Décembre 1809
Palais des Tuileries, 3 décembre 1809.
DISCOURS
A L'OUVERTURE DE LA SESSION DU CORPS LÉGISLATIF.
Messieurs les Députés des départements au Corps
législatif, depuis votre dernière session j'ai soumis l'Aragon et la Castille
et chassé de Madrid le gouvernement fallacieux formé par l'Angleterre. Je
marchais sur Cadix et Lisbonne lorsque j'ai dû revenir sur mes pas et planter
mes aigles sur les remparts de Vienne. Trois mois ont vu naître et terminer
cette quatrième guerre punique. Accoutumé au dévouement et au courage de mes
armées, je ne puis cependant, dans cette circonstance, ne pas reconnaître les
preuves particulières d'amour que m’ont données mes soldats d'Allemagne.
Le génie de la France a conduit l'armée anglaise: elle a
terminé ses destins dans les marais pestilentiels de Walcheren. Dans cette
importante circonstance, je suis resté éloigné de quatre cents lieues, certain
de la nouvelle gloire qu'allaient acquérir mes peuples et du grand caractère
qu'ils allaient déployer. Mes espérances n'ont pas été trompées. Je dois des
remerciements particuliers aux citoyens des départements du Pas-de-Calais et du
Nord. Français ! Tout ce qui voudra s'opposer à vous sera vaincu et soumis;
votre grandeur s'accroîtra de toute la haine de vos ennemis. Vous avez devant
vous de longues années de gloire et de prospérité à parcourir. Vous avez la
force et l'énergie de l'Hercule des anciens !
J'ai réuni la Toscane à l'Empire. Ces peuples en sont
dignes par la douceur de leur caractère, par l'attachement que nous ont
toujours montré leurs ancêtres et par les services qu'ils ont rendus à la
civilisation européenne.
L'histoire m'a indiqué la conduite que je devais tenir
envers Rome. Les papes, devenus souverains d'une partie de l'Italie, se sont
constamment montrés les ennemis de toute puissance prépondérante dans la
Péninsule; ils ont employé leur influence spirituelle pour lui nuire.
Il m'a donc été démontré que l'influence spirituelle
exercée dans mes États par un souverain étranger était contraire à
l'indépendance de la France, à la dignité et à la sûreté de mon trône.
Cependant, comme je reconnais la nécessité de l'influence spirituelle des
descendants du premier des pasteurs, je n'ai pu concilier ces grands intérêts
qu'en annulant la donation des empereurs français, mes prédécesseurs, et en
réunissant les États romains à la France.
Par le traité de Vienne, tous les rois et souverains mes
alliés qui m'ont donné tant de témoignages de la constance de leur amitié, ont
acquis et acquerront un nouvel accroissement de territoire. Les provinces
illyriennes portent sur la Save les frontières de mon grand empire. Contigu
avec l'empire de Constantinople, je me trouverai en situation naturelle de
surveiller les premiers intérêts de mon commerce dans la Méditerranée,
l'Adriatique et le Levant ! Je protégerai la Porte, si la Porte s'arrache à la
funeste influence de l'Angleterre; je saurai la punir, si elle se laisse
dominer par des conseils astucieux et perfides.
J'ai voulu donner une nouvelle preuve de mon estime à la
nation suisse, en joignant à mes titres celui de son médiateur, et mettre un
terme á toutes les inquiétudes que l'on cherche à répandre parmi cette brave
nation.
La Hollande placée entre l'Angleterre et la France en est
également froissée. Cependant elle est le débouché des principales artères de
mon empire. Des changements deviendront nécessaires; la sûreté de mes
frontières et l'intérêt bien entendu des deux pays l'exigent impérieusement.
La Suède a perdu, par son alliance avec l'Angleterre,
après une guerre désastreuse, la plus belle et la plus importante de ses
provinces. Heureuse cette nation si le prince sage qui la gouverne aujourd'hui
eût pu monter sur le trône quelques années plus tôt! Cet exemple prouve de
nouveau aux rois que l'alliance de l'Angleterre est le présage le plus certain
de leur ruine.
Mon allié et ami, l'empereur de Russie, a réuni à son vaste empire la Finlande, la Moldavie, la
Valachie et un district de la Galicie. Je ne suis jaloux de rien de ce qui peut
arriver de bien à cet empire. Mes sentiments pour son illustre souverain sont
d'accord avec ma politique.
Lorsque je me montrerai au-delà des Pyrénées, le Léopard
épouvanté cherchera l’Océan pour éviter la honte, la défaite et la mort.
Le triomphe de mes armes sera le triomphe du génie du bien sur celui du mal, de
la modération, de l'ordre, de la morale sur la guerre civile, l’anarchie
et les passions malfaisantes. Mon amitié et ma protection rendront, je
l’espère, la tranquillité et le bonheur aux peuples des Espagnes.
Messieurs les députés des départements an Corps
législatif, j'ai chargé mon ministre de l'intérieur de vous faire connaître
l'histoire de la législation, de l'administration et des finances dans l'année
qui vient de s'écouler. Vous y verrez que toutes les pensées que j'ai conçues
pour l'amélioration de mes peuples se sont suivies avec la plus grande
activité; que dans Paris, comme dans les parties les plus éloignées de mon
empire, la guerre n'a apporté aucun retard dans les travaux. Les membres de mon
Conseil d'État vous présenteront différents projets de lois, et spécialement la
loi sur les finances; vous y verrez leur état prospère. Je ne demande à mes
peuples aucun nouveau sacrifice, quoique les circonstances m'aient obligé à
doubler mon état militaire.
Paris, 4 décembre 1809
Note pour le ministre de la guerre
Le ministre de la guerre, pour prévenir l'encombrement
dans le dépôt des conscrits réfractaires établi à Blaye, a dirigé 200 de ces
conscrits, par petits détachements, sur La Rochelle, 100 hommes sur Lorient,
100 hommes sur Saint-Malo, 200 hommes sur Brest...... 2 décembre 1809. |
Toutes ces mesures sont mauvaises. Il aurait mieux valu
renvoyer les conscrits réfractaires chez eux, ç'aurait été des gens contents
et qui ne seraient pas devenus des brigands. Puisqu'on les gardait, il
fallait les embrigader et les envoyer en Espagne. En les dirigeant sur
l'intérieur, tout cela désertera et augmentera le brigandage, comme il est déjà
arrivé. |
(Du Casse)
Paris, 5 décembre 1809
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre,
à Paris
Monsieur le Général Clarke, la Garde impériale doit
recevoir l'ordre de se tenir prête à entrer en campagne pour la campagne
d'Espagne. Vous donnerez les ordres nécessaires pour réunir le 13 décembre, à
Chartres et environs, la 1e division de la Garde, qui provisoirement
sera commandée par le général de brigade Roguet, et sera composée d'un escadron
de chevau-légers polonais, d'un escadron de chasseurs et de la compagnie de mameluks,
d'un escadron de dragons et d'un escadron de grenadiers; le tout formant 600
chevaux. On prendra de préférence les hommes qui sont à Paris et qui n'ont pas
fait la campagne d'Allemagne; et le général Walther désignera un major de la
Garde pour commander ce régiment de cavalerie. L'infanterie de cette division
sera composée du 2e régiment de conscrits et du 2e régiment de
tirailleurs-chasseurs, formant la 1e brigade, du 2e régiment de conscrits et du
2e régiment de tirailleurs-grenadiers, formant la 2e brigade. Chacun de ces
régiments sera fort de l, 600 hommes au moment du départ. Il y aura deux pièces
de 3 ou de 4 attachées à chaque régiment, avec les caissons d'infanterie
nécessaires. Ces huit pièces seront servies par une des trois compagnies d'artillerie
de la Garde qui se réunissent à la Fère.
On joindra également à cette division des caissons pour
le transport du pain, des ambulances, un commissaire des guerres, un
détachement de l’administration de la Garde, des boulangers et tout ce
qui est nécessaire pour faire campagne. Au 15 décembre le général Dorsenne
passera la revue de cette 1e division, et, sur le compte qu'il m'en
rendra le 17, je donnerai des ordres pour sa destination ultérieure. La revue
aura lieu sur la place de Chartres.
La 2e division sera composée du ler régiment de conscrits
et du 1er régiment de tirailleurs-chasseurs, du 1er
régiment de conscrits et du 1er régiment de tirailleurs-grenadiers
(chaque régiment ayant 1,600 hommes présents sous les armes), d'un régiment de
cavalerie formé d'un escadron de chevau-légers polonais, d'un escadron de
chasseurs, d'un escadron de grenadiers et d'un escadron de dragons fort de 600
hommes, en ayant soin de prendre les hommes les moins fatigués. Chaque régiment
d'infanterie aura deux pièces d'artillerie; ce qui fera huit pièces, qui seront
servies par une des compagnies d'artillerie qui se forment à la Fère, des
caissons, administrations, etc.
Cette division sera commandée par le général Dumoustier,
de la Garde.
Je passerai la revue de cette division le 15, au
Carrousel. Elle devra être dans le cas de partir le 16 décembre.
La 3e division sera composée de deux régiments de
fusiliers et de deux régiments de la vieille Garde, composés chacun de l,600 hommes présents sous les armes, et aura trois pièces de
canon.
Toute la cavalerie de la Garde, avec soixante pièces
d'artillerie, quatre mille outils attelés et six pontons à la suite de la
compagnie de pontonniers et des marins, sera prête à partir le 1er
janvier. J'en passerai la revue à midi, le 1er janvier, au
Carrousel.
Ainsi ma Garde sera composée, à son départ pour
l'Espagne, de 19,000 hommes d'infanterie, de 4,000 hommes de cavalerie et de
quatre-vingt-quatre pièces de canon, avec tous les caissons, administrations,
et tout ce qui est nécessaire. Ce corps sera commandé par le duc d'Istrie, sous
mes ordres immédiats. Donnez sur-le-champ tous les ordres afin que les généraux
de ma Garde fassent toutes les dispositions nécessaires, et vous remettent
l'état des caissons, du personnel et matériel, de l'administration, des
boulangers, etc. Il est nécessaire que la Garde ait les caissons nécessaires
pour porter du pain au moins pour quatre jours.
Paris, 5 décembre 1809
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre,
à Paris
Monsieur le Général Clarke, donnez l'ordre que le
quartier général du 8e corps et la division Rivaud, composée des huit
bataillons des brigades Ménard et Taupin et de la brigade formée du 22e de
ligne, faisant douze bataillons, se rendent à Orléans. Je verrai le 22e à son passage
à Paris. Le 15, le duc d'Abrantès se rendra à Orléans et passera la revue de
cette division. Faites-moi connaître où sont les 10e et 11e
bataillons des équipages militaires qui doivent être attachés au 8e corps.
Faites-moi connaître s'il sera possible de faire partir
le 15 les huit bataillons qui sont à Paris des 32e, 58e, 121e et 122e, qui
forment la 1e brigade de la division Lagrange, et des 2e, 4e, 12e et
15e légers, qui forment la 2e brigade; ces deux brigades, avec celle
formée du 65e et d'un bataillon du 46e, composant la
division du général Lagrange. Toutefois nommez les deux généraux de brigade qui
doivent commander ces huit bataillons, et donnez-leur l'autorité dans les
dépôts qui doivent les fournir; je les verrai, le 15, dans la situation où ils
se trouvent.
Je crois avoir disposé du général Clauzel; sinon on
pourrait lui donner le commandement de la division que quitte le général
Rivaud.
Paris, 5 décembre 1809
A M. Régnier, duc de Massa, Grand-Juge, ministre de la
justice, à Paris
Le procureur de la cour spéciale de Trêves, au lieu de
punir les révoltés, demande grâce pour eux. Faites-moi un rapport sur ce magistrat.
(Du Casse)
Paris, 5 décembre 1809
A M. Fouché, duc d’Otrante, ministre de la police générale,
à Paris
Donnez ordre que l'association des jeunes gens de Lyon
dont vous parlez dans votre rapport du 17 soit dissoute.
(Du Casse)
Paris, 6 décembre 1809
A Monsieur de Champagny, duc de Cadore, ministre des
relations extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, je vous envoie différentes
notes que je reçois de Vienne. Vous ferez connaître à l'ambassadeur d'Autriche
que, la police de Vienne encourageant de pareils outrages, mon intention n'est
pas d'envoyer à Vienne un ambassadeur, mais d'y tenir un simple chargé
d'affaires, et que je n'y enverrai d'ambassadeur que lorsque je serai certain
que ces horreurs ne se renouvelleront pas et seront réprimées de bonne foi; que
c'est une triste gloire que d'insulter une nation qui s'est si bien conduite
envers la ville de Vienne; que je demande réparation pour le Français qui a été
maltraité an théâtre. Vous pourrez communiquer l’original de ces pièces à
M. de Schwarzenberg.
Paris, 9 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, je pense qu'il est nécessaire
d'expédier un courrier en Russie pour porter mon discours au Corps législatif.
Vous ferez connaître les véritables nouvelles de la défaite des Russes au duc
de Vicence, et vous lui ferez comprendre que c'est à cause de ces défaites que
j'ai cru nécessaire de parler de la réunion de la Valachie et de la Moldavie à
l'empire russe; qu'ainsi l'empereur doit voir que je ne biaise pas, et que je
fais même plus que je ne promets. Je désire aussi que le duc de Vicence, dans
les discussions qui ont lieu, fasse sentir que la Russie aurait pu mieux agir
dans cette dernière guerre; que ses troupes n'ont pas tiré le sabre une fois
dans la campagne; que les Autrichiens avaient la conviction qu'elles ne
feraient rien, et qu'elles n'avaient pas encore passé leurs frontières quand
j'étais à Vienne; que cette conduite sans couleur, je ne l'imiterai pas, et
que, quand il s'agira d'une coopération de ma part, ce sera avec 2 ou 300,000
hommes que je marcherai. Le duc de Vicence doit dire à M. de Romanzof cette
propre phrase: « Vous sentez qu'il n'y a
rien dans la conduite passée que l'Empereur n'ait saisi; dans les affaires
d'Autriche, vous avez été sans couleur. Comment l'Empereur a-t-il agi ? Il vous
a donné une province qui paye plus que les frais que vous avez faits pour la
guerre, et il déclare tout haut que vous avez réuni la Finlande à la Moldavie
et la Valachie à votre empire. "
Paris, 9 décembre 1809
A Monsieur de Champagny, duc de Cadore, ministre des
relations extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, je vois dans une dépêche du
sieur Bignon que l'ancien roi de Suède doit venir dans les États de Bade.
Vous écrirez à ce ministre que je n'ai consenti au
passage de ce prince par les États de Bade que pour qu'il se rende en Suisse,
et qu'il doit influer pour que son séjour à Bade soit le plus court possible et
pour qu'il en parte au plus tôt pour aller en Suisse. Répondez au sieur Turreau
(Turreau de Linière, général de division, ministre
plénipotentiaire de France à Washington) que je l'autorise à donner tous
les fonds dont Mlle Paterson (L’ex épouse de
Jérôme) aurait besoin pour sa subsistance, me réservant de régler son
sort incessamment; que, du reste, je ne porte aucun autre intérêt en cela que
celui que m'a inspiré cette jeune personne; mais que, si elle se conduisait
assez mal pour épouser un Anglais, là cesserait cet intérêt, et je
considérerais qu'elle a renoncé aux sentiments qu'elle avait exprimés dans sa
lettre, et qui seuls m'avaient intéressé à sa situation.
Faites-moi une réponse pour le prince de Schwerin.
Il n'y a pas de difficulté d'accorder au canton de Zurich
les boulets qu'il demande.
Paris, 9 décembre 1809
Au vice-amiral, comte Decrès, ministre de la marine, à
Paris
Monsieur le Vice-Amiral Decrès, indépendamment du corps
d'ouvriers et marins que commande le colonel Baste, j'ai besoin d'un équipage
pareil à réunir le plus promptement possible à Bordeaux.
Je destine ce nouveau corps à servir à la suite de mon
armée de réserve d'Espagne. Veillez à la formation de ces bataillons, qui m'ont
rendu tant de services en Allemagne, et qui doivent m'en rendre encore plus en
Espagne, vu la grande quantité de côtes de ce royaume.
Paris, 9 décembre 1809.
Au général comte de Lauriston, aide de camp de
l’Empereur, à Paris
Je désire que vous preniez connaissance de tout ce qui
est relatif au matériel, au personnel et aux attelages de l'artillerie de
l'armée d'Espagne, afin que vous puissiez me mettre au fait de tout ce qui
regarde cette arme. Le service en est en ce moment assez compliqué; il se
divise naturellement en deux parties; ce qui existe en Espagne et ce qui va y
être envoyé.
Ayez des états bien dressés de toute l'artillerie de
campagne, avec ses munitions, attelée, à la suite des différents corps; de
l'artillerie de campagne, non attelée, existant dans les différents dépôts
(même observation pour le personnel); de la quantité d'artillerie de siège
existant dans les différentes places ou dépôts; enfin de tout le personnel et
des chevaux qui seraient en route de l'intérieur pour l'Espagne, avec
l'indication du jour où chaque détachement arrivera à Bayonne. Cette partie
sera la plus facile. La seconde exige plus de soin et d'étude, et je désire que
vous vous en occupiez beaucoup, pour pouvoir me remettre des états clairs et
n'être pas trompé dans mes calculs. Cela se divise en équipage de campagne et
équipage de siège, et chaque équipage se subdivise en matériel, personnel et
attelages. L'équipage de campagne est relatif au 8e corps. Je crois que je n'ai
pas désigné d'équipage d'artillerie, ni pour la division Loison, ni pour la
division Reynier; cependant quelques pièces leur seront aussi nécessaires.
L'équipage de campagne du 8e corps, quel en est le commandant
? Quel en est le personnel ? Où est le matériel, et quand pourra-t-il entrer en
Espagne ? Procurez-vous les mêmes renseignements sur l'artillerie de la
Garde.
Quant à l'équipage de siége, j'ai demandé 4,000 chevaux
et beaucoup de voitures. Quand le matériel et le personnel seront-ils arrivés à
Bayonne ?
Faites-moi des tableaux bien clairs et bien exacts, car
le temps est ici le grand élément. Prenez une connaissance parfaite de
l'artillerie de l'armée d'Espagne, et soumettez-moi tous les ordres à donner
pour que cette arme soit en mesure de remplir mon attente.
Paris, 9 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de
l’armée d’Espagne, à Paris
Mon Cousin, donnez ordre au général Loison de faire
partir les 1,500 hommes de la légion de la Vistule qui doivent déjà être
arrivés à Vitoria, pour se rendre à Saragosse , où ils
seront incorporés dans leurs régiments respectifs.
Quant aux 600 Irlandais qui doivent également être
arrivés à Vitoria, faites-moi un rapport qui m'apprenne où se trouve l'autre
régiment irlandais, afin de les réunir.
Paris, 9 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de
l’armée d’Espagne, à Paris
Vous répondrez au général Suchet pour lui témoigner ma
satisfaction sur la bonne situation de son corps, lui faire sentir la nécessité
d'avoir un million de rations de biscuit à Saragosse pour se porter sur Valence
quand j'entrerai en Espagne, et de préparer des moyens pour le siège de cette
ville. Lui demander un plan là-dessus. Lui faire connaître également que le 13e
de cuirassiers va être porté à 1,500 hommes, ainsi que le 4e de hussards;
qu'avant le 20 décembre le 2e régiment de cavalerie de l'armée d'Espagne sera à
Saragosse et aura renforcé sa cavalerie; que 1,500 hommes des régiments de la Vistule
sont à Vitoria et se rendent à Saragosse pour augmenter les trois régiments de
la Vistule, et qu'en janvier des détachements arriveront à ce corps pour le
porter à 30,000 hommes sous les armes.
Paris, 9 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de
l’armée d’Espagne, à Paris
Mon Cousin, le ministre de la guerre donne ordre à la
division Rouyer de se rendre à Mannheim, aux Badois de se rendre à Bade, et aux
troupes de Hesse-Darmstadt de se rendre à Darmstadt. Il est nécessaire que vous
voyiez mon ministre des relations extérieures pour prendre connaissance des
démarches que j'ai fait faire près les petites cours d'Allemagne pour avoir à
ma disposition de nouvelles troupes de la Confédération, qui formeront une
division pour l'Espagne. Écrivez au général Rouyer qu'il vous fasse connaître
les troupes qui seraient de bonne volonté pour cette destination. Écrivez à mes
ministres à Bade, à Darmstadt, à Nassau, etc., pour savoir ce que pensent à cet
égard ces souverains. Je désire qu'ils fassent partir tout ce qui est
nécessaire pour compléter les cadres qu'ils ont en Espagne.
Faites-moi un rapport qui me fasse connaître les secours
que je peux espérer par cette voie.
Paris, 9 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de
l’armée d’Espagne, à Paris
Vous ne me parlez pas du tout du mouvement de la division
Loison; vous ne me remettez aucun état; vous ne me faites pas connaître les
progrès de la formation des différents corps que j'ai ordonné pour l'Espagne;
vous ne m'envoyez aucun état d'artillerie; enfin, vous ne vous mêlez pas de
cette armée, qui cependant ne peul pas marcher toute seule.
Paris, 9 décembre 1809
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre,
à Paris
Monsieur le Duc de Feltre, vous ferez parvenir par un
officier les ordres suivants au prince d'Eckmühl et au vice-roi d'Italie.
Vous ordonnerez au prince d'Eckmühl d'exécuter
ponctuellement les articles du traité, et d'avoir évacué, le 20 décembre à
midi, la basse Autriche, en supposant, 1° que l'article 2 du traité ail été
exécuté à la lettre, et que des poteaux aient été placés dans l'arrondissement
de Cracovie, ainsi que sur les frontières de la Haute Autriche; 2° que toutes
les contributions aient été payées; 3° que les prisonniers aient été restitués.
Alors toute mon armée sera placée, l'armée française
d'Italie dans la Styrie, et l’armée française d'Allemagne dans la Haute
Autriche.
Les Bavarois continueront à pacifier le Tyrol. Enfin, au
5 janvier, terme de rigueur pour toute l'évacuation, toutes les troupes
resteront placées dans le pays de Salzburg et sur la limite.
Quant aux troupes alliées, vous ferez connaître au prince
d'Eckmühl que, comme tout parait bien marcher, il est autorisé à renvoyer les Saxons
sur Dresde par le plus court chemin, les Wurtembergeois sur Stuttgart, la
division Rouyer sur Mannheim, les troupes de Hesse-Darmstadt sur Darmstadt, les
Badois sur Carlsruhe, et les Portugais sur Ratisbonne, pour y être formés en un
seul corps. Les Portugais cesseront de faire partie du 2e corps et passeront au
3e; le prince d'Eckmühl les placera dans la division où il le jugera à propos.
Par ce moyen, il aura soulagé son armée de toutes les troupes auxiliaires; ce
qui ne laissera pas d'être une diminution considérable pour les subsistances.
Vous ferez connaître au prince d'Eckmühl que les corps
restent organisés comme ils le sont, avec cette différence que la division
Morand, qui a perdu le 65e, reprendra en place le 57e. Ainsi le 3e corps
se trouvera composé de quinze régiments, et le 2" corps en perdra un. Vous
lui donnerez l'autorisation de diriger, lorsqu'il le jugera convenable, le 2e
corps sur Augsbourg et Ulm, et tout le 4e corps sur Bamberg, Bayreuth et
Würzburg, ne gardant ainsi, jusqu'au dernier moment de l'évacuation, que les
quinze régiments du 3e corps, les trois divisions de cuirassiers et les six
régiments de cavalerie légère de la division Montbrun, au delà de l'Inn. Si,
comme tout me porte à le penser, il n'y a aucun inconvénient à exécuter ces
dispositions, le prince d'Eckmühl vous fera connaître quand les corps
arriveront dans leur nouveaux cantonnements, et vous en enverra le détail en
règle, la situation, l'état de l'artillerie, du génie, des équipages
militaires, etc.
Vous recommanderez à ce maréchal de ménager la Bavière
autant que possible.
Vous lui donnerez l'ordre de faire partir sur-le-champ
pour Strasbourg les marins et les ouvriers de la marine.
Paris, 9 décembre
1809
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre,
à Paris
Je vois qu'il y a encore sept divisions de gardes
nationales sans compter celles de Boulogne : ne pourrait-on pas les réduire, et
supprimer les divisions Lamarque, Soulès et Vaubois, ce qui ne ferait plus que
quatre divisions, rendrait des généraux disponibles et serait déjà une première
économie ?
Présentez-moi un projet pour faire de toutes les gardes
nationales qui sont au nord une légion de gardes nationales volontaires de la
Garde, qui serait formée à sept bataillons et composée de tous les hommes de
bonne volonté, lesquels marcheraient avec la Garde.
Paris, 9 décembre 1809
Au comte Bigot de Préameneu, ministre des Cultes, à Paris
Monsieur le Comte Bigot Préameneu, envoyez ordre au sieur
Fournier, évêque de Montpellier, de se rendre à Paris pour y rendre compte de
sa conduite. Il paraît qu'il montre de mauvaises dispositions, notamment dans son
dernier mandement.
(Du Casse)
Palais des Tuileries, 10 décembre 1809
ALLOCUTION
A LA DÉPUTATION DU CORPS LÉGISLATIF.
J’agrée les sentiments que vous m'exprimez. Je
connais l'attachement de votre Corps à ma personne. La France a besoin d'une
monarchie modérée, mais forte. L'époque actuelle doit être distinguée non
seulement par la gloire des armes françaises, mais aussi par la prospérité de
son commerce, par la sagesse des lois, par l’éclat des arts, des sciences
et des lettres. Pour conduire la France dans la situation où elle se trouve,
j'ai surmonté bien des obstacles. Moi et ma famille, nous saurons toujours
sacrifier nos plus chères affections aux intérêts et au bien-être de cette
grande nation. Avec l'aide de Dieu et le constant amour de mes peuples, je
surmonterai tout ce qui pourrait s'opposer à mes grands desseins. Je désire
vivre trente ans encore, afin de pouvoir trente ans servir mes sujets,
consolider ce grand Empire et voir toutes les prospérités que j’ai
conçues embellir cette chère France.
Paris, 13 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, écrivez au sieur Bignon que je
désire qu'il protége les Palatins, et qu'il fasse connaître au gouvernement du
grand-duc de Bade que je vois avec peine que les 6 ou 700,000 Catholiques qui
sont dans le pays ne sont pas aussi bien traités qu'ils doivent l'être, et que
les Palatins sont exclus de toutes les places; que dans toutes les occasions il
doit soutenir leurs intérêts.
Il faut expédier un courrier à Berlin pour prescrire au
comte de Saint-Marsan de faire les démarches les plus sérieuses, 1° pour se
refuser à toutes les demandes faites pour le duché de Varsovie; 2° pour presser
la rentrée des contributions. Il fera sentir que mes troupes vont passer le
Rhin; que je serai obligé de les faire marcher du côté de Magdebourg; que cela
me coûtera de très-fortes dépenses; qu'il faut marcher de bonne foi et remplir
religieusement ses obligations. Vous écrirez la même chose à M. de Brockhausen;
vous lui ferez sentir que ses dernières propositions sont inadmissibles et
ridicules; que, quand on a de l'argent pour faire des camps et lever des 10 ou
12,000 chevaux, on doit en avoir pour payer ses dettes.
Écrivez au sieur la Rochefoucauld pour connaître l'effet
qu'a produit en Hollande mon discours, et quelle sorte d'opposition on
trouverait à la réunion.
Faites faire des copies des lettres que j'ai écrites en
Perse, et faites-les remettre à l'ambassadeur, qui les fera passer par une
nouvelle occasion.
Je vois dans une lettre du sieur la Rochefoucauld qu'il
vous accuse réception de deux lettres du 27 novembre, la première relative à
l'autorisation que je voulais accorder aux bâtiments américains d'entrer en
Hollande avec des chargements de colon; que veut dire cette phrase ?
Paris, 13 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de
l’armée d’Espagne, à Paris
Mon Cousin, je vous envoie les dernières dépêches reçues
d'Espagne; accusez-en la réception au Roi et au général Suchet. Faites
connaître au Roi que les drapeaux pris par mes troupes aux batailles de
Medellin, d'Ocana, etc., doivent être envoyés en France pour m'être présentés
et servir à orner les monuments français. Vous écrirez la même chose au duc de
Dalmatie. Écrivez également qu'on envoie en France les prisonniers, en retenant
les Allemands, Suisses et Français, pour les placer dans les régiments, mais
qu'il ne faut employer aucun Espagnol qui, tous, se font un jeu de trahir.
Donnez ordre aux Irlandais qui font partie de la division
Loison de se rendre à Burgos pour se réunir à leurs régiments.
Paris, 13 décembre 1809
Au comte Daru, intendant général de la Maison de l’Empereur,
à Paris
En faisant donation du château de Villers au comte de
Lobau, j'ai entendu lui donner les meubles, mais mon intention n'a pas été d'y
comprendre ceux qui peuvent avoir été tirés de mes palais pour l'établissement
du prince Kourakine et qui doivent y être réintégrés ni les orangers qu'on a
pris à Neuilly et qui doivent être rendus à la princesse Pauline. Vous ferez
aussi rendre à la princesse Pauline les orangers et les tableaux que contre mon
intention on a aussi pris à Neuilly.
(Du Casse)
Paris, 14 décembre 1809
Au prince de Nauchâtel et de Wagram, major-général de
l’armée d’Espagne, à Paris
Mon Cousin, je vois par votre lettre du 13 décembre que
la 2e brigade de la division Reynier, que commande le général
Valentin, et la 3e brigade, que commande le général Lamartinière, qui
s'organisent à Bayonne, peuvent être prêtes dans les premiers jours de janvier.
Donnez ordre que le 1er régiment provisoire de chasseurs
parte le 18 de Saintes pour continuer sa route, et faites-moi connaître le jour
où il arrivera à Bayonne. On le fera entrer sur-le-champ en Espagne. Le 5e
régiment de marche de cavalerie, qui arrive le 11·à Tours, en partira le 16 et
continuera sa route sur Bayonne, afin de pouvoir également entrer le plus tôt
possible en Espagne.
J'approuve que les 3e, 4e et 5e
régiments de marche de l'armée d'Espagne filent, à mesure qu'ils seront formés,
sur l'Espagne.
Il faudrait mettre le détachement du 4e de
hussards, qui est dans le 3e régiment de cavalerie, dans le 2e, puisque le 2e
régiment est destiné à aller en Aragon, où est le 4e de hussards.
Paris, 14 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée
d’Espagne, à Paris
Mon Cousin, il y a ici des magasins contenant 12 ou 15
mille habits de fourniture faits par la ville de Paris. Faites les visiter par
le sieur Lambert, intendant général de l'armée d'Espagne, et si ces fournitures
sont bonnes voyez le ministre Dejean pour qu'il les fasse emballer et partir
pour Bayonne.
(Du Casse)
Palais des Tuileries, 14 décembre 1809
OBSERVATIONS
DE L'EMPEREUR SUR LE CONSEIL D’ADMINISTRATION DE L’INTÉRIEUR
Sa Majesté remarque que la nomenclature du budget n'est
pas dans le même ordre déterminé par le décret arrêté en conseil
d'administration du 25 octobre 1808 pour le budget de 1809. Elle désire que
l'on s'y conforme, sauf à placer à la suite des objets de la nomenclature
actuelle les nouveaux travaux qui seraient proposés pour 1810.
Sa Majesté est dans l'intention de signer pour 1810 un
décret uniforme. Le budget de 1809 est composé de quatre chapitres; on pourra
ajouter à celui de 1810 les chapitres nécessaires, et établir dans le même
décret la distribution des fonds spéciaux estimés selon leur produit de 1809,
et tels que le droit sur la navigation, les centimes imposés, le droit de
tonnage, etc. On n'oubliera pas dans ces chapitres le produit des fonds
extraordinaires du Piémont, et l'on dira que la somme de 2,465,000 francs, à
laquelle ces fonds s'élèvent aujourd'hui et qui est composée de diverses
valeurs, sera réalisée, soit en mettant les obligations et autres effets à la
disposition de la caisse d'amortissement, pour en tirer le meilleur parti
possible et en faire compte aux ponts et chaussées, soit en transformant les monti en 5 pour 100, qui seront vendus à
la caisse d'amortissement.
La somme qui se trouvera disponible après ces
arrangements, déduction faite de ce qui a été dépensé en 1808 et en 1809, sera
portée au budget de 1810 et affectée de préférence, afin de faire quelque chose
qui frappe les esprits en Piémont, à la construction du pont de Turin, qui serait
suivie avec la plus grande activité. Tout ce que le conseil de liquidation de
Turin, qui a été prorogé par Sa Majesté, parviendra à faire rentrer, depuis
l'époque de l'état de choses consigné dans le dernier rapport du ministre des
finances, sera également affecté aux ponts et chaussées pour en être disposé
par le budget de 1811.
Sa Majesté remarque que le ministre de l'intérieur ne
rend pas compte de ce qui a été fait pour l'exécution de l'article 4 du titre
III du décret du 29 octobre 1809. Elle pense que l'oubli qui a eu lieu à cet
égard provient du chef de la division, qui aurait dû rappeler l'objet de cet
article, et elle juge convenable que le ministre lui en témoigne son
mécontentement.
Sa Majesté désire que le ministre de l'intérieur lui
fasse connaître, par des rapports particuliers, toutes les mesures qu'il y a à
prendre pour l'exécution des différents articles du décret du 29 octobre 1809,
et lui remettre un rapport particulier sur les fonds affectés aux canaux par
l'article 2 du titre III de ce décret.
M. le comte Frochot présentera un rapport sur
l'exécution, article par article, de l'article 5, titre IV, du même décret. Il
fera connaître les modifications qu'il croira nécessaires dans la distribution
des travaux, et les fonds dont il aura besoin sur l'emprunt de huit millions
pour 1810. Le ministre des finances fera connaître au ministre de l'intérieur
la somme qui peut lui être accordée sur les fonds du trésor pour les travaux
des ponts et chaussées en 1810. Le fonds spécial du Piémont et les autres fonds
spéciaux ne seront pas compris dans cette somme.
Le ministre des finances apportera en même temps tout ce
qui est relatif au fonds de réserve des communes, bois communaux, etc., et au
fonds de non-valeurs, pour voir si ces objets peuvent offrir quelques
ressources.
M. le comte Roederer apportera aussi des états présentant
toutes les dispositions faites en 1808 et en 1809, sur les fonds appartenant
aux communes ou à d'autres propriétaires. Il y comprendra le produit du droit
d'exportation des grains et tous autres produits de cette nature, et fera
mention détaillée des divers fonds dont le versement devait être fait à la
caisse d'amortissement, et qu'il paraît qu'elle n'a pas recouvrés. Il y a aussi
à cette caisse plusieurs fonds qui n'appartiennent pas à la caisse de
l'extraordinaire et qui n'ont pas de maître, tels que ceux qui proviennent de
la part du Gouvernement dans les bâtiments expédiés en aventuriers, ceux qui
proviennent des différentes prises sur lesquelles il n'a pas été statué, etc.
Un rapport est nécessaire sur ces différents fonds.
Les différents rapports et comptes rendus seront
présentés dans le conseil d'administration que Sa Majesté tiendra jeudi
prochain.
Le ministre de l'intérieur est invité à apporter aussi à
cette séance tout ce qui est relatif aux dépôts de mendicité, le compte des
dispositions faites et la demande du fonds à faire.
Paris, 15 décembre 1809
Au prince Cambacérès, archichancelier de l’empire,
à Paris
Mon Cousin, nous avons ordonné la convocation d'un conseil
privé qui aura lieu aujourd'hui, à dix heures du soir, dans notre palais des
Tuileries.
Nous jugeons convenable de ne pas nous trouver à ce
conseil, et nous avons signé la présente lettre pour vous faire connaître que
notre intention est que vous le présidiez en notre absence, et que vous lui
présentiez le projet de sénatus-consulte ci-après:
Le Sénat réuni, etc.
Vu l'article dressé le 15 du présent mois par
l'archichancelier de l'Empire, dont la teneur suit,
A décrété et décrète :
ARTICLE PREMIER. Le mariage contracté entre l'Empereur
Napoléon et l'Impératrice Joséphine est dissous.
ART. 2. - L'Impératrice Joséphine, ayant été couronnée,
conservera les titre et rang d'Impératrice-Reine.
ART. 3. - Son douaire est fixé à une rente annuelle de
deux millions de francs sur le trésor de l'État.
ART. 4. - Toutes les dispositions qui pourront être
faites par l'Empereur en faveur de l'Impératrice Joséphine sur les fonds de la
liste civile seront obligatoires pour ses successeurs.
Après le conseil privé, vous vous retirerez par devers
nous pour nous présenter la rédaction qui aura été arrêtée, et à l’égard
de laquelle seront remplies les formalités d'usage.
Paris, 15 décembre 1809
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre,
à Paris
Faites faire des recherches dans vos bureaux, et
faites-moi un rapport qui me fasse connaître s'il serait possible de tirer 25 à
30,000 hommes de mes dépôts d'infanterie et de cavalerie, pour former une
réserve destinée à garder les derrières de l'armée d'Espagne lorsque les corps
des généraux Loison, Reynier, le 8e corps, les régiments de marche, les douze
bataillons auxiliaires et les vingt escadrons de gendarmerie auront rejoint, et
que ces corps seront tout à fait formés.
Les corps qui restent en Allemagne sont suffisamment
forts. Mon intention est de disposer de ce qu'il y aurait dans tous les cadres
de France pour le diriger sur l'Espagne; et, quand ces détachements
arriveraient successivement à Bayonne en février, mars, avril, mai, ce serait
toujours suffisant pour alimenter l'armée, tranquilliser les derrières et
assurer enfin la conquête de cet immense pays.
Paris, 15 décembre l809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, parlez au ministre d'Autriche
de la mauvaise direction que l'on donne aux affaires à Vienne. Dites-lui que
Roger Dumas et la coterie du comte Rasumovsky y sont déjà arrivés, et que, si
l'on ne prend pas des mesures pour empêcher leur influence, il arrivera de
grands malheurs.
Paris, 15 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie les pièces
relatives aux affaires de Rome. Votre rapport ne me paraît pas mal fait. Il
pourrait être supposé fait pour le moment où j'ai décidé que les États de Rome
seraient déclarés réunis à la France. Mais il faut en faire un second pour
motiver le sénatus-consulte, dans des termes conformes aux notes que j'ai
dictées au conseiller d'État d'Hauterive, avec les pièces justificatives à
l'appui. Remettez-moi promptement tout cela, avec les pièces, afin qu'on puisse
sans délai le porter au Sénat.
Il me semble qu'il n'y a pas d'inconvénient à imprimer le
travail du sieur André, puisque c'est l'ouvrage d'un particulier; je le lirai
lorsqu'il sera imprimé. Mais il ne me paraît pas remplir mon but :
1° De prouver que la cour de Rome a toujours employé les
armes spirituelles pour maintenir et agrandir son état temporel, et a sacrifié
ainsi le principal à l'accessoire; 2° de prouver que la cour de Rome a toujours
été l'ennemie de la puissance prépondérante en Italie, et qu'elle a constamment
employé les armes spirituelles pour nuire à cette puissance; 3° que la
puissance spirituelle des papes a donc été constamment employée, non pour
l'intérêt de la religion, mais pour consolider leur puissance temporelle; que
leur puissance temporelle a toujours été employée pour la destruction de
l'Italie et de la puissance qui y était prépondérante; que, la France étant
dominante aujourd'hui, il s'ensuit que la cour de Rome sera constamment son
ennemie; 4° consultation : qu'il y a deux partis à prendre; le premier,
d'établir un patriarche et de se séparer de la cour de Rome comme a fait
l’Angleterre, (discuter les avantages et les inconvénients de ce parti);
le deuxième, de détruite le pouvoir temporel des papes des papes en réunissant
les États romains à l’empire français (établir l'obligation, dans cette
circonstance, de cette mesure légitimée par la conduite de la cour de Rome).
Paris, 15 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le duc de Cadore, montrez cette lettre au prince
Kourakine, et faites-lui connaître que j’ai vu avec peine que mes lettre
à l’empereur se trouvent dans les journaux anglais, ce qu’on
n’est pas dans l’usage de faire, même en temps de guerre.
Paris, 15 décembre
1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de
l’armée d’Espagne, à Paris
Mon Cousin, le général Loison doit, depuis le 4, être à
Vitoria; je suis surpris qu'aujourd'hui 15 vous n'en ayez pas de nouvelles. Il
a dû faire occuper Saint-Sébastien, Bilbao par ses troupes, et grossir l'armée
d'Espagne des bataillons d'hommes isolés et de marche de Vitoria et de Saint-Sébastien,
hormis du bataillon de gardes nationales qui doit rester dans la Biscaye.
Écrivez au duc de Dalmatie que j'ai hâte de voir se
réunir tous les corps; qu'il donne l'ordre que tout ce qui appartient aux 32e,
15e, 66e, 26e et 82e se rende dans le nord à Benavente et à Valladolid, pour
être réuni au corps du général Loison; que tout ce qui appartient aux 51e, 43e,
55e, 58e, 47e de ligne et 12e léger rejoigne les régiments respectifs à Madrid;
que le 2e corps ne sera formé que des deux divisions des généraux Merle et
Heudelet, composées, comme elles le sont aujourd'hui, des 2e, 4e, 17e et 31e
légers, et des 15e, 36e, 47e, 70e
et 86e. Vous lui ferez connaître que dans le corps du général Loison
il y a 6,000 hommes appartenant à ce corps, et qu'il y a un égal nombre
d'hommes en marche de France pour porter ces neuf régiments au complet. Vous
lui réitérerez l'ordre de ne pas toucher au corps du général Loison, dont je me
réserve la disposition. Il y a à Madrid beaucoup d’hommes isolés et
détachés, tels que le 10e bataillon de marche et plusieurs
détachements appartenant aux divers corps, qu'il faut lui donner l'ordre de
faire rejoindre. Vous lui ferez connaître que je vais donner l'ordre au corps
du général Loison d'occuper Burgos; ce qui rendra disponible le 118e,
dont je veux renforcer la division Bonet.
En résumé, vous lui donnerez l'ordre que tout ce qui
appartient aux 15e, 32e, 26e, 66e, 82e, 122e, 120e, 119e
et 118e, à la légion du Midi, aux régiments de Westphalie, de
Prusse, et à la garde de Paris, reste dans le nord, pour maintenir en paix la
Castille, contenir les insurgés de Portugal et l'armée ennemie de Galice ;
que tout ce qui appartient au 6e corps reste du côté de
Salamanque ; que tout ce qui appartient aux régiments des 5e, 1er
et 4e corps les rejoigne et s'y réunisse, afin qu'ils se tiennent
prêts à recevoir des renforts à mon arrivée et à finir enfin la conquête de
l'Espagne.
Il y a également un bataillon du 2e léger qu'il faut
réunir, ainsi que beaucoup de détachements appartenant à des régiments de
cavalerie.
Trianon, 16 décembre 1809
Au prince Ferdinand, à Valençay
Je reçois la lettre de Votre Altesse Royale du 11. Je me
suis fait rendre compte des réclamations qu'elle contient, et j'ai ordonné
qu’on y fît droit sans délai, car je me suis convaincu qu'elles sont
fondées. Votre Altesse doit être sans inquiétude et compter que ce que je lui
ai promis sera ponctuellement exécuté.
Trianon, 16 décembre 1809
A Maximilien-Joseph, roi de Bavière, à Munich
Je reçois la lettre de Votre Majesté du 8, par laquelle
elle m'annonce sa prochaine arrivée à Paris avec la Reine. Votre Majesté ne
doute pas, j'espère, du plaisir que m'a fait cette lettre. J'en aurai beaucoup
à lui renouveler l'assurance des sentiments qu'elle m'inspire. Je désire
beaucoup que le séjour de Paris puisse être agréable à la Reine. J’envoie
mon grand chambellan à la rencontre de Votre Majesté.
Trianon, 17 décembre 1809, huit heures du soir (date présumée)
Mon amie, je t'ai trouvée aujourd'hui plus faible que tu
ne devais être. Tu as montré du courage; il faut que tu en trouves pour te
soutenir; il faut ne pas te laisser aller à une funeste mélancolie; il faut te
trouver contente et surtout soigner ta santé, qui m'est si précieuse. Si tu
m’es attachée et si tu m'aimes, tu dois te comporter avec force et te
placer heureuse. Tu ne peux pas mettre en doute ma constante et tendre amitié,
et tu connaîtrais bien mal tous les sentiments que je le porte, si tu supposais
que je puisse être heureux si tu n'es pas heureuse, et content si tu ne le
tranquillises. Adieu, mon amie; dors bien; songe que je le veux.
Trianon, 17 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de
l’armée d’Espagne, à Trianon
Mon Cousin, donnez l'ordre au général Loison de faire
partir la brigade du général Gratien pour Burgos, où elle tiendra garnison pour
maintenir la tranquillité dans la Castille. Il joindra à cette brigade le
premier régiment de marche de cavalerie de l'armée d'Espagne; ce qui mettra à
la disposition du général Gratien 5 à 6,000 hommes, qui seront suffisants pour
la police de la Castille et pour maintenir les communications avec Aranda,
Burgos et Santander.
Vous donnerez l'ordre que le 118e soit tout entier réuni
et envoyé pour renforcer la division Bonet, aussitôt que le général Loison sera
arrivé. Vous donnerez le même ordre au 122e, et, lorsque le général
Bonet sera ainsi renforcé de huit bataillons et soutenu par la brigade Gratien,
qui reste à Burgos, vous lui enverrez l'ordre d'attaquer l'ennemi et de le
poursuivre vivement.
Vous ordonnerez que tout ce qui se trouverait à Burgos et
dans l'arrondissement, appartenant aux divers corps d'armée, se dirige sur ces
corps pour les renforcer.
Le général Loison pourra, s'il le juge convenable, porter
son quartier général à Burgos, afin de veiller par lui-même à la tranquillité
de la Castille.
Vous donnerez l'ordre au général Reynier de partir le 1er
janvier avec ce qu'il aura de disponible de la 2e et de la 3e
brigade et les régiments de marche de cavalerie qui doivent faire partie de sa
division. Il placera ce qu’il aura de disponible de la 2e brigade à
Tolosa et Saint-Sébastien; il portera son quartier général à Vitoria, avec ce
qu'il aura de la 3e brigade. Là, il se chargera de la police des
trois Biscayes et de rétablir la tranquillité sur les confins de la Navarre et
de la Castille., jusqu’à ce que les 2e et 3e brigades soient
formées et que la 1re brigade lui soit arrivée.
Aussitôt que le général Reynier sera arrivé à Vitoria, la
brigade Simon se rendra à Valladolid, et là tout ce qui appartient aux 66e,
26e et 82e, à la légion du Midi et aux Hanovriens, y sera
réuni. Le général Loison portera alors son quartier général à Valladolid,
et, comme il ne pourra y être arrivé
avant le 15 janvier, je lui ferai connaître d'ici à ce temps la composition de
son corps et ce qu'il aura à faire.
Faites bien connaître au général Reynier qu'en le faisant
entrer en Espagne un peu plus tôt, mon but est de dégorger Bayonne, qui est
trop encombré, d'utiliser ses troupes dans les Biscayes et de rendre par là le
corps du général Loison disponible.
Vous pouvez faire connaître au général Loison que,
lorsqu'il sera arrivé à Valladolid, je composerai son corps de la division
Bonet et d'une autre division dont fera partie la brigade Simon, qui, par la
réunion d'autres bataillons, se trouvera
portée á 8,000 hommes. Mais le général Reynier et le général Hédouville doivent
recevoir rapidement les ordres de compléter à Saint-Sébastien, Tolosa et Vitoria,
les brigades de la division Reynier, mon intention étant que le général Reynier
ne quitte pas la Biscaye que son corps ne soit complètement formé selon
l'organisation que j'ai arrêtée.
Envoyez l'ordre au général Suchet, en Aragon, de former
des colonnes mobiles pour rétablir la tranquillité dans la Navarre, de
considérer ce pays comme sous ses ordres et d'y rétablir par conséquent l'ordre
et l'administration.
Trianon, 17 décembre 1809.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de
l’armée d’Allemagne, à Trianon
Mon Cousin, donnez l'ordre à la 1e division de la Garde
impériale, qui est à Chartres, commandée par le général de brigade Roguet, et
composée conformément à l'état ci-joint, de partir de Chartres, du 19 au 21 de
ce mois, sur trois colonnes, et de se rendre à Bordeaux. La cavalerie formant
l'avant-garde partira le 19. Les deux régiments du corps des chasseurs
partiront le 20 avec leurs quatre pièces d'artillerie, et les deux régiments du
corps des grenadiers le 21; les administrations partiront avec les chasseurs.
Vous me ferez connaître le jour où cette division arrivera à Bordeaux, et vous
vous concerterez avec le ministre de la guerre pour ce mouvement. Vous
remarquerez que les quatre régiments d'infanterie n'ont de présents que 5,500
hommes, tandis qu'ils devraient en avoir 6,400. Vous donnerez l'ordre que tout
ce qui reste aux dépôts, ou galeux ou autres, soit formé en un régiment de
marche d'un millier d'hommes, et parte au 1er janvier pour compléter les corps.
Vous donnerez l'ordre que le régiment de cavalerie qui
avait été attaché à la 2e division avec ses huit pièces d'artillerie parte le
20 de Paris pour se rendre à Poitiers, où il recevra de nouveaux ordres.
Vous donnerez ordre que 50 gendarmes d'élite partent
demain pour marcher avec la 1e division de la Garde, que commande le général
Roguet, et que 50 autres partent avec la 2e division.
Trianon, 17 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de
l’armée d’Espagne, à Trianon
Mon Cousin, donnez l'ordre à la division Rivaud, du 8e
corps, composée des brigades Ménard, Taupin et Godard, de partir pour se rendre
à Bordeaux. Ayez soin qu'elles marchent à petites journées, qu'elles aient un
séjour tous les trois jours et qu'elles marchent de manière à se fatiguer le
moins possible. Faites-moi connaître quand l'artillerie de cette division sera
arrivée.
Trianon, 17 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de
l’armée d’Espagne, à Trianon
Mon Cousin, donnez l'ordre que la brigade composée d'un
bataillon du 32e, d'un du 58e, d'un du 121e et d'un du 122e, qui doivent former
au moins 3,000 hommes, parte le 20 de ce mois pour se rendre à Bordeaux. Cette
brigade est la 2e de la division Lagrange. Faites-moi connaître quand la 1re
brigade arrivera à Bayonne.
Donnez ordre que la 3e brigade de cette division,
composée d’un bataillon du 2e léger, d'un du 4e, d'un du 12e et d'un du
15e légers, parte le 22. Cette 2e et cette 3e brigade suivront la route de
Versailles, où elles séjourneront; vous en passerez la revue à Versailles et
vous vous assurerez qu'elles sont munies de tout ce qu'il faut pour faire la
guerre, et qu'elles ont le nombre d'officiers nécessaire pour les discipliner
et les contenir en route. Tracez-leur un itinéraire tel qu'elles se reposent un
jour sur trois, et même qu'elles aient un double séjour dans les grandes
villes.
Vous me remettrez un tableau du mouvement du 8e corps, de
la division du·général Rivaud, que j'ai, je crois, remplacé par le général
Dufour, et des trois brigades de la division Lagrange, avec l'état de leur
artillerie.
Le régiment d'infanterie du grand-duché de Berg qui est
aux environs d'ici peut venir à Paris, s'il est nécessaire, pour y faire le
service.
Vous le ferez passer en revue à Paris, et vous me ferez connaître
la situation où il se trouve.
Trianon, 17 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de
l’armée d’Espagne, à Trianon
Mon Cousin, je réponds à votre lettre du 16. Je m'en
tiendrai, quant à Nassau, au traité que j'ai fait avec cette Maison. Ainsi le
régiment de Nassau qui fait partie de la division Rouyer recevra ordre de
continuer sa route sur Paris. Je consens à ce qu'il soit fait une convention
particulière avec les petits princes. Entendez-vous pour cela avec le duc de Cadore.
Je consens à accorder les invalides à ces troupes qui, de fait, sont à mon
service. Je consens également à ce que ces troupes forment dans tous les cas le
contingent des princes.
Trianon, 17 décembre 1809
A M. Fouché, duc d’Otrante, ministre de la police
générale, à Paris
Je vous envoie une lettre du roi d'Espagne. Je vous prie
d'envoyer chercher le sieur Laborie, et de voir ce que cet intrigant écrit et
s'il veut cesser de se mêler de ce qui ne le regarde pas. S'il y a lieu, vous
ferez mettre le scellé sur ses papiers.
Trianon, 17 décembre 1809
A Joseph Napoléon
Monsieur mon Frère, j’envoie à Votre Majesté le
Moniteur qui lui fera connaître le parti que j’ai cru devoir prendre (Il s’agit de son mariage avec Marie-
De Votre Majesté, le bien affectionné frère.
PS. Je ne sais ce que vous entendez par des bruits répandus.
Si des sots répandent des bruits qui compromettent la tranquillité publique, faîtes-les
arrêter.
(du Casse)
Trianon, 17 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, vous verrez dans la Gazette de
France un article sur un pardon donné aux landwehrs. Cet article est vrai. Il
parait que l’on voudrait conserver les landwehrs, ce qui est contraire au
traité.
Demandez une explication là-dessus.
(Du Casse)
Trianon, 18 décembre 1809
Au président du Sénat du royaume d’Italie, à Milan
Monsieur le Président du Sénat, faites agréer au Sénat
mes remerciements sur sa dernière adresse. Les provinces illyriennes forment
une frontière qui assure davantage mon royaume. Ma constante politique est
d'organiser mon empire de manière que la guerre soit à jamais éloignée de nos
provinces de France et d'Italie. Et les peuples de mon royaume, qui a été
depuis plusieurs siècles le théâtre de la guerre, connaissent, plus que tous
autres, tous les maux que la guerre produit.
Trianon, 18 décembre 1809
Aux ministres de la guerre et de l’administration
de la guerre, à Paris
Je vous ai déjà fait connaître, par ma lettre
d'aujourd'hui, que mon intention est de contremander toutes les remontes, afin
de diminuer d'autant les dépenses. Je vous ai recommandé de faire diriger sur
Niort tous les chevaux qui seraient déjà en route pour l'Italie; il faut les
faire arrêter aux lieux où ils se trouvent aujourd'hui, et adresser vos ordres
spécialement à Paris, Lyon et Chambéry et sur les principaux points de la
route; car je n'ai plus besoin de chevaux en Italie, et un millier de chevaux
de plus du côté de l'Espagne me sera très utile.
Je vous écris aujourd'hui la présente pour vous demander
un rapport général sur la cavalerie. Ma dépense est énorme, et il faut
aujourd'hui songer sérieusement à une réforme. Mon armée, dans l'état actuel,
mangerait trois fois le revenu de la France. Je désire donc connaître d'abord
la situation en hommes, en chevaux, en selles, de tous mes régiments de
cavalerie au ler décembre, ensuite les réformes qu'il est urgent de faire dans
les hommes et dans les chevaux pour réduire les dépenses à un taux convenable.
Je trouverai dans cette mesure un autre avantage, ce sera
celui de retirer des dépôts de cavalerie beaucoup de conscrits qui, désormais,
y seraient inutiles, et de pouvoir les remettre à la disposition du ministre de
la guerre pour en former les nouveaux bataillons du train d'artillerie destinés
à l'armée d'Espagne.
Je vous ai fait connaître que tous vos budgets devaient
être faits sur l'hypothèse de l'état de paix du côté de l'Allemagne et de
l'état de guerre du côté de l'Espagne.
Les hommes, les chevaux et les harnais de ma cavalerie se
divisent en deux parties: celle qui est à l'armée et celle qui est dans les
dépôts.
Quatorze de mes régiments de cuirassiers, un grand nombre
de mes régiments de chasseurs et de hussards sont en Allemagne; quel que soit
le pied de paix que j'arrêterai aussitôt que vous m'aurez remis votre rapport,
la réduction s'opérera promptement dans les escadrons de guerre par la réforme
de chevaux hors de service et des hommes démontés ou invalides; mais c'est
surtout dans mes dépôts qu'il est urgent de porter la reforme, afin que je
n'aie en France aucun cheval inutile et que, l'année prochaine, je puisse faire
de grandes économies sur les fourrages. Ainsi j'entends que les dépôts de tous
ceux de mes régiments qui restent à l’armée d’Allemagne n'aient pas
plus de 50 chevaux, l'un portant l'autre; en supposant trente dépôts, cela ne
ferait pas 1,500 chevaux à nourrir en France pour mes régiments de l'armée
d'Allemagne. Quant aux hommes, les dépôts devront en avoir tout au plus le
double.
Après la cavalerie de l'Allemagne vient celle de
l'Italie. J'ai des régiments de cavalerie dans mon armée d'Illyrie; j'en ai
dans mon armée d'Italie. Mon intention est, en général, de tenir tous mes
dépôts de cavalerie dans les Alpes plus nombreux et les escadrons que j'ai en
Italie sur un plus haut pied, vu les difficultés de leur remonte. Je n'entends
pas payer les fourrages plus cher en Piémont et en Italie que dans les autres
pays. Les fourrages, en Italie, sont abondants; ce ne peut être que par abus
qu'on en porte le prix si haut. Mon intention est d'autoriser les préfets à les
faire fournir au taux de dix-huit sous, au plus d'un franc, et par réquisition,
s'il est nécessaire.
Je serais porté à placer en Normandie les quatre dépôts
de cuirassiers que j'ai en Piémont; ils seraient là plus près pour leur
remonte, et j'ai d’ailleurs toujours besoin de ressources et de cavalerie
sur la côte.
J’ai en Espagne vingt-cinq régiments de dragons. Je
n'entends pas qu'ils aient, en France, plus de 25 à 50 chevaux à leur dépôt.
Même observation pour les douze régiments de hussards et de chasseurs qui sont
en Espagne; et, comme en Espagne la nourriture des chevaux n'est pas à mes
frais, il faut en général me proposer d'y envoyer tous les chevaux qui sont
disponibles dans les dépôts. Là ils seront utiles, ne me coûteront rien, et il
en résultera de grandes économies pour mes finances. J'ai quatre-vingts
régiments de cavalerie; c'est quatre-vingts dépôts qui, à raison de 40 chevaux
l'un portant l’autre, ne feront pas plus de 3 à 4,000 chevaux à nourrir;
ce qui réduira la masse de fourrage de 15 millions à moins de 4 millions pour
1810. Et c'est une grande et importante économie.
Je crois avoir augmenté d'une 9e compagnie tous mes
régiments de dragons et de cavalerie légère. Il me semble qu’il serait
convenable de réformer pour l'année prochaine ces 9e compagnies, car
les régiments de cavalerie que j'ai en Allemagne seront suffisamment forts à
quatre escadrons, puisqu'ils y sont dans l'état de paix. Les régiments qui sont
en Espagne sont si nombreux, qu'ils seront suffisamment forts à trois
escadrons.
Je pense qu'il serait également nécessaire de réformer le
5e escadron de cuirassiers; ce qui nous replacerait tout à
fait sur le pied de paix.
Cette lettre est commune aux ministres de la guerre et de
l'administration de la guerre. Entendez-vous donc tous deux sur ce qu'elle
contient, et présentez-moi un rapport sur les augmentations que l'état de
guerre a nécessitées, un état de situation générale de ma cavalerie sous le
triple rapport des hommes, des chevaux et des harnais, et enfin un projet de
décret qui remplisse les vues que je viens de vous indiquer.
Trianon, 18 décembre 1809
Aux ministres de la guerre et de l’administration
de la guerre, à Paris
Je vous ai déjà fait connaître, par ma lettre de ce jour,
les réformes que j'espère opérer pour l'année prochaine sur la masse des
remontes, sur celle des fourrages et sur le personnel, en supprimant tous les
cadres que l'état de guerre a fait créer en augmentation de l'état ordinaire. Je
me propose de faire une autre importante économie, c'est sur la conscription; à
moins d'événements extraordinaires, je ne compte pas en lever. Il est un grand
nombre d'autres économies sur lesquelles j'appelle votre attention, et qu'il
est urgent de prendre en haute considération, vu l'impuissance où mes finances
se trouvent de subvenir à tant de dépenses.
Faites-moi un rapport sur toutes les économies possibles
dans l'état de sécurité où la paix de Vienne nous place avec l'Allemagne, et
dans l'état de guerre où nous restons avec l'Espagne. Une éminente économie
doit être faite sur les employés d'administration. Je crois que rien que leur
solde pour l'armée d'Allemagne s'élève à près de six millions. Mon intention
est de ne laisser l'année prochaine en Allemagne que le 3e corps du duc
d'Auerstaedt, les quatorze régiments du duc de Rivoli, les quatorze régiments
de cuirassiers et six régiments de cavalerie légère, et même, dans le courant
de l'année prochaine, je me déciderai sans doute à faire rentrer les quatorze
régiments du duc de Rivoli ou le 4e corps. Il faut donc diminuer autant que
possible les employés ; il faut supprimer tout ce qui tient à l'état de guerre,
tout ce qui est provisoire, les adjoints aux commissaires des guerres, les
commandants de place, les états majors, etc., et enfin réduire tout à l'état
ordinaire.
Toute l'armée d'Italie doit être mise sur le pied de
paix.
L'armée d'Illyrie doit être mise sur un demi-pied de
paix, en portant l'économie sur toutes les branches d'administration.
Le train d'artillerie sera un des articles d'économie le
plus important; peut-être sera-t-il possible de l'employer à faire l'évacuation
de l'artillerie que nous avons à Magdeburg et dans les autres places en
Allemagne: cela économiserait d'autres dépenses et me le tiendrait toujours
disponible.
Les équipages militaires peuvent aussi être employés à
l'évacuation des malades et à d'autres services qui seraient de véritables
objets d'économie. Il faut vous occuper de me suggérer tous les moyens
d'économie qui tiennent à la nouvelle position politique où je me trouve. Il
faut surtout me proposer des inspecteurs pour inspecter tous les dépôts
d'infanterie, en renvoyer tous les hommes susceptibles de réforme qui les
embarrassent, et remettre le tout sur un pied convenable.
Les états-majors seront aussi un objet important. Il est
une infinité de généraux qui ont été mis en activité par suite des
circonstances; tout doit reprendre l'organisation de paix. Il faut enfin
obtenir la plus grande économie, car je ne pense pas qu'il me soit possible de
donner pour 1810 plus de 190 millions au ministère de la guerre et plus de 130
millions à l'administration de la guerre; ce qui fera 320 millions pour les
deux ministères de la guerre, indépendamment de ce qui sera nourri en Espagne,
à Naples, en Illyrie, dans le pays de Hanovre et dans les garnisons de l'Oder.
Trianon, 19 décembre 1809, 6 heures du soir
A l’Impératrice Joséphine, à Malmaison
La reine de Naples, que j’ai vue à la chasse, au
Bois de Boulogne, où j’ai forcé le cerf, m’a dit qu’elle t’avait
laissée hier, à une heure après-midi, bien portante.
Je te prie de me dire ce que tu as fait aujourd’hui.
Moi, je me porte fort bien. Hier, quand je t’ai
vue, j’étais malade. Je pense que tu auras pu te promener.
Adieu, mon amie.
Napoléon
(Lettres à Joséphine)
Trianon, 19 décembre 1809, 7 heures du soir
A l’Impératrice Joséphine, à Malmaison
Je reçois ta lettre, mon amie. Savary me dit que tu
pleures toujours; cela n'est pas bien. J'espère que tu auras pu te promener
aujourd'hui. Je t'ai envoyé de ma chasse. Je viendrai te voir lorsque tu me
diras que tu es raisonnable et que ton courage prend le dessus.
Demain, toute la journée, j'ai les ministres.
Adieu, mon amie, je suis triste aussi aujourd'hui; j'ai
besoin de te savoir satisfaite el d'apprendre que tu prends de l'aplomb. Dors
bien.
Trianon, 19 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, vous répondrez au prince
Kourakine de vive voix, que je sais que l'intention de l'empereur Alexandre est
de ne pas avoir de ministre près la cour de Sardaigne.
Trianon, 19 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, faites-moi un rapport sur la
manière de terminer mes différends avec le roi de Westphalie, et voyez son
ministre pour cet objet.
Voici les bases de cet arrangement: 1 ° Je n'aurais pas
de difficulté à remettre Magdeburg au Roi; l'artillerie et toutes les munitions
qui sont dans la place seraient évaluées, et la valeur m'en serait payée par le
Roi. 2° Tout ce que le Roi me doit pour les contributions serait consolidé;
l'intérêt m'en serait payé à cinq pour cent, et le remboursement se ferait en
dix ans, comme il l'a proposé; le produit de la vente des objets d'artillerie
provenant de Magdeburg serait joint à cette dette. 3° Les biens donnés à mes
généraux, que le Roi aurait pris, seront restitués par lui en d'autres biens ou
consolidés sur son trésor. 4° Je céderai au Roi tout le Hanovre. Ce pays fera
partie de la Confédération, et le Roi en touchera les revenus à dater du 1er
janvier. Mais, pendant tout le temps que durera la guerre avec l'Angleterre, je
veux n'avoir rien à perdre. Le Roi entretient 12,500 hommes, ce qu'il est
obligé de faire par un traité; il en entretiendra 12,000 autres pour le
Hanovre; ce qui fera 20 à 25,000 hommes.
Le contingent du Roi sera augmenté et porté à 36,000 hommes.
Trianon, 19 décembre 1809
A M. Maret, duc de Bassano, ministre secrétaire d’État,
à Paris
Convoquez le conseil des ministres pour demain à onze
heures du matin. Prévenez les ministres des finances et du trésor public
d'apporter ce qui est relatif au budget et au compte des finances, que
j'arrêterai après le conseil des ministres.
Portez-moi aussi demain: 1° tout ce qui est relatif aux
jugements du conseil des prises, aux marchandises en séquestre dans les ports,
qui se gâtent ; si vous n'avez pas tous les renseignements, demandez-les au
ministre des finances; 2° tout ce qui est relatif aux listes et au grand décret
de M. Cambacérès; 3° tout ce qui est relatif aux quarante chambellans que j'ai
à nommer; 4° demander à l'archichancelier, à l'architrésorier ou au ministre
des finances, de m'apporter ce qui a été décidé, dans les conseils tenus chez
eux, pour la vente du domaine à Rouen et pour celle des biens des religieuses
et moines.
Vous avez d'autres objets sur lesquels je vous ai demandé
des rapports; recherchez tout cela et portez-le-moi, voulant mettre en règle
tout ce qui traîne.
Demandez au sieur la Bouillerie un rapport général sur la
caisse de l'extraordinaire, et qu'il m'apporte cela jeudi à midi pour
travailler et donner mes ordres.
Renvoyez-moi les états relatifs aux biens donnés en
Allemagne et à qui je les ai donnés. J'ai besoin que cet état reste dans mon
secrétariat, parce que j'ai souvent besoin de le consulter. Donnez une petite
instruction à votre frère sur la manière dont il doit me rendre ses comptes
vendredi, afin que je sache à quoi m'en tenir sur cette administration.
Trianon, 19 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée
d’Espagne, à Trianon
Mon Cousin, je suis instruit que des bâtiments américains
sont arrivés à Saint-Sébastien. Donnez l'ordre au général Loison de faire
mettre le scellé sur les bâtiments américains qui seraient arrivés ou qui
arriveraient à Saint-Sébastien, à Bilbao et à Santander, et de confisquer les
cargaisons. Tout cela doit être considéré comme de bonne prise.
Trianon, 19 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée
d’Espagne
Mon Cousin, Girone a capitulé. Il est probable que déjà
le roi d'Espagne en est instruit. Faites cependant connaître cette nouvelle au général
Loison, au duc de Dalmatie et sur toute la ligne.
Trianon, 19 décembre 1809
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à
Paris
Monsieur le Duc de Feltre, faites connaître au duc de
Castiglione ma satisfaction sur la prise de Girone, et le regret que j'ai que
mes troupes n'aient pas été depuis longtemps commandées
par lui. Donnez-moi des renseignements sur la santé de ce maréchal, et s'il est
en état de faire un service actif. Mandez-lui par un officier, qui vous
rapportera la situation de l'armée et des renseignements sur tout ce qui peut
m'intéresser dans le pays, qu'il se porte sur Barcelone pour débloquer la
ville, la ravitailler et influer dans les affaires générales.
Il est bien important de prendre le fort de Hostalrich,
afin d'avoir sa communication entre la France et Barcelone bien assurée.
Trianon, 19 décembre 1809
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à
Paris
Je donne ordre que la carte d'Allemagne qui a été faite
au Dépôt de la guerre y soit renvoyée. Elle est si mauvaise que je n!en fais
aucun cas; je lui préfère la première carte prise chez un libraire. Ce mélange
de parties bonnes et mauvaises est malheureux, pire que si toutes les parties
étaient mauvaises, car cela n'est propre qu'à compromettre dans des opérations
importantes; je ne connais rien de plus dangereux. En fait de cartes, il n'en faut
que de bonnes, ou bien il faudrait une couleur sur les parties douteuses ou
mauvaises, qui indiquât qu'il ne faut pas s'y fier. Je ne suis pas davantage content
de celle que vous me présentez pour les quatre départements du Rhin. Je la veux
sur l'échelle de celle de Cassini, et je me moque des divisions décimales. J'ai
demandé une adjonction à la carte de Cassini, et vous me proposez une carte
d'un huitième plus petite. Le Dépôt de la guerre est mal mené; on m'y dépense
beaucoup; on travaille aussi beaucoup et on ne me satisfait pas. J'ai décidé,
il y a déjà longtemps, que je ne voulais pas qu'on me fit
le cadastre des quatre départements, mais qu'on me fît seulement une carte
comme celle de Cassini.
Trianon, 19 décembre 1809.
A M. Fouché, duc d’Otrante, ministre de la police générale
Nos journaux copient tout ce qu'impriment les journaux de
Vienne; le fait est qu'ils disent tout l'opposé de ce qui est. Avec un simple
commis on fait chanter dans l'Europe tout ce qu'on veut. Prévenez les
journalistes de ne pas donner dans ce piége.
Trianon, 19 décembre 1809
A M. Fouché, duc d’Otrante, ministre de la police générale,
à Paris
Donnez ordre que le nommé Kolb, libraire à Spire,
directeur et imprimeur d'un journal allemand, soit arrêté sur-le-champ, que le
scellé soit mis sur ses presses et que son journal soit supprimé. Vous ferez venir
ce sieur Koll dans les prisons de Paris.
(Du Casse)
Trianon, 19 décembre 1809
A M. Gaudin, duc de Gaète, ministre des finances, à Paris
Faites venir demain au conseil celui de vos secrétaires
qui a été à Rome et qui a fait le travail sur les finances des États romains,
et qu'il apporte des renseignements, 1° sur les douanes; je vois qu'il n'en est
point question au budget; 2° sur les domaines nationaux, car je vois qu'il n'en
est pas question au budget, de sorte que je ne sais sur quoi compter; 3° sur un
projet de budget général de la ville de Rome et des États romains; 4° le projet
qu'avait fait la Consulte et qui augmentait les revenus de Rome. Je me suis
refusé à l'adopter parce que nous étions en temps de guerre. Je n'aurais pas de
difficulté aujourd'hui à mettre ces finances sur un meilleur pied, afin d'en
finir tout d'un coup.
Me mettre sous les yeux ce qui est relatif à la partie de
la dette que doit nous payer l'Italie. Envoyez chercher demain le sieur Prina,
ministre des finances du royaume d'Italie; entendez-vous avec lui et
présentez-moi un projet de convention.
Trianon, 19 décembre 1809
Au maréchal Augereau, duc de Castiglione, à Fornells
Je reçois votre lettre du 11 décembre, avec la
capitulation de Girone, que me remet votre aide de camp. J'ai double
satisfaction de celte nouvelle, à cause de l'importance de la place et parce
que c'est vous qui l'avez prise. Il est fâcheux que vous n'ayez pas commandé
dès l'origine, mes affaires auraient été mieux menées. Tâchez de vous bien
porter et d'achever la conquête de la Catalogne. Ne doutez jamais, surtout, de
mon estime. J'ai accordé à votre aide de camp ce que vous avez demandé pour
lui. Portez-vous le plus tôt que vous pourrez sur Barcelone pour débloquer
cette ville. Tout ce qui de Valence et des autres provinces s'est porté sur
Barcelone a été obligé de rétrograder.
Trianon, 19 décembre 18ß09
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée
d’Espagne, à Trianon.
Mon Cousin, faites connaître au duc de Dalmatie que j’apprends
avec indignation qu’une partie des prisonniers faits à la bataille d’Ocana
avaient été relâchés, et même qu’on avait remis les armes à la main à
plusieurs ; que quand je vois une pareille conduite, je me demande :
est-ce trahison ou imbécillité ? N’y a-t-il donc que le sang français
qui doit couler sans regret et sans vengeance en Espagne ?
(Du Casse)
Trianon, 20 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée
d’Espagne, à Trianon
Mon Cousin, écrivez au général Suchet qu'il ne fait pas
assez d'attention aux brigands qui sont dans la Navarre; que je vois avec peine
qu'il leur ait laissé prendre Tudela; que, quoiqu'ils n'aient occupé que
momentanément celle ville, c'est un grand mal, et qu'un point comme celui-là
devrait être à l'abri de toute attaque.
Trianon, 20 décembre 1809.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à
Paris
Monsieur le Duc de Feltre, j'approuve que le général
Raynaud soit employé dans la division Clauzel. Le général Fabre n'est pas en état
de servir.
Je ne connais point le général Vachot, mais il paraît que
cet officier n'a pas servi depuis 1803; il n'est pas accoutumé à la grande
guerre ; j'en ai de meilleurs.
(Du Casse)
Trianon, 21 décembre 1809
NOTE POUR LE MINISTRE DE L'INTÉRIEUR.
La réponse au mémoire a déjà été faite de Vienne.
Un bâtiment américain, partant de la
Des décrets de Berlin et de Milan ont déclaré dénationalisé tout bâtiment qui aurait touché en Angleterre,
ou qui aurait été visité en mer par les Anglais. Immédiatement après, les
Américains ont mis chez eux un embargo général. Ils ont ensuite levé l'embargo
et l'ont remplacé par un empêchement.
Sous ce nouvel ordre de choses, ils permettaient aux
bâtiments américains d'aller en Hollande, en Espagne et dans le royaume de
Naples, et ils défendaient toute expédition dans les ports de France et
d'Angleterre. Sa Majesté a usé de son droit d'influence sur ses voisins, parce
qu'elle ne voulait pas qu'ils fussent traités autrement que la France, et elle
a fait séquestrer les bâtiments destinés pour leurs ports.
On a déclaré que, s'ils voulaient nous traiter comme nos
voisins, leur commerce n'éprouverait aucune difficulté de notre part. Tout bâtiment
américain venant d'Amérique, n'ayant point été visité en mer et n'ayant pas
touché en Angleterre, sera bien reçu dans les ports de France.
Trianon, 21 décembre 1809
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée
d’Espagne
Mon Cousin, passez le plus tôt possible la revue des
écoles de Saint-Cyr et de Saint-Germain.
Ayez soin de bien vérifier que tout s'y fait selon les
règlements, et que ces écoles ne sont pas des écoles de théorie, mais de
pratique; que les cours de l'administration et de l'artillerie sont faits et
imprimés, et que les élèves savent tout ce que savent un sergent d'artillerie
et un garde-magasin.
Vous me ferez connaître si le projet adopté pour les bâtisses
de Saint-Germain est le plus convenable; vérifiez cela sur les lieux. Voyez
pourquoi il n'y a que soixante individus et pas de chevaux.
Proposez-moi de mettre cette école dans la plus grande
activité. La pension est de 2,400 francs. L'administration de l'école doit avec
cela pourvoir à tout; mais elle peut avoir besoin d'avances. Je ne verrais pas
d'inconvénient à lui faire faire une avance, moyennant que, sur la pension de
chaque pensionnaire, on fît une retenue pour rembourser les avances faites. Il
faut cependant que vos calculs reposent sur ce principe: 400 élèves dont 300
payants, et 100 élèves du gouvernement qui ne doivent rien coûter. Ainsi les
2,400 francs seraient réduits à 1,800 francs, puisqu'un quart des élèves ne
payerait pas.
Mais c'est encore trop. En mettant 800 francs pour
l'élève et les professeurs, 400 francs pour le cheval, il resterait encore 600
francs à retenir, jusqu'à ce que les 100,000 écus pour les frais de
l'établissement, les 100,000 écus pour achat de chevaux, ameublement, et les
100,000 écus pour bâtiments soient remboursés. Ce serait donc à peu près un
million à retenir avec les 600 francs. Une retenue de 200,000 francs par an
rembourserait ce million en cinq ans.
Vérifiez si les formes de comptabilité sont
rigoureusement suivies; car ce n'est pas pour les dépenses qu'on a exigé 2,400
francs, mais parce qu'on n'a voulu avoir que des jeunes gens très riches. Il
faut que le gouverneur compte de clerc à maître avec le ministre, et qu'il
tienne compte du surplus.
Vous me présenterez sur cela un rapport que j'enverrai au
ministre, pour qu'il me propose un projet de décret.
Trianon, 21 décembre 1809
A l’Impératrice, à Malmaison
Je voulais venir te voir aujourd’hui, mon amie ;
mais je suis très occupé et un peu indisposé. Je vais cependant aller au
conseil.
Je te prie de me dire comment tu te portes.
Ce temps est bien humide et pas du tout sain.
Napoléon
(Lettres à Joséphine)
Trianon, 21 décembre 1809, au soir
A l’Impératrice, à Malmaison
Hortense, que j’ai vue cet après-midi, m’a
donné, mon amie, de tes nouvelles. J’espère que tu auras été voir aujourd’hui
tes plantes, la journée ayant été belle.
Je ne suis sorti qu’un instant, à trois heures,
pour tuer quelques lièvres.
Adieu, mon amie ; dors bien.
Napoléon
(Lettres à Joséphine)
Trianon, 22 décembre 1809, 8 heures
A l’Impératrice Joséphine, à Malmaison
Je voulais venir te voir aujourd’hui, mais je ne le
puis ; ce sera, j’espère, pour demain. Il y a bien longtemps que tu
ne m’as donné de tes nouvelles.
J’ai appris avec plaisir que tu t’étais
promenée dans ton jardin, pendant ces froids.
Adieu, mon amie, portes-toi bien et ne doutes jamais de
mes sentiments.
Napoléon
(Lettres à Joséphine)
Trianon, 22 décembre 1809 (date présumée)
A l’Impératrice Joséphine, à Malmaison
Je serais venu te voir aujourd'hui si je n'avais dû aller
voir le roi de Bavière, qui vient d'arriver à Paris. Je serai chez lui ce soir
à huit heures, el de retour à dix. J'espère te voir demain, et te trouver gaie
et d'aplomb. Adieu, mon amie.
Trianon, 22 décembre 1809
Au comte Daru, intendant général de la Maison de l’Empereur,
à Paris
Monsieur le Comte Daru, l'intendance de la liste civile
se compose non seulement des biens de la Couronne, mais encore des prétentions
de la Couronne et de l'administration des duchés, comtés, baronnies et autres
donations faites avec clause de réversibilité à la Couronne.
Il est donc nécessaire que les copies de toutes les
donations faites par les empereurs et réversibles à la Couronne existent dans
un bureau particulier de la liste civile, et que vous me fassiez connaître de
quoi elles se composent jusqu'à présent, ainsi que les extinctions qui ont eu
lieu et dont le produit doit être versé dans la caisse de la Couronne, jusqu'à
ce que cela soit rendu. Faites-moi un rapport sur la constitution du duché de
Guastalla et sur celle des trois principautés, des duchés et du duché ou comté
que j'ai institué pour la fille du prince de Lucques. Établissez en conséquence
dans votre intendance un bureau ad hoc, et faites les démarches nécessaires
pour faire verser dans la caisse de la Couronne le produit des extinctions qui
ont eu lieu.
Pour procéder à cela avec plus d'ordre, je crois devoir
vous faire connaître mes idées; elles serviront de hase à la rédaction du sénatus-consulte.
La Couronne a trois espèces de domaines : 1° les domaines
de la Couronne, qui se composent de ce qui appartient à la Couronne et de ce
qui est réversible; 2° les domaines extraordinaires; le sieur la Bouillerie en
est en quelque sorte l'intendant; ces domaines se composent de ce que
l'Empereur a en pays conquis, dont il n'a pas disposé, des contributions et prétentions
de cette espèce ; 3° le troisième objet se compose du domaine prive de
l'Empereur, c'est-à-dire de ce qui appartient à l'Empereur à titre privé. Comme
je n'ai pas d'intendant pour cette partie, parce qu'elle est trop peu considérable,
c'est vous qui en remplissez les fonctions; c'est un objet à part. Le palais de
l'Elysée et une terre en Poitou, c'est à peu près tout ce qui forme le domaine privé de l'Empereur.
J'ai fait donner beaucoup d'argent pendant la dernière campagne
d'Allemagne, sur les fonds de la cinquième coalition, pour les blessés, et pour
le budget des dépenses extraordinaires de mes écuries. J'ai aussi à réclamer
des avances, à peu près pour les mêmes objets, sur les fonds des précédentes
coalitions. Voyez le duc de Frioul et MM. Estève et Nansouty, et présentez-moi
un projet pour faire restituer ces sommes à la liste civile et mettre tout cela
parfaitement en règle.
Trianon, 22 décembre 1809
A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Paris
Mon Fils, je vous envoie une note sur ce qui vous
concerne; faîtes-moi connaître votre opinion.
« Avant
de donner une principauté au prince Eugène, il faut que son sort soit fixé en
Italie et qu'il y jouisse d'un apanage d'un million de rente, qu'on pourrait
composer de cette manière: 500,000 francs en domaines avec la propriété de la
villa Bonaparte, avec les dépendances et l'ameublement existant; 500,000 francs
en terres, en choisissant de bonnes campagnes et de bonnes fermes. Le prince
Eugène posséderait cet apanage sa vie durant; le douaire de la princesse sa
femme y serait aussi; le tout selon les lois qui régissent les apanages des
princes français. Comme il faut prévoir le cas extraordinaire et inattendu où
l'Italie manquerait à la France, on propose de constituer en France, en faveur
du vice-roi, une principauté comme celle de Wagram, qui serait appelée
principauté de Raab, et d'y assigner pour maison celle du vice-roi à Paris. Il
ne sera pas difficile de trouver avec le temps une belle terre.
À cette
principauté seraient attachés 10 millions de capital formant 500,000 francs de
rente; ces 10 millions se composeraient de 2 millions en Saxe et 2 millions sur
le territoire de Danzig, de 2 millions. . . (non précisé sur la minute). Les 300,000 francs que
ces 6 millions rendraient chaque année seraient employés en achats de terres en
France. Il y serait joint 2 millions sur le canal du Midi et 2 millions sur
l'emprunt de la ville de Paris, produisant 200,000 francs de rente; ce qui
compléterait les 500,000 francs.
Le
vice-roi jouirait donc dès à présent de 1,500,000
francs de rente; mais, comme il n'en a pas besoin, on les emploierait, ou en
rentes sur le grand-livre de France, ou en achats de terres qui seraient
jointes au domaine privé du vice-roi, destiné à fournir la dot de ses filles. En
six ans, ces 1,500,000 francs seraient portés à 9
millions, et, avec les intérêts des intérêts, à plus de 10 millions; ce qui
ferait 2 millions de rente.
Pour la
sanction de ces dispositions, il faut: 1° un décret royal et une communication au
Sénat du royaume d'Italie; 2° une lettre patente et un message au Sénat de
France.
Comme
tout porte à penser que le vice-roi gardera encore vingt ans la vice-royauté d'Italie,
il placera en France 30 millions, et, avec les intérêts des intérêts, 40
millions; ce qui lui ferait de 3 à 4 millions de rente. »
Trianon, 22 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, écrivez au sieur Talleyrand de
poursuivre avec la plus grande activité les chefs des partisans des Autrichiens
dans les Grisons, et de demander leur exil. Donnez ordre au sieur Talleyrand de
prendre possession de la seigneurie qui m’appartient dans les Grisons et
d’y mettre provisoirement un bailli qui soit contraire à l’Autriche.
Faites mettre dans le Moniteur les pièces relatives à l’emprunt de la
Russie, comme le demande le prince Kourakine.
(Du Casse)
Trianon, 24 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, il est temps de terminer les
affaires d'Allemagne. Je vous écris la présente pour vous autoriser à entrer en
négociation avec les ministres des différents princes de la Confédération sur
les bases que je vais développer ci-dessous.
Je vous ai déjà fait connaître mes intentions pour le
royaume de Westphalie; le sort du Hanovre se trouvera par là fixé. Si quelques
parties du Hanovre convenaient aux villes hanséatiques ou à quelques autres
États, vous pourriez me proposer de les leur accorder et de les extraire de la
Westphalie.
Mon intention est de donner Hanau et Fulde au prince
Primat.
Ces deux pays sont chargés de 1,650,000
francs de dotations. Une partie des domaines est déjà prise et affectée à ce
service. Vous prendrez à cet égard des informations auprès du ministre des finances.
Cette partie n'est susceptible d'aucun changement. Quant
au reste, et spécialement ce qui est dû pour la dotation des principautés de Wagram et
d’Eckmühl (ce qui fait environ 1,100,000 francs
de revenu), le prince Primat pourra donner en échange, premièrement l'octroi du
Rhin; je vois dans votre rapport que vous l'évaluez à 750,000 francs; cet octroi
devra être cédé libre au prince de Wagram, et les domaines de Fulde et de Hanau
devront pourvoir au surplus nécessaire. Le prince Primat doit abandonner Ratisbonne,
qui, réellement, ne peut plus appartenir à la Bavière. Quant au successeur du
prince Primat, lorsque son État sera une fois constitué, il est dit dans l'acte
de la Confédération que je dois le nommer; mais je ne veux point, pour l'avenir,
nommer un prêtre; c'est contre nos principes: les prêtres ne doivent point être
souverains.
Proposez-moi la cession des enclaves de Fulde et de Hanau
(qui conviendraient à la Maison de Nassau ou au grand-duc de Hesse-Darmstadt.
Je donne sans difficulté Erfurt au roi de Saxe, moyennant
que les dotations que j'y ai faites soient confirmées, et que le Roi paye l'équivalent
en revenu, pour les biens qui ne sont pas encore donnés à des particuliers.
Je donnerai également le comté de Katzenelnbogen à la Maison
de Nassau, en me réservant les biens patrimoniaux, ou l'équivalent en capitaux
payables en bons portant intérêt et remboursables successivement selon les
facultés du prince.
Je donnerai à la Bavière le pays de Salzburg et tous les
pays cédés par l'Autriche sur la rive droite de l'Inn, ainsi que la principauté
de Bayreuth, sous la condition que je me réserverai des domaines dans le pays
de Salzburg pour un capital de 10 millions, et dans la principauté de Bayreuth
pour 20 millions; en tout pour un capital de 30 millions, qui pourront être également
payables en bons, comme il avait été établi. Je donne, de plus, Ratisbonne à la
Bavière, en renouvelant les stipulations fixées pour la famille du prince Primat
par le traité d'Erfurt. Le Tyrol allemand peut bien difficilement aller avec la
Bavière; mais, si la Bavière croit pouvoir le soumettre, je ne m'y oppose pas.
En tout cas, cependant, il faut que la Bavière me cède le Tyrol italien avec une
communication de Villach à Brixen et à
Par ce moyen, je me trouverai avoir disposé de toutes mes
possessions en Allemagne; et, mes affaires finies avec la Prusse, je pourrai en
retirer toutes mes troupes.
Il faudra régler une augmentation de tous les
contingents, et porter celui de la Bavière à 40,000 hommes, celui du Wurtemberg
à 15,000, et celui de Bade à 10,000.
Vous aurez soin de bien expliquer, dans le traité avec le
prince Primat, qu'il n'est pas nécessaire que son successeur soit un prêtre.
Faites-moi un plan de négociations, d'après lequel vous commencerez
par demander davantage pour vous relâcher ensuite, sans dépasser cependant les termes
contenus dans cette lettre, qui sont le minimum de ce à quoi je puis consentir.
Vous verrez s’il est convenable de faire payer quelque chose au Wurtemberg
et à Bade pour ce qui leur sera donné.
Quant aux villes hanséatiques, ce qu'on me propose me
paraît assez raisonnable. Le principe est que je puisse y faire exécuter
exactement mes ordres contre les Anglais, en cas de guerre maritime. Faites
dresser un traité avec les députés de ces villes, dans le sens de ce qu'a présenté
Reinhard. Je vous renvoie le portefeuille qui contient ce travail sur les
villes hanséatiques.
Trianon, 25 décembre 1809
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à
Paris
Vous recevrez demain le décret d’organisation des
provinces d'Illyrie, avec un autre décret sur les mêmes provinces. Envoyez le décret
d’organisation au duc de Raguse par un officier intelligent, qui restera
dans le pays tout le temps nécessaire pour parcourir la Croatie et rapporter des
renseignements sur la marche du gouvernement et l’esprit des peuples.
Trianon, 25 décembre 1809
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à
Paris
Monsieur le Duc de Feltre, j'ai fait vérifier le tracé
des nouvelles frontières de la Confédération du Rhin dans la haute Autriche. Le
village de Strass dont il est question dans le traité n'est point celui qui se
trouve entre Efferding et Linz, ni celui qui est le plus voisin de Passau;
c'est celui qui, sur la petite carte de Smith, est indiqué par erreur Szal, car,
sur la grande carte de la Haute Autriche, il est réellement écrit Strass.
Ainsi donc la frontière doit commencer au Danube,
au-dessous de ce village de Strass, au confluent de la petite rivière, la
remonter jusqu'à Santa-Agatha, descendre par une ligne sur la rivière Aschah,
remonter cette rivière jusqu'au village de Dittersdorf, prendre à gauche l'affluent
qui vient de Wœdling, arriver à Grieskirchen, suivre la rivière et son
affluent jusque près de Meggenhofen, passer à Hœrt, et de là arriver à
Schwannstadt par la ligne la plus courte qu'indique le chemin de traverse. Il
est donc clair qu'il n'est point question du Jeding qui se trouve le plus près
de Lambach.
Je vous envoie une carte de Smith sur laquelle la
nouvelle frontière avait été tracée par mon ordre à Schönbrunn même, pendant la
discussion du traité de paix; les difficultés survenues relativement au
territoire des villages doivent cesser de même, puisque c'est presque toujours
le cours des rivières ou une route qui détermine la frontière.
Trianon, 25 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, donnez ordre au sieur Bacher
et à tous mes agents en Allemagne de faire arrêter l'individu dont il est question
dans sa dépêche du 17. Mandez au roi de Hollande, que voilà une nouvelle insulte
que se sont permis ses officiers et que si sous vingt-quatre heures justice
n'est pas faite de l'officier hollandais qui a insulté mon pavillon à bord du
corsaire le Tilsit, mon ministre a ordre de quitter La Haye.
(Du Casse)
Paris, 25 décembre 1809
Au Landamman de la Suisse, à Berne
Monsieur le Landamman, les témoignages d'affection que vous
m'offrez, au nom des Suisses, me seront toujours chers. J’ai réussi dans
la guerre d'Autriche à couvrir au loin leurs frontières et je mets au rang de
mes premiers succès la sécurité dont ils ont joui. Il leur faut, pou le bonheur
de leur pays comme pour leur gloire, une
neutralité qui n'éteigne pas cet esprit militaire qu'ils ont hérité de leurs
ancêtres. J'aime à protéger la paix de leurs cantons comme j'aime à compter
leurs soldats dans mes armées et ma bienveillance envers eux s'accroîtra
toujours avec les services que j'en recevrai.
Trianon, 26 décembre 1809
A l’Impératrice, à Malmaison
Je me suis couché hier après que tu as été partie, mon
amie. Je vais à Paris.
Je désire te savoir gaie. Je viendrai te voir dans la
semaine. J’ai reçu tes lettres, que je vais lire en voiture.
Napoléon
(Lettres à Joséphine)
Paris, 27 décembre 1809, midi
A l’Impératrice Joséphine
Eugène m'a dit que tu avais été toute triste hier; cela
n'est pas bien, mon amie, c'est contraire à ce que tu m'avais promis.
J'ai été fort ennuyé de revoir les Tuileries; ce grand
palais m'a paru vide, et je m'y suis trouvé isolé.
Adieu, mon amie; porte-toi bien.
NAPOLÉON.
Paris, 27 décembre 1809, six heures du soir
A l’Impératrice Joséphine
Mon Amie, je ne vois pas d’inconvénient que tu reçoive
le roi de Wurtemberg quand tu voudras. Le roi et la reine de Bavière doivent
aller te voir demain après-midi.
Je désire fort aller à Malmaison ; mais il faut que
tu sois forte et tranquille : le page de ce matin m’a dit qu’il
t’a vue pleurer.
Je vais dîner tout seul.
Adieu, mon Amie ; ne doutes jamais de mes sentiments
pour toi ; tu serais injuste et mauvaise.
Napoléon
(Lettres à Joséphine)
Paris, 27 décembre 1809
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à
Paris
Écrivez au général Marmont qu'il doit prendre des mesures
pour mettre les troupes qui sont dans la Croatie sur le pied de paix, faire payer
à chacun ce qui lui revient, et faire cesser les fourniture arbitraires qui
pèsent sur les habitants.
Paris, 27 décembre 1809.
Monsieur le Duc de Feltre, je suis instruit qu’un
nommé Alvarez qui commandait à Girone a déjà prêté serment au roi Joseph. Faites
vérifier ce fait et, s'il est vrai, faites arrêter cet Alvarez et traduisez-le
devant une commission militaire.
(Du Casse)
Paris, 27 décembre 1809
A Joachim Napoléon, roi des Deux-Siciles, à Paris
Je reçois la lettre de Votre Majesté du 27. Ce que Votre Majesté
doit, soit au trésor, soit à la Légion d'honneur, soit à la Couronne, doit être
payé rigoureusement. L'Allemagne étant pacifiée, Votre Majesté doit restreindre
ses dépenses en diminuant son recrutement, car la force des États consiste à
avoir des troupes bonnes et fidèles plutôt que beaucoup de troupes.
Paris, 28 décembre 1809.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée
d’Espagne, à Paris
Mon Cousin, je vois par l'état que vous m'avez remis que
la première division de la Garde sera à Bordeaux du 6 au 15 janvier, et qu'à la
même époque le 8e corps sera réuni également à Bordeaux. Il est donc nécessaire
que vous me présentiez un projet pour que tous les corps qui composent le 8e
corps prennent deux jours de séjour à Bordeaux et continuent leur marche sur
Bayonne. Si même plusieurs de ces corps pouvaient ne pas passer par Bordeaux,
ce serait utile pour cette ville.
Par ce moyen, du 20 au 30 janvier, les divisions Dufour
et Lagrange pourraient entrer en Espagne.
Aussitôt que les 1er, 2e, 3e et 4e régiments de marche
d'infanterie seront arrivés à Périgueux, Angoulême, Limoges et Châteauroux, envoyez
un de vos aides de camp, colonel, pour en passer la revue.
Il pourra être arrivé le 6 ou le 7 janvier à Châteauroux,
le 10 à Limoges, le 14 ou le 15 à Angoulême, le 16 ou le 17 à Périgueux.
Faites-moi connaître la situation des bataillons auxiliaires
qui doivent se former à Versailles du 29 au 31 décembre.
Donnez ordre au général la Riboisière d'envoyer à
Poitiers des officiers pour surveiller la remise des 2,000 mulets et le passage
des différents détachements du train.
Donnez ordre au duc d'Abrantès de faire en sorte que son
chef d'état-major soit rendu à Bordeaux le 15, et à Bayonne le 20, et qu'il se
tienne prêt à y être lui-même du 20 au 30.
Paris, 28 décembre 1809
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à
Paris
Je vous renvoie les dépêches du duc d'Auerstaedt. Il paraît
qu'il n'y a plus de difficulté pour la Haute Autriche. Il ne peut pas en avoir pour
Salzburg, puisqu'il peut laisser les enclaves en suspens; c'est aux diplomates
à s'arranger. Je donnerai des ordres au duc de Cadore. Il est convenable, en
général, de ne point faire de fausses difficultés. L'affaire de Cracovie est
une affaire contentieuse, qui se décidera. Du moment que les poteaux sont mis,
il faut évacuer. Le duc d'Auerstaedt a mal fait de faire revenir des troupes de
Ratisbonne en Autriche; c'est les fatiguer inutilement. Il valait mieux faire
aller tous les Portugais sur Ratisbonne.
Paris, 29 décembre 1809
Au comte Daru, intendant général de la Maison de l’Empereur,
à Paris
Monsieur le Comte Daru, j'ai lu avec attention votre
rapport d 24 décembre. Je désire que vous vous entendiez avec la section d
l'intérieur, pour qu'on arrange le sénatus-consulte conformément aux intérêts
de la liste civile. Mon intention n'est pas de déroger au décret de 1791, mais
au contraire de laisser la liste civile aussi entière que l'a placée ce décret.
Or en 1791 la liste civile avait tout le grand parc et le petit parc de
Versailles et beaucoup de fermes et d'enclos qui depuis ont été vendus;
remettez-moi l'état de tous ces objets. Je crois, autant que je puis m'en souvenir,
que cela va à 30 millions. J'ai déjà racheté une partie de ces biens, et ces
rachats s'élèvent à près de 5 millions; l'autre partie est à racheter. Ce que
j'ai acheté, il est juste que la nation me le rembourse. Ainsi il faut établir,
dans un rapport détaillé, la différence de la liste civile constituée par le
décret de 1791 à celle dont je jouis, déclarer la nation débitrice de cette
différence, et prendre en payement des forêts, celles que vous proposez ou
toutes autres. Je désirerais de préférence le bois de Vincennes, le bois de Boulogne,
la forêt de Bondy. Ce sont des forêts où je peux aller chasser, et elles seront
plus dans ma main appartenant à la liste civile.
Causez de cela avec le prince de Neuchâtel, et voyez s'il
n'y a pas quelques autres forêts près Paris qui offrent la même raison de convenance
pour mes chasses. J'ai intérêt de compléter ma forêt de Rambouillet. Je
désirerais que tout ce qui peut appartenir à la nation, dans la forêt de
Rambouillet, soit pris à mon compte, de manière qu'il n'y eût là que des
propriétés de la Couronne et quelques propriétés de particuliers, mais que
désormais la nation n'y fût plus pour rien. Je désirerais également prendre à
mon compte ce qui appartiendrait à la nation dans les bois de Versailles, de
Meudon, de Buttard et autres environnants; de sorte que, dans un rayon de
quatre à cinq lieues de Versailles, tous les bois dont j'ai déjà la plus grande
partie ne forment plus qu'une seule propriété appartenant à la Couronne. Cela
une fois pris, si cela ne suffisait pas pour composer l'équivalent qu'il s'agit
d'établir, je préférerais la forêt de Soigne, dans la Belgique, parce qu'elle
peut former dépendance du palais de Laeken. Il faut que le mémoire justificatif
soit très bien fait, pour qu'on puisse le mettre à la suite du
sénatus-consulte. Moyennant ces cessions, il sera dit qu'en aucun temps la
liste civile ne sera admise à fonder, sur le décret de 1791, des demandes de
compensation pour ce qu'elle a perdu depuis ce décret.
Vous me présenterez aussi un projet pour réunir à mon
domaine privé tout ce que j'ai déjà racheté des anciennes dépendances de la
liste civile; et, pour ce qui me regarde, j'apporte si peu d'esprit de
propriété dans tout ceci, que je ne ferai ensuite aucune difficulté de réunir à
la Couronne cette portion de mon domaine privé. Le résultat de cela sera donc
d'augmenter le domaine de la Couronne de 7 à 8 millions. Mais vous sentez que,
pour la simplicité de l'administration et pour l'agrément, il est important de
n'avoir pas à Versailles, à Rambouillet, à Meudon, deux administrations. Je ne
serais pas étonné que, dans les forêts de Fontainebleau, de Saint-Germain et de
Marly, la nation ne possédât aussi quelque chose, soit comme bien de moines,
soit à tous autres titres. Les officiers des forêts doivent savoir cela, et les
portions qu'ils vous indiqueront, vous devez les comprendre dans votre travail.
Cela une fois fait, je désire que vous me dressiez un état de mon domaine privé,
et que, dans cet état, vous distinguiez les biens qu'il est convenable de
réunir au domaine de la Couronne, et ceux qui peuvent rester au domaine privé. Je
regarde comme faisant partie de mon domaine privé le château de Laeken, la
terre que j'ai en Poitou, la maison de l'Élysée, etc.
Remettez-moi un état de mon domaine extraordinaire. J'y
comprends le domaine de Guastalla, ce que j'ai donné à la princesse de Lucques
à Parme et les autres concessions de même nature. N'allez pas vous jeter ici
dans ce qui n'est pas fait, car votre mémoire a cela de fautif.
Je n'ai pas dit que les domaines de Galicie dussent
m'appartenir, etc. Il est donc convenable de ne parler que de ce que j'ai porté
dans mon domaine extraordinaire, sans s'occuper des choses sur lesquelles je
n'ai pas encore statué.
Il est un autre objet dont vous devez parler à la section
de l'intérieur, c'est la liste civile du Piémont et celle de la Toscane; il
faudra confondre celle de Parme et de Gênes sous le titre de Liste civile des
départements au delà des Alpes. Vous y mentionnerez le palais de Turin et ses
dépendances, la campagne de Stupinigi, la campagne de Colorno à Parme et un
palais à Gènes. La liste civile du Piémont est de 500,000 francs, celle de
Parme est de 600,000 francs; ces deux articles réunis font désormais un total
de 1,100,000 francs. Je crois que je paye là-dessus
200,000 francs de contributions; mais, comme par le sénatus-consulte les biens
de la liste civile seront exempts de contributions, je compte donc avoir ces
200,000 francs disponibles, ce qui mettra à même de supprimer les 150,000
francs que j'avais destinés pour la dotation du palais qu'il est important
d'avoir à Gênes. La liste civile de Toscane est de 2 millions bruts: je pense
que la contribution est de 200,000 francs; je gagnerai encore de ce côté plus
que je ne perds. Les listes civiles de Florence et de Turin me sont données à
des conditions que l'on pourrait rappeler dans le nouveau sénatus-consulte,
savoir: d'entretenir un palais et les dépendances nécessaires pour le grand
dignitaire qui est établi dans l'un et l'autre gouvernement; de donner à ce grand dignitaire
le traitement convenable, etc. Mon intention est de n'avoir là rien pour moi,
et il me suffit qu'il ne m'en coûte rien. Je pense qu'on peut assigner un fonds
fixe d'un million pour le traitement de la grande-duchesse en Toscane, et de
500,000 francs pour le gouverneur général des départements au delà des Alpes,
et régler que, outre cela, l'entretien du mobilier et des bâtiments restera à
mes frais. De cette façon, le fonds destiné à ces deux cours serait à peu près
employé.
Quant au Palais-Royal, au Petit Luxembourg, à quelques
maisons de campagne qui existent encore autour de Florence, et qu'il est
inutile de réunir à la liste civile, je pense qu'il est convenable de déclarer,
par un titre particulier du sénatus-consulte, que ces biens appartiendront au
domaine ou à la liste civile et pourront servir à être donnés en apanages.
Comme je désire que ce sénatus-consulte passe le plus tôt
possible , je vous recommande de vous en occuper dans
la semaine. Remettez-moi promptement les états et le mémoire que je viens de vous
demander, et prévenez le comte Regnaud que je désire que ce sénatus-consulte
puisse être présenté mardi ou mercredi.
Paris, 30 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie le projet de traité avec le roi de Westphalie. Ce traité est obscur et ne
dit rien. D'abord je ne puis pas lui donner la possession le 1er janvier 1810,
puisqu'il n'est pas possible qu'il soit mis en jouissance à cette époque; il
faut prendre le 1er avril. L'article des domaines n'est pas clair; il faut
spécifier la somme des revenus. L'article 4 n'est pas plus clair; il faut
nommer les personnes que le Roi a dépossédées et qu'il n'avait pas le droit de
déposséder. L'article 7 est obscur; il faut dire que l'artillerie que je
céderai sera estimée, mais non toute l'artillerie de cette place, qui est
immense; il faut aussi assigner l'époque où je remettrai Magdeburg; comme
l'estimation ne pourra pas être terminée avant un an, il faut mettre l'époque
du 1er janvier 1811. L'article 8 doit désigner la somme des annuités, et dire
qu'elles seront versées dans la caisse de l'extraordinaire avant le 1er
février. L'article 11 ne veut rien dire; il faut spécifier si ces 6,000 hommes
sont infanterie ou cavalerie. En général, ce traité est fait sans prévoyance et
sans aucun soin. Il le faut mieux rédiger.
Paris, 30 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie votre projet
sur la Bavière. Il faut avoir pour cela une correspondance avec le ministre.
Le fait est que j'ai besoin du Tyrol italien, que je
crois que le Tyrol allemand sera toujours mal gouverné, qu'il ne sera jamais
soumis et nous donnera des inquiétudes graves. Il faut donc établir une
constitution et un gouvernement pour le Tyrol, et savoir comment la Bavière
prétend soumettre ce pays. Quant à la portion italienne, elle influe sur la
tranquillité de l'Italie, et je dois savoir jusqu'où je puis compter sur son
affection. J'ai besoin de tout le Tyrol, italien, c'est-à-dire du versant des
eaux.
Paris, 30 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, le sieur La Bouillerie étant
administrateur de la caisse d'extraordinaire, il est nécessaire que vous lui
donniez fréquemment des audiences et que vous lui prêtiez main forte pour tout
ce qu'il aura à faire pour mes intérêts. Remettez-lui les différentes propositions
faites par la Prusse pour le paiement de ses contributions, causez avec lui
pour tout ce qui est relatif aux dettes de la Saxe, de la ville de Danzig et du
royaume de Westphalie et ouvrez des négociations pour ces trois objets. Faites
remettre au sieur La Bouillerie tout ce qui concerne les créances de Hesse-Cassel.
Accréditez-le auprès de vos chefs de division pour qu'il connaisse parfaitement
ces affaires contentieuses et puisse décider les démarches à faire.
(Du Casse)
Paris, 30 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie votre portefeuille.
Faites connaître verbalement an prince Kourakine que je ne puis rien faire pour
le duc de Saxe-Cobourg, parce qu'il a souffert que son frère prît du service
chez les Autrichiens.
Je suppose que vous avez écrit au roi de Hollande
relativement à l'insulte faite à l'un de ses officiers.
(Du Casse)
Paris, 30 décembre 1809
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à
Paris
Autorisez le général Marmont à renvoyer la cavalerie que
le pays ne pourrait pas nourrir. Recommandez la plus grande économie pour la
mise des troupes sur le pied de paix.
Paris, 30 décembre 1809, 1 heure de l’après-midi
A l’Impératrice, à Malmaison
Mon amie, j’ai vu hier Eugène qui m’a dis que
tu recevrai les rois.
J’ai été au concert jusqu’à huit heures ;
je n’ai dîné, tout seul, qu’à cette heure là.
Je désire bien te voir. Si je ne viens pas aujourd’hui
je viendrai après la messe.
Adieu, Mon Amie ; j’espère te trouver sage et
bien portante. Ce temps là doit bien te peser.
Napoléon
(Lettres à Joséphine)
Paris, 31 décembre 1809, dix heures du matin
A l’Impératrice Joséphine, à Malmaison
J'ai aujourd'hui grande parade, mon amie; je verrai tôt
la vieille Garde et plus de soixante trains d'artillerie.
Le roi de Westphalie s'en va chez lui : ce qui pourra donner
une maison vacante à Paris. Je suis triste de ne pas te voir. Si la parade finit
avant trois heures, je viendrai; sans cela, à demain.
Adieu, mon Amie
Paris, 31 décembre 1809
A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations
extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie la lettre du
Vicence. Il me semble qu'il aurait pu répondre d'une manière qui satisfît
davantage. Vous pouvez envoyer vos dépêches par le colonel Gorgoli, en les
faisant de manière qu'elles puissent être lues par M. de Romanzof. Vous
répondrez au duc de Vicence que je suis peiné que, depuis le temps que je donne
des instructions pour faire ce que l'on veut, on soit encore inquiet. Vous
écrirez à M. de Romanzof que l'on n'a cessé de donner les assurances et les
sécurités qu'on a pu désirer, mais que je ne puis répondre des articles des gazettes
et des bruits répandus par les agents anglais, sur lesquels on doit être en
garde.
Paris, 31 décembre 1809
A Alexandre Ier, empereur de Russie, à Saint-Pétersbourg
Monsieur mon Frère, je reçois une seconde note du
chancelier Romanzof; elle me peine. Pourquoi revenir sur des affaires que ma
lettre de Vienne a terminées ? J'ai déclaré à la face de l'Europe mes
sentiments, non seulement sur le duché de Varsovie, mais même sur la Valachie
et la Moldavie. Après tout cela, je ne sais plus ce que l'on veut; je ne puis
détruire des chimères et combattre des nuages. Je laisse Votre Majesté juge qui
est le plus dans le langage de l'alliance et de l'amitié, d'elle ou de moi. Commencer
à se défier, c'est avoir déjà oublié Erfurt et Tilsit. Votre Majesté
sera-t-elle assez bonne pour approuver cet épanchement ?
Caulaincourt marque que Votre Majesté est à Moscou; elle
est infatigable.
J'ai été un peu en retraite et vraiment affligé de ce que
les intérêts de ma monarchie m'ont obligé à faire. Votre Majesté connaît tout mon
attachement pour l'Impératrice.
Votre Majesté veut-elle me permettre de m'en rapporter au
duc de Vicence pour tout ce que j'ai à lui dire sur ma politique et ma vraie
amitié ? Il ne lui exprimera jamais comme je le désire tous les sentiments que
je lui porte.
NAPOLÉON.