16 - 31 juillet 1808
Bayonne, 16 juillet 1808
Au général Clarke, ministre de la guerre, à Paris
Je désire que les noms suivants soient donnés aux différents ouvrages de la place d'Alexandrie: la demi-couronne du Tanaro s'appellera la demi-couronne de Saorgio; la demi-couronne de Gênes s'appellera la demi-couronne de Montenotte; la couronne de la haute Bormida s'appellera la couronne de Dego; la demi-couronne de Marengo conservera son nom ; la demi-couronne de la basse Bormida s'appellera la demi-couronne de Mondovi; la demi-couronne du bas Tanaro s'appellera la demi-couronne de Lodi.
Bayonne, 16 juillet 1808
Au vice-amiral Decrès, ministre de la marine, à Paris
Il existait à Bayonne une mouche; six ont été construites dernièrement; ce qui fait sept. Je désire en faire construire une huitième, qui serait prête à partir avant le 15 septembre. J'ai ordonné que le n° 6 fût armé de manière à pouvoir aller à l'île de Frauce. Ces bâtiments peuvent seulement porter douze hommes, trois mois d'eau et quatre mois de vivres. Le n° 8 serait également destiné à aller à l'île de France, nommez les enseignes pour les commander et choisissez des hommes qui connaissent les îles de France et de la Réunio, et faites préparer les paquets que ces bâtiments doivent porter. Mettez en construction à Rochefort les n° 9 et 10, pour servir d'avisos à l'escadre de l'ile d'Aix, et aussi pour expédier, si cela était nécessaire.
Faites mettre le n° 11 en construction à Nantes, pour le même service; le n° 12 à Lorient, le n° 13 à Brest, pour le même objet. Faites mettre les n° 14 et 15 à Boulogne, pour servir d'éclaireurs à la flottille, faire des sorties et observer les côtes. Faites mettre le n° 16 en construction à Dunkerque, pour le même objet. Faites mettre les n° 17 et 18 en construction à Flessingue ou à Anvers, pour servir d'éclaireurs et d'avisos à l'escadre de Flessingue, et pour expédier selon les circonstances. Mettez les n° 19 et 20 en construction à Toulon , pour servir d'éclaireurs à mon escadre, et, selon, les circonstances, porter des nouvelles en Corse et partout ailleurs. Donnez des ordres pour que ces petits bâtiments soient mis à l'eau avant le 15 septembre. On a l'habitude de se servir, pour leur armement, d'une pièce de 6 et de quatre pierrers. Je désirerais qu'au lieu de la pièce de 6 on pût y mettre une caronade de 24 ou de 36. Ces petits bâtiments réunissent tous les avantages; ils se manoeuvrent facilement, exigent peu d'équipage, dix hommes à la rigueur suffiraient. Je désire beaucoup en avoir à Boulogne. A la ligne d'embossage, un ou deux de ces bâtiments détachés en observation peuvent être d'une grande utilité.
Le n° 5, qui est à Bayonne, a ses quatre mois de vivres et trois mois d'eau et est prêt à partir. Le n° 6 est également prêt à partir pour l'île de France. Le n° 7 sera prêt dans cinq jours. Le n° 8 pourra être prêt à partir pour l'île de France au mois de septembre. Je désire qu'il y ait toujours à Bayonne une de ces mouches en appareillage, prête à partir vingt-quatre heures après avoir recu votre courrier. Par ce moyen, j'enverrai beaucoup plus souvent des nouvelles à mes colonies. Ce port a d'immenses avantages pour les petites expéditions. Voilà dix bâtiments que j'expédie en vue des Anglais, tandis que leurs croisières sont sur Saint-Sébastien et Santander, et que la connaissance qu'ils ont de mon séjour à Bayonne les porte à observer plus spécialement ce port. Quatre pièces de canon et 12 ou 15 hommes d'équipage rendent ces bâtiments plus forts qu'un aviso ordinaire, sans nuire à sa vitesse, et ils ont de plus l'avantage d'un bâtiment-mouche, qui voit de loin et n'est pas aperçu. Je crois qu'il sera très-utile d'attacher trois ou quatre de ces petits bâtiments à chacune de mes escadres. Cela m'épargnera des bricks, qui sont déjà des bâtiments assez considérables , et cela porte des ordres avec une grande rapidité. Ces bâtiments ne sont, dans le fait, que des doubles péniches. La mouche qui est sortie avec l'Oreste a surpris tout le monde par la vitesse avec laquelle elle l'a gagné, et l'Oreste est cependant fin marcheur et réparé à neuf. Un brick me coûte 200,000 francs et m'occupe 100 hommes pour son équipage. Une mouche me coûte 15,000 francs et 12 hommes d'équipage. Je puis donc avoir plus de douze mouches pour un brick. On sent que c'est d'un avantage considérable pour faire parvenir des nouvelles aux colonies.
La simplicité est le premier élément d'un bon service. Si ces bâtiments sont reconnus bons, il ne faut pas en avoir d'autres sur la Méditerranée ou sur l'océan, et les préférer aux louqres, aux chasse- marée, aux tartanes, etc. Envoyez au vice-roi un profit de ces mouches pour qu'il en fasse construire à Venise. Envoyez-en à Gênes, afin que je réunisse, de plusieurs points, des renseignements sur leurs qualités, et que je me décide à leur donner la préférence, s'ils la méritent, sur toute espèce de petits bâtiments destinés à porter des lettres ou paquets. Je verrai avec plaisir les observations que votre expérience de la mer vous suggérera pour ou contre ces bâtiments.
Bayonne, 16 juillet 1808
A Alexandre, prince de Neuchâtel, major-général de la Grande Armée, à Bayonne
Mon Cousin, il faut donner l'ordre au général Miquel, qui commande dans le département de l'Ariége, d'avoir soin de garnir le poste de la Claire et de Saint-Béat, afin de couvrir le département de la Haute-Garonne. Il faut donner l'ordre au général qui commande à Perpignan, et au préfet de Perpignan, de placer deux compagnies, chacune de 140 hommes de gardes nationales, à Mont-Louis, et de placer une compagnie de 80 hommes au fort de la Garde et une de même nombre au fort des Bains, afin d'assurer la possession de ces villes. Il faut également ordonner à la compagnie de vétérans qui est à Cette, et qui est forte de 100 hommes, de se rendre à Mont-Louis. Il faut ordonner que les compagnies de vétérans qui sont à Perpignan et Toulouse se rendent également à Mont-Louis; il y a à Perpignan une compaguie de 118 hommes, à Toulouse une de 50 hommes; ce qui augmentera la garnison de cette place. Enfin il faut ordonner que Mont-Louis, Bellegarde et les trois petits forts de Villefranche soient approvisionnés de la manière suivante, savoir : à Mont-Louis, 30,000 rations de biscuit; au fort des Bains, 10,000; au fort de la Garde, 10,000; à Bellegarde, 30,000; à Villefranche, 20,000; total, 100,000 rations, ce qui servira d'approvisionnement de siége en cas d'événement.
Vous me proposerez un général de brigade pour commander le département des Pyrénées-Orientales, le général Augier ayant eu l'ordre de se rendre à la division du général Reille. Il faut s'assurer également si le général Viala s'est rendu à Figuières pour prendre le commandement de cette place.
Bayonne, 16 juillet 1808
A M. Fouché, ministre de la police générale, à Paris
Défendez aux journaux de parler de l'entrée et de la sortie des bâtiments aventuriers. Cela ne peut avoir que des inconvénients. Les intéressés le savent assez.
Je reçois votre lettre du 13 avec les papiers de Prégent. Je ne sais pas trop ce que veulent les Anglais. Peut-être a-t-on blâmé en Angleterre la mesure d'arrêter les pêcheurs.
(Brotonne)
Bayonne, 16 juillet 1808
NOTE POUR LE COLONEL
LACOSTE
devant Saragosse (Cette note, écrite au nom du général
Bertrand, est placée parmi les minutes de la secrétairerie d'État.)
Il faut continuer à faire fortifier toujours la tête de pont, de manière que 200 hommes soient là inattaquables; faire mettre en batterie les pièces de canon de 4 et de 8, sans avant-train, qui sont au parc et qui ont été prises à l'ennemi. Il faut que la garnison même soit chargée d'améliorer les fortifications. Faire également fortifier, avec la plus grande activité, le pont du Gallego, du moment qu'on y sera établi.
Il serait peut-être utile de choisir un gué, à un quart de lieue de Saragosse sur le bas Èbre, et de faire, vis-à-vis, une redoute où une soixantaine d'hommes pussent être à l'abri de l'insulte avec deux pièces de canon; alors la cavalerie qui battrait la plaine sur la rive gauche ne serait pas obligée de repasser le Gallego, et pourrait se ranger sous la protection de cette redoute pour passer et repasser. Cela d'ailleurs donne la facilité aux troupes qui seraient de ce côté, sur la rive gauche, de secourir le pont. L'opinion des gens du pays est qu'il y a beaucoup de gués de ce côté-ci.
Bayonne, 16 juillet 1808
A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Milan
Mon fils, jai destiné cette année des fonds assez considérables pour les travaux de Venise et de la place qui est en avant. Les plans ne m'en ont pas encore été soumis; et, en attendant qu'ils soient présentés par le général Chasseloup et que je les aie approuvés, la campagne sera passée. Je désire donc que les 500,000 francs que j'y avais destinés soient employés à augmenter les travaux de Palmanova. On peut avec cet argent avancer trois lunettes de plus. Donnez des ordres en conséquence au général Chasseloup, et faites-vous remettre par lui un mémoire sur les augmentations quil proposera. Mais qu'il aille toujours de l'avant; cette place étant à lextrême frontière, il ne pourrait être que très-heureux de la terminer promptement.
(Prince Eugène)
Bayonne, 16 juillet 1808
A Jérôme Napoléon, Roi de Westphalie
Vous devez à la caisse d'amortissement 2 millions. Vous laissé protester vos billets; ce n'est pas d'un homme d'honneur. Je ne souffre point qu'on me manque. Vendez vos diamants, votre vaisselle; ne faites pas de folles dépenses, qui vous rendent la risée de l'Europe et finiront par exciter l'indignation de vos peuples. Vendez vos meubles, vos chevaux, vos bijoux, et payez vos dettes. L'honneur passe avant tout. Vous avez mauvaise grâce à ne payer vos dettes, lorsqu'on voit les présents que vous faites, et ce luxe incongru chez vous, qui révolte vos peuples. Vous êtes jeune, léger, et ne tenez aucun compte de l'argent, surtout dans un temps où vos peuples souffrent par suite de la guerre.
(Lecestre)
Bayonne, 16 juillet 1808
A Jérôme Napoléon, Roi de Westphalie
Je reçois votre lettre que m'apporte votre aide de camp Girard.
Je vous recommande trois choses : respect, reconnaissance et attachement à moi et au peuple francais, à qui vous devez tout; - économie la plus sévère, pour ne pas faire contraster la misère des circonstances qui pèsent sur vos peuples avec un luxe et une dépense déréglés; économie nécessaire à tous les souverains, surtout au roi d'un peuple simple; économie nécessaire en tous temps, surtout au commencement d'un règne, où l'opinion se forme; économie telle que non seulement vous n'ayez pas de dettes, mais encore que, sur vos 6 millions de liste civile, vous en dépensiez trois pour votre maison, vous ayez 1,500,000 francs pour les accidents imprévus, tels que mariages, festins et bâtisses de palais, et 1,500,000 francs pour former en dix ans 15 millions de réserve, et, d'ici à ce temps-là, vous les prêtiez pour accélérer la formation de votre armée; enfin, employez votre temps de manière que vous appreniez ce que vous ne savez pas, la tactique des troupes à cheval, de l'infanterie, de l'artillerie, l'administration de la justice et des finances. Quand vous remplirez ces conditions, vous mériterez mon estime, celle de la France et de vos peuples. Pour remplir, tout cela, vous avez bien des réflexions à faire, des réformes à opérer et des choses à changer dans vos manières.
(Lecestre)
Bayonne, 16 juillet 1808.
A Jérôme Napoléon, Roi de Westphalie
Des courriers vont de la maison de campagne d'H** à Cassel. Je vous ai fait connaître que H**" était un misérable souillé de toutes les dilapidations et coupable de choses que je ne puis écrire. Je suis indigné qu'après cela vous continuiez de correspondre avec lui. On me dit même qu'il est en Italie. Dans ce cas, attendez-vous à le voir renfermé dans un château fort. Je le ferai arrêter dans le palais même qu'il ose profaner. Je vous déclare que, la première fois que vous écrirez à H**, vous désobéirez au chef de votre famille et que vous attirerez des malheurs sur ces gens-là.
(Lecestre)
Bayonne, 16 juillet 1808, à midi
A Joseph Napoléon, Roi d'Espagne
Je vous envoie des lettres que le général Lefebvre a pris à Catalayud, dans son expédition du 6. Vous y verrez que ce misérable Palafox s'était sauvé, lors du bombardement du 16 juin.
Au moment même arrive l'estafette du 12 à huit heures du soir. Il n'y a aucune espèce de doute que le maréchal Moncey n'ai des succès sur les insurgés de Valence; qu'il n'aura pas jugé à propos d'attaquer cette ville, qu'il aura trouvée barricadée, et qu'il est devant la ville en parlementage ou campé.
Je vous envoie une lettre du sieur Laforest. Il faut prendre garde que M. d'Urquijo ne commence par faire des sottises. Le secrétaire d'État doit tout envoyer aux ministres, et les ministres seuls doivent agir. Sans cela, il n'y aurait en Espagne qu'un seul ministre, ce serait le secrétaire d'Etat, et les ministres ne seraient rien. Le ministre secrétaire d'État a donc eu tort d'envoyer la constitution à l'assemblée; il devait l'envoyer au ministre de la justice.
La mesure que propose le sieur Laforest d'enlever les registres du conseil de Castille, au moment où il sera constitué tribunal de cassation, me paraît fort bonne. Je suis dans l'opinion que si vous ne pouvez pas avoir un meilleur ministre de la police que celui que je vous ai désigné, qui est décidé, qui a de l'esprit et l'intrigue.
(Lecestre)
Bayonne, 17 juillet 1808
A M. de Lacépède, Grand Chancelier de la Légion d'honneur, à Paris
Monsieur Lacépède, je suis informé que les demoiselles qui entrent à la maison d'Écouen n'apportent pas de trousseau. Le trousseau est évalué 400 francs. Cette dépense ne peut pas être supportée par la Légion d'honneur; cet établissement lui coûte déjà beaucoup trop. Prenez des mesures pour faire payer ce trousseau par les parents. Je vois, par les états, que la maison d'Écouen coûte déjà 440,000 francs pour frais détablissement, et que 250,000 francs sont mis à la disposition de l'économe. Il est nécessaire que les frais de réparation de cette maison soient fixés; qu'on sache ce qu'elle coûtera désormais pour frais d'établissement. Il est indispensable que vous fassiez faire un budget des dépenses de cette maison pour l'année, en les divisant en ordinaires et extraordinaires; l'extraordinaire comprendra les dépenses faites pour l'établissement. Si l'on ne suit pas cette marche, il se fera des dépenses qui ne seront point proportionnées aux revenus de la Légion.
Bayonne, 17 juillet 1808
A M. Barbier, bibliothécaire de l'Empereur
L'Empereur désire se former une bibliothèque portative d'un millier de volumes, petit in-12, imprimés en beaux caractères. L'intention de Sa Majesté est de faire imprimer ces ouvrages pour son usage particulier, sans marges, pour ne point perdre de place. Les volumes seraient de cinq à six cents pages, reliés à dos brisé et détaché, et avec la couverture la plus mince possible. Cette bibliothèque serait composée d'à peu près 40 volumes de religion, 40 des épiques, 40 de théâtre, 60 de poésie, 100 de romans, 64 d'histoire. Le surplus, pour arriver à mille, serait rempli par des mémoires historiques de tous les temps.
Les ouvrages de religion seraient l'Ancien et le Nouveau Testament, en prenant les meilleures traductions; quelques Épîtres et autres ouvrages les plus importants des Pères de l'Église; le Coran; de la mythologie; quelques dissertations choisies sur les différentes sectes qui ont le plus influé dans l'histoire, telles que celles des Ariens, des Calvinistes, des Réformés, etc. ; une histoire de l'Église, si elle peut être comprise dans le nombre des volumes prescrit.
Les épiques seraient Homère, Lucain, le Tasse, Télémaque, la Henriade, etc.
Les tragédies : ne mettre de Corneille que ce qui est resté; ôter de Racine les Frères ennemis, l'Alexandre et les Plaideurs, ne mettre de Crébillon que Rhadamiste, Atrée et Thyesle; de Voltaire, que ce qui est resté.
L'histoire : mettre quelques-uns des bons ouvrages de chronologie, les principaux originaux anciens, ce qui peut faire connaître en détail l'histoire de France. On peut mettre, comme histoire, les Discours de Machiavel sur Tite-Live, l'Esprit des Lois, la Grandeur des Romains, ce qu'il est convenable de garder de l'histoire de Voltaire.
Les romans : La Nouvelle Héloïse et les Confessions de Rousseau. On ne parle pas des chefs-d'oeuvre de Fielding, Richardson, de Lesage, etc., qui trouvent naturellement leur place; les Contes de Voltaire.
Nota. Il ne faut mettre de Rousseau ni 1'Émile ni une foule de lettres, mémoires, discours et dissertations inutiles; même observation pour Voltaire.
LEmpereur désire avoir un catalogue raisonné, avec des notes qui fassent connaître l'élite des ouvrages, et un mémoire sur ce que ces mille volumes coûteraient de frais d'impression, de reliure; ce que chaque volume pourrait contenir des ouvrages de chaque auteur; ce que pèserait chaque volume; combien de caisses il faudrait, de quelles dimensions, et quel espace cela occuperait.
L'Empereur désirerait également que M. Barbier s'occupât du travail suivant avec un de nos meilleurs géographes : rédiger des mémoires sur les campagnes qui ont en lieu sur l'Euphrate et contre les Parthes, à partir de celle de Crassus jusqu'au huitième siècle, en y comprenant celles d'Antoine, de Trajan, de Julien, etc., tracer, sur des cartes d'une dimension convenable, le chemin qu'a suivi chaque, armée, avec les noms anciens et nouveaux des pays et des principales villes, des observations géographiques du territoire, et des relations historiques de chaque expédition, en les tirant des auteurs originaux.
Bayonne, 17 juillet 1808
A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de la Grande Armée, à Bayonne
Mon Cousin, envoyez un courrier extraordinaire au général Reille. Écrivez-lui que sa lettre du 10 n'est arrivée qu'aujourd'hui 17; qu'il est nécessaire qu'il envoie par le retour du courrier son état de situation qui fasse connaître les troupes qui l'ont joint. Il faut aussi qu'il donne des détails sur la position et le nombre de l'ennemi, les noms des lieux, etc. Cette manière de rendre compte ne laisse pas comprendre ce qui se fait.
Il sera nécessaire, lorsque le général Reille sera sûr de Rosas et que, par l'arrivée des troupes , il sera suffisamment renforcé, qu'il ouvre la communication avec le général Duhesme. Il ne recevra votre lettre que le 19 ou le 20. A cette époque je suppose qu'il aura près de 6,000 hommes sous ses ordres.
Bayonne, 17 juillet 1808
A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de la Grande Armée, à Bayonne
Mon Cousin, envoyez des ordres par l'estafette de ce soir au général Songis, à l'intendant général et au maréchal Mortier, pour que la place de Neisse en Silésie soit réarmée, pour qu'il y soit mis sans délai la moitié de l'artillerie de Glogau, et qu'il y soit formé un fond d'approvisionnements de siège. Il est nécessaire que cette place soit mise à l'abri d'un coup de main, soit pour les vivres, soit pour l'artillerie, avant le 15 août. Écrivez au maréchal Mortier d'envoyer des officiers du génie reconnaître les chemins qui de Neisse vont en Bavière, et les chemins transversaux qui iraient directement, en passant par Kosel, de Neisse sur Olmutz. Demandez au général Songis et à l'intendant général un mémoire secret, dans la supposition qu'il y eût une campagne en Autriche, en débouchant par Neisse ou par Eger. Du reste, il ne faut pas qu'on fasse de trop fortes dépenses.
Bayonne, 17 juillet 1808, dix heures du matin
Au maréchal Bessières, commandant la Garde Impériale, etc., à Burgos
Mon Cousin, je ne reçois qu'au moment même le courrier que vous m'avez expédié le 14 de Medina de Rio Seco. La bataille de Medina de Rio Seco sera un titre de plus à votre réputation militaire.
Jamais bataille ne fut gagnée dans des circonstances plus importantes : elle décide les affaires d'Espagne.
J'accorde le brevet de général de division au général Darmagnac et celui de colonel au major du 13e. Proposez-moi un colonel et deux chefs d'escadron pour le 22e. J'accorde cent décorations de la Légion d'honneur pour ceux qui étaient présents à la bataille, qui se sont le plus distingués, savoir : cinquante pour les officiers et cinquante pour les sous-officiers et soldats. Parmi ces derniers, vous en prendrez au moins dix de la conscription de 1808, en choisissant de bons sujets et des hommes qui se soient distingués. J'accorde vingt-cinq aigles d'or d'officier pour ceux qui sont déjà légionnaires et cinq de commandant pour ceux qui sont déjà officiers. Envoyez- moi sans délai les procès-verbaux de tout cela.
Je suppose que vous avez continué votre mouvement sur Benavente et Léon, et que vous vous êtes fait rejoindre par le bataillon de Paris, par la brigade du général Gaulois et par celle du général Rey, qui était avec le Roi, ce qui vous fait un renfort de près de 5,000 hommes, et que, avec cela, vous vous préparez à entrer en Galice et dans les Asturies. Vous n'avez rien à craindre pour vos derrières. J'attends des bataillons provisoires de conscrits et plusieurs vieux régiments, qui, successivement, seront envoyés à Burgos, à Vitoria, pour maintenir la tranquillité. Le général Savary vous a envoyé 2,500 hommes, qui arrivent le 20 à Valladolid. Je ne pense pas qu'il y ait de l'inconvénient que vous les gardiez; cela renforcera votre corps. Vous sentez l'importance de soumettre la Galice pour ôter tout débouché aux Anglais. Je suppose que vous avez été le 15 ou le 16 à Benavente, et que vous serez bientôt à Léon, et que le 20 vous aurez balayé toute la plaine.
Le maréchal Moncey a eu de grands succès contre Valence et a battu les insurgés dans six rencontres différentes, leur a pris trente pièces de canon et leur a tué un monde considérable; mais le défaut de munitions l'a empêché d'attaquer Valence.
Bayonne, 17 juillet 1808
A Eugène Napoléon, vice-roi d'Italie, à Milan
Mon Fils, j'ai vu avec plaisir que vous avez fait venir à Milan le cardinal Gabrielli, évêque de Sinilaglia. Il faut le laisser là ; quand vous pourrez le voir, vous lui demanderez s'il veut ou non prêter le serment prescrit par le Concordat. Sil ne veut pas le prêter, vous l'enverrez dans un couvent du côté de Côme ou de Novare; vous ferez séquestrer son temporel, dont le revenu sera employé, moitié à secourir les hôpitaux de son diocèse et moitié à réparer les églises. On ne lui laissera qu'une pension alimentaire de 1,000 écus. Tout cela doit se faire sans bruit. Il ne faut imprimer aucun décret. Tout évêque et autre ecclésiastique qui ne prêtera pas le serment tel que le Concordat le prescrit, il faut ne lui laisser qu'une pension alimentaire et employer le reste de son bien en oeuvres de charité, moitié pour les hôpitaux et moitié pour les églises. Ayez soin, du reste, qu'il ne soit point question de cela dans aucune gazette, et que cela ne fasse aucune espèce de bruit.
Bayonne, 17 juillet 1808, midi.
A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, à Vitoria
Mon Frère, je reçois à l'instant votre lettre qui m'annonce la victoire de Medina de Rio Seco. Cette victoire est très-glorieuse. Témoignez-en votre satisfaction au maréchal Bessières en lui envoyant la Toison d'or. Cet événement est le plus important de la guerre d'Espagne et donne une couleur décidée à toutes les affaires. Il faut actuellement appuyer le général Dupont. La division Gobert et celles qui sont placées en intermédiaires peuvent filer sur ce général. Il est bien important que le général Dupont mette en déroute l'armée d'Andalousie. Quand j'aurai des nouvelles plus claires du résultat des événements du maréchal Bessières, de ceux de Valence, je vous enverrai un plan de conduite. Les brigades Rey et Gaulois doivent rejoindre le maréchal Bessières, qui aura alors plus de 21,000 hommes dans ses divisions actives ; il aura de quoi conquérir toutes les Asturies et la Galice.
Le 14e et le 44e de ligne arrivent ici ce soir. Le 43e et le 51e seront ici dans cinq jours. Beaucoup d'autres bataillons de réserve arrivent. Ainsi vos derrières seront bien suffisamment gardés. Il faut donc spécialement penser au général Dupont.
Marracq, 17 juillet 1808
A Joachim Napoléon, roi des Deux-Siciles
Mon Frère, j'ai reçu votre lettre. Je vois avec plaisir que les eaux vous font du bien.
Je vais vous annoncer une bonne nouvelle. Le 14 juillet, le général Cuesta, à la tête de 35,000 hommes, a été rencontré à Medina de Rio Seco. Sur ces 35,000 hommes, il y en avait 25,000 de troupes de ligne, faisant toute l'armée de Galice et d'Oporto. Ils occupaient une superbe position, défendue par quarante pièces de canon. A six heures du matin , le maréchal Bessières a marché à eux avec 15,000 hommes, a enlevé toutes leurs positions, les a mis dans la plus complète déroute, a fait plusieurs milliers de prisonniers, en a tué 5 à 6,000, a pris toute leur artillerie et dispersé l'armée.
Les fuyards se sont retirés sur plusieurs points. Nous n'avons eu que 250 blessés et 30 tués. Parmi ces derniers est le colonel du 22e de chasseurs, officier d'un mérite distingué. Le général Darmagnac a été légèrement blessé; le général Merle a eu deux chevaux tués. Cette affaire va nous donner toute la Galice et décider les affaires d'Espagne. Cette affaire a eu lieu le 14 juillet. L'armée a chargé aux cris de Vive 1'Empereur ! et Plus de Bourbons en Europe !
Annoncez cette nouvelle, qui est très importante. Le Roi était à Burgos et est parti pour Madrid.
Bayonne, 17 juillet 1808
Au prince Cambacérès, Archichancelier de l'Empire
Je vous envoie le bulletin de police. Je vous prie de le lire avec attention et de le comparer aux pièces. J'ai cru longtemps que c'était la rivalité contre le préfet de police qui portait M. Fouché à se conduire ainsi. Je commence à craindre que Fouché, qui a la tête gàtée, ne favorise les brouillons dont il espère se servir, et ne veuille point décourager des gens qui prévoient des circonstances de mort ou des événements extraordinaires, puisqu'il songe lui-même tant à l'avenir, témoin ses démarches pour un divorce. Dans cette situation des choses, je vous prie d'assemblrt le conseil de police et de vérifier les assertions suivantes savoir : 1° qu'il n'y a eu entre les accusés qu'une entrevue, tandis qu'il est constant par les interrogatoires qu'il y en a eu un grand nombre; 2° qu'elle a eu lieu par hasard, tandis qu'il est prouvé qu'elles ont été indiquées; 3° qu'il n'y a eu aucune proposition de faite de la part ou au nom de sénateurs, tandis que Servan et Jacquemont se disaient chargés de faire des propositions, sans que les sénateurs en sussent rien, comme c'est l'usage de la part des chefs de complot; 4° qu'ils n'ont adopté aucune espèce de résolution, tandis qu'ils ne pensaient qu'à cela et que le jour d'une émeute était déjà fixé, et que l'idée de la présence de la garde impériale à Paris les a seule arrêtés court; 5° qu'ils ne se soient donné aucun rendez-vous, tandis qu'ils se voyaient tous les jours.
Ces conclusions sont trop absurdes. Je n'y vois pas que Malet, Florent-Guyot, même Jacquemont soient compromis; c'est le préfet de police qui seul a conspiré. M. Fouché me prend pour trop imbécile.
Il vient, à la suite de cet article du bulletin, une note plus importante de la main même du ministre. Je désire que vous envoyiez chercher M. Regnaud pour lui demander s'il a tenu ce propos. S'il le nie, vous demanderez au ministre pourquoi il invente cela. Vous ferez également venir le préfet de police, et vous éclaircirez tout ce tripotage. D'une affaire de rien, qui montre quelques malveillants à punir et à réprimer, le bavardage de M. Fouché lui donne une immense importance. Il y a dans toute cette affaire un esprit et une conduite que je ne comprends pas. Pourquoi M. Fouché, au lieu de m'envoyer le travail du conseil de police, m'envoie-t-il cette analyse ? Où en serait-on si on ne réprimait les malveillants que lorsqu'ils ont une armée, et si, dans un État bien organisé, on n'arrêtait pas des essais qui ont pour but d'inquiéter et d'altérer la tranquillité publique ?
(Lecestre)
Bayonne, 17 juillet 1808
Au maréchal Jourdan, à Naples
Au reçu de cette lettre, vous laisserez le commandement de l'armée de Naples au plus ancien général de division, et vous partirez en poste pour vous rendre à Madrid, en passant par Bayonne. Vous prendrez le commandement de l'armée d'Espagne sous les ordres du Roi, avec le titre de major général; ce qui n'empêche pas que vous n'occupiez le poste de capitaine des gardes que le Roi vous destine. Vous emmènerez avec vous le général Dedon, que le Roi désire avoir en Espagne et qui commandera l'artillerie de cette armée.
Bayonne, 18 juillet 1808, dix heures du soir
A Joseph Napoléon, Roi d'Espagne, à Aranda
Je reçois votre lettre du 17. Je suppose que vous êtes parti aujourd'hui pour Madrid. J'aurais cru que vous auriez passé par Palencia et Valladolid. Dès que j'aurai reçu de nouveaux rapports du maréchal Bessières, et que j'aurai causé avec l'aide de camp du maréchal Moncey, je vous écrirai en détail sur la situation des affaires. 3,000 hommes partent demain pour se rendre devant Saragosse. Il est nécessaire d'avoir à Burgos un général de confiance pour réunir les troupes qui vont s'y rendre, et correspondre avec vous.
Quelques détails sur la manière dont vous avez été reçu à Burgos m'auraient fait plaisir.
Beaucoup de renseignements me porteraient à penser que le maréchal Bessières n'aurait battu que deux tiers de l'armée de Galice, et qu'un tiers n'aurait pas pris part à l'affaire de Rio Seco.
Ce que j'ai vu jusqu'à présent des opérations du maréchal Moncey me fait penser qu'il a fait ce qu'il a pu , qu'il a battu les rebelles dans toutes les rencontres, qu'il leur a fait un mal affreux, et qu'enfin il ne mérite que des louanges. Si la santé de ce maréchal n'était pas trop mauvaise, c'est un homme qui serait un bon gouverneur de Madrid.
Après la victoire de Medina de Rio Seco, le général Dupont peut sérieusement penser à dissiper et à détruire le général Castaños.
Je suppose que vous pourrez correspondre avec le maréchal Bessières par Valladolid.
Bayonne, 18 juillet 1808
A Joseph Napoléon, Roi d'Espagne
La lettre du général Reynier ne me plaît pas; il a l'air de faire des concessions. J'ai donné l'ordrc au maréchal Jourdan de partir en poste. Ilsera à Madrid vers le milieu d'août. Je lui ai mandé de laisser le commandement de l'armée de Naples au plus ancien général de division. Il réunira les deux places de commandandant de mon armée sous le titre de votre major général, et de capitaine de vos gardes, si vous voulez lui confier ces fonctions.
(Lecestre)
Bayonne, 18 juillet 1808
A Joseph Napoléon, Roi d'Espagne
Je reçois votre lettre d'Aranda du 17. Le prince de Neuchâtel m'a communiqué la lettre du général Savary. Savary est un homme très bon pour des opérations secondaires, mais qui n'a pas assez d'expérience et de calcul pour être à la tête d'une si grande machine. Il n'entend rien à cette guerre de marche. Je désire bien que Jourdan vous soit arrivé. L'habitude de commander en chef qui donne celle des calculs et des combinaisons, ne peut être suppléée par rien. Vous recevrez demain des notes sur la situation des affaires. La reine est partie le 15 de Stupinigi; ainsi je la suppose le 18 à Lyon. Je pars demain pour aller à Pau. Le général Drouet d'Erlon, qui commande la 11e division militaire, va rester à Bayonne.
A Barcelone, le général Duhesme a fait fouiller les couvents : on y a trouvé des cartouches, de manière que, comme de raison, il a fait tout prendre. Je vous mande ce qu'il a fait pour que cela vous serve de règle, et que vous ayez soin de faire fouiller les couvents.
Il ne faut pas laisser entrevoir à Savary l'opinion que j'ai de son incapacité. Du reste, c'est un homme d'énergie, de zèle et d'exécution, qu'il vous sera utile d'avoir.
Je vous prie de me parler quelquefois de la conduite de l'Infantado et de la plupart des personnes qui vous environnent. La renonciation des princes de la maison d'Espagne a été mise dans le Journal officiel de Saint-Pétersbourg, que je reçois aujourd'hui. N'ayez aucune crainte de la guerre, et n'ayez pas d'inquiétude sur le succès de mes armées en Espagne. Voici en deux mots le résumé de la note que vous recevrez demain : Laisser Moncey à San-Clemente ou aux environs, pour qu'il menace Valence. Garder 12,000 hommes, cavalerie, infanterie et artillerie, à Madrid, y compris la communication jusqu'à la Manche. Porter le corps du général Dupont à 22,000 hommes, infanterie, cavalerie et artillerie, et 3,000 hommes sur les défilés des montagnes et pour les communications de la Manche, et qu'il puisse appeler pour lui servir de réserve un jour d'action; lui fournir le supplément pour arriver à ce point le plus tôt possible, afin qu'il attaque et batte sans délai. Vous trouverez sur cette feuille la situation de votre armée.
(Lecestre)
Marracq, 19 juillet 1808
A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de la Grande Armée, à Bayonne
Faites partir aujourd'hui la compagnie basque pour se rendre à Barréges. Elle sera destinée pour assurer la sûreté des eaux. Elle prendra une position qui couvre parfaitement Barréges et mette les buveurs d'eau à l'abri de toute insulte de la part des miquelets.
Vous recommanderez également au général commandant les Hautes-Pyrénées de prendre des mesures pour garder Barréges et Bagnères de toute insulte.
Pendant le temps que le grand-duc de Berg sera aux eaux, la compagnie basque sera à ses ordres ; si l'impératrice y va, la compagnie prendra les ordres de son premier écuyer.
Il sera aussi nécessaire de disposer 300 hommes des gardes nationales du général Lamartillière pour se rendre à Barréges. Ils prendront position de manière à mettre les buveurs à l'abri de toute espèce d'insulte des miquelets. Ces 300 hommes seront commandés par un chef de bataillon des gardes nationales. Vous préviendrez le général qui commande les Hautes-Pyrénées pour qu'il fasse sans délai ses dispositions pour les lieux où il doit placer ses troupes.
Bayonne, 19 juillet 1808
A Alexandre, prince de Neuchâtel, major général de la Grande Armée, à Bayonne
Écrire au général Dupont une lettre pour faire connaître ma satisfaction sur les combats de Cordoue et sur les deux combats de Jaen.
J'accorde soixante décorations de la Légion d'honneur pour le combat de Cordoue, dont trente pour des officiers et trente pour des sous-officiers et soldats, dont au moins cinq à six seront données à des conscrits qui voyaient le feu pour la première fois et qui se seront le mieux emportés. J'accorde dix décorations d'officier de la Légion à ceux qui sont légionnaires et trois de commandant à ceux qui seront officiers. En portant des personnes qui lui ont été le plus utiles, le général Dupont dressera sans délai un procès-verbal de toutes ces nominations, et, quand il sera signé, il les fera connaître aux individus.
J'accorde cinq décorations pour les officiers et cinq pour les sous-officiers et soldats pour le premier combat de Jaen , que commandait le capitaine de frégate Baste ; quinze pour les officiers et quinze pour les sous-officiers et soldats pour le deuxième combat de Jaen, que commandait le général de brigade Cassaque.
J'accorde à la division du maréchal Moncey, pour les succès de ses cinq combats, vingt décorations pour les officiers et vingt pour les sous-officiers et soldats.
J'accorde dix décorations aux officiers et dix aux sous-officiers et soldats pour les troupes françaises qui se sont distinguées en Catalogue dans les différents combats.
J'accorde six décorations pour les officiers et six pour les sous-officiers et soldats pour les troupes qui ont donné au passage de la rivière. Je crois cependant que j'en ai déjà donné au 70e pour ce passage; il faudra y faire attention.
J'ai déjà accordé au maréchal Bessières cent décorations pour la bataille de Medina de Rio Seco.
En faisant mettre ces décorations à l'ordre de l'armée, on fera connaître ma satisfaction aux soldats.
Faites-moi connaître aussi dans la journée ceux qui se sont distingués à la bataille de Medina de Rio Seco, aux combats de Cordoue et du maréchal Moncey.
Bayonne, 19 juillet 1808, dix heures du soir
A Joseph Napoléon, Roi d'Espagne, à Butrago
Mon Frère, je reçois votre lettre du 18 à trois heures du matin. Je vois avec peine que vous vous affectiez. C'est le seul malheur que je craignais. Il entre des troupes de tous côtés et constamment. Vous avez un grand nombre de partisans en Espagne mais qui sont intimidés : ce sont tous les honnêtes gens. Je n'en conviens pas moins cependant que votre tâche est belle et glorieuse.
La victoire du maréchal Bessières, qui a entièrement défait Cuesta et l'armée de ligne de Galice, a apporté une grande amélioration dans toutes les affaires; elle vaut plus qu'un renfort de 30,000 hommes. Les divisions Gobert et Vedel ayant joint le général Dupont, il faut pousser vigoureusement l'offensive de ce côté. Le général Dupont a de bonnes troupes et en viendra à bout. J'aurais préféré que les 2e et 12e d'infanterie légère renforçassent le maréchal Bessières; mais, puisque vous avez jugé convenable de les mener à Madrid , gardez-les pour votre garde. 2,000 conscrits à l'école de bataillon vont les rejoindre, et ces deux beaux régiments avec ceux de votre garde vous feront un beau corps de réserve.
Vous ne devez pas trouver trop extraordinaire de conquérir votre royaume. Philippe V et Henri IV ont été obligés de conquérir le leur. Soyez gai, ne vous laissez point affecter, et ne doutez pas un instant que les choses finiront mieux et plus promptement que vous ne pensez.
Tout va très-bien à Saragosse.
Bayonne, 19 juillet 1808
Au prince Cambacérès, Archichancelier de l'Empire.
Mon Cousin, je reçois votre lettre du 16 par laquelle vous m'informez que vous quittez votre hôtel au mois d'août, ce qui donnera le temps d'y établir le secrétaire d'État avant la fin de l'automne
(Brotonne)
Bayonne, 19 juillet 1808
A M. de Champagny, ministre des relations extérieures
Il est convenable de faire mettre dans les journaux quelques articles sur les affaires intérieures de la monarchie autrichienne, pour la discréditer davantage et faire sentir les vices et les malheurs de ses finances
(Lecestre)
Bayonne, 20 juillet 1808
Au prince Ferdinand, à Valençay
J'ai reçu la lettre de Votre Altesse Royale du 15 juillet. Je vais donner tous les ordres pour l'exécution du traité fait avec Votre Altesse. Tous ces objets ont été retardés, parce que je n'ai pas encore donné connaissance du traité, cela exigeant dans nos constitutions des formalités auxquelles il fallait suppléer. Je vais me rendre à Paris.
Bayonne, 21 juillet 1808
Au prince Cambacérès, archichancelier de l'Empire, à Paris
Mon Cousin, je pars aujourd'hui pour Pau; j'irai voir Tarbes, Toulouse, Agen et Bordeaux, et probablement Saintes, Rochefort, Niort, Napoléon, Nantes et Angers.
Bayonne, 21 juillet 1808
Au vice-amiral Decrès, ministre de la marine, à Paris
Monsieur Decrès, je désire que vous soyez rendu le 1er août à Rochefort; j'y serai probablement le 2. Du moment de votre arrivée, vous m'enverrez un courrier sur Bordeaux, par lequel vous me ferez connaître ce que vous avez fait dans ce port. Vous préviendrez le commandant du département de mon arrivée imminente, pour qu'il accélère la marche des détachements qui doivent former la garnison de l'île d'Aix.
Bayonne, 21 juillet 1808
A Joseph Napoléon, Roi d'Espagne, à Madrid
Mon Frère, vous trouverez ci-joint des notes sur la situation des affaires, que je vous prie de lire avec attention. J'y ai tracé la situation du corps du maréchal Bessières, celle du corps de l'Aragon, que commande le général Verdier avec la seule qualité de général de division, et celle du corps de Catalogne, que commande le général Duhesme avec la simple qualité également de général de division. Vous verrez que ces trois corps forment 60,000 hommes présents sous les armes. Vous savez mieux que moi la situation des corps qui sont du côté de Madrid et qui forment les trois divisions du général Dupont, les trois divisions du maréchal Moncey et la réserve de la Garde. Le seul événement de la prise de Saragosse vous rendra, sur 18,000 hommes qui forment le corps de l'Aragon, l2,000 hommes disponibles.
Il faut que les communications avec le maréchal Bessières soient ouvertes ; je n'en ai pas de nouvelles depuis le 16.
Il faudrait tenir toujours à Burgos un général actif et intelligent. Je pars cette nuit pour Pau, où j'apprendrai votre arrivée à Madrid.
Je retarde depuis deux jours mon voyage, espérant recevoir des nouvelles de ce qui s'est passé à Benavente ou à Léon.
Le général Drouet, qui commande la 11e division militaire, va rester à Bayonne.
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P. S. Portez-vous bien. Ayez courage et gaieté, et ne doutez jamais d'un plein succès. Renvoyez-moi Tournon, lorsqu'il ne vous servira plus à rien.
Bayonne, 21 juillet 1808
NOTE SUR LA POSITION ACTUELLE DE L'ARMÉE EN ESPAGNE.
1° La bataille de Medina de Rio Seco a mis les affaires de l'armée dans la meilleure situation. Le maréchal Bessières ne donne plus aucune inquiétude, et toutes les sollicitudes doivent se tourner du côté du général Dupont.
2° Dans la position actuelle des affaires, l'armée française occupe le centre; l'ennemi, un grand nombre de points de la circonférence.
3° Dans une guerre de cette nature, il faut du sang-froid, de la patience et du calcul, et il ne faut pas épuiser les troupes en fausses marches et contre-marches. Il ne faut pas croire, quand on a fait une fausse marche de trois à quatre jours, qu'on l'ait réparée par une contre-marche; c'est ordinairement deux fautes au lieu d'une.
4° Toutes les opérations de l'armée ont réussi jusqu'à cette heure autant qu'elles devaient réussir. Le général Dupont s'est maintenu au delà des montagnes et dans les bassins de l'Andalousie. Trois fois il a défait les insurgés.
Le maréchal, Moncey a défait les insurgés à Valence. Il n'a pas pu prendre la ville, ce qui est une chose qui n'est pas extraordinaire. Peut-être eût-il été à désirer qu'il eût pu se camper à une journée de la ville, comme a fait le général Dupont; mais enfin, qu'il soit à une journée ou à cinq, comme à San-Clemente, la différence n'est pas très-grande.
En Aragon on a battu, sur tous les points et dans toutes les circonstances, l'ennemi, et porté le découragement partout. Saragosse n'a pas été pris. Il est aujourd'hui cerné, et une ville de 40 à 50,000 âmes défendue par un mouvement populaire ne se prend qu'avec du temps et de la patience. Les histoires des guerres sont pleines de catastrophes des plus considérables pour avoir brusqué et s'être enfourné dans les rues étroites des villes. L'exemple de Buenos-Ayres et des 12,000 Anglais d'élite qui y ont péri en est une preuve.
5° Ainsi la position de l'armée est bonne. Le maréchal Moncey étant à San-Clemente ou environs, les généraux Gobert et Vedel réunis au général Dupont en Andalousie, ce serait une faute, à moins d'incidents et d'un emploi immédiat à donner à ces troupes dans un autre point, que de concentrer toutes les troupes trop près de Madrid. L'incertitude des événements du maréchal Bessières et les vingt-cinq chances qu'il avait contre lui sur cent pouvaient déterminer à faire arrêter la marche de toutes les troupes qui s'éloignaient de la capitale, afin que les colonnes pussent être rappelées à Madrid, si le maréchal Bessières était battu, et pussent arriver dans cette ville avant l'ennemi. Mais ce serait une faute si on eût fait rétrograder ces colonnes et si on eût agi comme si le maréchal Bessières avait été battu, lorsque, quelques jours avant, on agissait comme si l'armée de Galice n'existait pas. 500 chevaux et 1,800 hommes d'infanterie, dirigés sur Valladolid, étaient tout ce qu'il fallait. Si cette colonne fût partie trois jours plus tôt, elle y serait arrivée le 17. Le maréchal Bessières a été vainqueur et avait, pour être vainqueur, soixante et quinze chances contre vingt-cinq. Mais la fatigue qu'on a donnée à l'armée et les mouvements rétrogrades qu'on a ordonnés inutilement, puisque, même le maréchal Bessières battu, on avait huit à dix jours pour réunir l'armée, ont fait un mal moral et physique. Il faut espérer que la nouvelle de sa victoire, arrivée à temps, aura mis l'état-major à même d'arrêter tout mouvement sur Madrid, et que chaque colonne se trouvera plus près du point où elle doit se trouver.
6° Dans la situation actuelle des affaires, le plus important de tout est le général Dupont; on doit lui envoyer le reste de la division Gobert et employer d'autres troupes pour maintenir la communication. Il faut tenir la tête de la division du maréchal Moncey sur San-Clemente et menacer toujours la province de Valence. Si le maréchal Bessières a battu, sans effort et avec peu de perte, l'armée de Galice, et a eu moins de 8,000 hommes engagés, il n'y a pas de doute qu'avec 20,000 le général Dupont ne culbute tout ce qu'il a devant lui.
7° La brigade du général Bey rend à l'armée plus qu'elle n'a perdu par le détachement qui a été fait sur Valladolid. Toutes les probabilités humaines sont que le maréchal Bessières n'a plus besoin d'aucun renfort, du moins pour être maître de toute la Castille et du royaume de Léon. Ce n'est que lorsqu'on aura reçu la nouvelle de ce qu'il aura fait à Benavente et à Léon, qu'on pourra décider s'il doit attaquer la Galice.
8° Le général Verdier, en Aragon, a cerné Saragosse. Le 14e et le 44e de ligne partent demain pour s'y rendre. Les partis francais vont jusqu'à moitié chemin de Lerida, de Barbastro et de Jaca. Dans dix jours, toute l'artillerie sera arrivée. Cette belle et bonne brigade de troupes de ligne porte à près de 15,000 hommes l'armée du général Verdier. Il est probable que Saragosse tombera bientôt, et que les deux tiers de ces 15,000 hommes deviendront disponibles.
9° Ainsi le corps du maréchal Bessières a pris l'offensive; il est, depuis sa victoire, renforcé de la brigade Lefebvre et de la brigade Gaulois. Il est donc dans le cas de conserver l'offensive.
Le corps du général Verdier, en Aragon, a battu partout les insurgés, a cerné la ville avec des forces beaucoup moindres. Il vient d'être considérablement renforcé; ainsi il peut donner une nouvelle activité aux opérations du siége, et conserver son activité offensive sur les deux rives de l'Èbre.
Le corps de Catalogne a agi isolement, ayant pour point d'appui Barcelone. La jonction sera faite aujourd'hui ou demain devant Girone avec le général Reille.
Voilà pour les trois corps d'armée situés du côté de la France.
10° La communication de Madrid avec la France est important sous tous les points de vue; il faut donc que les colonnes qui viennent d'être organisées à Burgos et à Vitoria, et qui seront renforcées et augmentées, soient laissées dans ces stations. Ci-joint la note de la formation de ces colonnes; elles sont presque toutes composées de 3e bataillons et de conscrits, mais avec de bons cadres. Quinze à vingt jours de station à Burgos et à Vitoria les mettront à peu près à l'école de bataillon. Ce serait une très-grande faute que de rappeler trop tôt ces troupes pour en renforcer les cadres principaux; il faut attendre jusqu'à ce qu'on ait pu les remplacer à Vitoria et à Burgos par de nouvelles troupes.
10° Il n'y a donc rien à craindre du côté du maréchal Bessières ni dans le nord de la Castille, ni dans le royaume de Léon.
Il n'y a rien à craindre en Aragon ; Saragosse tombera un jour plus tôt ou un jour plus tard.
Il n'y arien à craindre en Catalogne.
Il n'y a rien à craindre pour les communications de Burgos à Bayonne, moyennant les deux colonnes qui sont organisées dans ces deux villes et qui seront renforcées.
S'il y avait des événements en Biscaye, la force qui se réunit à Bayonne, formant réserve, serait suffisante pour mettre tout en ordre.
S'il arrive à Burgos quelque événement trop considérable pour que la colonne mobile qui est à Burgos puisse y mettre ordre, le maréchal Bessières ne sera pas assez loin pour ne pas pouvoir faire un détachement.
Le général Bonnet, à Burgos, est chargé de maintenir la communication de Vitoria avec le maréchal Bessières et avec Madrid. Il est nécessaire que ces deux généraux correspondent tous les jours entre eux et avec le général Drouet, qui est laissé en réserve à Bayonne, de même que le général Verdier, de Saragosse, et le général d'Agoult, de Pampelune, doivent correspondre tous les jours avec le général Drouet à Bayonne et avec Madrid par le canal de Bayonne et de Vitoria, jusqu'à ce que les communications directes soient rétablies. Un courrier, partant de Madrid, peut se rendre par Vitoria, Tolosa, Pampelune, devant Saragosse.
Le seul point donc important aujourd'hui est le général Dupont. Si l'ennemi parvenait jamais à s'emparer des défilés de la Sierra Morena, il serait difficile de l'en chasser ; il faut donc renforcer le général Dupont, de manière qu'il ait 25,000 hommes , compris ce qu'il faudra pour garder les passages des montagnes et une partie du chemin de la Manche. Il pourra disposer ses troupes de manière que, le jour où il voudra attaquer, la brigade de 2 ou 3,000 hommes destinée à garder les montagnes arrive au camp du général Dupont à marches forcées, et soit successivement remplacée par les colonnes qui seraient en arrière; de sorte que le général Dupont ait, pour le jour de la bataille, plus de 23,000 hommes à mettre en ligne.
Une fois qu'on aura battu l'ennemi, une partie des troupes de ligne se dissipera, et, selon que la victoire sera plus ou moins décidée, on pourra faire continuer le mouvement à d'autres troupes sur le général Dupont.
12° Saragosse pris, on aura des troupes disponibles, soit pour renforcer l'armée de Catalogue, soit pour marcher sur Valence de concert avec le maréchal Moncey, soit pour renforcer le maréchal Bessières et marcher en Galice, si, après la victoire qu'il a déjà remportée et celle qu'il remportera à Léon, il ne se croit pas assez fort pour s'y porter d'abord.
13° Il serait important de choisir deux points intermédiaires entre Andujar et Madrid pour pouvoir y laisser garnison permanente, un commandant, un dépôt de cartouches, munitions, canons, magasins de biscuit, des fours, des farines et un hôpital, de sorte que 3 ou 400 hommes défendent les magasins et l'hôpital contre toute une insurrection.
Il est difficile de croire qu'il n'y ait point quelque château, donjon pouvant être retranché promptement, propre à cela. C'est par ce seul moyen qu'on peut raccourcir la ligne d'opération et être sûr d'avoir, toutes les trois ou quatre marches, une manutention et un point de repos.
14° En résumé, le partage de l'armée parait devoir être celui-ci :
Corps de Catalogne, tel qu'il existe, à peu près 20,000 homme
Corps d'Aragon, tel qu'il existe, à peu près 15,000 hommes jusqu'à ce que Saragosse soit pris.
Corps du maréchal Bessières, ce qu'il a, à peu près 17,000 hommes; colonne de Burgos, 2,000; colonne de Vitoria, 2,000 ; garnison de Saint-Sébastien, 1,500 ; corps d'Aranda, 1,000 ; total du corps du maréchal Bessières, 24,000 hommes.
Après la prise de Saragosse, lorsque les affaires de Catalogne seront un peu apaisées, on pourra, selon les circonstances, ou renforcer le maréchal Bessières, ou renforcer le général Dupont, ou entreprendre l'opération de Valence.
Aujourd'hui, le seul point qui menace, où il faut promptement avoir un succès, c'est du côté du général Dupont. Avec 25,000 hommes, infanterie, cavalerie et artillerie comprises, il a beaucoup plus qu'il ne faut pour avoir de grands résultats. A la rigueur, avec 21, 000 hommes présents sur le champ de bataille, il peut hardiment prendre l'offensive ; il ne sera pas battu, et il aura pour lui plus de quatre-vingts chances.
Bayonne, 21 juillet 1808
A Eugène Napoléon, vice-Roi d'Italie, à Milan
Mon fils, je reçois votre lettre du 10, avec le projet de l'organisation de l'armée d'Italie, qui me paraît bien. Mais il ne faut faire aucun mouvement de cavalerie, ne pas faire marcher d'escadrons des dépôts, et ne rien déranger qu'au dernier moment. Accélérez l'instruction des dépots, et faites en sorte qu'ils soient le plus fort possible. Je ne vois pas pourquoi vous ne portez le 6e de hussards, les 6e et 8e de chasseurs, les 7e, 23e, 24e, 29e et 50e de dragons que pour 700 chevaux. Ces 8 régiments doivent avoir chacun 900 chevaux à l'armée, ce qui doit porter votre cavalerie, au lieu de 9,600 hommes, à 1l ou 12,000 hommes. Les deux régiments qui ont leurs dépôts en Piémont fourniront un escadron pour la 5e division. Dans les régiments qui ont 4 bataillons, on fera marcher les majors au dernier moment; quant aux chefs des 4e bataillons, il est nécessaire qu'ils y soient. Présentez-moi ce travail pour l'armée d'Italie, et proposez-moi les chefs de bataillon les plus en état de faire un bon service. Je remarque dans l'état que vous m'avez envoyé que le bataillon du 53e est bien faible. Je vois que le 4e bataillon du 35e est à Cranglio, ct celui du 106e à Serravalle, tout cela doit joindre le camp.
(Prince Eugène)
Bayonne, 21 juillet 1808
A Eugène Napoléon, vice-Roi d'Italie, à Milan
Mon Fils, je pars aujourd'hui pour voir Pau, Toulouse et le superbe bassin de la Garonne. Le roi d'Espagne est arrivé hier 20 à Madrid. Il y a quelques troubles en Espagne. Le maréchal Bessières a remporté le 14 une grande victoire à Médina del Rio-Secco, dans le royaume de Léon; avec 15,000 hommes, il a battu 45,000 hommes de troupes de ligne et d'insurgés, qui avaient pris parti, et auxquels les Anglais avaient fourni des armes. Comme je ne fais rien imprimer des affaires d'Espagne, cela est pour votre gouverne.
(Prince Eugène)
Bayonne, 21 juillet 1808
A M. Fouché, ministre de la police générale
J'ai lu avec intérêt les papiers de Préjean. Vous me ferez connaître si tous les individus que Préjean dit avoir vus sont arrêtés.
Mme de Jarnac me paraît fortement compromise. Je vous prie de répondre sur cette question . Savait-elle que les lettres venaient par Préjean, oui ou non ? Si elle le savait, elle est coupable, quand même on la dirait innocente. La lettre n° 4, où vous avez mis en note : "Nouvelle imaginée par Préjean" , dit qu'un vaisseau anglais désarmé est entré dans le port de Brest, n'est pas imaginée, parce qu'elle est vraie. Tâchez de savoir quel est l'officier de marine qui a dit cela. J'attends le rapport général que vous me ferez sur cette affaire.
(Lecestre)
Bayonne, 21 juillet 1808
Au vice-amiral Decrès, ministre de la marine
Vous trouverez ci-joint les papiers originaux saisis par la police sur Préjean. Lisez les seul et avec attention, et ne les communiquès à personne. Prenez les notions qui peuvent vous être utiles sur les lieux où débarquent les agents, et sur les mesures à prendre pour saisir leurs bâtiments. Vous renverrez ensuite le paquet à la police cacheté, et de manière qu'on ne sache pas même que vous l'avez lu. Il est dit dans une de ces pièces qu'un vaisseau anglais est entré à Brest en mars; je crois la nouvelle vraie. Sachez quel est l'officier de marine qui est arrivé à cette époque à Saint-Malo.
(Lecestre)
Bayonne, 21 juillet 1808
Au général Caulaincourt, ambassadeu à Saint-Pétersbourg
Vous devez remercier l'empereur de ce qu'il m'a fait dire relativement au roi d'Espagne. Il n'a pas affaire à un ingrat, et comme il n'a pas attendu que je le lui demande pour faire une chose qui m'est si agréable, vous pouvez lui dire que je viens de donner des ordres pour en finir avec la Prusse. Aussi bien la saison s'avance, et mes troupes ne pourraient évacuer l'hiver. Je voulais attendre l'issue de ma conférence avec l'empereur; mais, puisque cela tarde et que l'hiver approche, vous direz que les affaires avec la Prusse étant à peu près d'accord, au reçu de cette lettre, le traité avec cette puissance sera probablement signé.
Les affaires d'Espagne vont bien. Le maréchal Bessières a remporté le 14 une victoire signalée qui a soumis le royaume de Léon et les provinces du Nord. En racontant cela à l'empereur, vous lui direz que les Anglais mettent partout le feu en Espagne, qu'ils y répandent de l'argent et s'entendent avec les moines, et qu'il y a vraiment du trouble. Je pars cette nuit pour aller faire un tour dans mes provinces du Midi, et de là me rendre à Paris, où je serai avant le 15 août.
(Lecestre)
Pau, 23 juillet 1808
Au prince Cambacérès, archichancelier de l'Empire
Mon Cousin, je suis arrivé à Pau. Je vais partir pour Tarbes. Le roi d'Espagne est arrivé le 20, à six heures du soir, à Madrid.
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P. S. Je suis arrivé à Tarbes aujourd'hui, à dix heures du matin.
Tarbes, 23 juillet 1808
Au maréchal Pérignon, Paris
Mon Cousin, le secrétaire d'État vous envoie le décret par lequel je vous ai nommé gouverneur de Naples et commandant de mon armée dans ce royaume. Il est indispensable que vous soyez rendu à Naples le 5 août, ou plus tôt s'il est possible. Le maréchal Jourdan ayant été appelé à Madrid, vous recevrez le commandement de lui, s'il est encore à Naples, ou du plus ancien général de division auquel il l'aura laissé. La proclamation du grand-duc de Berg comme roi de Naples doit avoir été faite. Il ne pourra se rendre à Naples que d'ici à quinze ou vingt jours. Il est donc nécessaire que, d'ici à ce temps, vous preniez toutes les mesures convenables pour le bien du royaume et de mon armée. Je m'en fie entièrement à votre zèle pour mon service. Vous trouverez, à votre arrivée à Naples, des lettres patentes du Roi, qui vous confèrent le titre de son lieutenant général, afin que vous puissiez pourvoir à tous les besoins du royaume.
Pau, 23 juillet 1808, trois heures du matin
A Eugène Napoléon, Roi d'Espagne
Vous commandez l'armée; je vous l'ai dit; je l'ai fait mettre à l'ordre. Savary, dans la lettre qu'il écrit au major général le dit, puisqu'il dit qu'il ne fera aucun mouvement sans votre ordre. Vous auriez donc pu vous épargner une page de bavardage. Actuellement écrivez-moi souvent et en détail, ce que vous ne faites pas; et ordonnez que votre état-major envoie des états de situation et écrive tous les jours en détail au major général. Les mouvements militaires de Savary font hausser les épaules; il n'a fait que de fausses marches. Gobert doit rester avec Dupont, puisqu'il y est; Moncey à San-Clemente ou environs, et Dupont doit être renforcé.
J'eusse voulu que la brigade Rey eût joint, le 20, le maréchal Bessières; mais, puisqu'elle est à Madrid, gardez-la deux mois sans bouger. Ces soldats sont fatigués et ont besoin de repos : ils viennent de Rennes à marches forcées. Si on les fait toujours aller, ils tomberont tous malades. Il me tarde d'avoir des nouvelles du maréchal Bessières; je n'en ai pas depuis le 15. Portez-vous bien et croyez à mon amitié.
(Lecestre)
Auch, 24 juillet 1808
NOTE.
A Auch, nommer trois curés de première classe; le vicaire général, évêque de Poitiers; Jaubert, ailleurs.
Il faut, pour entretenir 1a cathédrale, 12,000 francs. J'ai assigné 6,000 francs sur les cultes, 4,000 par le département, 2,000 par la ville. Il sera formé une fabrique pour administrer.
J'ai accordé 50,000 francs pour faire venir les eaux; ce fonds sera pris sur les ponts et chaussées, savoir : 25,000 francs cette année, 25,000 l'année prochaine; ceux de cette année, sur les fonds communs.
10,000 francs pour le pavé, également par les ponts et chaussées.
Auch, 24 juillet 1808
A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, à Madrid
Mon Frère, je suis arrivé aujourd'hui à Auch; je serai demain à Toulouse.
Je vous envoie votre courrier de Naples. J'ai ouvert tous les rapports de la police et de l'armée; je n'y ai rien trouvé d'intéressant.
La Reine est arrivée à Lyon. Si vous ne jugez pas à propos qu'elle aille à Madrid, peut-être feriez-vous bien de la laisser venir à Paris. Il ne faut, dans la position actuelle des choses, rien faire qui n'ait l'air d'être naturel.
Je n'ai point de nouvelles de votre entrée à Madrid; votre dernier courrier est de Buitrago, le 19, à onze heures du soir. Je n'en ai pas davantage du maréchal Bessières. Je crois vous avoir mandé d'avoir l'oeil sur Burgos et d'y tenir un général de confiance.
Les espèces sont parties de Paris pour former le second payement de l'emprunt. Je suppose que le ministre des finances aura fait la cédule royale et se sera occupé de déposer les effets, conformément à la demande qu'en a faite la Banque.
Toulouse, 25 juillet 1808
A M. Daru, intendant général d la Grande Armée, à Berlin
Monsieur Daru, les employés français en Saxe ne doivent rien coûter au pays, tout au plus le logement. Cela est contraire à mes intentions. Les employés, commissaires des guerres, gardes-magasins, etc., ont leur traitement de guerre et ne doivent rien demander, sous prétexte qu'ils sont dans un pays allié. Au lieu de cela, on a demandé au gouvernement saxon de donner en argent ce qu'il donnait en nature. Ces petites tracasseries font tort et sont tout à fait contraires à la dignité de la France. Écrivez au sieur Bourgoing pour qu'on laisse tranquille le roi de Saxe. Diminuez les trois quarts des employés, soit civils, soit militaires. Réitérez vos ordres et prenez des mesures telles que mes agents ne coûtent rien au roi de Saxe. Faites finir toutes ces misères. il est inutile d'avoir des manutentions, des commissaires des guerres, des gardes-magasins dans tous les lieux de passage. Les employés saxons peuvent tout aussi bien faire cela que des employés français. Laissez des employés français seulement dans les lieux où il y aurait des magasins français assez considérables; ces lieux sont extrêmement peu nombreux.
Toulouse, 25 juillet 1808
A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, à Madrid
Mon Frère, Tournon apporte votre lettre du 20, et celle du 21 au soir qui m'apprend votre entrée à Madrid.
Le maréchal Bessières mande de Benavente, en date du 20, qu'il marche sur Léon. Je reçois de Santander la nouvelle que 1,500 hommes des Asturies, qui s'y étaient rendus, en sont repartis, apprenant la défaite de Cuesta. L'officier d'ordonnance d'Estourmel, de chez le maréchal Bessières, raconte avoir donné dans une des colonnes de Cuesta, près de Benavente. Il paraît que Cuesta, avec un débris de 3 à 4,000 hommes, se dirigeait du côté de l'Estremadure.
Le major général a donné des ordres pour qu'il y eût à Burgos, dans les premiers jours d'août, 3 ou 4,000 hommes; ce qui assurera et maintiendra vos derrières. Comme ce sont en grande partie des conscrits, il faut les laisser s'exercer, et se trouver satisfait de voir les communications avec Madrid et avec le maréchal Bessières à l'abri de toute surprise. Il faudrait envoyer à Burgos un général pour avoir l'oeil sur Vitoria et sur Aranda, et qui correspondra avec Madrid et avec le maréchal Bessières, qui sera arrivé le 23 à Léon.
Vous aurez reçu des lettres du général Verdier devant Saragosse. Le major général vous a mandé l'expédition du colonel Pepin sur Villafeliche près Daroca, qui a dissipé 4,000 rebelles. On écrit de Saragosse que cette ville ne tardera pas à tomber. L'officier du maréchal Bessières dit que Zamora, Valladolid, Palencia, etc. , sont fatiguées d'être pillées par les deux partis, et que même les moines désirent fort la tranquillité. Le colonel Pepin, qui est devant Saragosse, écrit que tous les villages et petites villes qu'il a parcourus demandent à grands cris la paix.
J'approuve fort les mesures que vous avez prises pour renforcer le général Dupont.
Toulouse, 25 juillet 1809
A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie (la même lettre a été adressée ait roi de Wurtemberg, et, avec quelques modifications, aux autres princes de la Confédération du Rhin)
Monsieur mon Frère, l'Autriche arme; elle nie ses armements : elle arme donc contre nous. Elle fait répandre le bruit que je lui demande des provinces : elle veut donc couvrir du voile d'une défense légitime une mesure aussi gratuitement offensive qu'insensée. Nos relations avec l'Autriche, depuis la paix de Presbourg, ont été constamment amicales ; un traité les a cimentées. Les notes, les communications importantes qui ont eu lieu depuis cette époque entre les deux gouvernements étaient le gage d'une parfaite harmonie. La Russie n'est pas moins que nous étonnée de ces armements de l'Autriche.
Sans doute il ne devrait pas être vraisemblable que l'Autriche voulût attaquer la France et la Confédération du Rhin. Mais n'avons-nous pas vu, il y a deux ans, la Prusse, par une démarche plus insensée encore, provoquer sa ruine entière ? Dans un gouvernement faible, le parti qui veut la guerre fait faire des armements sous un prétexte quelconque, et le prince trompé se trouve engagé dans la guerre sans l'avoir voulu.
Les hommes raisonnables verront avec pitié les armements de l'Autriche. Mais, s'ils étaient tolérés, ils ne seraient pas sans inconvénients; ils lui donneraient en Allemagne une force d'opinion qu'elle ne doit point avoir. Elle-même acquerrait une idée exagérée de sa propre puissance, et, se croyant forte parce qu'on aurait souffert ses préparatifs, elle se déciderait bientôt à la guerre, que d'abord elle ne voulait pas.
Puisque l'Autriche arme, il faut donc armer. Aussi j'ordonne que la Grande Armée soit renforcée. Mes troupes se réunissent à Strasbourg, Mayence, Wesel. J'engage Votre Majesté à tenir son contingent prêt. S'il est un moyen d'éviter la guerre, c'est de montrer à l'Autriche que nous ramassons le gant et que nous sommes prêts.
Je répète à Votre Majesté qu'il n'y a, entre l'Autriche et moi, aucun sujet de différend, que je ne lui demande rien, et que je n'arme que parce que je la vois armer.
Toulouse, 25 juillet 1808
A M. de Champagny, ministre des relations extérieures, à Toulouse
Monsieur de Champagny, faîtes faire les expéditions des lettres ci-jointes et présentez-les ce soir à ma signature. Faîtes-moi connaître si l#article ci-joint du Journal de l'Empire daté de Belgrade est vrai ou controuvé. S'il est vrai, proposez-moi de faire défendre la Gazette de Bayreuth.
(Brotonne)
Toulouse, 25 juillet 1808
A M. de Champagny, ministre des relations extérieures
Je vous renvoie votre portefeuille. Je ne conçois rien à ce tripotage du sieur Bourgoing, il fait des choses qui compromettent la dignité de la France et sont contraires à mes intentions. J'ai donné il y a longtemps deux ordres : le premier, pour diminuer des deux tiers les officiers, commandants de place, commissaires des guerres et garde-magasins qui sont employés sur la route d'étapes en Saxe; 2° que le tiers restant fût soldé à mes frais et ne coutât au roi de Saxe, qui est tenu tout au plus de fournir le logement. Au lieu de cela, le sieur Bourgoing remercie le roi des ordres qu'il a donnés, démarche basse et ridicule; car, ou le roi doit nourrir ce qui passe de mes troupes sur ses États, comme membre de la Confédération du Rhin, et je ne lui dois pas alors de remerciements; ou il ne le doit pas, et il est ridicule que je remercie un petit prince de la Confédération du Rhin pour 30 ou 40,000 francs qu'il me donne; il était tout simple de ne pas les lui prendre. Écrivez au ministre de Saxe que j'ai blâmé la conduite du sieur Bourgoing; que mon intention est qu'il y ait en Saxe le plus petit nombre d'employés possible, et qu'ils ne coûtent rien au pays. Vous ferez connaître au sieur Bourgoing qu'il ne doit employer son ministère que pour des affaires graves, et que les employés qui sont en Saxe reçoivent des appointements et ne doivent rien demander.
(Lecestre)
Toulouse, 25 juillet 1808
A M. Daru, Intendant général de l'armée d'Espagne
Il est nécessaire que vous arrêtiez toutes les lettre du ministre de Russie ou de tout autre venant d'Espagne qui donneraient des détails sur les affaires de ce pays. Vous devez me renvoyer les originaux de toutes des lettres.
(Brotonne)
Toulouse, 26 juillet 1808
A M. de Lacépède, Grand Chancelier de la Légion d'honneur
J'ai reçu votre lettre. Je suis fâché que la lettre que je vous ai écrite vous ait affligé; ce n'était pas certainement mon intention. La maison d'Écouen ne peut être ainsi régie de clerc à maître et par le grand chancelier de la Légion. Il est nécessaire qu'il y ait un conseil d'administration de la maison sous la surveillance du grand chancelier, et que la Légion soit tenue de payer une masse par individu au dit conseil d'administration. Cette mesure doit calmer toute inquiétude. Si une élève, quelque économie qu'on y apportât d'ailleurs, devait coûter plus de 7 à 800 francs, il me semble que ce serait trop cher. Dites-moi un mot dans ce sens, et surtout croyez que personne ne désire plus que moi vous donner des preuves d'estime et de considération.
Toulouse, 26 juillet 1808
Au général Savary, duc de Rovigo, aide de camp de l'Empereur, à Madrid
Je reçois votre lettre du 21 de Madrid que m'apporte Faudoas. J'ai vu avec plaisir l'entrée du Roi. Aidez-le de tous vos moyens.
Tous les rapports que je reçois de l'Aragon, de Bessières et du théâtre de la guerre s'accordent à dire que tous les pays sont fameusement fatigués de cet état de révolte et que les prêtres, même les moines, commencent à s'apercevoir que, pillés de tous côtés, ils seront les victimes de tout ceci.
(Brotonne)
(Pierre-Paul-Eugène, baron Faudoas-Séguenville (1788 - 1844), lieutenant de cavalerie, officier d'ordonnance de l'Empereur et frère de la duchesse de Rovigo)
Toulouse, 26 juillet 1808
A M. de Champagny, ministre des relations extérieures, à Toulouse
Monsieur de Champagny, je vous envoie une note qui m'est remise par le ministre de la police. Écrivez à cet effet à mon ministre en Hollande pour requérir l'arrestation des chefs de cette maison (La maison Schott, de Bréda, soupçonnée de faire du commerce avec l'Angleterre)
(Brotonne)
Toulouse, 26 juillet 1808
Au prince de Nauchâtel, major général de la Grande Armée
Donnez des ordres pour que la Gazette de Bayreuth soit suupprimée, et que la correspondance de ce gazetier soit mise sous le scellé, qui sera apposé par des officiers francais. On prendra le dépouillement de tous les papiers, et les pièces qui seraient relatives à sa correspondance avec les Anglais seront envoyées à Paris. Le journaliste sera retenu en prison et interrogé sur ses relations et sur les menées qu'il pratique depuis plusieurs années avec les Anglais
(Lecestre)
Toulouse, 27 juillet 1808
Au général Clarke, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le général Clarke, la batterie du signal de Breskens, au lieu d'avoir sept côtés, doit être formée par une demi-ellipse devant contenir vingt-cinq pièces de canon. Comme les mortiers peuvent être mis derrière, 75 toises suffisent au côté elliptique. La batterie peut être ensuite fermée par trois côtés, en forme de trapèze, de manière qu'avec 200 toises de développement, avec escarpe et contrescarpe, une caserne, des magasins, une citerne, la batterie soit à l'abri de toute espèce de coup de main et puisse résister huit à dix jours de tranchée ouverte, sans avoir besoin d'avoir de l'eau dans les fossés. Cette batterie ou redoute ne serait, dans le fait, qu'un grand cavalier placé sur le milieu de la dune. On tracerait autour trois fronts de fortification en terre, de 180 toises, avec fossés pleins d'eau; ce serait la place qu'on défendrait par un siège en règle. Alors on sent que tous les avantages seraient réunis. On pourrait commencer d'abord par faire la redoute et avoir 300 hommes à l'abri de toute insulte. Il y aurait ensuite une belle enceinte bastionnée, capable de résister et de prolonger la défense fort loin, d'autant plus que cette place recevrait longtemps des secours de Flessingue par mer. On désirerait savoir ce que pourraient coûter quatre tourelles en maçonnerie, destinées à flanquer par un feu de mousqueterie les quatre côtés de la redoute. Ces tourelles ne devraient point masquer le feu de l'artillerie de la redoute. On y arriverait de l'intérieur de 1a batterie par une communication souterraine.
Toulouse, 27 juillet 1808
Au maréchal Davout, chargé du commandement d la Grande Armée, à Varsovie
Mon Cousin, faites partir le plus tôt possible les 8,000 Polonais qui doivent passer à ma solde, et dirigez-les sur Mayence par le plus court chemin.
Toulouse, 27 juillet 1808
Au comte Bigot de Preameneu, ministre des Cultes, à paris
Monsieur Bigot de Preameneu, le sieur Marchaix, prédicateur de l'église Bonne-Nouvelle et le sieur Cagny, curé idem, ont de mauvais principes. Faîtes vérifier les faits et interdisez ces deux individus.
(Brotonne)
Toulouse, 28 juillet 1808
A Joseph Napoléon, roi d'Espagne, à Madrid
Mon Frère, le général Mathieu-Dumas vous remettra cette lettre. Il se rend à l'armée d'Espagne; on verra ensuite à le traiter comme il pourra le désirer; le principal est qu'il vous serve. Votre écuyer Filangieri vous a été expédié ce matin. Je serai le 31 à Bordeaux.
J'ai reçu, ce matin, des nouvelles de Russie, du 9, et des lettres de l'Empereur. L'affaire d'Espagne était déjà là une affaire fort ancienne, et tout y était arrangé.
L'Autriche est prise d'une terreur panique qui n'a pas de bon sens.
Le maréchal Bessières a dû arriver le 23 à Léon.
Une gazette anglaise dit que mon escadre de Cadix a été canonnée pendant trois jours par les insurgés, quelle a été obligée d'amener et qu'elle est dans le port de Cadix; ce sont les Anglais qui disent cela. Il paraît que tout va bien du côté de Lisbonne.
Du moment que le général Dupont aura appris la victoire du maréchal Bessières, j'espère qu'il ne sera pas resté en arrière.
Bessières, à ce qu'il parait, a trouvé beaucoup de fusils, de poudre et de cartouches à Benavente.
Dessolles m'a fait demander, à Auch, à être employé en Espagne; va s'y rendre.
J'ai nommé le maréchal Pérignon gouverneur de Naples et commandant de mon armée. Le grand-duc de Berg est toujours fort malade.
La Reine m'a écrit de Lyon. Je suppose que vous me parlerez d'elle dans votre première lettre. Je pense qu'il faut qu'elle aille pour le reste de l'été à Paris; il fait trop chaud pour aller en Espagne dans ce moment. Au reste j'attendrai ce que vous déciderez là-dessus.
Toulouse, 28 juillet 1808
Au général Clarke, ministre de la guerre, à Paris
Il est nécessaire que vous donniez des ordres pour que les ler, 2e, 3e et 4e bataillons des 14e, 43e, 44e, 5le de ligne, 9e, 12e et 14e légers, 15e, 47e, 70e et 86e de ligne, soient tout entiers à l'armée d'Espagne et de Portugal ; qu'il ne reste en France que les quatre compagnies du 5e bataillon de dépôt, et que les bataillons de guerre soient portés à leur grand complet.
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P. S. Si Lacuée pouvait diriger un millier de conscrits sur Bayonne, il doit le faire.
Toulouse, 28 juillet 1808
Au général Clarke, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Général Clarke, donnez l'ordre que tout ce qu'il y a de disponible en France du 10e régiment de chasseurs à cheval complète le 4e escadron, de manière qu'il soit au moins à 200 chevaux. Vous le dirigerez sur Bayonne. Donnez le même ordre pour le 22e régiment de chasseurs. Donnez ordre que le 3e escadron du 26e de chasseurs soit complété à 200 hommes et se tienne prêt à entrer en campagne à la fin d'août.
J'ai blâmé le maréchal Kellermann d'avoir formé des grenadiers et les voltigeurs; cependant, puisque cette mesure a été prise, il faut en profiter. Vous voudrez donc bien donner l'ordre que 25 grenadiers et 12 voltigeurs, faisant 50 hommes de chacun des régiments qui ont des compagnies de grenadiers et de voltigeurs à la division Oudinot, se mettent en marche pour se rendre à Dantzig, bien armés et bien équipés. Comme il y a à la division Oudinot des détachements de 48 régiments, ou 96 compagnies, ce sera une augmentation de 2,400 hommes qu'elle rendra.
Ces 2,400 hommes seront formés en trois détachements, dont l'un se réunira à Strasbourg, l'un à Mayence et l'autre à Wesel. Vous me ferez connaître la situation et la composition de ces détachements au 15 août, afin que j'ordonne le mouvement. Écrivez au maréchal Kellermann de vous envoyer l'état de situation au 5 août des trois brigades de réserve qui doivent être formées à Strasbourg, Mayence et Wesel, afin que je connaisse le nombre d'officiers, de sous-officiers, l'état de l'habillement et de l'armement, etc. Ces revues seront passées au 5 août. Je désire les avoir avant le 15, afin que je voie si ces réserves sont dans le cas de marcher.
Toulouse, 28 juillet 1808
A M. de Champagny, ministre des relations extérieures, à Toulouse
Monsieur de Champagny, la proposition du prince d'Anhalt-Coethoen n'est pas à rejeter. Je prendrais volontiers à mon service un régiment qu'il lèverait, dont il serait le propriétaire et qu'il composerait tout entier d'Allemands. Par le courrier que vous enverrez à Constantinople il est convenable que vous écriviez à Téhéran.
(Brotonne)
Agen, 30 juillet 1808
Au prince Cambacérès, Archichancelier de l'Empire
J'ai reçu votre lettre du 21. Je suis extrêmement content de l'esprit de ce pays-ci. La ville de Montauban m'a fort intéressé. Cette ville a été horriblement maltraitée. Je pars d'Agen ce soir à sept heures, pour ne plus m'arrêter qu'à Bordeaux, où j'arriverai demain matin à dix heures. J'y resterai probablement le ler d'août; après quoi, je partirai pour Rochefort.
Agen, 30 juillet 1808
A M. Cretet, ministre de l'intérieur, `Paris
J'ai l'honneur de transmettre à Votre Excellence une note que Sa Majesté a dictée relativement à la création d'un nouveau département qui aura Montauban pour chef-lieu.
MARET, ministre secrétaire d'État.
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Il est impossible de laisser Montauban dans l'état d'abandon où elle se trouve, et il convient de la créer chef-lieu d'un nouveau département dont le territoire serait pris sur les départements voisins.
Le Lot a 38,000 habitants; on lui ôtera l'arrondissement de Montauban et Moissac, avec 100,000 habitants. La Haute-Garonne a 433,000 habitants; on lui ôtera l'arrondissement de Castel-Sarrasin, avec près de 100,000 habitants. Le Lot-et-Garonne a 533,000 habitants; on lui ôtera Valence et 50,000 habitants. Le Tarn a 272,000 habitants; on lui ôtera un arrondissement de 30,000 habitants. On pourra aussi ôter au Gers 12 à 15,000 habitants. Le nouveau département, qui portera le nom de Tarn-et-Garonne, aura donc près de 300,000 habitants.
Sa Majesté désire que le ministre fasse faire la carte de ce nouveau département pour la lui présenter avant la fin du mois d'août, avec les projets de loi et de règlement, cette affaire devant être portée au prochain Corps législatif.
Agen, 30 juillet 1808
A Joseph Napoléon, Roi d'Espagne, à Madrid
Mon Frère, je reçois votre lettre du 23. Le major général reçoit des lettres du matin du même jour du maréchal Bessières, qui marque qu'il n'y a plus d'armée ennemie en Castille, que Cuesta avec 500 hommes de cavalerie se dirigeait du côté de Toro, et qu'il croit être certain que le point de sa retraite est Badajoz, dans l'Estremadure; que les villes et provinces de Léon, Zamora, se sont soumises, et que son intention était de se reposer le 25 et le 26 à Léon, et de marcher ensuite en Galice.
Le général Dessolles a reçu des lettres de service pour l'armée d'Espagne; il se rend à Burgos. Le major général vous instruit des ordres qu'il reçoit. Le général Dessolles aura, à son arrivée à Burgos, près de 5 à 6,000 hommes. 500 chevau-légers polonais de ma Garde se dirigent sur Burgos.
Il est inconcevable que le maréchal Moncey se soit retiré sur Ocana. La conduite de cet officier est fort extraordinaire; son mouvement est défavorable pour tout, mais particulièrement pour le général Dupont, puisque les provinces de Valence, de Murcie cessent d'être menacées. Il paraît que le général Dupont a déjà 20,000 hommes; s'il n'a pas fait de fautes, avec cela il n'a rien à craindre de l'ennemi.
J'ai reçu des nouvelles de Saragosse à peu près de la même époque que celles du maréchal Bessières, qui sont tout aussi satisfaisantes que ces dernières.
Le général Mathieu-Dumas vous aura joint. Il fait ici fort chaud. Je suis fort satisfait de l'esprit de ces provinces. Je serai à Rochefort le 3, et à Nantes probablement le 7 ou le 8.
Agen, 30 juillet 1808
A Joachim Napoléon, Roi de Naples
Je reçois votre lettre. Je vois avec plaisir que votre santé s'améliore.
Les nouvelles du duché de Berg ne sont pas satisfaisantes. Vos agents emballent et font tout passer sur la rive gauche; vos haras filent sur le Tyrol. Cela fait un détestable effet dans le pays et en Allemagne. Cela vaut-il la peine, pour des babioles, de montrer de l'avidité ? Dans tout état de choses, si vous tenez à vos haras, quinze ou vingt jours plus tard n'êtes-vous pas sûr de les avoir ? Cela est irréfléchi et fait mal dans l'opinion. Écrivez, et donnez des ordres qu'on n'emporte rien, et qu'on ne montre aucune avidité.
La chaleur est si forte que je crains que, si vous vous mettez en route trop promptement, vous ne puissiez la supporter. Soignez d'abord votre santé; c'est le principal.
(Lecestre)
Bordeaux, 31 juillet 1808, onze heures du soir
A Joseph Napoléon, Roi d'Espagne
J'ai reçu vos lettres des 24, 25 et 26. Le style de votre lettre du 24 ne me plaît point. Il ne s'agit pas de mourir, mais de se battre et d'être victorieux, et vous l'êtes et le serez. Je trouverai en Espagne les colonnes d'Hercule, mais non des limites à mon pouvoir. Depuis que je sers, ce que j'ai trouvé de plus lâche, ce sont ces rassemblements et ces troupes espagnoles. Au reste, des troupes et des secours de toute espèce se dirigent de votre côté.
Vous avez le tiers plus de forces qu'il ne vous faut, si cela est dirigé avec la précision convenable. Hormis Moncey et sa déshonorante retraite de San-Clemente sur Ocana et son lâche conseil guerre, je suis fort content de mes troupes. Savary est un homme de tête et de coeur qui a erré dans ses dispositions générales, parce qu'il n'a pas l'habitude de commander en chef, mais qui cependant est encore plus fort que ce que vous avez autour de vous. Caulaincourt a fait très bien à Cuenca. La ville a été pillée . c'est le droit de la guerre, puisqu'elle a été prise les armes à la main.
La Russie vous a reconnu; la lettre en a été envoyée à M. Strogonoff. A mon arrivée à Paris, j'apprendrai que l'Autriche a fait de même.
Votre position peut être pénible comme roi; mais elle est brillante comme général. Il n'y a qu'une chose à craindre : prendre garde de perdre l'esprit de l'armée et de la sacrifier aux Espagnols. Il n'y a point de ménagements à garder avec des brigands qui assassinent mes blessés et qui commettent toutes sortes d'horreurs. Il est fort naturel de les traiter comme on le fait; je vous l'ai déjà dit et je vous le répète. Depuis la belle victoire de Medina de Rio-Seco, qui à si promptement décidé les affaires d'Espagne, le maréchal Bessières est le maître absolu du Nord.
J'ai vu avec plaisir que vous n'avez pas envoyé la division Morlot au maréchal Bessières, comme on le proposait. Il faut soutenir Dupont. Soyez sans inquiétude sur l'issue de tout ceci. Je connais bien votre position; rien de ce qui est arrivé ne m'a surpris. Aurais-je sans cela envoyé 150,000 hommes en Espagne, levé deux conscriptions et dépensé 80 millions ? J'aurais mieux aimé perdre une bataille que de lire le procès-verbal de Moncey.
(Lecestre)