Consulat
Premier Empire

Les combats de Markgrafneusiedl.

6 juillet 1809

Nous sommes à Wagram. L’instant est solennel.
Davoust s’est élancé pour tourner Neusiedl.
L’Empereur a baissé sa petite lunette.
On vient de te blesser d’un coup de baïonnette.
Je t’ai transporté là, sur ce talus.
(L’Aiglon - Edmond Rostand)


La tour de Markgrafneusiedl. Photo : R. OuvrardMarkgrafneusiedl et sa vieille tour sont situés à la fin d’une série de hauteurs, qui, depuis Wagram, délimitent le plateau, bordé en son pied par le Rußbach, profond d’environ 1m, difficile à passer pour la cavalerie et l’artillerie. Ces hauteurs, qui atteignent l'époque 8 à 10m par rapport au ruisseau, s’éloignent ensuite du ruisseau, vers le nord, en s’atténuant. Le plateau offre une bonne possibilité de repli, si nécessaire

Savary: "D’où nous étions, nous l’appelions (le village de Markgrafneusiedl) le village de la tour carrée, à cause d’un vieux château féodal, surmonté d’une grande tour carrée, visible de partout dans la plaine"

Il était alors naturel de penser qu’en franchissant le Rußbach vers ce coté, loin de la gauche autrichienne, il serait possible d’effectuer un mouvement d’encerclement de cette dernière.

Charles Morand (1771 - 1835)Louis Friant (1758 - 1829)Pour ce faire, la cavalerie légère de Montbrun, et les dragons de Grouchy devront déblayer le terrain, les divisions Morand et Friand passer le Rußbach comme indiqué, entre Glinzendorf et Ober-Siebenbrunn, pour prendre Markgrafneusiedl à revers, pendant que les divisions Gudin et Puthod attaqueront de front.

 

 

 

Franz von Rosenberg-OrisiniLe Corps d’Armée autrichien de Rosenberg s’était positionné des deux cotés de la Tour. Le village, le moulin et les fossés étaient occupés par 5 bataillons et une batterie d’artillerie. Sur sa droite se trouvait, sur les hauteurs évoquées plus haut, et qui s’étendent de Wagram à Parbarsdorf (Baumersdorf) le 2e Corps d’Armée du prince de Hohenzollern. Ce dernier village était lui même occupé par deux bataillons du général comte Hardegg.

 

 

 

Louis-Nicolas Davout, duc d’Auerstadt (1770-1823)Tard dans la soirée du 5, une tentative d’enlever la position a été faite par Davout, mais, devant la résistance autrichienne, il a préféré se retirer en deçà du Russbach.

4 heures du matin, le 6 juillet: Les fantassins de Rosenberg descendent lentement du plateau, se dirigeant sur Großhofen et Glinzendorf, repoussant les quelques avant-postes de Davout. Celui-ci est, au même instant prêt à passer à l’attaque. Une attaque de deux bataillons de Radetsky sur Glinzendorf est d’autant plus facilement repoussée que Rosenberg reçoit bientôt l’ordre de stopper son attaque.

A ce moment, et devant la menace pesant sur son aile gauche (Masséna résiste héroïquement aux attaques de Klenau vers Aspern et Essling, qui visent à le tourner et à le couper du Danube et des ponts), Napoléon décide de porter son effort sur sa droite, pour renouveler en quelque sorte (mais à l’envers), la manœuvre d’Austerlitz. Il donne à Davout l’ordre d’enlever la position de Markgrafneusiedl pour, le long du Rußbach, de se porter sur Wagram et ainsi d'envelopper les autrichiens. Le Corps d’Armée d’Oudinot doit marcher sur Parbarsdorf, ayant à sa gauche le Corps de Marmont.

Marmont: "Pendant la journée du 5, j’étais resté au pont avec mon corps. J’en partis deux heures avant le jour pour venir prendre ma place de bataille. Elle me fut assignée au centre, à la gauche d’Oudinot." (En fait, il ne va pas être engagé dans toute cette bataille).

En même temps, des attaques seront menées sur Aderklaa, avec l’appui de l’infanterie de la Garde, une division de cuirassiers et la Garde à cheval. De part et d’autre de la route menant de Raasdorf à Breitenlee, Kolowrat (3e Corps autrichien) et Bernadotte (IXe Corps) se font face. Plus à gauche, enfin, le IVe Corps de Masséna, déjà mentionné, auquel s’est joint la Division Boudet, contient Klenau.

Charles Etienne Gudin (1768 - 1812)L’attaque française se déclenche à hauteur d’Ober-Siebenbrunn par une charge des cavaliers d’Arrighi au niveau de la ferme Siehdichfür. A gauche d’Ober-Siebenbrunn, les divisions Morand et Friant attaquent les pentes est de Markgrafneusiedl. La cavalerie autrichienne de Nordmann (Officier français émigré de la Légion de Bourbon, un des meilleurs cavaliers d’Europe. Il va bientôt périr dans cette bataille) cherche à s’interposer, mais est finalement refoulée vers les hauteurs. Simultanément, les divisions Gudin et Puthod traversent le Russbach à Glinzendorf, remontant celui-ci vers Markgrafneusiedl. Enfin, une quatrième attaque est menée à partir de Grosshofen, de sorte que les positions autrichiennes sont bientôt prisent en tenaille.

Les troupes de Rosenberg en sont réduites à défendre les hauteurs entourant la vieille tour. A gauche, face à Morand, il place la Brigade Mayer, derrière, celle de Riese, plus en arrière encore, la cavalerie de Nordman, qui s’est repliée et les brigades Fröhlich et Vecsey. A sa gauche, sur une ligne très étirée, les escadrons de cavalerie Wartensberger et Rothkirch. A droite de la Tour (en faisant face aux français) il place le reste de son Corps d’Armée, avec pour mission de défendre les hauteurs entre Markgrafneusiedl et Parbarsdorf (Baumersdorf), tenues par le prince de Hohenzollern.

A midi, l’infanterie française atteint la vieille Tour. Au même moment, les cavaliers d’Arrighi refoulent l’adversaire vers cette même tour, par l’est. La retraite autrichienne devient inévitable, les troupes françaises arrivant de tous les cotés. Une contre-attaque de la cavalerie de Rosenberg se brise sur les cuirassiers d’Arrighi, et les autrichiens sont obligés de se replier sur Bockfließ.

L’archiduc Charles, arrivé sur place vers 11 h avait bien donné l’ordre au Prince de Hohenzollern (qui faisait face à Oudinot, lequel n’était pas encore intervenu) d’appuyer, avec la moitié de ses troupes, Rosenberg. Un moment, la division Gudin s’était trouvée en difficulté, malgré l’aide des cavaliers d’Arrighi, qui avaient du mal à charger sur ce terrain difficile, mais le nombre avait eu raison des autrichiens.

Les généraux Nordman et Vecsey sont tués, les Princes Hessen-Homburg et Coburg sont parmi les milliers de blessés autrichiens.

La retraite autrichienne s’effectue en bon ordre vers Bockfließ, seulement troublée par quelques charges de la cavalerie française (stèle).

Cette brillante action des troupes du Corps d’Armée de Davout décide du sort de la bataille.

Marbot: "L'Empereur, toujours impassible, les yeux constamment fixés sur l'extrême droite, sur Neusiedel..... attendait pour fondre sur la droite et sur le centre des ennemis que Davout, après avoir battu sur leu aile gauche, l'eût rejetée au delà de Neusiedel. Plus de doute, la gauche ennemie est vaincue ! Alors l'Empereur se tournant vers moi me dit: <<Courez dire à Masséna qu'il tombe sur tout ce qui est devant lui, la bataille est gagnée !"

Paulin: "En ce moment, je me sentis enfiévré d'admiration lorsque j'entendis l'Empereur dire de sa voix claire et pénétrante: <<La bataille est gagnée.>>. Pendant trois quart d'Heures ou une heure, je vis de mes yeux un spectacle qui me plongea dans le plus grand étonnement: l'Empereur se coucha de tout son long dans un sillon de cette plaine brûlée par le soleil, la face contre terre, appuyé sur ses deux mains, et, au milieu de nous tous, demeura sans mouvement et comme endormi jusqu'au moment où le major général, ayant réuni tous les rapports qu'il attendait de divers points du champ de bataille, lui apprit que les positions de Neusiedel et de Wagram, défendues le plus résolument après l'ennemi, avaient été enlevées"

La gauche autrichienne enfoncée, Oudinot attaque le centre à Parbarsdorf (Baumersdorf), puis, ensemble avec Davout, refoule les autrichiens vers Wagram. C’est la division Tharreau qui prend le village, les divisions Frère et Grandjean continuant sur leur lancée, faisant de nombreux prisonniers.

Voyant toutes ses troupes reculer (à sa droite devant Masséna, qui à repris l’offensive, au centre devant Macdonald, à gauche devant Oudinot et Davout), et craignant de se voir couper de la route de Moravie (vers Brno), l’archiduc Charles décide alors de la retraite.

Marmont: "L’Empereur vint se reposer dans la position du centre, que j’occupais, et y fit élever sa tente… (il) me donna l’ordre de déployer mes troupes et de les faire camper en carré autour de sa tente. Ainsi gardé il pouvait reposer avec sécurité"


FIN