ARTILLERIE ET DU GÉNIE
Le titre même de ce règlement ne donne pas une idée juste de son objet. Il s'agit moins de la formation d'une école d'artillerie et du génie que de la réunion des deux écoles. Aussi l'article 1er, au lieu de prononcer la suppression des écoles de Châlons et de Metz, devrait stipuler expressément leur réunion.
L'article 3 paraît inutile; il n'y a pas de nécessité de dire ce qu'on a l'intention de faire, dans le même moment où on le fait.
Le titre II, article 4, forme un état-major beaucoup trop considérable; s'il existait de la sorte, il rendrait l'établissement trop dispendieux, et ne tendrait, en y réunissant autant d'officiers supérieurs, qu'à y introduire de nombreuses causes de dissipation.
L'article 5 paraît inutile. L'établissement étant une école, on doit y trouver des canonniers, des ouvriers, des sapeurs et des mineurs, sans qu'il soit besoin d'y attacher une compagnie de ces divers individus.
Les articles 6 et 7 donneraient lieu à des observations particulières, mais ces observations se présenteront naturellement dans l'examen des articles suivants.
Les titres III et V doivent être réunis pour ne former qu'un seul titre.
La durée totale des cours de l'école étant fixée à deux ans,, il faut diviser l'enseignement en quatre parties, chacune comprenant six mois d'étude.
Les élèves de la première classe apprendraient : 1° les manœuvres de l'infanterie, du peloton et du bataillon; 2° celles du canon de campagne et de siège, ainsi que de la bombe et des obusiers; 3° les manœuvres de force, l'artifice, etc. ; 4° les éléments de la fortification, la levée des cartes et les premiers principes de la construction, coupe des pierre, etc.
On enseignerait dans la seconde classe l'exercice à feu, l'escrime, les éléments de la fortification de campagne, les principes de l'attaque des places, toute la partie de l'aide-mémoire qui est relative au tir; enfin tout ce qui est nécessaire au canonnier et à l'ingénieur en campagne. On conduirait les élèves au polygone; ils jetteraient des bombes dans des tonneaux, tireraient au blanc, etc., et construiraient des batteries de toutes espèces. Ils continueraient leur cours de construction.
Dans la troisième classe, les élèves suivraient leurs études dans l'architecture hydraulique, civile et militaire. Ils s'occuperaient de la partie plus compliquée des constructions, et ils apprendraient tout ce qui est nécessaire pour diriger et surveiller la construction d'une place. Ils prendraient connaissance des détails des fonderies, des mines, etc.
La quatrième classe serait consacrée à perfectionner les élèves dans les différentes parties qui auraient été jusqu'alors l'objet de leurs études. Ils visiteraient tous les détails des arsenaux, les mines, les galeries, etc.; tout ce qui tendrait à terminer leur instruction comme ingénieurs et artilleurs serait du ressort de cette classe.
L'article 19 ordonné la rédaction d'un cours complet composé de seize traités. Tous ces traités existent; il faudrait donc se borner à faire la classification de ceux qui devraient être appliqués à chaque degré d'instruction, c'est-à-dire à chaque classe, et déterminer parmi ceux qui traitent de la même matière celui qui devrait obtenir la préférence. Il ne s'agirait plus alors que de les faire réimprimer en quatre tomes, et de réunir ainsi toutes les connaissances éparses dans un grand nombre d'ouvrages. Cette opération ne peut paraître difficile et d'un succès incertain. Les ouvrages que l'on enseignait à l'école du génie avant la révolution existent et ne laissent rien à désirer. L'aide-mémoire, classé d'une manière convenable, et quelques principes de théorie qui se trouvent dans Lombard et dans Robins, fourniraient un bon ouvrage pour l'artillerie. On a aussi d'excellents traités sur les mines et sur l'art de lever les plans. Un cours formé de ces différentes parties réunies suffirait. On s'occuperait ensuite de perfectionner les différents objets d'enseignement qui en
auraient besoin.
Ces observations donneraient donc lieu à des modifications dans les principales dispositions du projet.
La distribution du règlement exige aussi des changements. La division en personnel et matériel ne paraît pas convenable. On a adopté généralement pour les écoles une autre distribution qui consiste dans les titres : Admission, Police, Étude, Examen, etc.
On doit, en général, dans l'établissement d'une école du génie. et d'artillerie, considérer comme objet principal de l'instruction la connaissance des manœuvres de toutes les bouches à feu et la tactique de l'infanterie. Il conviendrait qu'aussitôt qu'un élève est admis à l'école de bataillon, il fût astreint à faire, au moins trois fois par décade, le maniement des armes et les manœuvres du bataillon. Il importe, pour les manœuvres de l'artillerie, de ne pas perdre de vue qu'il n'y a rien de plus incertain que la théorie du tir. Cette partie de l'art est classée parmi les sciences physico-mathématiques; ses résultats sont douteux; ceux de la pratique sont certains. Les élèves ayant fait un cours de mécanique savent à peu près tout ce qu'il faut pour saisir et appliquer. Il convient donc de s'attacher par-dessus tout, et comme à l'un des principaux fondements de l'instruction, à ce que chaque élève exécute mieux qu'un vieux soldat tous les mouvements du fusil, toutes les manœuvres des pièces; qu'il soit habile à tirer à la cible et qu'il connaisse parfaitement l'usage des bouches à feu. Aucun d'eux ne doit être réputé bon élève si, au sortir de l'école, il ne peut aller immédiatement à une batterie ou à un siège. Il est convenable qu'arrivant au corps il instruise une classe de recrues aux manœuvres de l'artillerie, de l'infanterie et à celles de Gorce. Combien ne voyait-on pas d'officiers hors d'état de mettre la prolonge, de diriger une manœuvre de force, de composer un artifice, et obligés de prendre les leçons des vieux sergents ! Lorsqu'un élève pointera mieux que les soldats, on ne lui contestera ni ses droits à l'avancement, ni les autres avantages de son éducation. Les vieux sergents ne seront pas jaloux des jeunes officiers auxquels ils n'auront jamais rien appris.
Le Premier Consul désire que le général Marmont prenne connaissance de ces notes, et voie s'il ne convient pas de les faire entrer, en tout ou en partie, dans les dispositions du règlement à rédiger. Il l'invite à rechercher et à consulter les officiers auxquels les détails de l'instruction à donner dans les écoles sont familiers. Il pense que ce règlement doit contenir avec précision le nombre des professeurs et de tous autres agents d'instruction. C'est lorsque le projet d'organisation d'une école unique pour l'artillerie et le génie sera présenté en tableau complet, que l'on pourra juger s'il est utile de réunir et de confondre dans un seul établissement les moyens d'instruction pour les deux armes.
Paris, 28 juin 1801
Au général Berthier, ministre de la guerre
On me rend compte, Citoyen Ministre, que les commandants militaires de l'île de Groix et autres de la côte de l'ouest se permettent de s'absenter souvent de leur résidence et de rester plusieurs jours sans y paraître. Je vous prie de donner les ordres pour que, sous aucun prétexte, les commandants ne se permettent plus de sortir de l'arrondissement dont la sûreté leur est confiée.
Je suis également informé que les approvisionnements de guerre et de bouche, ainsi que l'armement de ces îles, sont dans une situation peu satisfaisante. Veuillez ordonner qu'il soit fourni, sans délai, à tout ce qui est nécessaire pour la défense de ces différents postes.