8 - 15 janvier 1807
Varsovie, 8 janvier 1807
A l'Impératrice, à Mayence
Ma bonne amie, je reçois ta lettre du 27 avec celles de M . Napoléon et d'Hortense, qui y étaient jointes. Je t'avais priée de rentrer
à Paris. La saison est trop mauvaise, les chemins peu sûrs et détestables, les espaces trop considérables pour que je permette que tu viennes jusqu'ici, où mes affaires me retiennent. Il te faudrait au moins un mois pour arriver, tu y arriverais malade, il faudrait peut-être repartir alors; ce serait donc folie. Ton séjour à Mayence est trop triste; Paris te réclame; vas-y, c'est mon désir. Je suis plus contrarié que toi; j'eusse aimé à partager les longues nuits de cette saison avec toi; niais il faut obéir aux circonstances.
Adieu, ma bonne amie, tout à toi.
Varsovie , 8 janvier 1807
A la reine d'Étrurie
Madame ma Sœur, j'ai reçu la lettre où Votre Majesté veut bien m'informer de la part qu'elle prend aux avantages que j'ai obtenus contre nos ennemis. Leurs plans d'attaque menaçaient mes alliés comme moi. Les mêmes succès nous ont servis tous, et les événements qui m'ont rendu maître du nord de l'Allemagne ont assuré le repos de l'Italie, ont protégé les États de Votre Majesté. Elle n'a, pour entrer dans ce plan de défense commune, aucun armement à faire, elle a seulement à préserver ses États de toute relation de commerce avec nos ennemis. L'Angleterre, exclue, de tous les ports depuis la Baltique jusqu'à Tarente, ne doit pas espérer plus de faveur dans un royaume qu'elle a refusé de reconnaître; l'Angleterre, armée contre la France, armée contre l'Espagne, ne trouvera pas chez la fille de Sa Majesté Catholique de nouveaux moyens pour faire la guerre à l'Espagne, pour faire la guerre à la France. Sa Majesté Catholique, dont vous aimez, Madame, à suivre les exemples, me donne avec loyauté des preuves de son attachement à l'alliance et ne m'a jamais mis dans le cas de douter de la sincérité de ses sentiments
Varsovie, 8 janvier 1807
A M. Cambacérès
Mon Cousin, je reçois vos courriers du 25 et du 26 décembre. Il me semble que ce qu'il y a de plus prudent à faire est, lorsqu'il y aura moins d'inquiétudes pour les subsistances, d'empêcher la sortie des blés de France. Tenez un conseil sur cet objet. L'année me parait fort extraordinaire, et je suis porté à penser que nous aurons une mauvaise récolte. Occupez-vous de cela sérieusement, et prenez un parti définitif d'après les résultats du conseil que vous tiendrez.
Varsovie, 8 janvier 1807
A M. Fouché
Rien de nouveau ici. Nous ne sommes désolés que d'une chose c'est qu'il ne fait pas assez froid. Il y avait ces jours-ci un pied de neige, qui avait permis l'usage des traîneaux. Aujourd'hui il dégèle. Nous avons cependant besoin de froid pour rendre les chemins praticables.
Un homme comme Joliclerc serait fort utile ici pour mettre à 1a tête de la police; il ne serait pas hors de propos d'en envoyer un.
Varsovie, 8 janvier 1807
Au général Dejean
Je désirerais avoir un état général de la situation des troupes cheval.
La première colonne de cet état présenterait la formation, savoir :
Des régiments de grosse cavalerie à cinq escadrons;
Des régiments de hussards et de chasseurs à quatre escadrons;
Des régiments de dragons à-quatre escadrons, faisant de 8 à 900 chevaux chacun.
La deuxième colonne de l'état ferait connaître la situation des chevaux au 1er septembre;
La troisième, ce que les dépôts se trouvent avoir acheté au 1er janvier et avoir envoyé à l'armée;
La quatrième, ce que les dépôts ont acheté et l'existant postérieurement au 1er janvier;
La cinquième, ce que les régiments ont reçu du dépôt de Potsdam : j'écris au général Bourcier de vous en envoyer l'état;
La sixième, le total de la situation des régiments au moment où l'état sera dressé;
La septième, ce que doivent produire les marchés approuvés par le ministre et les achats faits par des officiers isolés pour des chevaux qui doivent rentrer avant le 1er février;
La huitième, le nombre de chevaux qui peut être acheté avec l'argent qui reste dans les caisses et au moyen des marchés à conclure;
La neuvième, le total du nombre auquel s'élèvera alors l'effectif des régiments;
La dixième et dernière colonne, le nombre de chevaux qu'il sera nécessaire de se procurer pour porter chaque régiment au complet proposé.
Il ne restera plus, pour avoir une connaissance précise de la situation des corps de troupes à cheval, qu'à déduire de cet état les chevaux perdus, dont le nombre doit d'ailleurs être compensé par celui des chevaux pris à l'ennemi et incorporés sans passer aux dépôts.
Il faudra dresser un état pareil pour les hommes, dont la première colonne sera l'effectif de chaque régiment, en mettant cependant un terme commun, pour qu'il n'y ait pas trop de différence; ce qui est d'autant plus praticable que, par l'appel de la réserve, il peut égaliser les corps.
En général, mon désir est que les hommes de tous les dépôts soient mis à cheval, tant ceux qui y sont en ce moment que ceux qu'ils vont recevoir de la conscription de 1807. Je n'en excepte aucune arme, pas même les dragons.
Je ne regretterais pas une dépense de six ou sept millions, si cela devait me donner 7 ou 8,000 chevaux de plus. Mais il faut que j'aie les hommes, et le ministre jugera, par la situation des dépôts, si cela est possible. Tout ce que j'ai ici est ou sera monté.
Ainsi donc, mon intention est d'avoir autant de chevaux que je puis me procurer d'hommes. La quantité d'hommes est bornée, puisqu'elle est subordonnée à la nécessité d'en donner à toutes les armes. La quantité des chevaux ne l'est pas, puisqu'elle ne dépend que de l'argent qu'on peut employer à en acheter, et que je suis en position de pouvoir faire les dépenses nécessaires pour cela.
S'il est vrai que j'aie, avec les réserves, avec la conscription de 1806, avec la réserve de cette année et avec la conscription de 1807, le moyen de porter ma cavalerie à 80,000 hommes, mon intention est d'avoir, avant le mois de mai, 80,000 chevaux.
Dans cette supposition, et pour réaliser cette volonté, il n'y aurait plus d'autre objection que l'argent, et, comme je le dis plus haut, cette objection n'en est pas une dans ma position. On pourrait observer aussi que l'on aurait de la sorte des compagnies et des escadrons trop nombreux; mais cette objection n'est pas fondée. Les escadrons de grosse cavalerie sont à 180 hommes par la dernière formation, ils seraient à 220, qu'il n'y aurait à cela aucun inconvénient. Les petits dépôts, la consommation des marches, les ordonnances, les escortes de bagages, ont bientôt réduit les escadrons ligne à 150 ou 160 chevaux. Les escadrons de cavalerie légère même sont aujourd'hui ridicules; ils ne sont pas à 100 hommes présents sous les armes en ligne. On les porterait, par l'organisation, à 3 où 350, qu'il n'y aurait aucun inconvénient pour les mouvements.
Mon intention n'est donc pas d'augmenter mes cadres, mais je veux les renforcer autant que je pourrai leur fournir des hommes. Ma limite est là, et une fois que j'aurai les hommes, je ne veux rien épargner pour leur procurer des chevaux et les monter tous. Je crois, par exemple, que les régiments qui se trouvent en Italie sont à 900 et 1,000 hommes; il faut leur procurer des chevaux pour qu'ils aient 900 ou 1,000 chevaux. Il ne doit y avoir aucune différence entre l'Italie et la Grande Armée, parce que, cette mesure étant prise pour l'Italie, j'en tirerai alors des régiments pour les faire venir à la Grande Armée.
Si je n'avais à considérer que j'ai besoin d'hommes pour l'infanterie et l'artillerie, et si je pouvais en mettre dans les troupes à cheval autant que je le désire, je ne serais pas éloigné de porter les régiments de grosse cavalerie à 1,000 hommes, formant cinq escadrons de 200 hommes chacun; les régiments de hussards et chasseurs à 1,200 hommes, formant quatre escadrons de 300 hommes chacun; les régiments de dragons à 1,000 hommes, formant quatre escadrons de 250 hommes chacun; ce qui me ferait un total de 84,000 hommes de cavalerie, et nul doute alors qu'il ne fallût procurer aux corps autant de chevaux qu'ils auraient d'hommes.
Mais il faut par-dessus tout faire la défense la plus formelle d'acheter des chevaux de moins de cinq ans. Je préfère de beaucoup des chevaux de 4 pieds 6 pouces, même de 4 pieds 4 pouces, âgés de cinq ou six ans, à des chevaux de 4 pieds 10 pouces qui n'auraient que quatre ans. Il ne s'agit pas de la guerre à venir, mais de la guerre présente, et, à la guerre, le moment est tout. Faites sur ce sujet une circulaire à tous les dépôts.
En résumé :
Je veux acheter autant de chevaux que j'ai d'hommes.
Je destine à la cavalerie 10,000 hommes de la conscription de 1807; il faut donc lui fournir autant de chevaux, à moins qu'il ne se trouve dans les dépôts autant de chevaux que d'hommes.
Il y a en Italie 3 ou 4,000 hommes non montés, il faut leur procurer 3 à 4,000 chevaux.
Enfin, si la guerre continue, j'augmenterai encore mes cadres au moyen de la conscription de 1808.
Varsovie, 8 janvier 1807
DÉCRET
ARTICLE 1er. - Il sera établi une enceinte bastionnée autour de Sierock, de 6 à 700 toises de développement, formant une tête de pont sur la rive droite de la Narew, et couvrant les deux ponts placés sur la Narew et le Bug.
Il sera établi, à la jonction de la Narew et du Bug, une espèce de cordon qui coupe la presqu'île, de manière à donner un espace de 2 à 300 toises entre la Narew et le Bug.
Il sera établi une autre tête de pont sur la rive gauche de la Narew, de manière à couvrir les deux ponts de la Narew et du Bug.
Une manutention de dix fours, des magasins contenant de quoi nourrir 100,000 hommes pendant dix jours et 300,000 boisseaux d'avoine, une ambulance, seront établis à Sirock.
ART. 2. - Il sera établi une tête de pont sur la rive droite de la Vistule à Modlin, à l'embouchure de la Narew dans la Vistule, de 8 à 900 toises de développement, couvrant le pont qui sera établi dans cet endroit.
Une autre tête de pont coupera la presqu'île formée par la Vistule et la Narew, de manière à avoir là un emplacement de 100 toises carrées.
Une autre tête de pont sera établie sur la rive gauche de la Vistule, de manière à couvrir le pont.
Une manutention, des magasins et des hôpitaux seront établis à Modlin dans la même proportion que pour Sierock.
ART. 3. - Une tête de pont sera construite au pont de Pultusk sur la rive gauche de la Narew, en formant un simple ouvrage de 100 toises de développement.
ART. 4. - Indépendamment des huit redoutes qui forment le camp retranché de Praga, lesquelles seront palissadées et fermées à la gorge, il sera fait une tête de pont de 2 à 300 toises de développement, qui servira de réduit pour la défense du pont de Praga.
ART. 5. - La vieille enceinte de Thorn sera relevée. Les haute qui la dominent seront occupées, et une tête de pont sera établie, sur la rive droite de la Vistule, au pont de Thorn.
Une manutention, des magasins et des hôpitaux considérables seront établis à Thorn.
ART. 6. - Tous ces ouvrages seront conduits avec toute l'activité possible. On fera travailler les paysans et les soldats. Les soldats travailleront à la tâche, de manière à gagner en raison de leur travaux.
Une retenue sera ordonnée pour couvrir leurs masses.
Ces ouvrages devront être, au ler mars, armés de canons, palissadés et fraisés, et les points les plus saillants devront avoir des contrescarpes revêtues en bois. Les travaux seront continués en mars et avril, de manière qu'au 1er mai les escarpes et les contrescarpes
soient entièrement revêtues en bois.
Au 1er mars, il y aura trente pièces de canon de campagne en batteries à chacune des places de Modlin et de Sierock, et dans chacune de ces deux places seront établis cinq magasins faits comme les ouvrages de campagne et contenant un armement et un approvisionnement de cinquante coups par pièce et de deux millions de cartouches.
Vingt pièces de canon seront placées en batterie à la tête de pont de Pultusk.
Douze pièces de canon seront placées en batterie au réduit de la tête de pont de Praga.
Et quarante pièces seront placées en batterie à Thorn.
Ces cent trente-deux pièces seront tirées des lieux ci-après :
Les pièces qui seront placées à Pultusk seront prises parmi celles qui ont été enlevées à l'ennemi dans la dernière expédition ;
Celles qui seront placées à Thorn seront tirées de Stettin;
Celles qui seront placées à Sierock, à Modlin et à Praga seront tirées de Breslau.
ART. 7. - Notre major général présentera, dans la journée de demain, à notre nomination, un général de brigade pour commander à Sierock, un général de brigade pour commander à Modlin', un général de brigade pour commander à Praga, et un général de brigade pour commander à Thorn.
Ces officiers seront chargés de défendre ces quatre places, et de prendre toutes les mesures pour accélérer les travaux et pour qu'ils aient la perfection et la solidité convenables.
Notre major général fera connaître ces dispositions à l'intendant général et aux généraux commandant le génie et l'artillerie de l'armée.
Varsovie, 8 jantier 1807
A M. de Castille, officier d'ordonnance de l'Empereur
M. de Castille se rendra à Kalisz. Il y conférera avec le commandant de la province, avec l'intendant et le commissaire des guerres pour faire accélérer le départ de 20,000 quintaux de farine venant de Glogau. Il verra les farines. Il m'enverra de Kalisz, par un officier attaché au commandement de la province, l'état de ce qui est arrivé à Kalisz et de ce qui en est parti, et me fera connaître quand on pourra espérer que les farines arriveront à Varsovie. Il séjournera à Kalisz, s'il est nécessaire, vingt-quatre heures, et se rendra de là à Breslau. Il remettra la lettre ci-jointe au prince Jérôme. Il visitera tous les magasins d'artillerie, de subsistances, d'habillement, de l'harnachement, etc. Après avoir séjourné quatre ou cinq jours à Breslau, il en partira pour me porter les inventaires de ces magasins.
Varsovie, 8 janvier 1807
Au maréchal Soult
Le district de Plock a été divisé en cinq arrondissements. La cham bre de Plock a nommé des commissaires pour chacun de ces arrondissements. Il y en a un pour l'arrondissement de Przasnysz. Adressez-vous à eux et à la chambre de Plock pour tous les approvisionnements qui vous sont nécessaires.
Breslau a capitulé. J'ai accordé aux corps d'infanterie et de cavalerie 20,000 francs pour réparer l'habillement et le harnachement.
Le major général vous enverra l'ordre pour le cantonnement. Mon intention est que vous centralisiez vos administrations et vos dépôts à Plock.
Du moment que vous serez arrivé à avoir organisé vos manutentions de manière à donner une ration de pain à votre armée, il faut faire faire à Plock et dans les arrondissements 3,000 rations de biscuit par jour, pour en avoir pour tout votre corps pendant six ou huit jours. Vous aurez vu par les différents ordres du jour, que j'ai accordé de l'argent aux corps. Tout va être soldé; j'attends six millions qui m'arrivent par Küstrin.
Varsovie, 8 janvier 1807
Au prince Jérôme
Mon Frère, je ne doute pas qu'à l'heure qu'il est vous ne soyez entré dans Breslau. Immédiatement après votre arrivée, faites partir sans perdre de temps, tout le biscuit qui se trouve dans cette place pour Varsovie. Faites partir également 20,000 quintaux de farine de froment. Il n'y a pas un moment à perdre. Dirigez vos convois par Petrikau. Je pense qu'il est convenable que vous séjourniez de votre personne à Breslau pendant quelque temps, pour surveiller l'administration et empêcher les voleries. Faites faire tous les inventaires. Correspondez avec moi tous les jours. Envoyez-moi tantôt un aide de camp, tantôt un officier bavarois, tantôt un courrier, pour me donner chaque jour de vos nouvelles. J'ai besoin de Breslau pour me nourrir ici. Si vous pouvez vous procurer 3,000,000 de rations d'eau-de-vie, envoyez-les-moi ; vous êtes dans un pays de ressources. Soyez toujours à cheval. Visitez tous les magasins, tenez registre de tout, qu'on ne vous trompe pas, sans quoi ils vont se mettre tous, comme ils ont fait partout, à s'emparer des magasins pour les vendre et les dilapider.
Varsovie, 8 janvier 1807
A M. de Turenne, officier d'ordonnance de l'Empereur
M. de Turenne se rendra à Posen. Il conférera avec le commandant de la province, avec l'intendant et le commissaire ordonnateur. Il s'informera du jour où les différents convois d'argent, de souliers, de capotes, de fusils saxons ou prussiens, bons pour l'infanterie française, ainsi que les convois de vin et d'eau-de-vie, venant de Stettin et de Küstrin, ont passé par Posen, afin que je puisse calculer quand ils arriveront à Varsovie. Il prendra des informations en route sur ces convois, afin que, s'il en rencontrait, il puisse le relater dans le rapport qu'il m'enverra de Posen. Il visitera les hôpitaux. Il me fera un rapport détaillé sur la route, sur la situation des chemins après ces jours de gelée.
Il se rendra de là à Stettin, y séjournera vingt-quatre heures, afin de prendre connaissance de la situation des fortifications, et des magasins de cette place, des troupes qui s'y trouvent, et du départ des convois de vin, d'eau-de-vie, de souliers, de capotes, de draps. Il remettra ce second rapport au général Thouvenot, pour qu'il me le fasse passer par un officier ou par un courrier.
Delà, M. de Turenne se rendra à Anklam, au quartier général du maréchal Mortier, et lui remettra la lettre ci-jointe.
De là, il se rendra à Hambourg et remettra à M. Bourrienne la lettre à son adresse. Il restera à Hambourg trois au quatre jours pour prendre connaissance de la quantité de capotes et de souliers qu'on y a fait faire. Il verra le commissaire des guerres, et surtout mon ministre, pour en accélérer l'envoi. Il verra si mon décret sur le blocus sur l'Angleterre et mes différents ordres sont exécutés. Il prendra note de la situation du corps hollandais, du lieu où il se trouve, et de la manière dont il fait le service.
De là, il reviendra sur ses pas. Il s'arrêtera à Schwerin pour voir la situation du Meklenburg, où en est la levée des chevaux que j'ai ordonnée, et de quelle manière les choses se passent de ce côté. Il s'informera des différents marchés qui ont été passés pour des souliers. De là, il reviendra au quartier général du maréchal Mortier pour voir ce qui s'y passe. Il repassera à Stettin, d'où probablement le corps du général Victor sera parti pour Danzig et Kolberg. Il s'informera de la situation de ce corps et reviendra à Posen. Il mettra dans son rapport ce qu'il entendra dire de vrai ou de faux sur la route.
Varsovie , 8 janvier 1807
Au général Clarke
Les deux bataillons du régiment de la garde de Paris, forts de 1,400 hommes, doivent être arrivés à Magdeburg. Je pense cependant que le général Lagrange aura pu les retenir à Cassel, pour mettre fin aux événements qui ont eu lieu , et que j'approuverais fort. Toutefois mon intention est qu'ils restent à Magdeburg jusqu'à nouvel ordre, ainsi que le régiment de fusiliers de ma Garde. Ce sera 3,000 hommes que je pourrais rejeter sur mes derrières, si ce devenait nécessaire. Envoyez la lettre ci-jointe au général Lagrange, par un de vos aides de camp, qui, en retour, rapportera un rapport détaillé sur la situation du pays.
Varsovie, 8 janvier 1807
Au général Lagrange
Je reçois vos lettres du 26 décembre. J'avais déjà appris très vaguement qu'il y avait eu une insurrection à Cassel. J'espère que recevrai bientôt un rapport détaillé. On dit que les rebelles ont pris un convoi de vingt pièces de canon et se sont emparés des armes qui étaient déposées dans plusieurs maisons communes, entre autres dans la maison commune de Hersfeld. C'est une grande imprudence d'avoir laissé des fusils; J'avais bien recommandé qu'on n'en laissât pas. Le régiment de Paris, fort de 1,400 hommes, et celui des fusiliers de ma Garde, fort de 1,400 hommes, doivent avoir passé par Cassel. Un régiment italien doit y avoir également passé. Ces trois régiments forment plus de 5,000 hommes, et, avec ce que vous avez, doivent vous composer pas moins de 8,000 hommes. Je suppose que vous avez retenu ces troupes et que vous vous en serez servi pour venger l'affront fait à mes armes. Mon intention est que le principal village où est née l'insurrection soit brûlé, et que trente des principaux chefs soient passés par les armes. Un exemple éclatant est nécessaire pour comprimer la haine de ces paysans et de cette soldatesque. Si vous n'avez fait aucun exemple, faites-en sans délai; cela est nécessaire pour le reste de l'Allemagne, où il serait bien funeste qu'il passât en principe qu'on peut se révolter impunément. Si vous avez laissé passer le régiment de Paris et les fusiliers de ma Garde, écrivez au maréchal Kellermann de vous envoyer les 5e, 6e et 7e régiments provisoires. Ils sont composés de conscrits, il est vrai, mais qui sont conduits par d'anciens officiers. Que le mois ne se passe pas que le principal village, bourg ou petite ville, qui a donné le signal de l'insurrection soit brûlé, et qu'un grand nombre d'individus aient été fusillés. Voilà l'ordre positif que je vous envoie par un aide de camp du gouverneur de Berlin. Je ne crains pas un mouvement de guerre à Cassel. J'y enverrai, s'il est nécessaire, des troupes de Magdeburg. Il faut que le pays soit persuadé que toute levée de boucliers sera sévèrement punie.
Faites-moi un rapport détaillé sur toute cette affaire; ne me dissimulez rien. Je ne puis regarder une insurrection dans l'État de Cassel, au mois de janvier, que comme un événement heureux. La haine que les souverains de ce pays ont toujours nourrie parmi les habitants contre la France devait la faire prévoir. Il vaut mieux qu'elle ait éclaté dans ce moment que lorsque les Anglais auraient pu faire une descente sur l'Elbe. Il faut bien saisir le moment actuel pour les désarmer et laisser des traces qui restent dans les cantons qui se sont révoltés. Toute autre manière de se conduire serait funeste: 30 des principaux coupables fusillés, 2 ou 300 envoyés dans les citadelles de France, et le bourg ou la petite ville, principal foyer de révolte, brûlé, sont des exemples nécessaires, et les actes de vigueur sont humains en ce qu'ils empêchent la renaissance de nouvelles séditions.
Varsovie, 8 janvier 1807
49e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE
Breslau s'est rendu. On n'a pas encore la capitulation au quartier général. On n'a pas non plus l'état des magasins de subsistances,
d'habillement et d'artillerie; on sait cependant qu'ils sont très-considérables. Le prince Jérôme a dû faire son entrée dans la place. Il va assiéger Brieg, Schweidnitz et Kosel.
Le général Victor, commandant le 10e corps d'armée, s'est mis en marche pour aller faire le siège de Kolberg et de Danzig, et prendre ces places pendant le reste de l'hiver.
M. de Zastrow, aide de camp du roi de Prusse, homme sage et modéré, qui avait signé l'armistice que son maitre n'a pas ratifié, a cependant été chargé, à son arrivée à Königsberg, du portefeuille des affaires étrangères.
Notre cavalerie légère n'est pas loin de Königsberg.
L'armée russe continue son mouvement sur Grodno. On apprend que, dans les dernières affaires, elle a eu un grand nombre de généraux tués et blessés. Elle montre assez de mécontentement contre l'empereur de Russie et la cour. Les soldats disent que, si l'on avait jugé leur armée assez forte pour se mesurer avec avantage contre les Français, l'empereur, sa Garde, la garnison de Saint-Pétersbourg et les généraux de la cour, auraient été conduits à l'armée par cette même sécurité qui les y amena l'année dernière; que si, au contraire, les événements d'Austerlitz et ceux d'Iéna ont fait penser que les Russes ne pouvaient pas obtenir des succès contre l'armée française, il ne fallait pas les engager dans une lutte inégale. Ils disent aussi :
"l'empereur Alexandre a compromis notre gloire. Nous avions toujours été vainqueurs; nous avions établi et partagé l'opinion que nous étions invincibles. Les choses sont bien changées. Depuis deux ans on nous fait promener des frontières de la Pologne en Autriche, du Dniester à la Vistule, et tomber partout dans les piéges de l'ennemi. Il est difficile de ne pas s'apercevoir que tout cela est mal dirigé. "
Le général Michelson est toujours en Moldavie. On n'a pas de nouvelles qu'il se soit porté contre l'armée turque qui occupe Bucarest et la Valachie. Les faits d'armes de cette guerre se bornent, jusqu'à présent, à l'investissement de Choczim et de Bender. De grands mouvements ont lieu dans toute la Turquie pour repousser une aussi injuste agression.
Le général baron de Vincent est arrivé de Vienne à Varsovie, porteur de lettres de l'empereur d'Autriche pour l'empereur Napoléon.
Il était tombé beaucoup de neige et il avait gelé pendant trois jours. L'usage des traîneaux avait donné une grande rapidité aux communications; mais le dégel vient de recommencer. Les Polonais prétendent qu'un pareil hiver est sans exemple dans ce pays-ci. La température est effectivement plus douce qu'elle ne l'est ordinairement à Paris dans cette saison.
Varsovie, 9 janvier 1807
La répartition du payeur ne vaut rien; il faut la faire de la manière suivante :
1° Assurer le prêt d'un mois pour les soldats de la division Suchet;
2° Idem de la Garde. Dix ou vingt jours doivent avoir déjà été assurés. Par ce moyen, on sera sûr que les troupes de Varsovie recevront le prêt jusqu'au 30 janvier. Pour la Garde cela sera affecté sur le prêt de décembre, et pour la division Suchet pour novembre.
3° Verser, par à-compte sur la solde de novembre de la division Suchet, et de décembre de la Garde, quinze jours de solde pour les généraux et officiers.
4° Payer vingt jours de prêt de novembre aux maréchaux Soult, Davout et Augereau.
Quant au maréchal Ney et au prince de Ponte-Corvo, il faut ordonner des envois directs d'argent de Berlin sur Thorn, et, comme l'argent ne manque pas à Berlin, il faut faire entrer dans la caisse du payeur ce qui reste dû d'octobre, novembre et quinze jours de décembre, conformément à l'ordre du jour.
ADMINISTRATION
Il faut faire payer à la Garde le tiers de ce qu'accorde le décret de l'Empereur pour mettre l'administration en état et pour la masse de janvier.
Il faut faire solder à tous les régiments de cavalerie le premier payement de l'ordre du jour d'hier, de 5,000 francs.
Il faut faire payer à toute la réserve de cavalerie vingt jours de prêt. Demain il sera remis l'état de !out ce qu'il faut pour tout ce que
je viens de demander.
L'officier qui escortait le convoi d'argent doit être arrêté, ainsi que les deux soldats qui n'ont pas été à leur poste; ils seront interrogés par un officier de gendarmerie.
Demain, M. Daru (comme le trésor de 4,000,000 va arriver) me remettra le projet de répartition de manière à remplir mes intentions, l'ordre du jour relatif à la solde, la gratification aux corps pour l'habillement, et ce qui est nécessaire au ministre pour l'administration de l'armée.
Varsovie, 9 janvier 1807
NOTE POUR L'INTENDANT GÉNÉRAL
Aucun Russe ne sera conduit aux hôpitaux de Varsovie.
Dans la journée de demain, il sera choisi, à une lieue ou deux de Varsovie, un local où il sera établi un hôpital, et tous les Russes malades y seront transportés. On y mettra un commandant, des officiers de santé du pays et un administrateur.
Je ne veux point de malades russes à Varsovie, parce qu'ils me donneraient la peste.
Les officiers russes sont seuls exceptés de cette disposition.
Palais de Varsovie, 9 janvier 1807
DÉCRET
ARTICLE ler. - La petite église de l'Annonciade, à Alexandrie, et ses dépendances, sont affectées à l'établissement de l'académie des sciences et arts d'Alexandrie.
ART. 2. - Notre ministre de la guerre est chargé de l'exécution du présent décret.
Varsovie, 10 janvier 1807
A la princesse Wilhelmine d'Orange
Ma Cousine, j'ai reçu votre lettre du 25 décembre. Je prends part aux nouveaux malheurs qui vous sont arrivés. Vous êtes la maîtresse de rester à Berlin et partout où cela pourra vous convenir. Je serai fort aise, lorsque je viendrai dans cette ville, de vous voir et de vous assurer de vive voix du désir que j'ai de vous être agréable et de la parfaite considération que je vous porte.
Varsovie, 10 janvier 1807
A la princesse Auguste de Hesse-Cassel
Ma Cousine, j'ai reçu la lettre de Votre Altesse du 25 décembre, avec celle de la princesse votre sœur. Je ne vois aucun inconvénient à ce qu'elle reste à Berlin et partout où cela peut lui convenir. Je désire trouver des occasions plus réelles de donner à Votre Altesse des preuves de l'estime que je lui porte.
Varsovie, 10 janvier 1807
Au maréchal Berthier
Mon Cousin, je ne vois jamais dans les états que vous me remettez les états de situation des troupes qui se trouvent à Thorn; témoignez-en mon mécontentement au gouverneur.
Demandez-lui sur-le-champ un rapport sur ce qui a été fait pour les travaux des fortifications et du pont, pour les vivres, pour la manutention.
Je vois que le général Éblé a changé l'organisation des régiments provisoires; écrivez-lui qu'il n'a pas ce droit; que nous allons nous trouver par là dans la confusion; que ces régiments sont formés par un ordre, et qu'on ne peut pas indistinctement changer les compagnies d'un bataillon pour les mettre dans un autre.
Varsovie, 11 janvier 1807
A l'Impératrice, à Mayence
J'ai reçu ta lettre du 27, où je vois que tu étais une peu inquiète sur les événements militaires. Tout est fini, comme je te l'ai mandé, à ma satisfaction; mes affaires vont bien. L'éloignement est trop considérable pour que je permette que, dans cette saison, tu viennes si loin. Je me porte fort bien, un peu ennuyé quelquefois de la longueur des nuits.
Je vois ici, jusqu'à cette heure, assez peu de monde.
Adieu, mon amie; je désire que tu sois gaie et que tu donnes un peu de vie à la capitale. Je voudrais fort y être.
Tout à toi.
J'espère que la reine est allée à la Haye avec M. Napoléon
Varsovie, 11 janvier 1807
A M. Cambaceres
Mon Cousin, j'ai reçu votre lettre du 28 décembre. Je vous prie de me faire connaître, comme curiosité, comment a fini l'affaire ducardinal Maury- On m'a assuré qu'on lui refusait le titre de Monsieur le Cardinal. Si cela est vrai, c'est bien ridicule et bien plat.
Varsovie, 11 janvier 1807
A M. de Champagny
Monsieur Champagny, il faut laisser à la place de la Concorde le nom qu'elle a. La concorde, voilà ce qui rend la France invincible.
Varsovie, 11 janvier 1807
A M. Fouché
Je reçois votre lettre du 29. M. Daunou a les talents nécessaire pour bien faire tout ce qu'il se chargera de faire. Je vous envoie des lettres de Mittau; voyez ce qu'elles contiennent d'important.
Varsovie, 11 janvier 1807
Au prince Primat
J'ai reçu vos lettres des ler et 7 décembre. Je remercie Votre Altesse de ce qu'elle veut bien me dire d'aimable. Elle vivra longtemps; on n'est qu'aux deux tiers de sa vie à soixante ans.
L'Impératrice se loue beaucoup du bon accueil qu'elle a reçu de Votre Altesse à Francfort.
Varsovie, 11 janvier 1807
Au général Dejean
Monsieur Dejean, vous avez donné l'ordre que les dépôts qui sont en France n'envoient rien aux corps. Il n'y a ici aucunes ressources et les corps manquent de beaucoup de choses. Le 64e avait son habillement entier an delà du Rhin au mois d'août; il est aujourd'hui absolument nu. Faites partir ledit habillement. Faites la même chose pour les corps qui sont dans la même situation. Pressez surtout le départ des souliers.
Varsovie, 11 janvier 1807
Au maréchal Augereau
Mon Cousin, j'ai reçu votre lettre du 9 janvier. J'ai accordé de l'avancement à une partie de votre état-major, conformément à votre demande. Les officiers qui ne sont point compris dans ces promotions le seront aux premiers événements et aux premières places vacantes. J'apprécie les services qu'ils ont rendus, et ils ne peuvent être que de bons officiers ayant été formés sous vos yeux.
Varsovie, 11 janvier 1807
Au général Songis
J'ai adopté le travail que vous m'avez présenté. Il reste actuellement à faire celui pour les services rendus à Iena et pour les dernières affaires. Il y a un capitaine d'artillerie qui commandait l'artillerie légère du maréchal Lannes, qui a fait faire le chemin à Iena pour monter l'artillerie. Je désire avoir son nom ainsi que celui des quatre canonniers à cheval qui ont le plus servi dans cette circonstance.
Le maréchal Soult se loue beaucoup de plusieurs de ses capitaines d'artillerie légère, de celui qui commande à la division Saint-Hilaire. Le prince Murat a eu lieu d'être très-satisfait de plusieurs capitaines d'artillerie légère qui sont de la réserve, etc. Il faut donc me faire un détail de tous ceux qui ont commandé l'artillerie dans les diverses divisions, et me faire connaître si je les ai récompensés. Dans les revues que j'ai passées des divers corps d'armée, je n'ai rien fait pour l'artillerie, parce que j'ai toujours voulu faire un travail général pour toute l'arme. Présentez-moi cela sans délai. Faites-moi connaître si j'ai dans la campagne donné de l'avancement à quelqu'un ; je ne m'en souviens pas. L'officier de pontonniers qui a fait le pont de Varsovie doit être distingué. Il est donc convenable que vous fassiez un rapport historique de tous ceux qui se sont le plus distingués dans la campagne et de ceux à qui on doit un témoignage de satisfaction.
Varsovie, 11 janvier 1807
Au général Clarke
Je reçois votre lettre du 5 janvier. Vous avez mal fait de faire rétrograder le 19e de chasseurs. Que peut faire la cavalerie dans les montagnes de la Hesse ? D'ailleurs j'aurais eu assez de troupes en France pour faire face aux troubles de ce pays, et des mouvements rétrogrades ne valent jamais rien.
Je vous ai déjà fait connaître que mon intention était que le régiment de la Garde de Paris, le régiment des fusiliers de ma Garde et le régiment italien, qui ne seraient point venus à Berlin, restassent à Magdeburg. Je persiste dans les mêmes dispositions. Donnez des ordres en conséquence, mais surtout qu'il n'y ait aucun mouvement rétrograde. Je viens de voir des détachements du 64e qui viennent d'arriver sans gibernes et ayant de très-mauvais fusils, qui n'ont point séjourné à Berlin, n'y ont pas passé votre revue et n'ont point reçu de souliers. Je vous recommande de porter une attention toute particulière à l'armement et à l'habillement des hommes qui passent par votre gouvernement, de leur faire donner des gibernes, en un mot de me les envoyer en bon état. Ce pays n'offre aucune ressource. Les régiments qui partent de Berlin et de Magdeburg doivent être abondamment fournis de tout, et avoir leur armement et leur habillement en très-bon état. Tous les hommes isolés arrivent sans armes et ne reçoivent rien ni à Stettin ni à Küstrin. Réitérez vos ordres qu'aucun homme n'arrive sans armes, c'est comme s'il ne m'arrivait rien.
Le 111e régiment et beaucoup de régiments ont leur habillement à Berlin, où on le leur retient. Voyez à donner des ordres pour qu'il parte.
Je vois toujours sur l'état de situation du 5 janvier 151 chevaux et 200 hommes de la compagnie Breidt.
Faites-moi connaître s'il est vrai que vous avez fait lever le scellé qui avait été mis sur les marchandises séquestrées à Magdeburg, Stettin, Francfort-sur-l'Oder et Küstrin. J'avais ordonné qu'on en dressât des inventaires et qu'il ne fût rien fait que les inventaires ne fussent dressés.
En général, on ne peut pas être plus mécontent que je ne le suis de M. Estève, qui ne fait rien, n'écrit rien, ne verse rien; faites-le-lui connaître. Il doit écrire tous les jours à M. Daru.
Varsovie, 11 janvier 1807
Au général Clarke
Je vous ai recommandé de passer la revue de tous les détachements qui passent à Berlin pour se rendre à la Grande Armée et de leur donner à cet effet un séjour; je vous autorise aujourd'hui à leur en donner deux ou trois, s'il est nécessaire. Il faut absolument que vous fassiez donner une capote aux hommes des dépôts qui n'en ont point. Ces malheureux jeunes gens traversent la Pologne transis de froid, ce qui me fait des malades. Je vous recommande donc bien d'avoir soin que tous ceux qui partiront de Berlin aient des souliers et des capotes.
Varsovie, 11 janvier 1807
Au général Bourcier
Des détachements du 9e de hussards m'arrivent sans manteaux. Veillez à ce que cela n'ait pas lieu. Portez tous vos soins à ce que les détachements de cavalerie que vous m'envoyez soient très-bien équipés. Deux jours de plus ou de moins de retard ne font rien. Je n'ai pas de ressources ici pour équiper les hommes.
Varsovie, 11 janvier 1807
Au roi de Naples
Vous me demandez vingt-quatre millions par an. L'armée française que j'ai dans le royaume de Naples ne me coûterait cela nulle part, Les armements considérables que je fais ne me permettent pas d'envoyer une si grande quantité de fonds hors de France. Cependant j'ai ordonné qu'on vous envoyât ce qu'il y a de disponible de la monnaie de Turin.
Varsovie, 12 janvier 1807
A M. Cambacérès
Je reçois votre lettre du 29 décembre. Les Russes s'éloignent toujours à grandes marches. Ils sont toujours en grande guerre contre la Porte. Les choses s'animent fort de part et d'autre de côté-là.
Varsovie, 12 janvier 1807
A M. de Talleyrand
Monsieur le Prince de Bénévent, le moment me paraît favorable pour prendre un parti sur les postes d'Allemagne. Je ne puis souffrir que les postes des États confédérés soient livrées aux agents du prince de la Tour et Taxis. Ce qui est tout simple aujourd'hui sera très difficile dans un autre temps. Le mieux est de chasser ces bureaux des pays conquis.
Varsovie, 12 janvier 1807
Au général Berthier
Mon Cousin, écrivez au général Lagrange que j'ai reçu sa lettre du 3 janvier; que je n'ai reçu aucun détail sur les troubles de Hesse; qu'il doit garder toutes les troupes qu'il a jusqu'à ce que les ordres que je lui ai envoyés par un aide de camp du gouverneur à Berlin soient exécutés, et qu'il ait été fait un exemple sévère qui serve de leçon.
Donnez ordre que le 31e d'infanterie légère qui arrive à Mayence du 10 au 15 février, y reste jusqu'à nouvel ordre.
Les deux bataillons du 15e de ligne, qui arrivent à Paris le 27 janvier, y attendront de nouveaux ordres.
Le 19e de ligne doit être arrivé à Münster. Écrivez au général Loison de l'y faire reposer et bien nourrir, et de le faire exercer tous les jours à la cible. J'attendrai l'état de son habillement et de son armement pour prendre un parti définitif sur ce régiment.
Donnez ordre qu'il soit payé 400 francs de gratification aux onze gendarmes de la garnison d'Erfurt qui ont été pillés par les Hessois et chargez l'intendant général de remettre leur armement et leur habillement en état.
Varsovie, 12 janvier 1801
Au prince Jérôme
Mon Frère, je reçois votre lettre du 9 janvier. Vous n'aviez pas encore reçu celle par laquelle je vous faisais connaître que vous deviez rester de votre personne à Breslau et commencer le siège de Kosel; c'est une place peu importante et qui ne doit pas faire une longue résistance. Je ne doute pas que Schweidnitz, Brieg et Kosel ne soient prises cet hiver.
Immédiatement après la réception de la présente lettre, faites partir un million pour Varsovie sur la rentrée des contributions. J'accorderai ce qui est nécessaire pour vos troupes; mais nous avons ici un très-grand besoin d'argent. Faites partir également 20,000 quintaux de farine et tout le biscuit qu'il vous sera possible d'envoyer. Mettez de l'activité dans ces envois; faites-les bien escorter et établissez leur ordre de route, afin qu'on sache quand ils arriveront. J'ai pris un décret pour lever une contribution extraordinaire à Breslau, et pour requérir des fournitures de souliers, de draps et de chevaux sur cette contribution. Mon intention est d'accorder dix décorations de la Légion d'honneur à la division wurtembergeoise; envoyez-moi un état des hommes qui s'en sont rendus les plus dignes. J'en accorderai aussi à quelques Bavarois, surtout de la cavalerie. Je n'ai pas encore reçu l'inventaire des magasins de subsistances. En cherchant bien, vous trouverez des magasins de harnais et de souliers. Donnez ordre que vos prisonniers passent par Dresde, Bamberg et Würzburg, au lieu de passer par Berlin.
Varsovie, 12 janvier 1807
Au général Songis
Je vous envoie l'inventaire de l'artillerie de Breslau. Vous avez là des canons qui vous seront fort utiles. Vous y trouverez des fers coulés et de la poudre en suffisance. Cela vous mettra à même de ne pas en tirer des derrières. Je pense que les pièces de 24 seront utiles à Varsovie, pour placer sur cette rive une batterie qui flanque les ouvrages de Praga; faites-les venir.
Vous avez soixante et dix pièces de 12, qui vous donneront les moyens d'armer, comme je le désire, mes têtes de pont de Modlin, Sierock et Praga . J'imagine qu'il y aura une grande quantité de pièce de rechange. Si cela est, faites-en construire les affûts.
Varsovie, 12 janvier 1807
Au général Clarke
Monsieur le Général Clarke, je ne conçois rien à la conduite du général Lagrange, qui n'écrit point. Cependant mon dernier courrier a passé à Cassel, à minuit, sans qu'il se soit donné la peine d'en profiter. Mon intention est que le 14e bavarois et un bataillon d'infanterie légère restent à Berlin. Le régiment de la garde de Paris et le régiment des fusiliers de la Garde sont arrivés à Cassel le 1er janvier. Moyennant ces régiments, j'ai dans cette ville 14,000 hommes; jugez si avec cela je dois être inquiet des événements. Parlez donc à
M. Estève, qui n'écrit pas, ne rend compte de rien, et, ce qui est pis ne verse aucune somme. Mon trésor ne se ressent pas plus de la conquête de la Prusse que si le roi de Prusse et son armée étaient à Berlin. Dites-lui qu'il écrive en détail et qu'il fasse verser de l'argent. Occupez-vous un peu de cela. Je vous ai écrit que Breslau s'était rendu; 5,500 hommes vont traverser la Prusse. Envoyez au-devant d'eux, à Glogau, pour qu'on les fasse passer par Dresde. Cela évitera le passage par Berlin.
Varsovie, 13 janvier 1807
A M. Cambacérès
Je reçois votre lettre du 31 décembre. L'affaire de Hesse-Cassel est terminée. Il paraît que c'est la soldatesque qui a voulu remuer.
Varsovie, 13 janvier 1807
DÉCRET
ARTICLE ler. - Le pont construit sur la Seine, en face du Champ-de-Mars, s'appellera Pont d'Iéna.
ART. 2. - Le quai sur lequel il doit s'appuyer, du côté de Chaillot, et qui doit être élargi et refait dans une nouvelle direction, s'appellera, dans la partie qui sera comprise entre la barrière et les pompes à feu, Quai de Billy, du nom du général tué dans cette bataille.
ART. 3. - La rue à ouvrir eu face du pont, depuis le quai jusqu'à l'enceinte de Paris, et les rues projetées dans son voisinage porteront les noms des colonels Lamotte, Barbanègre, Marigny, Doullem bourg, tués dans la journée d'Iena.
ART. 4. - Notre ministre de l'intérieur est chargé de l'exécution du présent décret.
Varsovie, 13 janvier 1807
Au vice-amiral Decrès
J'ai reçu votre lettre du 30 décembre. Je verrais avec plaisir que mon escadre et le vaisseau espagnol sortissent de Cadix et rentrassent à Toulon. Je verrais aussi avec plaisir que mon escadre de Rochefort se rendit à Toulon.
Je désire que celle de Cadix se rende à Toulon, parce que, dans ces circonstances, il est d'un grand intérêt que mes escadres soient dans mes ports; celle de Rochefort, parce qu'elle n'est pas en sûreté à l'île d'Aix; car, quelques troupes que j'y mette, l'ennemi, en y débarquant 12 ou 1500 hommes, pourrait se rendre maître de file assez de temps pour compromettre la sûreté de cette escadre. D'ailleurs je ne puis que sourire à l'idée d'avoir à Toulon, avec les 5 vaisseaux qui y sont, les 12 de Cadix et de Rochefort, c'est-à-dire une escadre de 18 vaisseaux. C'est une idée qui me sourit beaucoup; car les côtes de la Sicile craindront qu'elle n'aille à Constantinople, et même dans l'Adriatique. Il faudrait donc la bloquer, et, dans ce cas, ce serait des forces de moins devant Naples. Donnez donc ordre à cette escadre d'exécuter ce mouvement. J'imagine que, dans vos instructions, vous indiquerez les précautions nécessaires, soit pour le passage du détroit, soit pour l'arrivée à Toulon, soit enfin dans le cas où l'une des deux escadres, arrivée avant l'autre, aurait attiré l'ennemi.
J'imagine que vous aurez déjà expédié des bricks et des frégates à l'île de France et à la Martinique.
Varsovie, 13 janvier 1807
Au maréchal Berthier
J'ai besoin d'un général de cavalerie à Potsdam, près le général Bourcier; j'en ai besoin d'un à Breslau, j'y ai nommé le général Fauconnet. J'en ai besoin d'un à quatre lieues de Varsovie, pour réunir tous les petits détachements et hommes isolés qui passent à Varsovie de manière qu'il ne séjourne pas un homme isolé à Varsovie; on pourrait y nommer le général Roget. J'ai besoin d'un général de cavalerie au petit dépôt de Lenczyca.
Donnez l'ordre au général Trelliard de rentrer en France. Il sera employé à Mayence sous les ordres du maréchal Kellermann, pour visiter les dépôts de cavalerie de la 5e et de la 26e division militaire et pour veiller à ce que tous les détachements de cavalerie qui rentrent à l'armée soient munis de tout ce qui est convenable.
Il me faudrait à Strasbourg un colonel ou un autre général cavalerie pour surveiller les dépôts qui sont dans la 5e division militaire.
J'ai mis à la retraite un certain nombre d'officiers; désignez-en quatre qui resteront attachés an dépôt de Lowicz, sous les ordres du général Guérin.
Donnez ordre au général Duprés de rester à Potsdam, de bien soigner les trois régiments de cavalerie légère qui sont sous ses ordres, de les faire bien monter et équiper, et de vous envoyer leur état de situation. Il recevra là des ordres pour marcher avec ces régiments lorsque cela sera nécessaire.
Témoignez mon mécontentement au commandant de Posen de ce que le service ne se fait pas : il dirige sur Varsovie des hommes qui appartiennent au 1er et au 6e corps. Réitérez-lui l'ordre que tout ce qui appartient à ces corps d'armée, ainsi qu'aux divisions de dragons Grouchy et Sahuc, et à la division de cuirassiers d'Hautpoul, soit dirigé sur Thorn.
Répondez an général Teulié qu'il doit rester à Berlin jusqu'à nouvel ordre; que le 2e régiment italien et le 3e de sapeurs le joindront; que les douze pièces d'artillerie doivent le joindre à Berlin, ainsi qu'un ou deux régiments de cavalerie; qu'il veille à ce que les soldats soient en bon état, bien entretenus, bien chaussés, et qu'en arrivant à l'armée ils aient une paire de souliers aux pieds et trois paires dans le sac; qu'ils aient la quantité de cartouches en règle, et qu'ils se trouvent dans le cas de se distinguer.
Écrivez au général Bourcier que les trois régiments de cavalerie arrivant d'Italie doivent rester en entier à Potsdam; qu'il doit les faire reposer, les bien équiper, et que ce n'est guère que dans quinze ou vingt jours que je leur enverrai des ordres.
Autorisez le général Bourcier à donner 20 chevaux à la 1e compagnie des gendarmes d'ordonnance.
Écrivez au général Bourcier pour qu'il témoigne mon mécontentement au colonel du 19e régiment de chasseurs de ce qu'il n'a pas amené tous ses bagages, et pour qu'il envoie sur-le-champ un courrier extraordinaire pour en accélérer l'arrivée.
Donnez ordre au général Clarke de faire passer à Küstrin le régiment bavarois qui se trouve à Berlin, aussitôt que le commandant de Küstrin pourra faire partir les détachements du 10e léger et du 32e, qu'il a retenus, ainsi que les hommes des dépôts des
1e, 3e, 4e, 5e, 6e, 7e et 8e corps, qui se trouvent en état de partir, avec des capotes, des souliers, des armes et 50 cartouches par homme.
Témoignez mon mécontentement au commandant de Küstrin de ce que beaucoup d'hommes isolés arrivent sans armes.
Quant au 1er bataillon du 1er régiment provisoire, le commandant de Magdeburg attendra des ordres; il en passera la revue, fera connaître s'il y a des souliers, des capotes, ainsi que la situation de son armement. La 1e légion du Nord n'était pas partie, au 2 janvier, de Magdeburg, et ce commandant croyait qu'il pouvait la garder. Réitérez-lui l'ordre de la faire partir. Témoignez mon mécontentement à l'intendant de cette province de ce qu'il n'a pas encore envoyé l'état de l'habillement des 1er et 2e régiments provisoires. Donnez ordre à cet intendant de fournir aux troupes du grand-duc de Berg tout ce qui est nécessaire pour leur habillement et leur armement.
Il y a eu quelques erreurs d'écriture, puisqu'il y a eu un mouvement d'hommes appartenant au 3e corps, de Küstrin sur Stettin, et que le 3e corps a 300 hommes d'infanterie à son dépôt à Stettin. Donnez l'ordre qu'il n'y ait à Stettin aucun dépôt d'infanterie de ce corps, et que tout ce qui sera armé et ayant une capote et deux paires de souliers dans le sac en parte pour ce corps d'armée. Le dépôt du 3e corps est à Küstrin, et non à Stettin. Il n'y a que le dépôt du ler corps qui doit être à Stettin.
Que veut dire le commandant de Stettin lorsque, dans la situation de cette place du 31 décembre, il porte 187 hommes du 1er corps, dont 111 hors de service, 277 du 3e corps, dont 140 hors de service, etc. ? Qu'entend-il par hors de service ? sont-ce des blessés, ou des hommes en convalescence qui se rétabliront ? Engagez-le à parler clair.
Varsovie, 13 janvier 1807
Au maréchal Berthier
Mon Cousin, donnez ordre au général Belliard de parcourir tous les environs de Varsovie où des détachements de cavalerie ont été envoyés; on m'assure qu'il y a plus de 2,000 chevaux. Il en passe la revue et me fera connaître la situation des hommes et des chevaux de l'habillement, de l'armement et de l'équipement.
Le grand-duc de Berg me proposera un endroit situé à quatre lieues au plus de Varsovie, où l'on puisse faire arrêter les détachements et hommes isolés qui viennent joindre. Il faut un général pour commander ces dépôts. C'est à l'état-major de la réserve à prendre des mesures pour que ces hommes isolés et ces détachements rejoignent leurs divisions, et que tout cela se fasse en ordre.
Varsovie, 13 janvier 1807
Au maréchal Berthier
Mon Cousin, j'ai ordonné la formation de huit régiments provisoires. Mon intention est qu'ils forment deux divisions, chaque division commandée par un général de division et deux généraux brigade. Faites-moi connaître ceux que j'ai nommés et proposez-moi ceux à nommer pour les compléter.
Je désire aussi que vous me remettiez un tableau des corps dont sont ou seront composés ces régiments provisoires.
Faites-moi dresser un état pareil à celui que vous m'avez remis il y a deux mois, présentant le nombre d'hommes partis depuis le ler novembre jusqu'au 10 janvier pour se rendre à la Grande Armée.
Varsovie , 13 janvier 1807
Au général Songis
Vous avez bien fait de faire venir l'artillerie de Stettin, Spandau Küstrin, lorsque je n'étais pas maître de Breslau; mais il y a d'ici à Breslau 72 lieues et d'ici à Posen 84 lieues. Je ne parle pas de la distance de Stettin et Küstrin. Laissez à Posen et dirigez sur Thorn tout ce qui n'a pas dépassé Posen, soit de Stettin, soit de Küstrin ; mais que Modlin, Sierock et Praga soient armés par l'artillerie de Breslau; et, s'il arrivait que vous eussiez trop de pièces de canon, de celles de Stettin, Küstrin et Spandau, pour Posen, vous renverrez le surplus sur Stettin et Küstrin. Mon intention étant de démolir Breslau, je serai obligé de faire rétrograder l'artillerie sur Glogau. Il vaut mieux se rapprocher pour les approvisionnements de guerre. Il était tout simple de faire venir de Küstrin quand je n'avais pas Breslau. Si j'ai assez de poudre, de boulets, il faut contremander et laisser à Posen ce qui arrive de loin. Küstrin et Stettin peuvent approvisionner Posen et Thorn. J'espère qu'avant quinze jours ou un mois j'aurai Brieg et Kosel, ce qui rapprochera encore de dix ou quinze lieues de Varsovie. Faites reconnaître de bonne heure comment on peut communiquer avec Kosel par la Pilica. Vous n'aurez qu'un transport peu considérable à faire des munitions de Kosel pour les places dont j'ai ordonné l'armement. Je pense que vous pouvez tirer facilement quatre à six millions de cartouches de Breslau. Placez vos relais. L'objet le plus important de tous, c'est les fusils; nous en manquons absolument. J'ai passé hier la revue de deux régiments qui ont besoin, à eux deux, de 600 fusils. Trente-mille fusils ne sont point suffisants, faites-en venir davantage, car , si la campagne prochaine avait des événements sérieux, il faudrait trouver à Küstrin et à Magdeburg une grande quantité de fusils. Faites-moi un rapport là-dessus. Les fusils prussiens qui sont de notre calibre nous serviront comme les autres. Il faut donc faire réserver les fusils à Spandau et à Küstrin pour notre usage. Ce besoin devient considérable.
Varsovie, 13 janvier 1807
Au général Clarke
Que voulez-vous que je statue sur le traitement des invalides et pensionnaires prussiens ? M. Estève n'écrit rien, ne rend compte de rien, ne verse rien ; on ne peut ê1re plus mécontent que je le suis de cet administrateur, qui se moque de nous. Je lis toutes les lettres adressées à l'intendant, et je n'en vois jamais de lui. Je lis tous les états de M. la Bouillerie, je ne vois aucune somme versée. J'attends, pour statuer sur le payement des pensionnaires et invalides, de savoir si le pays rend quelque chose ou ne rend rien. Je vous ai écrit sur cet objet; j'attends, pour prendre un parti, votre réponse. Mon intention était que M. Estève écrivit tous les jours, versât tous les jours parce que mes besoins sont de tous les jours; il ne répond rien. Il est impossible de voir un administrateur des finances, chargé de nourrir une armée, plus insouciant et se moquant davantage des gens.
Varsovie, 13 janvier 1807
Au général Clarke
Je reçois votre lettre du 9 janvier. La faiblesse du général Lagrange ne peut se concevoir; il me croit d'humeur à laisser ces mouvements impunis. S'il avait renvoyé le régiment des fusiliers de la Garde, le régiment italien qui doit y être arrivé le ler janvier, ou le régiment de Paris, donnez ordre qu'ils s'arrêtent à Magdeburg. Mon intention est de réunir beaucoup de forces à Cassel pour faire un exemple qui serve à l'Allemagne.
Le 6e régiment bavarois est arrivé. Je vous ai donné ordre d'envoyer le 14e à Küstrin, le 5e bataillon d'infanterie légère à Glogau; gardez le 6e à Berlin jusqu'à nouvel ordre.
Je vois que la compagnie Breidt a toujours 122 chevaux et plus de 100 hommes à Berlin; que les grenadiers et chasseurs de la Garde y ont 320 hommes et 336 chevaux. Pourquoi ce détachement est-il si considérable ? Est-ce que les dragons seraient arrivés ? Envoyez-m'en le détail.
Faites dire un mot des affaires de Cassel dans les journaux Berlin. Faites dire qu'on a trouvé le bon moyen d'achever de ruiner les affaires de la Maison de Cassel; que, lorsque l'Empereur a appris les troubles de Hesse, il a décrété que jamais cette Maison ne serait rétablie en Hesse.
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Faites passer la lettre ci-jointe au général Lagrange par un de vos officiers, qui verra la situation des choses et vous portera la réponse.
Varsovie, 13 janvier 1807
Au roi de Hollande
J'ai reçu votre lettre du 30 décembre. Je vois avec peine que votre santé ne se rétablit point. Cependant, à l'âge où vous êtes, vos forces reprendront d'un moment à l'autre.
Je vois avec plaisir que vous songez à renforcer la division Dumonceau, de manière qu'elle ait 15,000 hommes; cela est très-nécessaire. Veillez à la stricte exécution du blocus; toutes les nouvelles de Londres sont que le commerce avec la Hollande se fait comme avant le décret. La première qualité d'un roi, c'est la vigueur.
Varsovie, 13 janvier 1807
50e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE
Les troupes francaises ont trouvé à Ostrolenka quelques malades russes que l'ennemi n'avait pu transporter. Indépendamment des pertes de l'armée russe, en tués et en blessés, elle en éprouve encore de très -considérables par les maladies, qui se multiplient chaque jour.
La plus grande désunion s'est établie entre les généraux Kamenski, Bennigsen et Buxhoevden.
Tout le territoire de la Pologne prussienne se trouve actuellement évacué par l'ennemi.
Le roi de Prusse a quitté Königsberg et s'est réfugié à Memel.
La Vistule, la Narew et le Bug avaient, pendant quelques jours, charrié des glaçons; mais le temps s'est ensuite radouci, et tout annonce que l'hiver sera moins rude à Varsovie qu'il ne l'est ordinairement à Paris.
Le 8 janvier, la garnison de Breslau, forte de 5,500 hommes, a défilé devant le prince Jérôme. La ville a beaucoup souffert. Dès les premiers moments où elle a été investie, le gouverneur prussien avait fait brûler ses trois faubourgs. La place ayant été assiégée en règle, on était déjà à la brèche lorsqu'elle s'est rendue. Les Bavarois et les Wurtembergeois se sont distingués par leur intelligence et leur bravoure. Le prince Jérôme investit en ce moment et assiège à la fois toutes les autres places de la Silésie. Il est probable qu'elles ne feront pas une longue résistance.
Le corps de 10,000 hommes, que le prince de Pless avait composé de tout ce qui était dans les garnisons des places, a été mis en pièces dans les combats du 29 et du 30 décembre.
Le général Montbrun, avec la cavalerie wurtembergeoise, fut à la rencontre du prince de Pless vers Ohlau, qu'il occupa le 28 au soir. Le lendemain, à cinq heures du matin, le prince de Pless le fit attaquer. Le général Montbrun, profitant d'une position défavorable où se trouvait l'infanterie ennemie, fit un mouvement sur sa gauche, la tourna, lui tua beaucoup de monde et lui prit 700 hommes, quatre
pièces de canon et beaucoup de chevaux.
Cependant les principales forces du prince de Pless étaient derrière la Neisse, où il les avait rassemblées après le combat de Strehlen. Parti de Schurgast, et marchant jour et nuit, il s'avança jusqu'au bivouac de la brigade wurtembergeoise, placée en arrière de Huben sous Breslau. A huit heures du matin, il attaqua, avec 9,000 hommes le village de Kriethern, occupé par deux bataillons d'infanterie et par les chevau-légers de Linange, sous les ordres de l'adjudant commandant Duveyrier; mais il fut reçu vigoureusement et forcé à une retraite précipitée. Les généraux Montbrun et Minucci, qui revenaient d'Ohlau, eurent aussitôt l'ordre de marcher sur Schweidnitz, pour couper la retraite à l'ennemi. Mais le prince de Pless s'empressa de disperser toutes ses troupes, et les fit rentrer par détachements dans les places, en abandonnant dans sa fuite une partie de son artillerie, beaucoup de bagages et de chevaux. Il a de plus perdu, dans cette affaire, beaucoup d'hommes tués et 800 prisonniers.
Sa Majesté a ordonné de témoigner sa satisfaction aux troupe bavaroises et wurtembergeoises.
Le maréchal Mortier entre dans la Poméranie suédoise.
Des lettres arrivées de Bucarest donnent des détails sur les préparatifs de guerre de Baraictar et du pacha de Widdin. Au 20 décembre, l'avant-garde de l'armée turque, forte de 15,000 homme, était sur les frontières de la Valachie et de la Moldavie. Le prince Dolgorouky s'y trouvait aussi avec ses troupes. Ainsi l'on était en présence. En passant à Bucarest, les officiers turcs paraissaient fort animés; ils disaient à un officier français qui se trouvait dans cette ville : "Les Français verront de quoi nous sommes capables. Nous formerons la droite de l'armée de la Pologne; nous nous montrerons dignes d'être loués par l'Empereur Napoléon. "
Tout est en mouvement dans ce vaste empire : les cheiks et les ulémas donnent l'impulsion, et tout le monde court aux armes pour repousser la plus injuste des agressions.
M. Italinski n'a évité jusqu'à présent d'être mis aux Sept-Tours qu'en promettant qu'au retour de son courrier les Russes auraient l'ordre d'abandonner la Moldavie et de rendre Choczin et Bender.
Les Serviens, que les Russes ne désavouent plus pour alliés, se sont emparés d'une île du Danube qui appartient à l'Autriche, et d'où ils canonnent Belgrade. Le gouvernement autrichien a ordonné de la reprendre.
L'Autriche et la France sont également intéressées à ne pas voir la Moldavie, la Valachie, la Servie, la Grèce, la Roumélie, l'Anatolie devenir le jouet de l'ambition des Moscovites.
L'intérêt de l'Angleterre dans cette contestation est au moins aussi évident que celui de la France et de l'Autriche; mais le reconnaîtra-t-elle ? Imposera-t-elle silence à la haine qui dirige son cabinet ? Écoutera-t-elle les leçons de la politique et de l'expérience ? Si elle ferme les yeux sur l'avenir, si elle ne vit qu'au jour le jour, si elle n'écoute que sa jalousie contre la France, elle déclarera peut-être la guerre à la Porte; elle se fera l'auxiliaire de l'insatiable ambition des Russes; elle creusera elle-même un abîme dont elle ne reconnaîtra la profondeur qu'en y tombant.
Varsovie, 14 janvier 1807
A M. Fouché
Je reçois votre lettre du 2 janvier. Il est difficile de ne pas voir que le Journal de l'Empire et le Mercure ne sont point animés d'un bon esprit. Cela est peu important pour quelques mois; mais il est enfin bien nécessaire d'avoir un homme sage à la tête de ces journaux. Ces deux journaux affectent la religion jusqu'à la cagoterie. Au lieu de réprimer les excès du système exclusif de quelques philosophes, ils attaquent la philosophie et les connaissances humaines. Au lieu de contenir par une saine critique les productions de ce siècle, ils les découragent, les déprécient et les avilissent. Tout cela ne peut pas aller ainsi. Je ne parle point d'opinions politiques, il faut n'être point bien fin pour voir que, s'ils l'osaient, elles ne seraient pas plus saines que celles du Courrier Français.
Varsovie, 14 janvier 1807
DÉCRET
ARTICLE ler. - Jusqu'à ce que le sort de la Pologne ait été fixé par la paix définitive, elle sera gouvernée par un gouvernement provisoire.
ART. 2. - Ce gouvernement sera composé de sept membres. Il prendra le titre de Commission de gouvernement.
ART. 3. - La Commission de gouvernement nommera son président dans son sein. Elle choisira un secrétaire général hors de son sein.
ART. IV. - Elle choisira également hors de son sein cinq personnes chargées de la direction des différentes branches de l'administration publique, savoir : un directeur de la justice, un directeur de l'intérieur, un directeur des finances, un directeur de la guerre et un directeur de la police.
ART. 5. - Ces directeurs travailleront avec la Commission de gouvernement, dont les décisions seront portées à la pluralité des voix.
ART. 6. - La Commission de gouvernement est investie de toute l'autorité nécessaire pour faire, sur le rapport du directeur de chaque partie, les lois et règlements relatifs à la justice, à l'administration intérieure, aux finances, à l'armée et à la police du pays.
ART. 7. - Il ne sera rien changé à la division actuelle du territoire en six départements, savoir : Varsovie, Posen, Kalisz, Bromberg, Plock et Bialystok.
ART. 8. - Sont nommés membres de la Commission de gouvernement :
MM. le maréchal comte Malachowski,
Gutakowski, président de la chambre suprême,
Le comte Stanislas Potocki,
Wybicki,
Le comte Dzialynski,
Bielinski, président de la chambre de Kalisz,
Sobolewski.
Varsovie, 14 janvier 1807
Au prince Eugène
Mon Fils, la division italienne est réunie à Berlin. Les corps sont à 1,600 hommes; au mois de mars et après les premières affaires, ils seront réduits à 1,400 hommes. Je vous ai déjà mandé de faire partir 600 hommes du 3e bataillon pour les compléter. Faites-en partir 600 autres, de manière qu'à la fin de mars je reçoive à Varsovie 1,200 hommes. Il n'en arrivera guère qu'un millier, qui serviront à compléter les trois corps.
Mon intention est d'appeler ici le 4e régiment de ligne italien. Du moment qu'il vous sera arrivé, mettez-le en état. Je vous enverrai des ordres pour le faire partir, dans les premiers jours de mars. Il faut que les deux bataillons partent forts de 2,400 hommes. Mon intention est d'appeler aussi les chasseurs royaux. Je les ferai venir avec le 4e de ligne. Il faut qu'ils partent avec 800 hommes et 800 chevaux. Répondez-moi sur ce que je puis espérer là-dessus. Il y aura alors ici une belle division italienne, de quatre régiments d'infanterie et d'un régiment de cavalerie, qui pourra se distinguer.
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La Maison d'Autriche paraît se décider tous les jours davantage à prendre parti plutôt pour moi que contre. Toutefois il n'en faut pas moins continuer à suivre tous mes ordres, à compléter mes divisions du Frioul, de Brescia et de Vérone à 140 hommes par compagnie. Ce doit être seulement une nouvelle raison pour hâter le départ des 3e et 24e de chasseurs, que je vous ai demandés. Si vous retenez les chevaux, faites en sorte que leurs selles, brides et tout leur harnachement partent avec le régiment. Les deux régiments de cavalerie légère qui sont arrivés à Potsdam avaient laissé leurs selles en arrière, et Dieu sait quand elles arriveront. Écrivez au maréchal Pérignon et donnez les ordres directement, pour que ce qu'il y a de disponible en soldats des quatre régiments de cuirassiers et des trois régiments de cavalerie légère parte pour Potsdam.
Varsovie, 14 janvier 1807
51e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE
Le 29 décembre, la dépêche ci-jointe (cette dépêche est dans le Moniteur du 26 janvier 1807, à la suite du bulletin) du général Bennigsen parvint à Königsberg, au roi de Prusse. Elle fut sur-le-champ publiée et placardée dans toute la ville, où elle excita les transports de la plus vive joie. Le Roi reçut publiquement des compliments. Mais, le 31 au soir, on apprit, par des officiers prussiens et par d'autres relations du pays, le véritable état des choses. La tristesse et la consternation furent alors d'autant plus grandes, qu'on s'était plus entièrement abandonné à l'allégresse. On songea dès lors à évacuer Königsberg, et l'on en fit sur-le-champ tous les préparatifs. Le trésor et les effets les plus précieux furent aussitôt dirigés sur Memel. La Reine, qui était assez malade, s'embarqua le 3 janvier pour cette ville. Le Roi partit le 6 pour s'y rendre. Les débris de la division du général l'Estocq se replièrent aussi sur cette place, en laissant à Koenigsberg deux bataillons et une compagnie d'invalides.
Le ministère du roi de Prusse est composé de la manière suivante :
M. le général de Zastrow est nommé ministre des affaires étrangères ;
M. le général Rüchel, encore malade de la blessure qu'il a reçue la bataille d'Iena, est nommé ministre de la guerre;
M. le président de Sagebarthe est nommé ministre de l'intérieur.
Voici en quoi consistent maintenant les forces de la monarchie prussienne :
Le Roi est accompagné de 1,500 hommes de troupes tant à pied qu'à cheval.
Le général l'Estocq a à peu près 5,000 hommes, y compris les deux bataillons laissés à Koenigsberg avec la compagnie d'invalides.
Le lieutenant général Hamberger commande à Danzig, où il 6,000 hommes de garnison. Les habitants ont été désarmés. On leur a intimé qu'en cas d'alerte les troupes feront feu sur tous ceux sortiront de leurs maisons.
Le général Loucadou commande à Kolberg avec 1,800 hommes.
Le lieutenant général Courbière est à Graudenz avec 3,000 hommes.
Les troupes francaises sont en mouvement pour cerner et assiéger ces places.
Un certain nombre de recrues, que le roi de Prusse avait fait réunir et qui n'étaient ni habillées ni armées, ont été licenciées, parce qu'il n'y avait plus de moyen de les contenir.
Deux ou trois officiers anglais étaient à Königsberg et faisaient espérer l'arrivée d'une armée anglaise.
Le prince de Pless a en Silésie 12 ou 15,000 hommes enfermés dans les places de Brieg, Neisse, Schweidnitz et Kosel, que le prince Jérôme fait investir.
Nous ne dirons rien de la ridicule dépêche du général Bennigsen; nous remarquerons seulement qu'elle paraît contenir quelque chose d'inconcevable. Ce général semble accuser son collègue le général Buxhoevden; il dit qu'il était à Makow. Comment pouvait-il ignorer que le général Buxhoevden était allé jusqu'à Golymin, où il avait été battu ? Il prétend avoir remporté une victoire, et cependant il était en pleine retraite à dix heures du soir, et cette retraite fut si précipitée qu'il abandonna ses blessés. Qu'il nous montre une seule pièce de canon, un seul drapeau francais, un seul prisonnier, hormis 12 ou 15 hommes isolés qui peuvent avoir été pris par les Cosaques sur les derrières de l'armée; tandis que nous pouvons lui montrer 6,000 prisonniers, 2 drapeaux qu'il a perdus près de Pultusk, et 3,000 blessés qu'il a abandonnés dans sa fuite. Il dit encore qu'il a eu contre lui le grand-duc de Berg et le maréchal Davout, tandis qu'il n'a eu affaire qu'à la division Suchet, du corps du maréchal Lannes. Le 17e régiment d'infanterie légère, le 34e de ligne, le 61e et le 88e sont les seuls régiments qui se soient battus contre lui. Il faut qu'il ait bien peu réfléchi sur la position de Pultusk, pour supposer que les Français voulaient s'emparer de celle ville; elle est dominée à portée de pistolet.
Si le général Buxhoevden a fait de son côté une relation aussi véridique du combat de Golymin, il deviendra évident que l'armée francaise a été battue, et que, par suite de sa défaite, elle s'est emparée de 100 pièces de canon et de 1,600 voitures de bagages, de tous les hôpitaux de l'armée russe, de tous ses blessés, et des importantes positions de Sierock, de Pultusk, d'Ostrolenka, et qu'elle a obligé
l'ennemi à reculer de 80 lieues.
Quant à l'induction que le général Bennigsen veut tirer de ce qu'il n'a pas été poursuivi, il suffira d'observer qu'on se serait bien gardé de le poursuivre, puisqu'il était débordé de deux journées, et que, sans les mauvais chemins, qui ont empêché le maréchal Soult de suivre ce mouvement, le général russe aurait trouvé les Français à Ostrotenka.
Il ne reste plus qu'à chercher quel peut être le but d'une pareille relation. Il est le même, sans doute, que celui que se proposaient les Russes dans les relations qu'ils ont faites de la bataille d'Austerlitz. Il est le nième, sans doute, que celui des ukases par lesquels l'empereur Alexandre refusait la grande décoration de l'ordre de Saint- Georges, parce que, disait-il, il n'avait pas commandé à cette bataille et acceptait la petite décoration pour les succès qu'il y avait obtenus, quoique sous le commandement de l'empereur d'Autriche.
Il y a cependant un point de vue sous lequel la relation du général Bennigsen peut être justifiée. On a craint sans doute l'effet de la vérité dans les pays de la Pologne prussienne et de la Pologne russe que l'ennemi avait à traverser, si elle y était parvenue avant qu'il eut pu mettre ses hôpitaux et ses détachements isolés à l'abri de toute insulte.
Ces relations, aussi évidemment ridicules, peuvent avoir encore pour les Russes l'avantage de retarder de quelques jours l'élan que des récits fidèles donneraient aux Turcs; et il est des circonstances où quelques jours sont un délai d'une certaine importance. Cependant l'expérience a prouvé que toutes ces ruses vont contre leur but, et qu'en toutes choses la simplicité et la vérité sont les meilleurs moyens de politique.