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L'insurrection du Tyrol de 1809
"Demain à laube verra la dernière attaque. Avec laide de Notre Sainte Mère, nous voulons nous saisir des Bavarois ou les détruire et nous nous sommes recommandé au Saint Cœur de Jésus ! " - Andreas Hofer
Offensive bavaroise et seconde bataille dInnsbruck (mai-juillet)
Entre les tyroliens et les troupes autrichiennes, ce nest pas, par ailleurs, le beau fixe. La co-ordination entre troupes autonomes et troupes officielles savère difficile. Hofer est même contesté dans son rôle, laffaire est porté à la connaissance dHormayr. Mais celui-ci pense pour le moment à quitter Vienne, devant lavance des français et on en reste là.
Napoléon, justement, avant que dentreprendre la bataille quil pense décisive, entend bien se débarrasser rapidement de laffaire tyrolienne qui pourrait gêner ses arrières: ordre est donné à Lefebvre de réoccuper le Tyrol.
Ce dernier commande le VII corps, qui se trouve depuis le 24 avril à Salzbourg. Loffensive commence le 10 mai, selon un plan très simple: la 1ère division bavaroise (prince héritier Louis) couvrira lopération, la 3e (Deroy) avancera par Traunstein et Kufstein, et la 2e (Wrede) par Reichenhall et le Pass Strub.
Repoussant devant eux les autrichiens de Fenner et les compagnies de chasseurs tyroliens, les bavarois atteignent rapidement Wörgl. Mais ils font connaissance avec la guerre de guérilla, contre une ennemi qui se dérobe souvent à leur regard. Les atrocités répondent aux atrocités, et Wrede doit , le 12 mai à Ellmau, rappeler ses troupes à lordre: "Soldats ! Je vous le demande: comment votre sentiment de lhumanité est-il tombé si bas ces deux derniers jours ?"
Quoiquil en soit, ils battent Chasteler, accouru dInnsbruck avec 3000 hommes, dans ce village et le contraignent à battre en retraite. Narrivant même pas à mobiliser quelques 8000 miliciens tyroliens accourus aux nouvelles, mais fortement alcoolisés, il ne sarrête même pas à Innsbruck, mais à Steinbach am Brenner De leur coté, les chefs tyroliens ont sur le cœur le manque de soutien quils étaient en droit dattendre de la division Jellacic, rendue disponible par lavance française et qui aurait pu leur venir en aide. Or Jellacic vient de recevoir lordre de se diriger sur Graz, ce qui scelle en fait labandon du Tyrol !
Dans la vallée de lInn, la retraite des autrichiens continue, de plus en plus difficile (Wrede a été rejoint à Rattenberg par la division Deroy, qui vient de ravitailler la forteresse de Kufstein), et ils doivent de nouveau, malgré lhéroïque défense de la milice, subir une lourde défaite, perdant 3000 soldats et insurgés, 9 canons et 3 drapeaux à Schwaz.
Les 15 et 16 mai, le village de Schwaz est la proie de flammes. Après 36 heures de cessez-le-feu, suite à une offre de Lefebvre, Innsbruck est, le 19 mai, réoccupée par les bavarois, sans combats.
Dans les autres parties du Tyrol, les affaires ne vont guère mieux pour les autrichiens. Lindécision de larchiduc Jean y est pour beaucoup, qui envoie des ordres contradictoires. Le 16 mai, Chasteler prend la décision de retirer lensemble de ses troupes sur le Brenner. Le 18, larchiduc Jean lui fait savoir quil peut, certes, tenir le temps quil pourra le Tyrol, mais quil "lui laisse de décider sil ne serait pas plus avantageux de joindre ses troupes aux siennes".
Le lendemain, il fait savoir à Chasteler quil doit "défendre le Tyrol comme une forteresse indépendante, aussi longtemps que possible, au pire, rassembler lensemble de ses troupes et chercher <à se faire de lair> quelque part". Mais il "sen remet à lui" !
Pauvre Chasteler, dont il est question, justement, dans un ordre du jour de Napoléon: "Un dénommé Chasteler, soi-disant général au service de larmée autrichienne, sera, le cas se présentant, considéré comme chef de brigands, responsable des assassinats commis sur les prisonniers français et bavarois et , comme instigateur du soulèvement tyrolien, mis hors la loi, présenté à un conseil de guerre et exécuté dans les vingt-quatre heures." On comprend alors quil donne bientôt lordre de réunir toutes les troupes autrichiennes du Tyrol à Lienz, et de quitter le pays dès que les conditions le permettront.
Cet ordre, Buol, qui se trouve toujours au Brenner, ne le reçoit pas .car il a été fait prisonnier par des insurgés ! Ce qui fait que si des troupes autrichiennes participeront au prochain combat du Bergisel, ce sera plus une affaire dhonneur, compte tenu du nombre de soldats disponibles.
Du coté des tyroliens, les nouvelles de "victoire" de larmée principale (la bataille dEssling sest déroulée les 21 et 22 mai) amènent de nouveaux espoirs. Andreas Hofer a fait placarder son célèbre appel: "Mes frères de lOberinntal ! Pour Dieu, lEmpereur et notre chère Patrie ! Demain à laube verra la dernière attaque. Avec laide de Notre Sainte Mère, nous voulons nous saisir des Bavarois ou les détruire et nous nous sommes recommandé au Saint Cœur de Jésus ! Venez nous aider, mais si vous pensez être plus avisé que la Providence, nous nous passerons de vous ! Andreas Hofer, Commandant en Chef !". Et il réunit un conseil de guerre à Sterzing.
Du coté allié, on croyait si bien la rébellion éteinte, que Lefebvre navait élevé aucune objection à lordre de Napoléon denvoyer deux de ses divisions dans la vallée du Danube pour renforcer son dispositif principal, laissant à Deroy le soin de soccuper des affaires en Tyrol.
Très rapidement, ce dernier est informé du renforcement des troupes du coté des insurgés, dont Hofer est "naturellement" devenu leur chef. Des renforts sont de toutes part recrutés, sous limpulsion de Josef Eisenstecken, Josef Speckbacher et Martin Teimer. Lattaque est décidée pour le 25 mai, une fois encore sur le Bergisel. De tous les cotés lui arrivent des renseignements montrant la détermination des tyroliens, qui investissent Innsbruck pratiquement totalement. Deroy met ses troupes (3850 fantassins, 400 cavaliers, 12 canons) en état dalarme.
En face, Hofer est désormais à la tête de troupes beaucoup mieux organisées quen avril, et qui sélèvent déjà à environ 6 500 hommes. Son plan est simple: attaquer les bavarois là où on les rencontre et les rejeter au-delà des montagnes.
Cette première attaque nest pas vraiment une réussite pour Hofer et ses troupes (ainsi que les autrichiens de Buol): les bavarois résistent bien et réussissent à garder leurs positions. Mais Deroy, tout en étant confiant pour sa ligne de communication avec Salzbourg, nen demeure pas moins inquiet, dautant quil est bientôt informé que la ville de Zirl vient de tomber aux mains des tyroliens.. Il maintient ses troupes en alerte.
Le 29, tyroliens et autrichiens relancent lattaque sur Innsbruck. Ce sont maintenant près de 13 500 fantassins (12 000 tyroliens, 1 270 autrichiens), 87 chevau-légers autrichiens et six canons dont dispose Hofer. Lattaque sur Innsbruck doit être dirigée à lest, au sud et à louest de la ville, tandis quon se saisira des ponts de Hall et Volders. Cest dailleurs là que les tyroliens enregistrent leurs premiers succès, malgré une défense héroïque des bavarois, coupant la ligne de retraite de Deroy.
Du coté du Bergisel, les évènements ressemblent étrangement à ceux davril. Les bavarois ne peuvent déloger les tyroliens de la colline, mais ces derniers ne parviennent pas à franchir lespace situé entre cette dernière et la ville. Hofer espère un moment leffet démoralisant dune attaque de flanc par une colonne venue de Zirl, sous le commandement de Teimer. Mais celui-ci avance avec trop de circonspection, et est même repoussé par les bavarois.
À quatre heures de laprès-midi, un cessez-le-feu est observé, officiellement pour permettre aux autrichiens de négocier avec Deroy une reddition de la ville, plus certainement parce que les tyroliens sont à court de munitions. Bientôt, la nuit survient, et avec elle, la fin de cette deuxième bataille du Bergisel (elle a coûté 130 morts et 500 blessés aux bavarois, 90 morts et 160 blessés aux austro-tyroliens)
Car Deroy, dont les troupes sont quelque peu démoralisées (ils ne veulent pas combattre ces "paysans, que lon ne voit jamais avant dêtre blessé, contre qui il ny a aucun honneur à gagner") va profiter de la nuit pour, faisant appel à une vieille ruse de guerre, quitter Innsbruck. Demandant à ses avant-postes dallumer des feux, de mener de nombreuses patrouilles de reconnaissance et même de fraterniser avec les lignes ennemies, il fait assourdir les roues de ses chariots et les fers de ses chevaux. Et la 3e division séloigne en silence dInnsbruck, atteignant Vomp le 30 mai à six heures du matin. Le soir même, malgré un harcèlement permanent des insurgés locaux, Deroy fait entrer ses troupes en sécurité dans la forteresse de Kufstein.
Et lorsque le jour se lève sur Innsbruck, ce matin du 30, les tyroliens découvrent une ville vidée de sa garnison, quils réoccupent dans la liesse populaire.
Le 2 juin, Deroy, après sêtre un peu "refait " à Kufstein, a quitté le sol bavarois. Pour la deuxième fois, le Tyrol est libre.
Le jour même de cette deuxième bataille du Bergisel, de Wolkersdorf, près de Vienne (voir les pages Wagram), lempereur François écrivait sa célèbre Proclamation (le billet de Wolkersdorf):
"Après bien des évènements funestes, et après que l'ennemi se soit emparé de la capitale du Royaume, Mes Armées ont réussi à battre le gros de l'armée française, sous le commandement de Napoléon lui-même, dans le Marchfeld, les 21 et 22 mai, et à la repousser au delà du Danube. L'Armée et le Peuple sont pleins d'enthousiasme; tout porte aux plus grandes espérances. Confiant en Dieu et en Mon bon Droit, je réitère ici à mon fidèle comté du Tyrol, y compris le Voralberg, qu'il ne pourra jamais être séparé de l'empire autrichien, et que Je ne signerai dautre paix, que celle qui attachera irréversiblement cette province à Ma Monarchie. Dès que cela lui sera possible, Mon Très Cher Frère larchiduc Jean se rendra au Tyrol, pour être avec le conducteur et le protecteur de mes fidèles tyroliens, jusquà ce que tout danger aux frontières du comté du Tyrol soit écarté".
Malgré la résistance de larchiduc Jean, qui voit le danger dune position si tranchée à légard du Tyrol, cette proclamation est rapidement connue de tous les tyroliens: ils savent maintenant qu'ils ne seront jamais abandonnés !
Jusquen août, Hormayr, qui est revenu à Innsbruck et a repris la direction des affaires (Hofer et ses amis sont pratiquement mis sur la touche ), va sefforcer de réorganiser le pays.
Mais une nouvelle tentative de reprendre Kufstein, dont le siège reprend le 12 juin, échoue encore une fois