15 - 21 Mai 1807
Finkenstein, 15 mai 1807
A M. Cambacérès
Mon cousin, je reçois votre lettre du 6 mai. Je vois, avec plaisir que le code de commerce sera présenté au Corps législatif. Peut-on, sans inconvénient, présenter les deux premiers livres sans le troisième ?
J'ai témoigné mon mécontentement au général Junot de ce qu'il a été si longtemps à partir; mais on quitte Paris bien peu volontiers.
Vous trouverez ci-joint un ordre pour le ministre Dejean; vous veillerez à ce qu'il soit exécuté. Les 9 bataillons qui composent le camp de Saint-Lô auront gagné dans les mois d'avril et de mai plus que l'affaiblissement produit par l'absence du 5e d'infanterie légère. Dites donc à M. Dejean qu'il m'envoie l'état de situation de l'intérieur au ler mai. Je n'ai encore que celui du ler avril, et nous sommes au 15 mai; je devrais avoir celui du ler mai depuis plusieurs jours; cela est fort important pour moi.
Si le général Sanson n'a pas envoyé le travail qu'il a annoncé, faites toujours publier les planches faites, car cet ouvrage n'a que le mérite de la circonstance; faites-les donc paraître sur-le-champ.
Finkenstein, 15 mai 1807
A M. Lacépède
Monsieur de Lacépède, je reçois votre lettre du 4. Je signe les décrets que vous m'avez présentés. Les publicistes pourront discuter le droit de donner des forêts du Domaine sans l'intervention d'une loi. J'ai signé provisoirement, mais il est nécessaire de mettre la chose en règle. Il faut que la Légion d'honneur achète le bois d'Écouen. Elle le peut par compensation de nombreuses créances qu'elle est dans le cas de faire valoir sur l'État. Conférez à ce sujet avec M. l'archichancelier et avec le ministre des finances. Je ne suis pas bien sûr des usages établis à cet égard. Il se pourrait que, le bois d'Écouen étant parvenu au Domaine par la voie de l'émigration, j'eusse plus de latitude que pour d'autres propriétés de ce genre.
J'ai fort approuvé les précautions que vous avez prises sous les rapports de santé. Il est très-important qu'il ne s'établisse pas, dès les commencements, un préjugé contre la salubrité de l'établissement. On a été au moment de me faire détruire le prytanée de Saint-Cyr, parce qu'il y avait eu quelques maladies la première année.
Je vous envoie une note que j'ai dictée sur l'établissement d'Écouen
NOTE
sur l'Établissement d'Ecouen
Finkenstein, 15 mai 1807
A M. Portalis
J'ai reçu votre lettre du 5 mai. Je suis bien aise que vous causiez avec le ministre de la police sur la recherche du brigand Saint-Hilaire, qu'il serait très-important d'avoir. Faites-moi un rapport sur les curés de Morra, Sommariva del Bosco et de Cortemiglia. Si ce sont des hommes distingués par leur bonne conduite et leurs mœurs, je pourrai bien les faire légionnaires, ainsi que, dans l'Aveyron, M. de Trémoulet, curé de Mondalazac. Faites-moi un rapport là-dessus.
Finkenstein, 15 mai 1807
Au prince Jérôme
Mon Frère, Napoléon est mort en trois jours, à la Haye; je ne sais pas si le roi vous en a instruit. Cet événement m'a fait d'autant plus de peine que son père et sa mère ne sont pas raisonnables et se livrent à tout l'emportement de leur douleur.
Finkenstein, 15 mai 1807
NOTE POUR LE MAJOR GÉNÉRAL
Écrire au général Beaumont que sa dépêche n'a pas de sens; qu'il n'instruit pas de ce que sont devenus les Polonais qui défendaient Kahlberg et qui, le soir du 13, s'étaient réfugiés à Freienhuben, à une lieue de Fürstenwerder, ni quelle était la position de l'ennemi qui a passé la nuit du 13 au 14 à Vogelsang; qu'il est fâcheux qu'il ait ainsi perdu une journée, et qu'il n'ait rien fait pour se mettre en
communication avec les Polonais et attaquer les flancs de l'ennemi, s'il avait passé; que, si l'ennemi a plus de 5 ou 600 hommes de cavalerie, il se fasse soutenir par la cavalerie légère ou les dragons qui sont le plus près de lui; qu'il culbute l'ennemi et le chasse de cette langue de terre; que j'ai été peu satisfait de son rapport et de ce qu'il a perdu une journée; qu'il me fasse connaître en détail ce qui s'est passé depuis quatre jours, depuis Kahlberg jusqu'à Danzig, ce qu'est devenue la cavalerie de la division Lasalle qui était cantonnée sur la gauche de la Vistule et qui a dû être inquiétée par le mouvement de l'ennemi dans les journées des 13 et 14; et que tout cela valait bien la peine d'être mis dans son rapport.
Finkenstein, 15 mai 1807
Au général Clarke
Le régiment des fusiliers de la Garde part le 19 de Magdeburg et sera le 23 à Berlin. Envoyez des ordres pour qu'il arrive à Berlin le 22, en lui faisant prendre la poste à Brandenburg. Faites-le partir de Berlin le 23, après en avoir passé la revue. Faites-le marcher en poste sur des chariots, de manière qu'il arrive en huit jours à Bromberg, d'où il se dirigera en droite ligne sur Finkenstein, en passant la Vistule à Bromberg, sans aller à Thorn, de manière qu'il soit le 30 mai à Bromberg.
Le bataillon des matelots de la Garde sera le 29 à Magdeburg. Faites-lui, là, prendre la poste en le dirigeant sur Danzig par Stettin, de manière qu'il soit le 10 juin à Danzig. Écrivez même pour qu'il prenne, si cela est possible, la poste à Cassel, où il sera le 20. Par ce moyen, il pourrait se trouver à Danzig dans les premiers jours de juin.
Finkenstein, 15 mai 1807
Au général Clarke
J'imagine que vous aurez dirigé les chasseurs royaux italiens sur Marienwerder.
Le débarquement n'a pas eu de suite. Il ne consistait qu'en 7 à S,000 hommes, qu'ils ont débarqués sous le fort de Weichselmünde, près du camp retranché. Ils sont cernés et n'ont pas encore pu communiquer avec la place. Nous exécutons le passage du fossé devant le Hagelsberg.
Faites filer le plus de cavalerie que vous pourrez sur l'armée surtout les cuirassiers, les chasseurs et les hussards. Vous n'en avez pas mal au dépôt de Potsdam. Qu'ils partent bien montés et bien équipés.
Envoyez savoir ce qui se fait à Kolberg, et tenez-moi au courant des travaux du siège. Si le général Thouvenot ne vous est pas utile envoyez-le à Kolberg; il y a besoin de beaucoup de généraux pour le service de la tranchée.
Vous accusez à tort M. Daru. Il faut que je traite Magdeburg comme j'ai traité Berlin, comme j'ai traité Emden et les autres pays. Quant aux contributions extraordinaires, je ne sais comment vous en parler. La Prusse est la seule province où l'on ne paye que la contribution ordinaire; encore déduit-on les fournitures, de sorte que ce pays est mieux traité que du temps du roi de Prusse. Croyez-vous que je puisse vivre avec des mots ?
Finkenstein, 16 mai 1807
A l'Impératrice, à Saint-Cloud
Je reçois ta lettre du 6 mai. J'y vois déjà le mal que tu éprouve; je crains que tu ne sois pas raisonnable et que tu ne t'affliges trop du malheur qui nous est arrivé.
Adieu, mon amie. Tout à toi.
Finkenstein, 16 mai 1807, à midi
Au maréchal Masséna, à Przasnysz
J'ai reçu votre lettre. Vous verrez par l'ordre du jour le petit succès que nous avons eu sous Danzig, et qui me fait espérer la prompte reddition de cette place.
Le major général vous a écrit pour vous faire connaître mon désir que vous campiez autour d'Ostrolenka, en faisant occuper les hauteurs de la ville par de bonnes redoutes et faisant construire un bon pont. J'ai donné de l'argent et des ordres pour que les transports par eau, d'Ostrolenka à Varsovie, soient organisés. Le pont rétabli, faites faire une bonne tête de pont, et donnez des ordres pour perfectionner et rendre inattaquables les ouvrages qu'a établis le général Lemarois.
Votre camp, ce me semble, sera très-bien sur la rive droite de la Narew vis-à-vis Ostrolenka. Vous pouvez, par des abatis et des redoutes, le bien lier avec l'Omulew et avoir des avant-postes sur la Rosoga. Mêlez des voltigeurs avec les piquets de cavalerie. Il ne faut pas, du reste, s'engager dans une guerre de postes. Il n'y a pas d'inconvénient à camper une brigade bavaroise à Rozan. Si vous prenez ce parti, il faut qu'elle ait aussi son pont et sa tête de pont sur l'Omulew.
Vous comprenez facilement les avantages qui résulteront de la position d'Ostrolenka. Les difficultés pour vivre sont levées par la circonstance de la Narew devenue navigable.
Il faut que vous teniez l'ennemi en haleine. Lorsque vous serez bien établi à Ostrolenka, si vous voyez jour à vous emparer des magasins de Nowogrod, rien n'empêche de le faire. Une fois votre communication établie avec la Gallicie par Wyszogrod et Brok, où l'ennemi ne maintiendra pas de troupes tant que vous serez à Ostrolenka, vous serez plus à portée d'être instruit de ses mouvements et de lui donner de l'inquiétude sur l'une et l'autre rive.
Finkenstein, 16 mai 1807
74e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE
Le prince Jérôme ayant reconnu que trois ouvrages avancés de Neisse, qui étaient le long de la Biela, gênaient les opérations du siège, a ordonné au général Vandamme de les enlever. Ce général, à la tête des troupes wurtembergeoises, a emporté ces ouvrages dans la nuit du 30 au 1er mai, a passé au fil de l'épée les troupes ennemies qui les défendaient, a fait 120 prisonniers et pris 9 pièces de canon. Les capitaines du génie, Deponthon et Prost, le premier, officier d'ordonnance de l'Empereur, ont marché à la tête des colonnes et ont fait preuve de grande bravoure. Les lieutenants Hohenhorff, Bauer et Mühler se sont particulièrement distingués.
Le 2 mai, le lieutenant général Camrer a pris le commandement de la division wurtembergeoise.
Depuis l'arrivée de l'empereur Alexandre à l'armée, il paraît qu'un grand conseil de guerre a été tenu à Bartenstein, auxquels ont assisté le roi de Prusse et le grand-duc Constantin; que les dangers que courait Danzig ont été l'objet des délibérations de ce conseil; que l'on a reconnu que Danzig ne pouvait être sauvé que de deux manières : la première en attaquant l'armée française, en passant la Passarge, en courant la chance d'une bataille générale, dont l'issue, si l'on avait du succès, serait d'obliger l'armée française à découvrir Danzig, l'autre, en secourant la place par mer. La première opération paraît n'avoir pas été jugée praticable sans s'exposer à une ruine et à une défaite totale, et on s'est arrêté au plan de secourir Danzig par mer. En conséquence, le lieutenant général Kamenski, fils du feld-maréchal, avec deux divisions russes, formant douze régiments, et plusieurs régiments prussiens, ont été embarqués à Pillau. Le 12, soixante-six bâtiments de transport, escortés par trois frégates, ont débarqué ces troupes à l'embouchure de la Vistule, au port de Danzig, sous la protection du fort de Weichselmünde.
L'Empereur donna sur-le-champ l'ordre au maréchal Lannes, commandant le corps de réserve de la Grande Armée, de se porter de Marienburg, où était son quartier général, avec la division du général Oudinot, pour renforcer l'armée du maréchal Lefebvre. Il arriva en une marche dans le même temps que l'armée ennemie débarquait. Le 13 et le 14, l'ennemi fit des préparatifs d'attaque. Il était séparé de la ville par un espace de moins d'une lieue, mais occupé par les troupes françaises. Le 15, il déboucha du fort sur trois colonnes; il projetait de pénétrer par la droite de la Vistule. Le général de brigade Schramm, qui était aux avant-postes avec le 26e régiment d'infanterie légère et un bataillon de Saxons et de Polonais, reçut les premier feux de l'ennemi, et le contint à portée de canon de Weichselmünde. Le maréchal Lefebvre s'était porté au pont situé au bas de la Vistule, et avait fait passer le 12e d'infanterie légère et des Saxons pour soutenir le général Schramm. Le général Gardanne, chargé de la défense de la droite de la Vistule, y avait également appuyé le reste de ses forces. L'ennemi se trouvait supérieur, et le combat se soutenait avec
une égale opiniâtreté.
Le maréchal Lannes, avec la réserve d'Oudinot, était placé sur la gauche de la Vistule, par où il paraissait la veille que l'ennemi devait déboucher; mais, voyant les mouvements de l'ennemi démasqués, le maréchal Lannes passa la Vistule avec quatre bataillons de la réserve d'Oudinot. Toute la ligne et la réserve de l'ennemi furent mises en déroute et poursuivies jusqu'aux palissades, et, à neuf heures du matin , l'ennemi était bloqué dans le fort de Weichselmünde. Le champ de bataille était couvert de morts. Notre perte se monte à 25 hommes tués et 200 blessés; celle de l'ennemi est de 900 hommes tués, 1,500 blessés et 200 prisonniers. Le soir on distinguait un grand nombre de blessés qu'on embarquait sur les bâtiments, qui successivement ont pris le large pour retourner à Königsberg. Pendant cette action, la place n'a fait aucune sortie, et s'est contentée de soutenir les Russes par une vive canonnade. Du haut de ses remparts délabrés et à demi démolis, l'ennemi a été témoin de toute l'affaire. Il a été consterné de voir s'évanouir l'espérance qu'il avait d'être secouru. Le général Oudinot a tué de sa propre main trois Russes. Plusieurs de ses officiers d'état-major ont été blessés. Le 12e et le 2e régiment d'infanterie légère se sont distingués. Les détails de ce combat n'étaient pas encore arrivés à l'état-major.
Le journal du siège de Danzig fera connaître que les travaux se poursuivent avec une égale activité, que le chemin couvert est couronné, et que l'on s'occupe des préparatifs du passage du fossé.
Dès que l'ennemi sut que son expédition maritime était arrivée devant Danzig, ses troupes légères observèrent et inquiétèrent toute la ligne, depuis la position qu'occupe le maréchal Soult le long de la Passarge, devant la division du général Morand sur l'Alle. Elles furent reçues à bout portant par les voltigeurs, perdirent un bon nombre d'hommes, et se retirèrent plus vite qu'elles n'étaient venues.
Les Russes se présentèrent aussi à Malga, devant le général Zajonchek, commandant le corps d'observation polonais, et enlevèrent un poste de Polonais. Le général de brigade Fischer marcha à eux, les culbuta, leur tua une soixantaine d'hommes, un colonel et deux capitaines. Ils se présentèrent également devant le 5e corps et insultèrent les avant-postes du général Gazan à Willenberg; ce général les poursuivit pendant plusieurs lieues. Ils attaquèrent plus sérieusement la tête de pont de l'Omulew, de Drenzewo; le général de brigade Girard marcha à eux avec le 88e, et les culbuta dans la Narew. Le général de division Suchet arriva, poussa les Russes l'épée dans les reins, les culbuta dans Ostrolenka, leur tua une soixantaine d'hommes, et leur prit 50 chevaux. Le capitaine du 64e, Laurin, qui commandait une grand'garde, cerné de tous côtés par les Cosaques, fit la meilleure contenance et mérita d'être distingué. Le maréchal Masséna, qui était monté à cheval avec une brigade de troupes bavaroises, eut lieu d'être satisfait du zèle et de la bonne contenance de ces troupes.
Le même jour (l'affaire dont il est question dans le paragraphe précédent eut lieu le 12 mai) 13, l'ennemi attaqua le général Lemarois à l'embouchure du Bug. Ce général avait passé cette rivière le 10 avec une brigade bavaroise et un régiment polonais, avait fait construire en trois jours des ouvrages de tête de pont, et s'était porté sur Wyskow, dans l' intention de brûler les radeaux auxquels l'ennemi faisait travailler depuis six semaines. Son expédition a parfaitement réussi; tout a été brûlé, et dans un moment ce ridicule ouvrage de six semaines fut anéanti.
Le 13, à neuf heures du matin (A trois heures du matin, d%près les rapports du général Lemarois maréchal Masséna), 6,000 Russes, arrivés de Nur, attaquèrent le général Lemarois dans son camp retranché. Ils furent reçus par la fusillade et la mitraille; 300 Russes restèrent sur le champ de bataille; et quand le général Lemarois vit l'ennemi, qui était arrivé sur le bord du fossé, repoussé, il fit une sortie, et les poursuivit l'épée dans les reins. Le colonel du 4e de ligne bavarois, brave militaire, a été tué : il est généralement regretté. Les Bavarois ont perdu 20 hommes et ont eu une soixantaine de blessés.
Toute l'armée est campée par divisions en bataillons carrés, dans des positions saines.
Ces événements d'avant-postes n'ont occasionné aucun mouvement dans l'armée. Tout est tranquille au quartier général. Cette attaque générale de nos avant-postes dans la journée du 13 parait avoir eu pour but d'occuper l'armée française, pour l'empêcher de renforcer l'armée qui assiège Danzig. Cette espérance de secourir Danzig par une expédition maritime paraîtra fort extraordinaire à tout militaire sensé et qui connaîtra le terrain et la position qu'occupe l'armée française.
Les feuilles commencent à pousser. La saison est comme au mois d'avril en France.
Finkenstein, 17 mai 1807
Au roi de Prusse
Monsieur mon Frère, Votre Majesté m'ayant annoncé, par sa lettre du 10 mai, que l'admission des diverses parties belligérantes au futur congrès ne souffrait plus de difficultés, il ne me reste dès lors aucune objection à faire. Mes plénipotentiaires et ceux des puissances qui font cause commune avec moi dans cette guerre seront arrivés à Copenhague le jour que Votre Majesté voudra désigner. Quant aux bases qui me paraissent devoir être adoptées pour la conduite dudit congrès, je pense que tout est contenu dans ces deux mots : égalité et réciprocité entre les deux masses belligérantes.
L'Angleterre et la Russie feront pour mes alliés ce que je ferai pour les leurs.
Je ferai pour les alliés de l'Angleterre et de la Russie ce qu'elles feront pour les miens.
Je me flatte que Votre Majesté verra dans la promptitude de cette explication mon désir de faire tout ce qu'il sera possible pour arriver à l'objet tant désiré du rétablissement de la paix et de la tranquillité en Europe.
Finkenstein, 17 mai 1807
Au maréchal Masséna, à Przasnyzs
Mon Cousin, je vous envoie des notes sur la position de votre corps d'armée. Je vous prie de les lire avec attention et de les méditer. Il me tarde d'apprendre que vous soyez maître d'Ostrolenka et que vos deux redoutes en avant de cette ville soient commencées et votre camp tracé et bien assis dans la position de la rive droite, en avant de Drenzewo. Mais, comme vous ne pouvez vivre que par la Narew, il est nécessaire que vous fassiez établir de suite une redoute à la position d'Ostrykol, afin d'en protéger la navigation. Je n'ai pas besoin de vous recommander de marcher à l'ennemi, la division Suchet et les Bavarois réunis. Je pense aussi que vous ferez bien de faire venir un bataillon polonais à Ostrolenka, parce qu'étant du pays ils auront plus de facilités pour la langue et pour l'espionnage. Si vous avez une affaire avantageuse à Ostrolenka et que vous mettiez un peu l'ennemi en déroute, rien ne s'oppose à ce que vous poussiez jusqu'à Nowogrod, car il entre dans mon système de donner de l'inquiétude à l'ennemi sur toute sa gauche, que je suis instruit qu'il a dégarnie.
Si l'ennemi résiste, vous l'attaquerez avec vos deux divisions réunies et vous m'enverrez quelques milliers de prisonniers. N'oubliez pas que c'est votre usage.
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Six mille hommes qui avaient voulu pénétrer par la langue de terre de Pillau à Danzig ont été défaits hier 16; nous leur avons pris 900 hommes et 4 pièces de canon.
Finkenstein, 17 mai 1807
NOTE SUR LA POSITION DU 5e CORPS.
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Le 5e corps a trois buts à remplir : 1° couvrir Varsovie; 2° former la droite de l'armée; 3° se trouver dans une position offensive qui donne de l'inquiétude à l'ennemi sur sa gauche et l'empêche de se dégarnir. Quelle est la position qu'il doit occuper pour remplir ces trois buts ?
L'ennemi peut se porter sur Varsovie le long du Bug, ou bien le long de la Narew. La réunion de ces deux rivières, Sierock, serait donc le meilleur point pour camper le 5e corps d'armée, s'il n'avait pour but que de couvrir Varsovie. C'est dans cette intention qu'on a ordonné une place forte et des magasins dans la position de Sierock. Après le point de Sierock, la position la plus avantageuse pour couvrir Varsovie serait de se tenir à cheval sur la Narew, entre Rozan e Pultusk, à l'extrémité du coude que fait la Narew, près Ostrykol, parce que, de cette position à Branszcryk, sur le Bug, il n'y a que quatre lieues, et qu'il serait impossible à l'ennemi de déboucher, ni le long du Bug, ni le long de la Narew, sans avoir attaqué ce camp.
Après cette position, celle de Pultusk serait la plus convenable pour remplir le but de couvrir Varsovie, mais elle ne serait que la troisième parce que de Pultusk à Wyskow il y a presque autant que de Wyskov à Sierock; ensuite, que l'ennemi qui attaque Sierock a le temps de rétrograder avant qu'on soit sur ses derrières.
La position d'Ostrolenka n'est que la quatrième; elle est moins bonne que les autres, parce qu'il y a d'Ostrolenka à Brock dix lieues, autant que de Brock à Sierock.
Ainsi donc, si le 5e corps n'avait qu'un but, celui de couvrir Varsovie, le lieu où il faudrait camper ses principales forces serait à Sierock, ensuite à Ostrykol, puis à Pultusk, enfin à Ostrolenka, qui sans comparaison, est le plus mauvais des quatre points, car de Pultusk à Sierock il n'y a que peu d'heures de marche; si on prend le parti de renforcer le poste de Sierock, il n'y a qu'une bonne journée de marche, et d'Ostrolenka à Sierock il en faut nécessairement deux.
Mais couvrir Varsovie n'est pas le seul but du 5e corps : il doit appuyer la droite de la Grande Armée; il doit être à même de soutenir le corps qui est à Willenberg; et dès lors, pour conserver la ligne de l'Omulew et remplir ce but, le meilleur point est Ostrolenka.
On pense donc que, pour remplir le second but qu'on se propose le 5e corps devrait être partagé de la manière suivante : la division Gazan campée à Willenberg, ayant un poste de quatre compagnies de voltigeurs et de 200 chevaux à Zawady; la division Suchet campée sur la rive droite de la Narew, vis-à-vis Ostrolenka, occupant Ostrolenka par des grand'gardes placées dans deux bonnes redoutes établies sur les deux mamelons d'Ostrolenka et couvrant la gauche par des abatis qui la lient à l'Oulew, ayant une grand'garde de 100 chevaux et 2 ou 300 hommes d'infanterie à Lelisa et une autre grand'garde à Ksienzylas sur la petite rivière de Rosoga, grand'garde qui doit coucher toutes les nuits dans des positions différentes pour n'être point surprise à la pointe du jour, et qui peut être aisément secourue par le camp.
On peut attacher à la division Suchet un bataillon d'infanterie légère bavaroise, pour lui faire occuper les points les plus importants depuis Zawady jusqu'à Bialobrzeg.
Dans cette position, les cinq régiments du général Suchet sont toujours campés et sous les armes; ils ne craignent point la petite guerre, parce que leurs communications sont derrière l'Omulew, que le poste de Lelisa les protégé suffisamment, que ce poste situé à deux lieues est inforçable et peut, selon les événements, être secouru.
La division bavaroise doit avoir une brigade campée à Ostrykol, où il faut établir un pont, du canon et une redoute servant de tête de pont. Ce point est, comme nous l'avons dit plus haut, le plus important de tous, et cette position a encore cet avantage qu'elle protégé la navigation de la Narew dans le point où elle forme le plus grand coude. Trois bataillons doivent être placés à Krasnosiele, tant pour couvrir Przasnysz que pour défendre l'Orzyca contre les partis de Cosaques qui auraient passé entre Zawady et la Narew.
Ainsi, la division bavaroise, composée de 15 bataillons, aurait 7 bataillons à Ostrykol, 3 à Krasnosiele, 2 à Pultusk et 2 à Sierock comme garnison, 1 bataillon d'infanterie légère détaché à Ostrolenka.
La garnison de Sierock, renforcée de Polonais, enverrait en avant de Sierock, sur la route de Wyskow, et même jusqu'à Wyskow, 2 ou 300 chevaux polonais et quelques centaines d'hommes d'infanterie pour observer le Bug; bien entendu que ce poste avancé se placerait de manière à ne pas se laisser surprendre et à se replier devant des forces supérieures.
Si l'ennemi se présente en force sur la rive gauche de la Narew devant Ostrolenka, pendant que le général français fait venir les diverses brigades bavaroises, il peut refuser le combat en se tenant sur la rive droite de la Narew.
Si l'ennemi attaque par la rive droite de la Narew, il attaque donc un camp qui peut s'être couvert de quelques redoutes, appuyé de deux rivières, dans une bonne position, qui, à chaque instant, reçoit les troupes bavaroises et même celles de Willenberg qui viennent le rejoindre, ayant dans l'Omulew un petit ruisseau bon pour appuyer une retraite; il se trouve donc avoir tous les avantages.
Si l'ennemi attaque Willenberg , le général français peut, dans une grande marche, y envoyer du secours.
Si l'ennemi se porte sur Varsovie , le général français peut se porter sur Brok, en débouchant par le pont d'Ostrolenka, et tomber
sur les flancs et les derrières de l'ennemi.
Une fois le camp d'Ostrolenka établi, que fera l'ennemi ? Se divisera-t-il en deux corps , l'un à Zambrow , l'autre à Nowogrod ? ou formera-t-il un seul camp dans une position opposée ?
En occupant la position d'Ostrolenka, l'art consiste à ne point s'éparpiller, à ne faire aucun établissement dans la ville, à n'y avoir que des avant-postes, à ne placer aucun poste fixe de cavalerie au delà des deux redoutes, afin d'éviter une guerre de Cosaques , qui nous est désavantageuse.
Quel intérêt , en effet, quand les troupes sont ainsi réunies, à savoir ce que fait la cavalerie ennemie ! Alors on s'éclaire par de bonnes reconnaissances faites le matin par des détachements d'infanterie et même du canon.
Si on demande pourquoi il faut occuper la ville d'Ostrolenka, la réponse sera simple : c'est d'abord pour que l'ennemi ne l'occupe pas, ensuite pour occuper les deux rives de la Narew, sans la navigation de laquelle il est impossible de vivre; enfin, c'est menacer l'ennemi que d'occuper les deux rives: mais il ne faut pas pour cela s'étabIir à plusieurs lieues des deux rives; il suffit que l'ennemi ne puisse s'y établir. Il peut avoir chaque matin 5 à 6,000 hommes d'infanterie et de cavalerie qui peuvent lui tomber dessus.
Il faut faire faire une reconnaissance de la position que doivent occuper les Bavarois à Ostrykol. On peut les placer à Rozan en
attendant que cette position soit bien reconnue.
Une fois ainsi placé, on pourra attaquer l'ennemi à Nowogrod , par la rive gauche et la rive droite. L'ennemi alors ne peut plus faire aucun mouvement. Ou il est obligé d'évacuer Nowogrod et de s'établir plus loin, ou il sera facile d'attaquer avec avantage la division qui sera là et de lui enlever ses postes.
Mais si Ostrolenka qui, sous le point de vue de couvrir Varsovie, est le moins important des quatre points indiqués, doit être occupé parce qu'il est le plus avantageux pour appuyer la droite de la Grande Armée , deuxième but que doit avoir le 5e corps , il n'y a pas de doute qu'Ostrolenka est la position la plus importante pour remplir le troisième but, c'est-à-dire pour placer le 5e corps dans une position offensive qui menace la gauche de l'ennemi et l'empêche de se dégarnir. Ainsi Ostrolenka doit être occupé, le camp, fortifié par des redoutes et des abatis; deux fortes redoutes doivent être construites sur les deux mamelons d'Ostrolenka, et une bonne redoute, au camp bavarois d'Ostrykol.
Finkenstein, 17 mai 1807, 8 heures du soir
Au maréchal Lefebvre
Il est probable que vous aurez appris l'issue du combat du général Beaumont. Dites au général Chasseloup qu'il faut établir une petite tête de pont au pont de Fürstenwerder. Cette tête de pont empêchera toujours l'ennemi de passer outre, d'autant plus qu'on peut y attacher quelques flèches qui iront jusqu'à la mer. Je pense que vous devez faire établir de bonnes redoutes, la gauche appuyée à la Vistule et la droite à la mer, vis-à-vis le fort de Weichselmünde, à peu près à 300 toises du fort, pour fermer l'espace de 600 toises. Il faut faire également bloquer le camp retranché par deux ou trois redoutes, entre la mer et l'inondation, et entre l'inondation et la Vistule, de sorte que l'ennemi qui voudrait déboucher par là devra enlever, pour y arriver, des redoutes bien palissadées. Ce travail me paraît fort important; les troupes mêmes peuvent le faire; d'ailleurs cela servira au cheminement qu'il faudra bien faire sur le camp retranché; car nous n'aurions pas Danzig, si, ayant la ville, le fort de Weichselmünde voulait tenir.
Il est bien nécessaire que vous culbutiez tous les postes que l'ennemi pourrait encore avoir sur la rive droite le long de l'inondation. J'attends avec impatience que vous m'appreniez enfin la prise du Hagelsberg; il me semble que cela est mûr. J'ai accordé les récompenses que vous m'avez demandées pour ceux qui se sont distingués.
Finkenstein, 17 mai 1807
DÉCISION
Le major général rend compte à l'Empereur que le roi de Wurtemberg augmente son infanterie de 1,800 combattants et sa cavalerie de 300 chevaux, et que ces troupes ont un besoin pressant de souliers, de bottes et de capotes. Il demande les ordres de l'Empereur à ce sujet. | Accorder une paire de souliers par homme et 12,000 francs par régiment pour la masse.
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Finkenstein, 18 mai 1807
Au général Lemarois
Monsieur le Général Lemarois, je suppose que vous êtes à Varsovie, où je désire que vous continuiez à faire ce que vous avez fait jusqu'ici, à voir le gouvernement, l'ordonnateur, et que vous veilliez à ce qu'on travaille à Praga, à Sierock, à Modlin, qu'on active les transports , qu'on approvisionne les magasins , et qu'on fasse filer, par la Vistule, tout ce qui est nécessaire aux différents corps, et par terre ce qui est nécessaire pour approvisionner Osterode et le corps du maréchal Masséna. Enfin envoyez des espions en Gallicie, et envoyez-moi des courriers pour me tenir instruit de tout ce qui se passe là et au corps du maréchal Masséna.
Finkenstein, 18 mai 1807, 11 heures du matin
Au maréchal Lefebvre
J'ai vu avec la plus grande surprise votre lettre; je vous croyais plus de caractère et d'opinion; est-ce à la fin d'un siège qu'il faut se laisser persuader par des intrigants qu'il faut changer le système d'attaque, ainsi décourager l'armée et faire tort à son propre jugement ? Rien ne vous autorise à dire que mon opinion était qu'on attaquât le Bischofsberg : mon opinion était qu'on attaquât d'abord le camp retranché, qu'on investît hermétiquement la place, et qu'alors on attaquât le point que le corps du génie et de l'artillerie aurait jugé le plus faible. Après un conseil que vous avez tenu, vous avez décidé de ne pas attaquer le camp retranché, mais le Hagelsberg; vous avez depuis remédié à l'inconvénient de n'avoir pas attaqué l'île, en la prenant, et cela est très-important. Vous êtes sur le point de prendre le Hagelsberg. Chassez de chez vous à coups de pied au cul tous ces petits critiqueurs. Attaquez le Hagelsberg : maître du Hagelsberg, vous l'êtes de la place, d'abord parce que vous le serez du Bischofsberg , et enfin quand vous ne seriez pas maître du Bischofsberg, cela est très-indifférent; vous cheminerez sur le bas front de la place sous la protection du Hagelsberg. Que veut dire que vous ne pourrez pas mettre sur le Hagelsberg assez de canon ? Vous avez un espace de plus de 400 toises jusqu'à la rivière. Prenez le Hagelsberg , et vous verrez avec quelle rapidité la place tombera. Mais, encore une fois, accordez votre confiance à un ingénieur; accordez-la à Chasseloup, qui est le meilleur et a le plus d'expérience de ces affaires; ne souffrez pas qu'on critique; car enfin, serait-il vrai qu'il eût fallu attaquer le Bischofsberg, qui est-ce, si ce n'est des malveillants, qui pourrait se permettre aujourd'hui de le conseiller ? Danzig a toujours été pris par le Hagelsberg. D'ailleurs, les officiers du génie et d'artillerie ont décidé que ce serait le point qu'il fallait attaquer; ils en savent plus que des subalternes et des bavards qui, au lieu de faire le passage du fossé, s'amuseront à critiquer. Je reconnais bien là la légèreté du caractère français. Faites jeter des sacs à terre et des tonneaux pleins de terre dans le fossé, et sous la protection de cette levée, faites briser les palissades et donnez l'assaut. Ne prenez conseil que de Chasseloup et de la Riboisière, et moquez-vous du reste.
Finkenstein, 18 mai 1807
Au prince Eugène
Mon Fils, je reçois vos lettres du 5 et du 6 mai. Je ne vois pas d'inconvénient à ce que le général Ottavi passe au service de Naples. Vous pourrez faire ce que vous jugerez le plus convenable pour le baptême de la princesse Joséphine. J'ai lu votre lettre au Pape, elle m'a paru fort bien; mais je doute qu'elle produise quelque chose, car ces gens-là sont ineptes au delà de ce qu'on peut imaginer.
Finkenstein, 18 mai 1807
A M. Roederer
Monsieur Roederer, j'ai reçu votre lettre du 26 avril. Je vous remercie de tout ce qu'elle contient.
L'organisation d'un bon système de finances dans le royaume de Naples, adapté aux moeurs et aux usages du pays, vous fera honneur et vous donnera de nouveaux titres à mon estime.
Finkenstein, 18 mai 1807 (date présumée)
NOTES SUR UN PROJET D'EXPOSÉ DE LA SITUATION DE L'EMPIRE.
Situation à l'extérieur. Mais le traité de Presbourg, qui avait rendu la paix au continent, ne l'avait pas rendue aux mers, et l'Angleterre, constante à chercher sa propre sûreté dans les malheurs de l'Europe, s'efforçait de faire continuer la guerre par la Russie et de déterminer la Prusse à des démarches hostiles. Ces trames furent déjouées : le traité de Vienne et la convention de Paris dissipèrent tous les nuages. Il semblait que désormais la paix du continent ne devait plus être troublée. La Russie elle-même en avait senti le besoin, et son ministre, revêtu de ses pleins pouvoirs, venait d'arriver à Paris.
L'Angleterre, entraînée par la force de ces circonstances, se montra disposée à la paix, ou plutôt, ainsi que l'ont révélé depuis ses discussions publiques, à une trêve qui aurait un moment suspendu les effets de la haine et de la jalousie qui l'animent contre nous. En même temps qu'elle ouvrait des négociations, elle préparait de nouvelles intrigues, bien résolue à tout rompre, si elle parvenait à rallumer le flambeau de la guerre continentale. Elle vit triompher ses coupables espérances, et le plénipotentiaire russe, après avoir signé un traité de paix, l'avoir communiqué à son souverain, en avoir obtenu l'approbation, fut désavoué dans un conseil que dominèrent les clameurs des partisans de l'Angleterre.
La Prusse fut de nouveau agitée; des femmes et de jeunes officiers l'emportèrent par leurs déclamations insensées sur les conseils du roi et sur les combinaisons du cabinet. Des cris hostiles se firent entendre, et la guerre fut déclarée, contre l'opinion des ministres et peut-être contre la volonté du roi lui-même. Fatal exemple de la faiblesse des princes ! Influence plus fatale encore d'un ministère qui soudoie les intrigants et les libellistes, qui sème les terreurs et la calomnie, qui soulève toutes les passions dont l'exaltation lui peut être utile, et qui, au milieu de toutes ces menées, calcule froidement les avantages qui peuvent résulter, pour ses intérêts, des dangers, de la ruine même de ceux qu'il appelle ses amis !
Il ne faut pas parler de l'Autriche ni de sa renonciation à l'Empire d'Allemagne.
Il faudrait mettre un article plus positif sur Naples, en rappelant que le même jour où l'ancien souverain de ce pays faisait la paix, il recevait les Anglais et les Russes.
Embellissements de Paris. Il ne faut pas parler du numérotage de Paris. C'est un objet de trop peu d'importance.
Instruction publique. Il faut parler du projet de loi sur l'Université, et dire que l'institution de cet établissement a été différée, à cause des occupations de Sa Majesté, qui ne lui ont pas permis de porter sur cet objet toute l'attention qu'elle voulait y donner.
Finances. Supprimer dans cet article ce que l'on dit sur la Banque. On la représente comme surchargée de ses propres richesses, et cela a son mauvais côté.
Aperçu de la dernière campagne. Ne pas parler de l'indépendance de la Pologne et supprimer tout ce qui tend à en montrer l'Empereur comme le libérateur, attendu qu'il ne s'est jamais expliqué à ce sujet.
Supprimer ce qui regarde la marine. Ce qu'on en dit n'est point assez convenable.
C'est en parlant de la perspective offerte à la France , qu'il faut faire le tableau de sa politique actuelle, qui avait été mis au commencement. C'est le lieu où se place naturellement ce qui concerne Naples, la Hollande, les alliés et la Confédération du Rhin. On évitera ainsi des répétitions.
M. de Champagny a le temps de faire ces corrections et de renvoyer son travail, avant la convocation du Corps législatif. Sa Majesté y ajoutera alors ce qui peut être relatif à la politique.
Finkenstein, 18 mai 1807
75e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE
Voici de nouveaux détails sur la journée du 15. Le maréchal Lefebvre fait une mention particulière du général Schramm, auquel il attribue en grande partie le succès du combat de Weichselmünde.
Le 15, depuis deux heures du matin, le général Schramm était en bataille, couvert par deux redoutes construites vis-à-vis le fort de Weichselmünde. Il avait les Polonais à sa gauche, les Saxons au centre, le 2e régiment d'infanterie légère à sa droite, et le régiment de Paris en réserve. Le lieutenant général russe Kamenski déboucha du fort à la pointe du jour; et, après deux heures de combat, l'arrivée du 12e d'infanterie légère, que le maréchal Lefebvre expédia de la rive gauche, et un bataillon saxon, décidèrent l'affaire. De la brigade Oudinot, un seul bataillon put donner. Notre perte a été peu considérable. Un colonel polonais, M. Paris, a été tué. La perte de l'ennemi est plus forte qu'on ne pensait. On a enterré plus de 900 cadavres russes. On ne peut pas évaluer la perte de l'ennemi à moins de 2,500 hommes. Aussi ne bouge-t-il plus, et parait-il très-circonspect derrière l'enceinte de ses fortifications. Le nombre de bateaux chargés de blessés qui ont mis à la voile est de quatorze.
Dans la journée du 14, une division de 5, 000 hommes, Prussiens et Russes, mais en majorité Prussiens, partie de Königsberg, débarqua à Pillau, longea la langue de terre dite le Nehrung, et arriva à Kahlberg, devant nos premiers postes de grand'garde de cavalerie légère, qui se replièrent jusqu'à Fürstenwerder. L'ennemi s'avança jusqu'à l'extrémité du Frische-Haff. On s'attendait à le voir pénétrer par là sur Danzig. Un pont jeté sur la Vistule à Fürstenwerder facilitait le passage à la cavalerie, cantonnée dans l'île de Nogat, pour filer sur les derrières de l'ennemi. Mais les Prussiens furent mieux avisés et n'osèrent pas s'aventurer. Alors l'Empereur donna ordre au général Beaumont, aide de camp du grand-duc de Berg, de les attaquer. Le 16, à deux heures du matin, ce général déboucha avec le général de brigade Albert, à la tête de deux bataillons de grenadiers de la réserve, le 3e et le 11e régiment de chasseurs et une brigade de dragons. Il rencontra l'ennemi entre Passenwerder et Stegen, à la petite pointe du jour, l'attaqua, le culbuta, et le poursuivit l'épée dans les reins pendant onze lieues, lui prit 1,100 hommes, lui en tua un grand nombre, et lui enleva quatre pièces de canon. Le général Albert s'est parfaitement comporté. Les majors Chemineau et Salmon se sont distingués. Le 3e et le 11e régiment de chasseurs ont donné avec la plus grande intrépidité. Nous avons eu un capitaine du 3e régiment de chasseurs et 5 ou 6 hommes tués, et 8 ou 10 blessés. Deux bricks ennemis, qui naviguaient sur le Frische-Haff, sont venus nous harceler. Un obus, qui a éclaté sur le pont de l'un d'eux, les a fait virer de bord.
Ainsi, depuis le 12, sur les différents points l'ennemi a fait des pertes notables.
L'Empereur a fait manœuvrer, dans la journée du 17, les fusiliers de la Garde qui sont campés, près du château de Finkenstein, dans d'aussi belles baraques qu'à Boulogne.
Dans la journée des 18 et 19, toute la Garde va également camper au même endroit.
En Silésie, le prince Jérôme est campé avec son corps d'observation à Frankenstein, protégeant le siège de Neisse.
Le 12, ce prince apprit qu'une colonne de 3,000 hommes était sortie de Glatz pour surprendre Breslau. Il fit partir le général Lefebvre avec le ler régiment de ligne bavarois, excellent régiment, 100 chevaux et un détachement de 300 Saxons. Le général Lefebvre atteignit la queue de l'ennemi le 14, à quatre heures du matin, au village de Canth; il l'attaqua aussitôt, enleva le village à la baïonnette, et fit 150 prisonniers. 100 chevau-légers du roi de Bavière taillèrent en pièces la cavalerie ennemie, forte de 500 hommes, et la dissipèrent. Cependant l'ennemi se plaça en bataille et fit résistance. Les 300 Saxons lâchèrent pied, conduite extraordinaire, qui doit être le résultat de quelque malveillance, car les troupes saxonnes, depuis qu'elles sont réunies aux troupes françaises, se sont toujours bravement comportées. Cette défection inattendue mit le 1er régiment de ligne bavarois dans une situation critique. Il perdit 150 hommes qui furent faits prisonniers, et dut battre en retraite, ce qu'il fit cependant en ordre. L'ennemi reprit le village de Canth.
A onze heures du matin, le général Dumuy, qui était sorti de Breslau à la tête d'un millier de Français, dragons, chasseurs et hussards à pied, qui avaient été envoyés en Silésie pour être montés, et dont une partie l'était déjà, attaqua l'ennemi en queue; 150 hussards à pied enlevèrent le village de Canth à la baïonnette, firent 100 prisonniers et reprirent tous les Bavarois qui avaient été faits prisonniers.
L'ennemi, pour rentrer avec plus de facilité dans Glatz, s'était séparé en deux colonnes. Le général Lefebvre, qui était parti de Schweidnitz le 15, tomba sur une de ces colonnes, leur tua 100 hommes, et lui fit 400 prisonniers, parmi lesquels 30 officiers. Un régiment de lanciers polonais, arrivé la veille à Frankenstein et dont le prince Jérôme avait envoyé un détachement au général Lefebvre, s'est distingué.
La seconde colonne de l'ennemi avait cherché à gagner Glatz par Silberberg : le lieutenant-colonel Ducoudras, aide de camp du prince, la rencontra et la mit en déroute. Ainsi cette colonne de 3 à 4,000 hommes, qui était sortie de Glatz, ne put y rentrer. Elle a été tout entière prise, tuée ou éparpillée.
Finkenstein, 18 mai 1807
Au prince Jérôme
Votre aide de camp m'a apporté votre lettre, où j'ai vu le petit échec qu'a essuyé le général Lefebvre. J'ai appris avec plaisir que les lanciers polonais vous étaient arrivés. Je viens de donner ordre aux deux régiments wurtembergeois qui sont devant Kolberg d'en partir sans délai, pour se rendre à Breslau. Vous avez mal dirigé le général Lefebvre et avez commis une grande faute militaire. Vous craignez que l'ennemi ne se porte sur Breslau ; vous savez que vous avez à Breslau des forces assez considérables pour, réunies au général Lefebvre, vous assurer la victoire. Il fallait diriger le général Lefebvre sur Breslau en manoeuvrant sur le flanc de l'ennemi, se réunir à toutes les troupes de Breslau, avant de l'attaquer; ainsi réunies, elles eussent obtenu une complète victoire. Ou bien il fallait rendre le général Lefebvre beaucoup plus fort. Il ne fallait pas diviser les Saxons; ensemble, ils eussent eu leurs officiers supérieurs qui les auraient contenus. Je vois que vous êtes dans une fausse route militaire; je vois que vous pensez que deux colonnes, qui en mettent une et demie au milieu, ont l'avantage : mais cela ne réussit pas à la guerre, parce que les deux colonnes n'agissent pas ensemble et que l'ennemi les bat l'une après l'autre. Il faut sans doute tourner l'ennemi, mais d'abord se réunir. Au reste, les 500 chevaux polonais et les 2,600 hommes à pied que vous avez, et qui seront bientôt montés, vous donneront des forces considérables de cavalerie, avec lesquelles vous pourrez protéger le pays. Renvoyez-moi les cuirassiers le plus tôt que vous pourrez. Je vous envoie 400 dragons à Breslau. Vous les monterez quand vous pourrez.
Écrivez à mon ministre à Dresde pour qu'on complète le régiment saxon et qu'on répare ce qu'il a perdu.
............................
19 mai 1807
Je reçois au même moment votre lettre du 16 à cinq heures du matin. Je vois avec plaisir les succès que vous avez obtenus, l'ennemi s'étant séparé et s'étant laissé battre en détail. Ces événements, joints au secours de deux régiments wurtembergeois que je vous envoie, et à la cavalerie polonaise, ainsi que la reddition de Neisse, qui ne tardera pas à tomber, car la réponse du gouverneur n'est pas d'un homme bien ferme, me font espérer que je n'aurai plus à recevoir que de bonnes nouvelles de vos côtés.
Finkenstein, 19 mai 1807
Au prince Eugèn
Mon Fils, faites partir pour Augsbourg la légion hanovrienne à cheval.
Finkenstein, 19 mai 1807
Au maréchal Berthier
Mon Cousin, faites connaître au maréchal Lannes que mon intention est que le corps de réserve soit campé dans les positions les plus saines, à la distance au plus de deux lieues de Marienburg; que la division Oudinot, qui forme la 1e division, campera en bataillon carré; que la 2e division, qui sera composée du 3e et du 72e de ligne, du 2e léger et du régiment de Paris, campera également en bataillon carré, et que ces deux camps seront placés à la distance d'une lieue l'un de l'autre sur la route de Marienburg à Christburg. Le maréchal Lannes s'occupera sans délai de choisir ces emplacements, mon intention étant que le 3e de ligne, qui est arrivé, se baraque sans délai dans la position qu'il doit occuper dans le camp de sa division.
Finkenstein, 19 mai 1807
Au roi de Naples
Mon Frère, j'ai vu le général Mathieu; je lui ai fait connaître que je voyais avec peine que les Anglais eussent le pied sur le continent, Si l'on peut prendre Scilla, il faut le prendre et le fortifier, en y plaçant une bonne garnison et y mettant des vivres pour trois mois. Il faut tenir peu de troupes dans le bas de la botte. Tout ce qui serait nécessaire pour la défense de cette partie doit se retirer, en cas de descente, dans Scilla. 900 hommes, soit infanterie, soit gendarmerie, soit artillerie, vous tiendront maître du bas de la botte et formeront la garnison de Scilla, qui pourrait tenir plus d'un mois, pendant lequel temps l'armée irait la dégager. Je n'ai point vu, dans les projets que vous m'avez envoyés, un projet sur Castellamare; c'est celui auquel je tiens davantage. Cette position ne peut être plus difficile que celle de Gênes, et Gênes passe pour être une bonne place. Dans les positions de montagne, les positions se réduisent ordinairement à deux ou trois points, seuls susceptibles de défense. Mon intention est que la place soit un port de mer. Vous en avez trois, Naples, Castellamare et Tarente. Je préfère Castellamare à tous, parce que je veux établir des lignes qui fermeraient l'isthme jusqu'à Amalfi, et construire dans l'île de Capri un fort qui rendrait maître de la pêche et du littoral de Naples et qui serait à portée d'être secouru de Toulon. Je mets en fait qu'on peut facilement, en deux ou trois ans de temps, et avec 7 ou 8 millions, remplir le but à Castellamare, sauf ensuite à travailler pendant une vingtaine d'années à lui donner de nouveaux degrés de force. Quel est l'ennemi qui voudra s'emparer de Naples, s'il n'a pas des forces telles qu'il puisse s'emparer de Castellamare ? et quelles seront les forces qui prendront Castellamare, si l'isthme et la place sont défendus par 18 ou 20,000 hommes ? Il en faudra au moins 50,000. Vous me demanderez comment le royaume de Naples aura ces 20,000 hommes ? Mais puisqu'il aura les équipages de ses vaisseaux de guerre, les équipages français qui auront pu être envoyés pour ravitailler la place, la garde du roi, le fond de l'armée napolitaine, la gendarmerie et le fond de l'armée auxiliaire française, cela fera plutôt 30,000 hommes que 20,000. Un an de guerre dans cette presqu'île, et le royaume de Naples sera sauvé,. On dit Castellamare montagneux; il ne peut l'être plus que Gênes. Il faut donc faire faire deux projets : des lignes et de la place; le premier, des lignes qui fermeront l'isthme. L'isthme, je le sais, a deux lieues; mais la défense de cet espace doit se réduire probablement à sept ou huit forts qui, soutenus par une armée de 20,000 hommes, ne peuvent pas être pris facilement. Mais enfin, ces forts pris, il doit y avoir à Castellamare une enceinte dans le genre de celle de Gènes. Joignez à cela un bon fort dans l'île de Capri. C'est à ce sujet qu'il faut s'arrêter, donnez ordre positivement qu'on le fasse; et, pour que je comprenne bien la situation des choses, chargez un artiste de faire le relief de toute la presqu'île, afin que je voie bien comment les montagnes se dominent les unes les autres.
Finkenstein, 20 mai 1807
A l'Impératrice, à Laeken
Je reçois ta lettre du 10 mai. Je vois que tu es allée à Laeken. Je pense que tu pourrais rester là une quinzaine de jours; cela ferait plaisir aux Belges, et te servirait de distraction.
J'ai vu avec peine que tu n'étais point sage; la douleur a des bornes qu'il ne faut pas passer. Conserve-toi pour ton ami, et crois à tous mes sentiments.
Finkenstein, 20 mai 1807
A la reine de Hollande
Ma Fille, tout ce qui me revient de la Haye m'apprend que vous n'êtes pas raisonnable; quelque légitime que soit votre douleur, elle doit avoir des bornes. N'altérez pas votre santé, prenez des distractions, et sachez que la vie est semée de tant d'écueils et peut être la source de tant de maux, que la mort n'est pas le plus grand de tous.
Votre affectionné père
Finkenstein, 20 mai 1807
A M. Cambacérès
Mon Cousin, j'ai reçu vos lettres du 10 et du 11 . Les bulletins vous instruiront des petits événements qui ont eu lieu.
Les sénateurs commandant des légions, qui iront au chef-lieu de leur légion, doivent y jouir des honneurs qui leur sont attribués, mais seulement dans la ville qui est le chef-lieu de leur légion.
Finkenstein, 20 mai 1807
A M. Monge
Je reçois votre lettre du 9 mai. Je vous remercie de tout ce que vous me dites de la mort du pauvre petit Napoléon : c'était son destin !
Finkenstein, 20 mai 1807
A M. Fouché
Je reçois votre lettre du 10 et celle du 11. Il n'y a rien ici de nouveau que les petits événements que vous verrez dans le bulletin.
La perte du petit Napoléon m'a été très-sensible. J'aurais désiré que ses père et mère eussent reçu de la nature autant de courage que moi pour savoir supporter tous les maux de la vie. Mais ils sont plus jeunes et ont moins réfléchi sur la fragilité des choses d'ici-bas.
Je vous recommande qu'il n'y ait point de réaction dans l'opinion. Parlez de Mirabeau avec éloge. Il y a des choses dans cette séance de l'Académie qui ne me plaisent pas : elle a été trop politique; il n'était pas du ressort du président d'une compagnie savante de parler de Mirabeau. S'il devait en parler, il ne devait pas parler de son style; cela seul pouvait le regarder. Quand serons-nous donc sages? Quand serons-nous animés de la véritable charité chrétienne, et quand donc nos actions auront-elles pour but de ne faire de la peine et de n'humilier personne, de ne point réveiller des faits qui vont au cœur de beaucoup de gens ? Et quand surtout chacun aura-t-il le bon sens de se restreindre dans ses fonctions ? Qu'a de commun l'Académie française avec la politique ? Pas plus que les règles de la grammaire n'en ont avec l'art de la guerre.
Finkenstein, 20 mai 1807
DÉCISION
Les Ursulines de Parme demandent, 1° la restitution des biens-fonds dont elles jouissaient et dont le revenu montait par an à 25,000 francs; 2° la permission de reprendre leur habit. | Renvoyé à M. Portalis. Mon intention est que la seconde demande soit accordée sans délai. Me faire un rapport sur les conséquences qu'entraînerait la première si elle était accordée. |
Finkenstein, 20 mai 1807
A la princesse Marie-Antoinette de Parme
J'ai reçu votre lettre du 2 mai. J'ai donné les ordres les plus précis pour que le collège des Ursulines, qui vous sert de retraite, soit spécialement protégé, et j'ai accordé les deux demandes que vous m'avez faites pour cette maison. Le ministre des cultes prendra les mesures nécessaires pour faire connaître ma volonté aux administrations du pays. Je suis bien aise que vous soyez contente, et d'avoir trouvé cette occasion de vous être agréable.
Finkenstein, 20 mai 1807
Au prince Eugène
Mon Fils, plus de 100 hommes, Brescians, ont déserté des régiments italiens à leur passage dans le Tyrol. Il faut les faire arrêter et les renvoyer aux corps.
Finkenstein, 20 mai 1807
76e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE
Une belle corvette anglaise doublée en cuivre, de vingt-quatre canons, montée par 120 Anglais et chargée de poudre et de boulets, s'est présentée pour entrer dans la ville de Danzig. Arrivée à la hauteur de nos ouvrages, elle a été assaillie par une vive fusillade des deux rives et obligée d'amener. Un piquet du régiment de Paris a sauté le premier à bord. Un aide de camp du général Kalkreuth, qui revenait du quartier général russe, plusieurs officiers anglais ont été pris à bord. Cette corvette s'appelle Le Sans-Peur. Indépendamment de 120 Anglais, il y avait 60 Russes sur ce bâtiment.
La perte de l'ennemi au combat de Weichselmünde, du 15, a été plus forte qu'on ne l'avait d'abord pensé, une colonne russe , qui avait longé la mer, ayant été passée au fil de la baïonnette. Compte fait, on a enterré 1,300 cadavres russes.
Le 16, une division de 7,000 Russes, commandée par le général Tutschkof , s'est portée , de Brok sur le Bug , sur Pultusk , pour s'opposer à de nouveaux travaux qui avaient été ordonnés pour rendre plus respectable la tête de pont. Ces ouvrages étaient défendus par six bataillons bavarois, commandés par le prince royal de Bavière. L'ennemi a tenté quatre attaques; dans toutes, il a été culbuté par les Bavarois et mitraillé par les batteries des différents ouvrages. Le maréchal Masséna, évalue la perte de l'ennemi à 300 morts et au double de blessés. Ce qui rend l'affaire plus belle, c'est que les Bavarois étaient moins de 4,000 hommes. Le prince royal se loue particulièrement du baron de Wrede, officier général au service de Bavière, d'un mérite distingué. La perte des Bavarois a été de 15 hommes tués et de 150 blessés.
Il y a autant de déraison dans l'attaque faite contre les ouvrages du général Lemarois dans la journée du 13, et dans l'attaque du 16 sur Pultusk, qu'il y en avait, il y a six semaines, dans la construction de ce grand nombre de radeaux auxquels l'ennemi faisait travailler sur le Bug. Le résultat a été que ces radeaux , qui avaient coûté six semaines de travail, ont été brûlés en deux heures, quand on l'a voulu, et que ces attaques successives contre des ouvrages bien retranchés et soutenus de bonnes batteries leur ont valu des pertes considérables sans espoir de profit.
Il paraît que ces opérations ont pour but d'attirer l'attention de l'armée française sur sa droite; mais les positions de l'armée française sont raisonnées sur toutes les bases et dans toutes les hypothèses, défensives comme offensives.
Pendant ce temps, l'intéressant siège de Danzig continue à marcher. L'ennemi éprouvera un notable, dommage en perdant cette place importante et les 20,000 hommes qui y sont renfermés. Une mine a joué sur le blockhaus et l'a fait sauter. On a débouché sur le chemin couvert par quatre amorces, et on exécute la descente du fossé.
L'Empereur a passé aujourd'hui l'inspection du 5e régiment provisoire. Les huit premiers ont subi leur incorporation. On se loue beaucoup dans ces régiments des nouveaux conscrits génois, qui montrent de la bonne volonté et de l'ardeur.
Finkenstein, 21 mai 1807
A M. Fouché
Le non-éclairage de Paris devient une dilapidation. Il faut porter enfin un terme à un abus dont le public commence à se plaindre.
Finkenstein, 21 mai 1807
Au général Lacuée
J'ai reçu votre lettre du 6 de ce mois. Ce qui me paraît convenable, c'est de ne plus nommer aux emplois d'officiers dans la légion du Midi, et, d'ici à quelque temps, de la resserrer en un seul bataillon. Continuez néanmoins son recrutement. Je l'ai toujours destinée à être embarquée et à être envoyée aux colonies. C'est pour cela que je la faisais recruter d'anciens soldats du roi de Sardaigne, afin de ne pas laisser en Piémont des hommes qui ont fait la guerre contre nous.
Finkenstein, 21 mai 1807
Au général Lacuée
Je reçois et lis avec un grand intérêt votre état A présentant la situation, après la réception des conscrits de 1808, 1° des dépôts de l'infanterie de l'armée de Naples et de la Grande Armée, 2° des régiments du Frioul, de la Dalmatie, etc. Cet état est si bien fait, qu'il se lit comme une belle pièce de poésie.
J'y ai remarqué quelques erreurs. Dans les dépôts de la Grande Armée, le long du Rhin, vous deviez porter le 3e bataillon du 17e; je ne l'y trouve pas. Au camp de Saint-Lô, je vois le 15e de ligne, qui n'y est pas, et le 31e léger, qui n'y est pas davantage; il fallait mettre en place le 5e léger. Il ne fallait pas porter au camp Napoléon le 5e léger, qui n'y est pas, mais porter en place le 3e et le 4e bataillon du 15e de ligne et le 3e bataillon du 31e léger. Dans le Frioul, il ne fallait pas mettre le 112e, qui n'y est pas. Dans les divisions Boudet et Molitor, il ne fallait pas mettre le 7e de ligne, dont le 3e bataillon est en Piémont, et les deux premiers bataillons à Braunau. Le 42e ni le 1er d'infanterie légère ne sont plus à l'armée de Naples, non plus que le 32e d'infanterie légère; il est tout réuni à Toulon. Il faut faire disparaître ces petites erreurs.
Par la lettre que je vous ai écrite ce matin, vous verrez les dispositions que j'ai faites de la réserve. J'y ai laissé 3,000 hommes pour la cavalerie et l'artillerie. Les carabiniers me paraissent complets; cependant on ne saurait trop donner à ces deux beaux régiments. Vous pouvez donc donner sur la réserve 25 hommes à chacun, pour réparer ce qu'ils perdront ou ce qu'ils ont peut-être déjà perdu par
les hôpitaux et par les événements de la guerre.
Le 2e de cuirassiers a besoin de 60 hommes; le 30e de 25; le 41e de 50; le 6e, de 100; le 90e de 45; le 12e, de 100; les deux régiments de carabiniers en ont besoin de 50. Total, 435.
Le 12e de dragons a besoin de 50 hommes; le 80, de 50; le 11e, de 50; le 12e, de 50; le 18e, de 50; le 19e, de 25; le 20e, de 25;
le 26e, de 50. Total, 350.
Le ler de chasseurs a besoin de 100 hommes; le 2e, de 100; le 3e, de 60; le 5e, de 60; le 7e, de 70; le 12e, de 100; le 13e, de 20; le 15e, de 50; le 24e, de 150. Total, 710.
Le 2e de hussards a besoin de 50 hommes; le 4e, de 100; le 7e, de 20; le 9e, de 50. Total, 220.
L'artillerie à cheval a besoin de 400 hommes.
Il vous restera donc près de 1,000 hommes pour l'artillerie et les sapeurs.
Finkenstein, 21 mai 1807
Au vice-amiral Decrès
Je reçois votre lettre du 11. Le roi de Naples pense que, si une division de quatre vaisseaux de ligne et de quelques frégates venait à Naples, elle pourrait s'emparer de la Sicile, où il n'y a que quelques frégates. J'ai cinq vaisseaux actuellement à Toulon. Il me tarde bien de savoir ces cinq vaisseaux en rade. Vous ne me répondez pas là-dessus. Je dois avoir à Toulon de meilleures frégates que la Muiron. Je désire que cette frégate, sur laquelle je suis revenu d'Égypte, soit gardée comme un monument et placée de manière à ce qu'elle se conserve, s'il est possible, plusieurs centaines d'années. D'ailleurs son équipage servirait à monter un vaisseau. J'éprouverais une peine superstitieuse s'il arrivait un malheur à cette frégate. Placez-la quelque part dans l'arsenal de Toulon.
Faites donc finir à Gènes le Superbe.
La Sicile est d'une grande importance, et, si j'ai cinq vaisseaux à Toulon dans le courant de l'été, cela peut nous redonner cette île. Informez-moi si un vaisseau à trois ponts peut entrer dans le port de Castellamare et dans le port de Naples.
Finkenstein, 21 mai 1807
ORDRES
Envoyer un courrier extraordinaire à Hambourg pour qu'on vende les bois.
Écrire confidentiellement à M. Bourrienne et au commandant de Hambourg qu'il faut prévoir le cas où les Anglais pourraient y arriver, et que, dès ce moment, il est nécessaire de faire filer sur Magdeburg tous les effets d'habillement à mesure qu'ils sont confectionnés, ainsi que l'argent.
Vendre les marchandises anglaises.
Finkenstein, 21 mai 1807
Au général Lemarois
Monsieur le Général Lemarois, je reçois votre lettre du 19 mai. Vous voyez les choses d'une manière trop absolue. Voyez fréquemment les membres du gouvernement, et n'employez pas trop de mécontents.
Duroc a dû vous écrire hier pour vous demander beaucoup de renseignements dont j'ai besoin. Je désire que vous me les envoyiez le plus tôt que vous pourrez. Voyez souvent les membres du gouvernement, et surtout le comte Stanislas Potocki. Tâchez de m'envoyer toutes les nouvelles que vous aurez de la Gallicie.
Finkenstein, 21 mai 1807
Au général Clarke
Je reçois votre lettre du 17. J'imagine que la division Boudet est en marche sur Stettin. J'ai mandé également au maréchal Brune de se porter à Stettin; je le trouve mieux placé là. Je n'ai encore pris aucun parti pour la division Molitor, qui, je crois, n'est arrivée que le 17 à Magdeburg, où elle aura besoin de reposer quelque temps. Je suppose qu'à l'heure qu'il est la division Boudet a passé Berlin. Il ne faut pas manquer de faire exagérer sa force dans tous les journaux, ainsi que celle des troupes espagnoles qui doivent, à l'heure qu'il est, avoir de beaucoup dépassé Augsburg.
Je vois par votre lettre du 18 que le roi de Suède est arrivé à Stralsund. S'il rompt l'armistice, il trouvera à qui parler.
Vous verrez que j'ai frappé une réquisition de 2,000 chevaux; mais je n'en approuve pas moins l'achat de 500 que vous avez ordonné. Il est arrivé de Paris un millier de selles à Magdeburg. Faites-les mettre à la disposition du général Bourcier, à Potsdam. Quand vous aurez plus de chevaux que d'hommes, il serait assez avantageux d'envoyer, avec les différents détachements, quelques chevaux en sus, qu'on distribuerait aux régiments. Donnez, par exemple, trois chevaux par deux hommes. Mais il faudrait qu'ils fussent tous sellés et bridés.